Question de points de vue. Pour le représentant des commerçants, l’image de la Puerta del Sol pleine de personnes et de tentes, qui fit l’année dernière le tour du monde, a causé un dommage incalculable pour l’Espagne, une perte bien supérieure à trente millions d’euros pour les magasins ayant pignon sur la place centrale madrilène. Demetra, quarante-cinq ans, assistant social au chômage et militant du mouvement 15-M, a quant à lui une vision radicalement différente de la situation : « tout d’abord, les chiffres sont exagérés, mais surtout, ce genre d’arguments est d’une insondable bêtise. Qui parle comme le président des commerçants ne comprend pas la nécessité de réveiller les consciences, chose que nous faisons depuis un an et que nous continuons de faire. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans une société dominée par le Dieu argent et où l’humain ne compte pas ».
Il est facile de deviner lequel des deux points de vue épouse le gouvernement espagnol, qui n’a pas perdu une occasion ces derniers jours pour répéter qu’il ne tolèrerait pas que se répètent les occupations de l’an dernier, tant dans la capitale que dans les autres villes. Une attitude jugée comminatoire y compris par le quotidien El Pais, pourtant sur des bases libérales. Dans son éditorial d’hier, on se demandait quel était le véritable objectif de l’exécutif de Rajoy : « éviter de nouveaux rassemblements ou laisser entendre que l’utilisation de la force est envisageable ».
A l’apparente nervosité de la droite au pouvoir, les Indignés ont répondu par la force de leurs arguments, en défilant dans plus de quatre-vingts communes, grandes ou petites, dans toute la péninsule ibérique. Dans la capitale, de nombreux cortèges sont partis dès les premières heures de l’après-midi des quartiers périphériques pour converger vers la place Puerta del Sol.
Les revendications du mouvement 15-M sont nombreuses et pouvaient se lire sur Internet ou sur les banderoles portées par les manifestants, dont beaucoup portaient un maillot vert, symbole de la lutte en faveur de l’école publique.
« En peu de mots, nous demandons un changement radical des politiques économiques », nous dit encore Demetria, engagé dans le groupe 15-M et plus particulièrement en charge de la désobéissance fiscale. « Nous voulons payer le coût de la dette publique que nous avons souscrit, nous, citoyens. Et nous en avons marre de soutenir à bout de bras la monarchie et l’Eglise catholique », finit par ajouter Demetria.
« Mariano, Mariano, no llegas a verano » (Mariano, tu n’arriveras pas à l’été), est un slogan répété en chœur. Un objectif apparemment difficile à atteindre étant donné la majorité absolue que détient le parti populaire au Parlement, mais il est en revanche tout à fait envisageable de penser que le gouvernement en place puisse ne pas tenir jusqu’à la fin de la législature : les enquêtes d’opinion montrent chaque jour un peu plus que le consensus vis-à-vis de l’exécutif est en train de s’effriter.
Mais les Indignés espagnols regardent aussi au-delà de leurs propres frontières, vers cette Europe où les choses commencent peu à peu à bouger. Dans le cortège madrilène figurait Alex, chômeur de 28 ans, qui portait une pancarte sur laquelle était inscrit : « je suis reconnaissant au peuple grec d’avoir donné une leçon aux partis favorables à l’austérité ». « Nous devons nous joindre à eux pour crier fort notre refus d’un système inhumain comme le capitalisme », ajoute-t-il.
A quelques pas de lui, Inès, étudiante âgée de 19 ans, argumente : « la fin de la crise ne peut passer que par la sortie de l'union européenne, pilier de l'ordre néolibéral mondial. Si l'on ne reprend pas la souveraineté monétaire, on est livré aux marchés et aux intérêts de la dette, et aux politiques de rigueur ».
Nombreux sont celles et ceux qui s’informent des initiatives prises à travers le monde, de Jérusalem à Londres en passant par Paris et Londres. Un énorme drapeau palestinien rappelle le drame que vit ce peuple.
A la fin de cette édition, la place Puerta del Sol est noire de monde. Pour les Indignés commence une soirée que tous espèrent très longue, en dépit des avertissements proférés par le gouvernement de Mariano Rajoy, manifestement aux abois. La police a délogé comme prévu les manifestants encore présents place Puerta del Sol ce dimanche matin.
« »« »« Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans une société dominée par le Dieu argent et où l’humain ne compte pas »« »« »
On l’aura entendue cette antienne
Mais elle a tout d’un voeux de conte de fées.
L’argent a toujours été très important. En particulier pour l’Espagne, la France, l’Angleterre, la Hollande, qui ont arpenté les mers et pillé le Monde pour s’enrichir
Heureusement, il a existé et il existe encore des recoins de la Terre où l’argent est ignoré. Ca nous prouve qu’en effet, il serait possible de s’en passer. Mais que veut dire pour des Européens de brailler en 2012, après des millénaires de course au pouvoir, au luxe et aux trésors matériels de chanter maintenant que c’est affreux, inhumain ?
Ne fallait-il pas y penser plus tôt ?
Ne fallait-il pas renoncer aux études, aux diplômes, à la télé, aux voyages en avion, aux Ipad, aux parcs d’attractions, au Coca mélangé de vin avant ?
Qu’est cet immobiler espagnol dont on dit qu’il est maintenant surnuméraire et ne vaut soudain plus rien ? Qu’est-il sinon essentiellement de l’immobiler de loisir, en tous cas de l’immobilier conçu autour de projets balnéaires (qui, s’ils avaient eu du succès, auraient créé des emplois pour des travailleurs ayant besoin de logements de vie) ?
A Alméria, va savoir pourquoi, avait démarré un concept de cultures en serre. Il s’agissait de nourrir l’Europe en tomates, fraises et autres courgettes. Ca vaut ce que ça vaut sur le plan gustatif mais c’est sérieux, c’est du dur car produire de la bouffe c’est du dur. Alméria non seulement tient (sur la marché européen) mais se développe sans cesse.
Et si baisse de CA il devait y avoir, les investissement consistant essentiellement en des serres, ses promoteurs ne tomberaient pas de bien haut.
Par contre, tout le long de son littoral, l’Espagne a été investie par d’autres promoteurs qui visaient eux, les loisirs, la bronzette (des Espagnols mais aussi des Européens des brumes) Un peu comme nous avant Eurodisney qui avions multiplié les parcs de loisirs en surestimant de deux fois leur fréquentation et le prix du ticket moyen et qui avions connu une série de faillites (dont Mirapolis), ceux qui ont parié sur les plages espagnoles ont conçu des projets globaux allant de la plage aux hôtels de luxe en passant par des parcs de loisir et des logements pour les nouveaux personnels de ces stations géantes. Que le crédit ait été pas cher et que l’Etat ait tout permis aura bien entendu favorisé ce jeu. Mais il ne faut pas pour autant omettre de considérer que ces parieurs ont été très, très optimistes sur le remplissage ou la fréquentation.
(La corruption, fatale lors de tous les emballements ou hystéries collectives, n’a rien arrangé mais elle n’est pas le coeur du problème. Les mafieux étant eux aussi très déçus que le casino s’effondre)
Tout se tenant en cohérence dans ce genre d’énorme projet, il aura suffit que la demande européenne ne puisse pas suivre l’offre pléthorique espagnole pour que tout le pays se grippe. Pas assez de logement touristiques vendus > pas assez de clientèle dans les parcs > pas assez d’emplois > pas assez de logements pour sédentaires vendus > effondrement de l’ensemble.
Et là, contrairement au système d’Alméria, la catastrophe est énorme en termes financiers et de nombre de déçus.
Et c’est maintenant qu’on se retrouve marri qu’on se met à réclamer plus d’humain ? Après avoir bétonné et polyestérisé tout le littoral ?
Attendez, Boja, Diego, Elsa, Lila, si les Européens avaient bien afflué dans vos immenses stations balnéaires, vous auriez tous eu du boulot et du fric. Comme à Ibiza il y a 20 ans. Vous auriez tous fait la fête jusqu’à pas d’heure pour arroser votre réussite, non ? Vous n’auriez manifesté ni contre l’argent ni pour plus d’humain, n’est-ce pas ?
C’est votre projet balnéaire qui a foiré et qui a entraîné la faillite de tous les projets périphériques (dont l’immobilier non balnéaire). Et cette erreur de projection est de si grande ampleur que toutes les banques qui y avaient cru se retrouvent avec des hypothèques pourries. Elles sont à genoux ces structures financières que vous maudissez alors que leur seul tort c’est d’avoir été aussi optimistes que vous tous, de n’avoir pas su dire « Arrêtons d’accorder des prêts, la production est trop forte, le marché ne va pas suivre » Et si elles s’écroulent ces banques, même les braves d’Alméria vont en baver
C’est cela qu’il faut considérer. Sinon c’est du déni.
Cela dit, je suis moins inquiet pour votre immobilier surabondant que je le suis pour celui des EU trop souvent construit en bois. Le vôtre est plus solide et ne subit pas de tornades. Il peut attendre des jours meilleurs.
Côté France, je ne relève pas de projet aussi énorme que nous aurions échafaudé en état d’euphorie et qui nous mettraient en pareille situation de danger. Notre grippage viendrait plutôt d’une absence totale de rêve. Si nous faisions un jour une folie de grande envergure, ce ne sera probablement pas dans le domaine immobilier car je ne vois pas en vertu de quoi nous pourrions nous dire un beau matin « Construisons 1 000 000 de logements balnéaires, les étrangers accoureront nous les acheter »