Le pacte anti-Hollande sème le trouble dans le gouvernement et la presse allemande
Dans son édition du 5 mars, le magazine allemand "Der Spiegel" a lancé une bombe qui fait des vagues en Europe. Il révèle que la chancelière allemande a fait une alliance secrète avec plusieurs partenaires européens pour ne pas recevoir François Hollande, le candidat socialiste à la présidence française, dont l'Italien Mario Monti, l'Espagnol Mariano Rajoy et le Britannique David Cameron se seraient joints à cette alliance secrète. Motif invoqué : la volonté affichée par ce dernier de renégocier le pacte budgétaire européen.
La veille, dans son édition dominicale, le" très conservateur" quotidien allemand "Die Welt", avait publié un entretien avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido WesterWelle, au cours duquel il appelait la classe politique allemande à ne pas s'immmiscer dans la campagne présidentielle française, ajoutant : "Nous travaillons beaucoup avec le gouvernement français actuel, mais nous ne doutons pas que l'Allemagne travaillera parfaitement, avec n'importe quel gouvernement qui sera choisi par le peuple français,".
Le 5 mars, donc le même jour de la révélation du Der Spiegel, il était écrit dans le Die Welt sous le titre "Le baiser de la mort" (Der Todeskuss der Kanzlerin für Nicolas Sarkozy) reprenant les mots de Dominique de Villepin concernant cette affaire, qu'Angela Merkel lors de la campagne présidentielle française en 2007, avait reçu à Berlin Nicolas Sarkozy, mais également Ségolène Royal. Comme Gerhard Schröder en 2002 avait rencontré Jacques Chirac et Lionel Jospin, et Helmut Kohl en 1995 avait lui aussi reçu Jacques Chirac, Lionel Jospin et son rival conservateur, Edouard Balladur.
Selon la Süddeutsche Zeitung, le FDP serait passablement énervé par l'action de Mme Merkel, les amis politiques du ministre allemand des affaires étrangères Guido Westerwelle craignant "qu'un boycott du candidat socialiste n'affecte les relations franco-allemandes".
Selon le journal, le Parti social-démocrate (SPD) a accusé précédemment la chancelière que son comportement pouvait porter atteinte aux intérêts allemands. Le directeur général du groupe Thomas Oppermann a dit qu'il était étonnant que Merkel fasse la même erreur deux fois. Rappelant que la chancelière avait tenté en vain d'empêcher l'élection de Barack Obama, en 2008, elle tentait maintenant d'influencer la campagne en France.
En ce qui concerne la presse autrichienne, le quotidien "Der Standard" souligne que le fait que Merkel doive s'appuyer pour ce boycott sur d'autres dirigeants conservateurs européens comme David Cameron et Mariano Rajoy, montre combien la chancelière est "chancelante". "Dédaigner de la sorte le probable prochain président du principal pays partenaire de l'Allemagne est la preuve d'un manque d'instinct que l'on n'avait plus vu depuis des décennies", en ajoutant que "si Hollande venait à gagner la présidentielle, Merkel pourrait s'en mordre les doigts.".
Pourquoi François Hollande suscite-t-il une telle crainte, auprès des gouvernements européens conservateurs ? Pour expliquer cette défiance ces derniers se réfèrent à leur peur de voir renégocier le pacte budgétaire européen tout juste signé le 2 mars. A Berlin des observateurs estiment qu'il sera assez fort pour catalyser une opposition, latente en Europe, à la discipline budgétaire imposée par Angela Merkel.
Mais leur plus grande inquiétude concerne les proposition économiques et fiscales du candidat PS. Par celles-ci, il esquisse une politique qui est clairement opposée au néolibéralisme qui domine actuellement la stratégie européenne, et qui se résume par une "pensée économique unique", et cette politique la menacerait de fracture.
Pour les conservateurs qui dirigent les pays européens, le danger est que, certains sujets, que le triomphe monétarisme a relégué au second plan ces derniers mois, risquent de revenir sur le devant de la scène, notamment la régulation des marchés financiers, l'imposition des grands capitaux, les politiques industrielles centrées sur la création d'emplois ou encore pire la réforme de l'État providence version socialiste !
Tous ces thèmes sont contenus dans la déclaration commune sur l'Europe qui doit être signée le 17 mars à Paris par les représentants du Parti socialiste français, de la gauche belge, des sociaux-démocrates allemands et du Parti démocrate italien.
La vive inquiétude des conservateurs européens face à l'ascension du candidat socialiste est la preuve de la pertinence de ses propositions. Et si le pacte anti-Hollande n'est pas acté, il est en filigramme dans leur façon de soutenir ouvertement le candidat Nicolas Sarkozy et d'ignorer François Hollande lors de ses déplacements dans leurs pays.
Sources : Der Spiegel, Die Welt, Die Welt, Süddeutsche Zeitung, Der Standard,
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