Le radeau qui nous méduse
Hier, elle avait passé une rude journée politique qui s’ajoutait à d’autres. Alors, le soir après ses ablutions, elle a bu « nuit tranquille l’Eléphant », Paulette. Mais trop.
Quand elle fait des abus d’actualités, elle est intenable dans le lit. Ronflements et coups de pieds, comme si elle était ministre. Et puis, elle rêve cauchemardement. Pour moi, alors, les nuits sont plus longues que les jours.
Ce matin, donc, Paulette avait la craquotte nerveuse. Elle raconta.
Je ne compris pas tout, mais son histoire avait du sens, au delà du drame.
Dans son souvenir, il y avait eu un naufrage de pédalo au large de Marseille lors de partielles au PS, après qu’il ait navigué à vue depuis l’école d’une gamine de Roms. C’était sous la cinquième République.
L’embarcation d’origine était fragile et n’était pas conçue pour supporter du capitaine de grands écarts. Pourtant, depuis le printemps 2012 où il avait pris la mer, il y avait surcharge sur son esquif, dont c’était la marque de fabrique. Peint d’une peinture bleu-sarkozy, sur un boudin était écrit : « L’indécision ».
Paulette se souvenait de tout.
Elle rajouta qu’il s’y prenait comme un manche et tapait avec sur ses électeurs, mais pas sur le Medef ni sur les puissants, perdant du temps sur tout, s’évertuant à colmater les brèches avec de la synthèse alors que seuls la poix et de la bonne foi auraient suffit pour lui rafraîchir la mémoire sur ses promesses qui prenaient l’eau. Mais ce n’est pas l’homme qui prend alzeimer en politique, c’est l’inverse, sauf accident.
C’est ce qui arriva, car le capitaine avait trop chargé la barque de godillots, de moutons de chèvres et de choux qu’il comptait ménager tout le long de son périple au long-court pour se laver ensuite les mains de tout.
Mais ce qui devait arriver arriva.
A force de tirer sur la corde et de confondre la gauche avec tribord, personne ne vit arriver l’iceberg dérivant, tellement c’était le foutoir dans la cabine de pilotage où il n’y avait personne dans l’avion. Paulette vit l’embarcation chavirer près des calanques.
Arrivée à ce point de la narration, je demandais à Paulette si elle n’en rajoutait pas.
Le yeux fixés sur moi, elle répondit que non et pleura aux carnage, rajoutant que le pire était à venir : des rescapés construisirent un radeau qui dériva jusqu’en 2017, avec plein de cadavres politiques dessus ce qui était bien naturel dans ce milieu.
« Tu vois le tableau ? », interrogea Paulette.
Sur les madriers en provenance du Vieux Port, les futurs morts étaient encore vivants et se touchaient les uns les autres, s’assurant qu’ils ne feraient pas le voyage tout seuls, ce qui, en politique, est un gage de longévité.
Valls, Ayrault, Hollande, étaient là, plus ou moins au sec ou mouillés jusqu’à l’os. Sur le radeau, le PCF de Paris, qui venait de divorcer d’avec le Parti de gauche à Mélenchon était de la partie, comme d’autres, médusés.
Décidément, Paulette venait de nous faire un cauchemar politique pyramidant.
L’atmosphère était glacée, il fallait la réchauffer avant que la mer monte et génère de nouvelles vagues d’immigrés qui ne sauraient s’intégrer.
Il y avait le feu au lac. Le capitaine essaya bien d’éteindre l’incendie allumé par Valls, mais rien n’y fit, les contre-feux sur l’eau faisant désordre et les canadairs n’ayant pu décoller.
Alors, Valls, à la demande du chef d’orchestre, sortit un violon qu’il avait confisqué à une écolière qui ne l’était plus depuis qu’elle séjournait ailleurs avec ses parents suite à des indélicatesses policières mais-elle-pourrait-revenir-seule-en-France-sans-ses parents-c’est-nouveau-ça-vient-de-sortir.
En bon bourrin, en bon cheval de Troie que rien ne ferait dévier de son cap, Valls joua jusqu’aux municipales des airs connus. C’était la nuit du second couteau.
Puis le violon toucha l’eau. Flottaient de fausses notes.
J’étais épouvanté.
Le rêve de Paulette était insupportable. Paulette était secouée de spasmes comme un dimanche matin avant les émissions religieuses sur France 2, comme si elle racontait une légende urbaine qui aurait été opérée d’une rumeur.
Puis Paulette se calma.
Il fallait la comprendre et lui pardonner : pour elle, la semaine avait été rude : elle avait aussi écouté Gérald Dahan piéger Samia Ghali et Patrick Mennucci avant le deuxième tour des primaires du PS à Marseille, et Ségolène venue soutenir François sur Bfmtv. ( Il n’y a plus de problème… »…
Pour la consoler, j’ai avancé que si ça se trouve, le violon tombé à l’eau remontera à la surface en d’autres temps, d’autres mœurs et sous une autre République et sera vendu.
Même si c’est loin et que d’ici là il y aura de l’eau dans le gaz et des impôts nouveaux à payer.
Le capitaine, dès que les vents tourneront, tournera encore, et à force de nous avoir endormi sur le frais cresson bleu, aura deux trous roses au côté droit.
Léon
http://leonetpaulette.blogspot.fr/
8 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON