Le quémandeur
Il n'y a que la médiocrité qui ait le privilège de la durée
-J.H Rosny aîné
Il avait déjà tendu la sébille en 2016, avec le résultat que l'on connait : seulement 2,4% des voix à la primaire de la droite, pas de quoi fouetter une maitresse américaine. Mais les mauvaises langues en furent pour leurs frais : en 2017 il prendra sa revanche, retournant sa veste face à la bande d'ingrats qu'était devenue la droite française. Une droite incapable de reconnaître son génie, à l'inverse du nouvel hôte de l'Elysée, toujours en quête de prises de guerre et autres chairs (plus très) fraîches...
Ainsi en 2017 il devient ministre de l'économie dans le gouvernement Philippe 1, un poste auquel il restera accroché comme un industriel s'aggrippe à ses bénéfices, et il faut avouer que depuis 6 ans maintenant, il fait montre d'une belle longévité. A cause de son talent ? Vous nous permettrez d'en douter quelque peu : sous son ministère, l'économie a opéré un plongeon vertigineux, le pouvoir d'achat des français s'est effondré, la balance commerciale a atteint un déficit historique, et la note financière de la France a été dégradée, excusez du peu. Les plus ardents défenseurs de ce ministre sûr des effets (à venir) de sa politique, argueront qu'il a dû faire face à des circonstances exceptionnelles, entre COVID, guerre en Ukraine et tutti quanti.
Qu'à cela ne tienne, Bruno Le Maire -car c'est bien de lui qu'il s'agit- possède LA recette miracle à tous nos problèmes, passés, présents comme à venir : demander gentiment, mais "avec fermeté", aux divers acteurs économiques, pompeurs de finances publiques et autres fuyards fiscaux qui bien sûr, sont toujours à l'écoute de ses exhortations on s'en doute, de "prendre leurs responsabilités", ou de "faire un geste" parce que le gouvernement n'arrête pas d'en faire, lui.
Portrait de l'homme à la sébille de la République, élève modèle de la fumeuse méritocratie à la française, écrivain érotomane à ses heures, et accessoirement Ministre de l'economie et des finances.
Un homme du peuple
Papa était cadre dirigeant chez Total (où il finira secrétaire général, excusez encore une fois du peu), et maman elle, avait un nom à particule -scusez du peu là aussi-, mais trimait comme directrice des établissements scolaires privés catholiques Notre-Dame de France dans le 13e arrondissement de Paris, puis dans le « petit collège » (primaire) du lycée Saint-Louis-de-Gonzague dans le 16e, dans lequel le petit Bruno étudiera jusqu'à l'obtention du baccalauréat.
Puis bien sûr, cet authentique fils de prolo né à égalité des chances avec les autres plébéiens français filera un parcours tout à fait classique : Ecole Normale Supérieure, Licence d'Allemand, Maîtrise puis agrégation de Lettres modernes -où, rendons lui justice, il se confrontera un temps au bas peuple en enseignant deux ans...mais qu'importe : il tentera Sciences Po (qu'il plantera la première année, avant de réussir) puis l'ENA, car ses "résultats ayant dépassé toutes ses espérances", il envisageait pour sa petite personne un destin beaucoup plus grand que l'enseignement.
Au bout de 3 années "difficiles" de son aveu même, il sort 20ème de sa promo, la promotion Valmy. N'empêche : être vingtième de l'ENA vaut bien, bien mieux que de sortir premier de sa classe de CAP préparateur de commandes au SEGPA de Garges-lès-Gonesse, vous en conviendrez. Il intègrera donc le Ministère des Affaires Etrangères en tant que Haut fonctionnaire sous le gouvernement Chirac en 1998, et sa petite carrière de galérien de la haute administration française fut placée sur sa funeste orbite à partir de ce moment-là.
Et depuis cette date, il ne cessera de se rapprocher du peuple en toutes occasions, comme il le dit volontiers lui-même et vient encore de le réaffirmer récemment : il sait ce que c'est que d'avoir "une famille nombreuse, vu qu'il a quatre enfants à nourrir". Mais manifestement, ce qu'il ne sait pas très bien faire, c'est compter.
Un tiens vaut mieux que deux tu ne l'auras pas
Voyons voir : Bruno commence sa carrière politique en 1998. Sachant qu'un Haut Fonctionnaire dans les ministères économiques ou financiers fait partie des agents les mieux payés de l'Etat, avec un salaire de départ entre 15 et 20 000 euros mensuels, on se doute que très tôt, comme des millions de Français le petit Bruno a dû connaitre les affres du froid et de la faim. Et ça, c'est quand il a commencé sa carrière dans les ministères à l'âge canonique de 28 ans. Parce qu'après, le petit Bruno va connaître encore pire. Imaginez.
Protégé de De Villepin, qu'il suivra au ministère des Affaires étrangères, puis à l'Intérieur en tant que conseiller détaché, il sera bientôt premier conseiller politique de De Villepin devenu premier ministre en 2005, avant de prendre la tête d'une des fonctions les plus prisées du gouvernement : directeur de cabinet de ce même
Premier ministre en 2006 -où il prouvera son génie précoce en s'occupant notamment du dossier de la privatisation des autoroutes. Ce qui ne l'empêchera pas de réitérer l'exploit en 2019 lors de la privatisation des Aéroports de Paris et de la Française des Jeux, deux bijoux de famille supplémentaires qu'il a bradés au moins offrant sans aucun état d'âme.
Alors oui, en 2019 à cette occasion certains esprits taquins ne manquèrent pas de lui faire remarquer l'énorme foirage que fût la privatisation des autoroutes françaises. Foirage, vraiment ? Ca dépend pour qui..certainement pas pour les bénéficiaires de cette poule aux oeufs d'or, qui depuis, se gavent copieusement sur le dos de ces pauvres français dont Bruno connaît bien "la galère". Il enterrera d'ailleurs très vite un récent rapport qui dénonçait cette gabegie monumentale. Oui, nous dirons gabegie, plutôt que "superprofits", car le petit Bruno l'a toujours affirmé haut et fort : les superprofits "il ne sait pas ce que c'est", on ne peut donc pas lui en vouloir. Gabegie des autoroutes privatisées donc, dont il est, sinon le complice, du moins l'authentique responsable.
Et bien qu'il reconnaîtra à cette occasion que "des erreurs ont été faites" lors de la privatisation desdites autoroutes en 2006, ça ne l'empêchera nullement, sûr de son expérience, d'imposer la même sauce aux contribuables en 2019.
Il est comme ça le petit Bruno : en bon littéraire qu'il est, il est un peu fâché avec les chiffres, mais pas grave il contrebalance ce mauvais penchant par une foi en l'être humain à toute épreuve. Une foi dans la bonne foi des pires requins que sont ses amis capitalistes. Il suffira comme à chaque fois, de le leur demander gentiment, mais fermement. C'est important, la fermeté.
Et ce qui allait de venir son leitmotiv, son mantra, sa marque de fabrique, prit corps en 2019 : déjà à l'époque, il invitait les entreprises à "prendre leurs responsabilités comme le gouvernement prend les siennes", face au chantage du MEDEF qui estimait que les 20 milliards du CICE transformés en exonérations de cotisations patronales pérennes -sans aucune contrepartie rappelons-le- n'étaient "pas suffisants". A cette occasion il osera affirmer, la main sur le portefeuille coeur, et avec une candeur toute juvénile, que "nous menons une politique favorable aux entreprises et aux entrepreneurs, parce que (...) ce sont eux qui fourniront aux Français les emplois dont ils ont besoin. Plutôt que de dire qu’il n’y a pas assez de baisses d’impôts et que ça ne va pas assez vite, les entrepreneurs devraient se demander comment aider un gouvernement qui prend des décisions qui leur sont favorables".
Waow, ça a dû suinter fort dans les caleçons du CAC40... avec un tel coup de menton ravageur, c'est sûr qu'ils n'allaient pas tarder à rentrer dans le rang, parole de ministre !
Bruno est un tendeur de sébille, façon petits chiffoniers du Caire, mais le moignon en moins, et le costard en plus. Il ne fait que ça, quémander auprès des riches et des puissants, et en retour il ne récolte que des baffes et des coups de pied au petit renflement brun. Mais il a l'étoffe d'un vrai gagnant : au lieu de se décourager, il recommence, encore et encore, car vous le savez maintenant : ça finira bien par marcher, c'est sûr.
En définitive, pour l'homme raisonnable et sensé une telle obstination ne pourra relever que de l'incompétence, de la croyance ou de l'aveuglement.
Osons une troisième hypothèse : au vu des faits, sans aucun doute de tout ça à la fois.
sivouuupléééé
Et tout le reste de son parcours au ministère des gros cadeaux fiscaux aux plus riches est du même tonneau : on croirait véritablement voir un Rom au feu rouge, en train de quémander quelque piécette aux automobilistes, la main tendue et le ton chevrotant indiquant que la vie a été tout sauf tendre pour sa petite personne, et qu'il faut quand même que les gens fassent un effort, donnez donnnez donnez, dieu vous le rendra mais certainement pas moi.
Le petit Bruno ne comprend manifestement toujours pas pourquoi, alors qu'il fait beaucoup d'efforts pour aider les petits copains de son patron, ceux-ci font preuve de tant d'ingratitude. Un peu comme avec ses ex amis de droite : que lui faudrait-il faire pour qu'enfin ils comprennent qu'il est de leur côté ? Et pourtant les chiffres sont connus, et ils ne sont pas bons : ces gens-là s'entêtent à ne pas écouter ses suppliques, ils prennent tout ce que Bruno veut bien leur donner, et s'en vont le planquer dans les paradis fiscaux. Sans créér aucun emploi ni investir dans quoi que ce soit de réellement productif pour l'économie française, autre que les jets privés, et les mégayachts de luxe construits à l'étranger.
Ouin ouin.
Pas grave, il continue d'arroser copieusement ce beau monde, en quémandant de plus belle. Ca finira bien par marcher, non ?
Arrivé à ce niveau, on sort du registre de la logique, pour arriver dans celui du surnaturel.
On entre dans l'incantation permanente : tel un sorcier de pacotille, le petit Bruno pense que réciter les paroles d'un rituel sans en comprendre la signification, et sans en connaître les mécanismes sous-jacents, ne l'empêchera pas de marcher. Or que ça soit pour jeter le mauvais oeil à un ennemi, aussi bien qu'opérer le fameux "ruissellement" du haut de la pyramide économique vers le bas, il faut quand même avoir saisi deux/trois petites choses au préalable.
Le capitaine Bruno comprend-il que dans le marigot de la compétition économique actuelle, les crocodiles et autres caïmans que sont les financiers, les oligarques et leurs multinationales, ne prévoient en aucun cas de partager quoi que ce soit avec les gueux... et qu'à moins de leur tordre la gueule en biais le plus fort possible, ils préfèreront crever que de lâcher prise ? Que le capitalisme est un système qui ne s'arrêtera que lorsque la dernière fleur sera cueillie, la dernière rivière tarie, et le dernier arbre coupé ? Que ce sont les grands patrons, les actionnaires, les oligarques et tous les financiers qui dictent leur loi au politique, et pas l'inverse ?
Et que finalement, un ministre de l'économie et des finances dans l'Union Européenne actuelle, n'a pratiquement aucun autre pouvoir, autre que celui d'appliquer les GOPE, et de fermer si possible sa grande bouche, histoire de ne pas en laisser échapper les grosses couleuvres qu'il doit avaler en permanence ?
Capitaine crochets
Bruno est ainsi fait : têtu, borné, stupide ou encore mieux, aveugle. Non pas par malignité ou duplicité, non : seulement par conviction idéologique que ce qu'il fait, c'est la chose à faire, et qu'à la fin, ça va forcément marcher.
Il le dit d'ailleurs lui-même depuis le début : en 2017, en 2018, comme plus récemment, il faut "maintenir le cap de la réduction des déficits", mais surtout, surtout, "ne pas refaire les erreurs du passé en distribuant l'argent public alors que la situation s'améliore".
Problème : la situation s'empire, et l'argent public coule à flots, mais que dans un sens. Du bas vers le haut.
La barque du ministre écrivaillon prend la flotte, mais pas grave, même si les récifs pointent à l'horizon, le moussaillon Le Maire persistera à suivre la lueur du phare capitaliste, jusqu'à la fracasser sur les rochers s'il le faut. C'est sûr, il le sait, il l'a vu (dans ses rêves) : après tous ces sacrifices, le bateau France ne peut pas couler. Et, même s'il coule, c'est pour ensuite mieux remonter à la surface. Ou pire encore, pour que les quelques rescapés du naufrage puissent enfin prouver leur valeur dans la compétition économique du chacun pour soi.
Et dieu reconnaitra les siens.
Le ministricule Bruno en est intimement persuadé : il est de la race des survivants, il est de cette trempe-là, de ceux qui débarquent à Koh-Lanta avec leur bite et leur couteau, et arrivent à bâtir une startup en moins de temps qu'il n'en faut à Bernard Arnault pour faire Paris-Nice dans son jet privé .
Et puis, Sa Majesté Poudrée ne l'aurait pas gardé aussi longtemps aux manettes d'un des ministères les plus importants de cette République qui n'en finit plus de maintenir le cap, droit vers le vide, en accélérant, si elle ne lui trouvait pas quelque(s) qualité(s) ?
A moins que...se pourrait-il que ce soit justement parce qu'il est ce qu'il est, lui, le bourgeois moyen, l'énarque pas franchement brillant, l'aveugle pathologique, l'incanteur professionnel, que Sa Majesté Poudrée Jupiter 1er ne puisse plus s'en passer ?
On dit toujours que les plus puissants s'entourent des plus médiocres, histoire de pouvoir les contrôler aisément, et de ne pas avoir à surveiller en permanence leurs arrières. Et le petit Bruno semble correspondre parfaitement à la fiche de poste : il coche toutes les cases du bon baltringue, remplit tous les critères de médiocrité, en un mot comme en 49,3 il est parfait pour le job.
Le ministère de l'économie et des finances (comprendre : des cordons de la bourse, et pas des bourses comme le croit Bruno) étant une de ces places de "la répubik' une et indivisib', comme le disait l'ex agité-désormais-condamné à talonnettes, qui ne saurait souffrir la moindre déviation de cap, la plus légère erreur de barre, le plus petit degré d'écart par rapport au cap fixé, il lui fallait un capitaine ad'hoc. Bruno est celui qui tient la barre avec fermeté, sous l'oeil bienveillant de Sa Majesté Eborgneuse.
Lequel cap ne pouvant mener qu'à l'île paradisiaque du capitalisme, nous sommes d'accord. Une île au trésor où tous vos voeux d'optimisation fiscale seront exaucés. Un continent perdu qui regorge de richesses, le paradis des actionnaires et du verrou de Bercy, le Saint Graal des superprofits (même si le petit Bruno ne sait toujours pas trop ce que c'est) aussi bien que des petits arrangements entre amis, pas de compte en Suisse ici, tout passe par la loi et l'ordre, pardon par la Loi de la République et l'Ordre Républicain, démocratie oblige !
Alors en attendant d'atteindre l'île aux trésors, Bruno rame un max : pour expliquer aux Français qu'il les protège jour et nuit, et que les réformes structurantes consistant à détruire les Services Publics et à vendre le pays et sa souveraineté à la découpe sont non seulement nécessaires, mais vitales. Et il est tellement bon dans son domaine, le petit Bruno, que bientôt il nous persuadera que manger une seule fois par jour, c'est bon pour la santé -du moment qu'on refile la différence qu'on aurait dépensée dans la bouffe à ses petits copains milliardaires.
Car c'est sûr, ça va marcher : les emplois, comme les GI en 40 sur les plages de Normandie, vont débarquer bientôt.
Dilaté comme jamais
Nous en sommes donc là : pour contrer les effets délétères d'une politique de droite assumée par absolument tous les présidents et tous leurs gouvernements depuis le tournant de la rigueur de 1983, il n'y a donc d'autre solution que toujours plus de la même politique, et le sieur Lemaire fait partie de cette race de technocrates qui croit dur comme fer à cette aberration.
En matière de fuite en avant, ça a au moins le mérite d'être clair.
Si l'économie va mal, c'est que nous n'avons pas assez fait de politique en faveur des plus riches. La suppression de l'ISF, la flat tax, l'exit tax, le CICE, les 160 milliards de cadeaux fiscaux faits chaque année aux plus riches (suppression de la CVAE, exonérations massives, baisse des impôts de production faites sur le dos des Services Publics, Hôpitaux en tête, etc. etc.) se sont fait exclusivement sur le dos des plus pauvres et de la classe moyenne, c'est à dire de 99% des français. Mais ça n'est bien sûr pas suffisant pour les vampires des multinationales et les tiques de la finance. Il en faut toujours plus, alors on pioche dans ce qui reste : au hasard, les retraites. Puis viendront la Sécurité Sociale dans son ensemble, avant qu'un jour prochain, même l'air qu'on respire ne soit vendu au plus offrant. Et vous avez intérêt à être d'accord, d'ailleurs si vous ne l'êtes pas c'est pareil : le petit Bruno adoptera volontiers des accents Thatchériens si d'aventure ça ne suffisait pas, assurant qu'il n'y a aucune alternative crédible à la réforme. Comprenez : circulez, y a rien à voir à part vos larmes, et votre sang.
Ca doit être ça qu'on appelle "le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ?"
Alors, pour faire passer la pilule de l'inflation qui depuis deux ans désormais empoisonne la vie des gueux, et éviter que ceux-ci ne commencent à lorgner vers les vrais responsables, Bruno reprend son bâton de pèlerin : partout dans les médias il fait fuiter ses coups de gueule et autres coups de pression, qui se révèlent aussi foireux qu'un des pets de la défunte reine d'Angleterre. Bruno "hausse le ton" face aux méchants industriels qui se gavent, il "hausse le ton" face aux méchants pétroliers qui se gavent, il "hausse le ton" face aux méchants entrepreneurs qui n'embauchent pas malgré ses cadeaux faramineux mais, contrairement à la Castafiore, ça ne va bien sûr jamais très loin, ni très haut.
Et à la fin, on finit (presque) tous par se le demander : se rend-il compte que ça fait deux ans qu'il prend les français pour des imbéciles, sur l'inflation comme sur le reste ? Compte-t-il encore longtemps sur sa bonne étoile, pour empêcher les gens d'enfin réaliser que le voyage en macronie va finir par très mal se terminer ?
Déjà au printemps dernier, promis-juré, l'inflation ne passerait pas l'hiver 2022.
Puis, ce printemps 2023, repromis-juré-craché, "pas de mars rouge" : ça tombe bien, il fut violet, à l'image de l'instrument que son héros de plume exhibe à sa nouvelle conquête américaine.
Mais n'allez pas dire que ce sont des échecs : c'est juste que ça n'a pas marché, la science économique étant ce qu'elle est, n'est pas ministre et devin qui veut n'est ce pas ? Et puis tous ces échecs insuccès ne sauraient cacher le fait que le petit Bruno a de l'ambition.
Il a pris le melon : être un ministre durable ne lui convient plus, il doit passer à la vitesse supérieure.
Quoi de mieux que le FMI ?
Et finalement, ça se tient : si on se souvient de Christine Lagarde, la nullarde qui affirmait becs et ongles en Août 2008 (soit 15 jours pile poil avant la chute de Lehmann Brothers et le krach de septembre) que "le plus gros de la crise financière est derrière nous", et que "la crise n'est pas un krach", Bruno aurait donc le profil idéal pour ce poste.
C'est comme au ministère de l'économie et des finances : il faut à la tête de ce machin qui affame et asservit les peuples, quelqu'un qui ne réfléchit pas, et surtout un technocrate qui n'a pas (d'état) d'âme.
Parfait pour le job, donc. Pour lui, ça constituerait un aboutissement d'une carrière toute vouée à en enrichir certains, au détriment de l'écrasante majorité des autres.
Et ça bruisse un peu partout dans les places parisiennes bien informées, qu'il s'active comme jamais, le petit dilaté de la République : il s'y voit déjà, coopté par les puissants (y compris d'anciens trumpistes, quand on a besoin de l'extrême droite bizarrement elle ne sent plus très mauvais), il construit aujourd'hui le réseau qui lui sera indispensable demain, pour espérer emporter le poste de directeur du bras armé de la finance mondiale qu'est le FMI.
Enfin diriger, c'est un bien grand mot. Disons qu'il aura le droit de mettre son nom en bas de la feuille et d'émarger à seulement cinq fois plus que son misérable salaire actuel de ministre... une manière de se rapprocher encore un peu plus de ces français qu'il a assuré six ans durant, comprendre et écouter ?
Casse-toi, riche c...
Finalement, qu'en dire ?
Remplir quelques pages sur un être aussi insignifiant, aussi pâle, aussi fadasse que cet individu, fut une gageure, assurément. Mais c'était nécessaire, sinon indispensable. Car contrairement au petit Bruno, je ne suis pas ministre (ni même haut fonctionnaire), et je ne suis donc pas rémunéré une fortune pour écrire des livres de cul et me foutre littéralement de la gueule de 99% français, pendant que j'arrose en permanence les 1% de privilégiés restants.
Ecrire prend du temps, et même énormément de temps, si on veut un tant soi peu faire quelque chose de correct.
Et de cathartique aussi, dans mon cas.
Et c'est là, avec horreur, que je me rends compte que le petit Bruno et moi -toutes proportions gardées bien sûr, je ne lui arriverai bien évidemment jamais à la cheville- avons quelque chose en commun.
Comme il le disait si bien lui-même,"l'écriture et la littérature me permettent de m'évader de ma vie quotidienne, de prendre du recul et de penser autrement".
Ces mots, j'aurais pu les faire miens : c'est comme s'ils étaient sortis de ma bouche.
Mais la comparaison s'arrêtera vite là : pendant que Bruno ira se la couler douce à Washington, avec un salaire de plénipotentiaire, et qu'il passera au next level de la nocivité financière, moi je ferai comme tous les autres, petit français de la classe moyenne : je végèterai, et avec un peu de chance, je crèverai au travail avant de finir gâteux et/ou euthanasié en Ehpad.
Jaloux, envieux, vous vous dites ?
Certainement pas : comme le dit si bien la Déclaration des Doigts de l'Homme et Durcis-toi bien : "les distinctions ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune".
Tout individu normalement constitué, de corps comme d'esprit, souhaitera donc bon vent au capitaine Lemaire.
Avant de le pousser à embarquer sur son radeau de la méduse, direction Washington, et le FMI.
Les bonnes choses ne se partagent pas, elles se donnent.
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