Toute question de morale exclue, les péripéties helvétiques
de Jérôme CAHUZAC infligent quels griefs à la collectivité ?
J’insère ci-après un article paru sur France-Soir qui ouvre d’autres visions
sur la morale et la vertu...
Et si nous en faisions un inventaire complet ?
« Des dizaines de hauts fonctionnaires ont le titre de préfets alors
qu’ils ne le sont pas. Un copinage politique qui leur permet notamment de
toucher une retraite de préfet. Parmi eux, Michel Vauzelle et Michel Delebarre.
Parmi ces préfets fantômes, les députés
et anciens ministres de François Mitterrand, Michel Vauzelle 66 ans, et Michel Delebarre, 65 ans
C’est un scandale français, un de ces abus qui alimentent la rancœur des
citoyens contre les politiques. Un de ces arrangements entre amis que l’on
cache soigneusement au citoyen, mais qui coûte cher au contribuable. Certains
de nos hommes politiques et certains hauts fonctionnaires ont été nommés
préfets par nos présidents de la République successifs, ils bénéficient
d’avantages liés à cette fonction… mais ils n’en ont jamais exercé la moindre
fonction. Parmi ces préfets fantômes, figurent deux stars de la politique, les
députés et anciens ministres de François Mitterrand, Michel Vauzelle, 66 ans,
et Michel Delebarre, 65 ans.
Tous deux indiquent, sur le site informatique de l’Assemblée nationale, la même
profession : préfet. Pourtant, le premier est avocat de profession et le second
cadre supérieur de collectivités locales. En fait, ces deux grands notables locaux
du Parti socialiste qui n’ont jamais exercé les fonctions de préfet avaient été
nommés à ce titre, de manière discrétionnaire, par le président François
Mitterrand, en 1985 pour le premier et en 1983 pour le second.
Quel intérêt de nommer un préfet fantôme ? C’est un joli cadeau… financier,
facile à comprendre. Le 28 avril 2011, Michel Delebarre a fait valoir ses
droits à la retraite de préfet, à l’âge de 65 ans, tout comme l’avait fait le
15 août 2010 Michel Vauzelle. Cela permet à ces deux caciques du PS de toucher
aujourd’hui une pension mensuelle de 4.000 € brut, qui vient s’ajouter à leurs
indemnités de parlementaires et d’élus locaux : soit 15.124 € brut (Michel
Delebarre) et 9.760 € brut (Michel Vauzelle). Sans compter pour chacun une
indemnité (forfaitaire) représentative de frais de mandat de député de 6.000 €
net. Et cela, en toute discrétion.
RETRAITES DORÉES
D’ici quelques années, lorsqu’ils décideront
d’abandonner leurs mandats, ces deux parlementaires pourront cumuler la
totalité de leurs retraites de préfet, de parlementaire et d’élu local ! Soit
en tout, de l’ordre de 12.000 € mensuels brut pour le premier et 10.000 pour le
second. Rappelons que, selon l’Insee, le montant moyen brut des pensions en
France s’élevait, en 2009, à 1.196 € par mois… Des montants et des cumuls
choquants pour bon nombre des Français.
En juin 2007, à une question de l’hebdomadaire L’Express lui demandant quel était son principal défaut, Michel
Delebarre avait répondu : « Je veux
tout. » Tout, il l’aura bientôt. En effet, le maire de Dunkerque,
président de la communauté urbaine de cette ville et préfet à la retraite
abandonnera en septembre prochain son mandat de député pour être tête de liste
socialiste aux sénatoriales dans le département du Nord.
Le général de Gaulle, qui ne plaisantait pas avec les finances et la morale
publiques, avait mis fin à cette folie des « préfets fantômes », une folie qui perdurait depuis la création
de ce corps par Napoléon Ier, en 1800. Autre temps, autres mœurs : avec
l’arrivée de François Mitterrand à l’Elysée, en 1981, ce système de copinage,
souvent basé sur des relations maçonniques, renaissait de ses cendres. La
nomination de préfets « en mission de
service public relevant du gouvernement » était alors autorisée par un
décret du 23 décembre 1982, à hauteur de 5 % de l’effectif budgétaire du corps
des préfets. Aujourd’hui, ce quota de «
faux préfets » autorisés représente 7 % des 236 préfets, soit 17 préfets
fantômes. Au fil du temps, cela fait des dizaines de faux préfets, nommés de
manière totalement discrétionnaire et sans exiger le moindre titre ou diplôme
pour exercer ces fonctions.
6.000 € MENSUELS SANS
RIEN FAIRE
Au bout de quelques mois, ces préfets bidons sont
nommés préfets hors cadre. Une voie de garage « royale » (utilisée également pour écarter les préfets qui
déplaisent), dont on ne revient jamais, mais qui permet aux intéressés de
toucher aujourd’hui 6.000 € brut mensuels en attendant la retraite ou d’être
élu sénateur, voire député.
Placé alors en détachement pour exercer son mandat, le préfet parlementaire
(deux fonctions officiellement incompatibles selon la loi) ne reçoit plus de
l’Etat qu’un tout petit salaire correspondant exactement au paiement de ses
cotisations de retraite de préfet. Ce qui a été le cas de Michel Delebarre et
de Michel Vauzelle pendant plus de vingt-cinq ans. De plus, en cas d’échec
électoral, chacun d’entre eux pouvait coiffer sa casquette de préfet hors cadre
et percevoir son salaire plein pot, sans être affecté en poste dans un
département.
De 1982 à 1995, François Mitterrand a ainsi nommé près d’une soixantaine de
préfets en mission de service public. Parmi eux, dix-sept étaient issus des
corps de sous-préfets et administrateurs civils. Agés d’au moins soixante ans,
ces vieux serviteurs de l’Etat partaient en retraite quelques mois après leur
nomination, qui récompensait leurs loyaux services. Ce qui leur permettait de
toucher une pension nettement supérieure à celle à laquelle ils avaient droit
pour leur carrière de sous-préfet ou dans l’administration de l’Etat. La
deuxième partie de ces préfets en mission de service public (une quarantaine)
était en quasi-totalité des membres du PS, des élus de ce parti et des amis ou
proches de l’ancien président. Parmi cette quarantaine de privilégiés, les élus
ont le droit de cumuler aujourd’hui cette retraite de préfet en mission (4.000
€ en moyenne) avec toutes leurs autres pensions liées à leurs mandats
électoraux et des emplois privés.
GARANTIE TOUS RISQUES
POUR LES COURTISANS
Cette institution des préfets fantômes n’est en
réalité qu’un des systèmes légaux de financement des deux grands partis
politiques français, le PS et l’UMP. Depuis sa renaissance « mitterrandienne », le système a
prospéré sous Jacques Chirac, y compris lorsque Lionel Jospin était Premier
ministre. Ce cadeau présidentiel offre une sorte de garantie tous risques pour
les courtisans, les poids lourds et les incontournables de ces deux formations.
On recase toujours ses amis ! Voilà pourquoi, chaque mercredi, jour du Conseil
des ministres, un « ami » ou un
obligé du président de la République, depuis François Mitterrand, peut être
nommé préfet « fantôme » chargé
d’une « mission (bidon) de service
publique relevant du gouvernement ».
Nicolas Sarkozy n’a pas mis fin au système. Son ancien ministre et fidèle
conseiller, Brice Hortefeux, 53 ans, en bénéficie. Selon un décret pris lors du
Conseil des ministres du 27 avril 1995, il a été nommé préfet, chargé d’une
mission de service public relevant de l’action du gouvernement. A l’époque, à la
fin des années 1990, ce fidèle de Nicolas Sarkozy tirait ses ressources de son
revenu de préfet, soit 40.000 francs brut par mois, et de ses indemnités de
conseiller régional d’Auvergne, soit 10.000 francs brut mensuels.
Cette promotion à un poste de préfet fantôme a suscité l’opposition du
commissaire du gouvernement, Rémy Schwartz, lors de la séance publique du
Conseil d’Etat de novembre 1996. En vain. Car, au bout du compte, à gauche
comme à droite, personne ne remet vraiment en cause le système. Tous en
profitent, espèrent en profiter ou en faire profiter un ami, un jour ou
l’autre. Ce qui est en réalité un scandale d’Etat bénéficie d’un habillage
légal dont tous les politiques s’accommodent en silence.
NOMMÉ PRÉFET POUR L’EMPÊCHER D’ÊTRE
RÉÉLU SÉNATEUR
Le 11 octobre 2010, le président de la République nommait préfet
administrateur des Terres australes et antarctiques françaises (avec résidence
dans l’île de la Réunion) le sénateur de Maine-et-Loire, Christian Gaudin, 60
ans. En fait, cet ancien membre du Modem et aujourd’hui du Nouveau Centre avait
été élu sur sa propre liste aux sénatoriales de 2011 contre celle du poids
lourd local de l’UMP, André Lardeux, 64 ans, ex-président du conseil général.
En fait, l’Elysée veut que la droite parte unie aux sénatoriales de septembre
2011 en Maine-et-Loire pour avoir une chance de gagner le siège supplémentaire
(le département passe de trois à quatre sénateurs). D’autres sénateurs
empêcheurs de tourner en rond pourraient être nommés préfets.
Cette nomination inopinée vise uniquement à déminer une situation bien
compliquée dans le département de Maine-et-Loire pour les sénatoriales de
septembre 2011. La droite possède deux sénateurs hommes, tous deux poids lourds
locaux, et qui ont mené leur propre liste en 2001, l’ancien président du
conseil général, André Lardeux, 64 ans, et Christian Gaudin, 60 ans. Tous les
deux étaient partants pour se représenter en septembre 2011. La présence de
Catherine Deroche colle parfaitement avec la constitution « chabadabada » des listes… De plus, le
Maine-et-Loire va encore se jouer à la proportionnelle, car le département
gagne un siège de sénateur, en passant de 3 à 4 représentants. N’oublions pas
que ce département figure parmi les espoirs de la droite quand à la conquête du
quatrième siège : si la droite part unie, elle a une chance de s’emparer de ce
siège.
Etant donné qu’elle domine le conseil général et la majorité des communes.
Après, c’est aussi stratégique d’avoir quelqu’un comme Catherine Deroche au
Sénat : en septembre 2011, elle n’aura même pas un an de mandat et, malgré son
expérience et sa présidence de l’association des maires, elle n’a pas le poids
nécessaire pour tenter de se faire réélire en montant une liste dissidente.
D’autres empêcheurs de tourner en rond pourraient être nommés préfets : Alain
Vasselle ou Philippe Marini dans l’Oise, Laurent Béteille pour l’Essonne, Alain
Gournac ou Dominique Braye dans les Yvelines, et enfin Christian Demuynck en
Seine-Saint-Denis. ».