Le sensationnisme fait d’une pierre deux coups
Mort lente et désastreuse de l'esprit critique et de la joie de vivre, ou pourquoi le pessimisme a contaminé les sociétés modernes...
Vous l’avez sans doute remarqué : nous sommes de plus en plus fatalistes, résignés, à-quoi-bonistes et tout ce qui va avec. Et ça, c’est sans compter le blasement, qui est pour moi le véritable mal des temps modernes (j’aurai sans doute l’occasion d’y revenir dans un prochain article).
La grande question que je me pose donc est : POURQUOI ? Pourquoi cette lassitude ? Pourquoi ce pessimisme ? Le monde n’est pourtant pas si laid…
En fait, c’est justement le monde qui pose problème. Je m’explique : à l’époque où l’agriculture et les vaches étaient encore le principal employeur, la balance de positif-négatif quotidien était plutôt équilibrée. Autrement dit, on vivait et on mourrait dans sa campagne, et on n’en sortait surtout pas.
De cette manière, les grands évènements d’une journée se cantonnaient certainement à un enfant malade, un âne tombé dans le puits, une météo catastrophique pour les moissons… et j’en passe. Tout cela compensé tout de même par d’éventuels dénouements heureux : voilà donc qu’un homme aura vu, dans la même journée, un évènement négatif pour un positif. Ça, c’est la théorie.
Sauf qu’aujourd’hui, nous avons accès à toute l’information, partout, en temps réel. Nous sommes ouverts sur le monde entier ; c’est un véritable déluge de nouvelles qui s’abat sur nous -sans que nous sachions nécessairement faire le tri. Et les médias, dans leur logique de course à l’audience, ne nous montrent souvent que les catastrophes : en effet, qui se soucierait d’un avion arrivé à bon port ? d’enfants bien nourris ? de la construction d’immeubles à la périphérie de Bombay ?
Sensationnel oblige, c’est un flot d’actualités profondément anxiogènes que nous subissons. Alors, on aura beau ronronner un peu dans son canapé, bien au chaud, en pensant à la chance qu’on a par rapport à ces pauvres hères dont on nous raconte la survivance, ça ne peut que nuire à notre bien-être.
Résultat : une balance positif-négatif déficitaire, puisque ces mêmes sources d’informations n’ont plus le temps de nous instruire de ce qui nous entoure véritablement. Sans rire, il y a probablement deux milliards d’humains heureux et bien-portants dont nous ne connaîtrons jamais l’existence. Dès lors, la voie est toute tracée au pessimisme, pour ne nommer que lui.
Laboratoires pharmaceutiques, vous sonnez l’alarme quant à notre consommation d’antidépresseurs et autres légumisants. Hé bien, au lieu d’en inventer de nouveaux, commencez par demander à vos clients d’éteindre leur télévision.
2 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON