Le petit prince, existe-t-il une sagesse propre à l’enfance ?
De l’importance de la chimère et de l'émerveillement.
Le petit prince marche à côté,
Aucune chance, pour lui, d’attraper jamais ce point fixe - sans consistance - appelé but ou objectif.
Son intensité se mesure en décibel de silence.
« En effet. Quand il est midi aux Etats-Unis, le soleil, tout le monde le sait, se couche sur la France. Il suffirait de pouvoir aller en France en une minute pour assister au coucher de soleil.
Malheureusement la France est bien trop éloignée. Mais, sur ta si petite planète, il te suffisait de tirer ta chaise de quelques pas. Et tu regardais le crépuscule chaque fois que tu le désirais…
- Un jour, j’ai vu le soleil se coucher quarante-trois fois !
Et un peu plus tard tu ajoutais :
- Tu sais… quand on est tellement triste, on aime les couchers de soleil…
- Le jour des quarante-trois fois tu étais donc tellement triste ? Mais le petit prince ne répondit pas. » p 26-27
Etna - Sicile 2017
Le petit prince, comme les enfants, a une connaissance intuitive de la pyramide de l’importance.
Philosophie en lettres minuscules, (le petit prince étant - dans le texte d'Antoine de Saint-Exupéry - l'assemblage d’un nom commun couplé à un adjectif dénué de majuscules), l’enfant sait voir le précieux d’un éléphant contenu dans un chapeau. Remarque la beauté d'une rose ordinaire. Célèbre le lever journalier du soleil ou le gris d'un nuage luisant sous un ciel d’orage. Chérit, plus que toute autre possession, la lumière d’une présence, fut-elle celle, capricieuse, d'une rose égocentrique. Et derrière le brouhaha des actions inutiles - s'occuper d'un volcan éteint, on ne sait jamais - sous la collecte du dérisoire, une boite en carton, une caisse en bois, un dessin approximatif, ce dernier, sait détecter les preuves des choses essentielles.
Malheureusement, ses seules compétences, sa capacité d’observation, son imagination, n’entrent pas dans la vie à labeur tenace. Que lui reste-t-il, alors ?
Les rencontres.
Réalistes. Décevantes. Le petit prince, comme l’enfant, a pour hiérarchie, la linéarité des sentiments premiers. Peu lui importe les consignes, les conquêtes, l’exploit – invocations purement adultes consistant, par une pensée du dessus – autrement dit du supérieur - à briguer nombre de titres et accumuler des avoirs dérisoires. Son ambition a la taille de la coquille du moi, se résume à ses quelques pas d'histoire, englobe son proche univers : la rose, le renard, l'aviateur.
Il persévère, pourtant. Chaque jour, à respirer le dialogue rance et convenu des hommes oublieux de leur enfance. Chaque minute à mesurer l’ampleur du désastre. A observer le monstre bruyant et hyperbolique d’une modernité phagocytant la vie des employés, plaçant l’agent, la notoriété, au zénith du primordial.
De fait, il pleure souvent. Il pleure beaucoup, tant il saisit l’ampleur de l’autisme adulte. Celui de l’oubli de l’enfance, de la focalisation sur de fausses valeurs. Tant il sait ne pas posséder les clés d’un monde où le vouloir ne suffit pas toujours à atteindre le seul primordial essentiel, celui du cœur.
Et puis, parfois, au détour d'un chemin, l’étonnement d’un rien, car l’enfant s’émerveille de tout et n’importe quoi, reprochent les grandes personnes. L’essentiel donc, la lumière des rencontres : la respiration d'un aviateur meilleur dessinateur que réparateur, la saveur d'une eau fraîchement sortie du puits, l'éclat amical d'un renard à l’œil brillant.
Son errance est une collecte de bouts de mémoires ébréchées,
Une collection de vieilleries frappant la rétine du cœur.
Aussi, s’esquive-t-il lentement vers un murmure fatigué à l’orée de la nuit.
Sicile 2017
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