Le souffle du Larzac
Aujourd’hui le documentaire « Tous au Larzac » de Christian Rouault est toujours là pour redonner un souffle à cette idée, un souffle venu du Larzac où le petit canard né en 1975 « Gardarem lo Larzac » continue à paraître et à tisser des solidarités entre ceux qui luttent au Brésil, au Chiapas, en Ile- et Vilaine, en Corse ou ailleurs… Journal auquel vous pouvez vous abonner via www.larzac.org ou par courrier à : Gardarem lo Larzac, Montredon, 12100 La Roque Sainte Marguerite.
Marizette, Christiane, Pierre, Léon, José… sont quelques-uns des acteurs, drôles et émouvants, d’une incroyable lutte, celle des paysans du Larzac contre l’Etat, affrontement du faible contre le fort, qui les a unis dans un combat sans merci pour sauver leurs terres. Un combat déterminé et joyeux, mais parfois aussi éprouvant et périlleux.
Un jour d'octobre 1971, Michel Debré, alors ministre de la Défense, décrète sans concertation préalable l'agrandissement du camp militaire du Larzac. A l'annonce de cette décision effarante, la colère se répand comme une traînée de poudre. La réaction des paysans est radicale : « Si on veut nous prendre nos fermes et nos terres, on partira les pieds devant et on ne sera pas les seuls. » Une vague unanime de protestations et de résistance s'organise. C'est le début d'une incroyable lutte qui durera dix ans. Dans le face à face quotidien avec l’armée et les forces de l'ordre, ils déploieront des trésors d’imagination pour faire entendre leur voix. Bientôt des centaines de comités Larzac naitront dans toute la France... Dix ans de résistance, d'intelligence collective et de solidarité, qui les porteront vers la victoire.
Le bouseux dont les militaires et les politiques pensaient ne faire qu’une bouchée leur ont tenu tête et ont fini par gagner le droit de rester sur leurs terres. En 1981, Mitterrand déclara l’abandon du projet d’extension de la zone militaire.
On ne sort pas indemne de ces formidables années de luttes commune menée par des modernes, des traditionalistes, des conservateurs, des révolutionnaires… des petits et gros exploitants, des soixante-huitards. Il en reste une conscience politique, une culture, une solidarité. C’est dans le Larzac que se retrouvaient en 2003 plus de 300.000 personnes pour clamer qu’un autre monde est possible à la mondialisation libérale. Aujourd’hui le documentaire « Tous au Larzac » de Christian Rouault[1] est toujours là pour redonner un souffle à cette idée, un souffle venu du Larzac où le petit canard né en 1975 « Gardarem lo Larzac » continue à paraître et à tisser des solidarités entre ceux qui luttent au Brésil, au Chiapas, en Ile- et Vilaine, en Corse ou ailleurs… Journal auquel vous pouvez vous abonner via www.larzac.org ou par courrier à : Gardarem lo Larzac, Montredon, 12100 La Roque Sainte Marguerite.
Le monde agro-pastoral est concerné alors qu’il est menacé par la spéculation immobilière, les poisons industriels, les traités abusifs de libre-échange et les méga-bassines privées des grosses exploitations. La solidarité est devenue nécessaire et vitale. Elle s’est affichée récemment par des cortèges de tracteurs et quelques actions contre des préfectures. Des mouvements ont décidé d’agir contre les méga-bassines et créent des ZAD, actions qui sont réprimées et qui valent à certains d’être fichés S. L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit de nourriture, d’eau, de pollution… et plus généralement du bien-être des peuples. Cet enjeu a ses victimes.
Le 26 octobre 2014,Remi Fraisse, botaniste âgé de 21 ans avait été tué par une grenade offensive lancée par un gendarme mobile, lors de violents affrontements sur le chantier de la retenue d’eau controversée de Sivens. Quelques jours après sa mort, le gouvernement avait suspendu l’utilisation de ce type de grenade par les forces de l’ordre, avant de l'interdire définitivement plusieurs mois plus tard. La cour administrative d’appel de Toulouse a confirmé, mercredi 22 février 2023, la « responsabilité sans faute » de l’État dans la mort de Rémi Fraisse, un manifestant écologiste tué lors d’une intervention des gendarmes dans le Tarn en 2014.
Plus près de nous, Sainte Soline, dans les Deux-Sèvres, a été un champ de bataille le 25 mars 2023. La manifestation contre les méga-bassines a dégénéré en violents affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. Selon le dernier décompte fourni par le parquet de Niort, les secours auraient pris en charge sept manifestants blessés, dont trois traités en urgence absolue et hospitalisés. Les organisateurs évoquaient, eux, un bilan beaucoup plus lourd, avec 200 manifestants blessés, dont 40 grièvement. L’un d’entre eux est resté en réanimation avec son pronostic vital engagé. Mickaël, un manifestant âgé de 34 ans, originaire du Loir-et-Cher, a été gravement blessé à la trachée lors des affrontements, mais il est sorti du coma le 30 mars 2023. Cet événement tragique souligne les tensions autour de la question de l’eau et des méga-bassines.
Edgar Morin a eu raison, de déclarer : « La conscience écologique vient d'une menace, non d'une espérance ; elle nous amène à repenser non seulement notre relation à la nature, mais notre histoire et notre civilisation ».
La conscience écologique, telle que l’exprime Edgar Morin, émerge non pas d’un optimisme béat, mais d’une prise de conscience urgente. Elle nous oblige à réévaluer notre lien avec la nature, à revisiter notre passé et à repenser les fondements de notre civilisation. Cette menace, qui plane sur notre environnement, nous pousse à agir, à réfléchir et à réinventer nos modes de vie. En aurons-nous collectivement le courage ? En aurons-nous la possibilité ? L’évolution de l’espèce humaine est-elle vouée à sa disparition ?
[1] « Tous au Larzac »film documentaire de Christian Rouault, France 2011
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