Le suicide en prison
Avant de commencer, je tiens à vous faire part de ma déception, Jérôme C ne s’est pas suicidé. Lui avait toutes les raisons de le faire. Il a bafoué la France, le parlement et lui-même. Il n’avait qu’une solution pour laver son honneur le suicide mais... c’est à vous de voir, je n'en pense pas moins. Je le déplore, car dans toute ma carrière, les tentatives ou suicide de détenus n’avaient pas d’aussi bonnes raisons que ce triste sire.
Les vrais suicides en prison ne sont pas plus élevés que dehors. Il y a une forte manipulation des chiffres, on arrive à faire dire tout et n’importe quoi aux nombres, il n’y a pas d’explications tangibles pour les expliquer, c’est ce que je vais tenter de faire.
Dans les prisons, c’est l’enfermement qui représente au dernier moment le doigt sur la gâchette. La moindre contrariété, se transforme en obstacle insurmontable. Une femme qui vous quitte, une peine trop élevée, la solitude, la pression des détenus comme des surveillants, sont des facteurs qui aggravent l’état d’esprit et qui poussent à un geste sans le vouloir vraiment. J’ai connu de faux suicides réussis, car les gars avaient mal calculé.
La faute à pas-de-chance
Je me souviens, aux Baumettes en 1992, un détenu s’est ainsi suicidé par malchance. Il était en cellule dans le bâtiment D au 4 eme étage, c’était en service de nuit. Pendant la nuit, durant leurs rondes les surveillants n’ont pas la clef des cellules, seul le brigadier les a. Cette nuit-là, le brave détenu entend le rondier arriver, il se coupe les veines et frappe comme un sourd a la porte.
Malheureusement pour lui, il fait un fausse manœuvre. En se tailladant il s'est sectionné l’artère fémorale. Le temps que le surveillant appelle le brigadier qui était aux greffes, que celui-ci franchisse toutes les grilles et arrive pour ouvrir, il se passe 5 ou 6 minutes environ, le détenu c’est vidé de son sang. Aux Baumettes : une artère fémorale sectionnée ça ne pardonne pas.
A la prison du Pontet – près d'Avignon, un détenu qui voulait sortir du Quartier disciplinaire (le cachot), feint une tentative de suicide. Ce sont ses codétenus qui ont pu lui suggérer cette solution pour échapper au mitard.
Malheureusement, il tisse de façon trop solide une corde avec des lanières déchirées de ses draps. (Les détenus ont droit à des draps au quartier disciplinaire.) D’habitude les surveillants commencent la distribution des repas par sa cellule. Dès qu’il entend le chariot de la gamelle, il se laisse pend. Mauvais coup du sort pour lui, le brigadier a décidé de commencer ce jour-là par le quartier des isolés situé sur le même palier. Lorsque les surveillants arrivent à sa cellule c’est trop tard, le type est déjà tout raide.
Une corde trop bien faite, penser que l’astuce trop répandue qu'une tentative de suicide pourra vous faire échapper au QD, et pour finir un changement dans la ronde de distribution du repas, et voilà ! Ce bonhomme sûrement ne voulait pas mourir : simplement il voulait sortir de cette cellule. Une corde tissée trop solidement l’a condamné à mort.
Beaucoup de ces tentatives ont réussi à cause du fait qu'elles sont arrivées à un mauvais moment, mais curieusement parmi tous les détenus que j’ai connus qui on fait une tentative ratée, aucun n'a jamais récidivé. Peut-être avaient-ils peur de mourir ?
Prévenir les tentatives de suicide
Lors que je reçois un arrivant, je prends toujours le temps de bien observer le nouveau détenu. Je lui ai toujours donné le traitement prescrit en garde à vue plus éventuellement un quart de Lexomil. Le Lexomil est un cachet que me donne le médecin et qui enlève le stress et rend calme de plus il est sécable en quatre et présente peut voir pas de risque en petite quantité. C’est pour cette raison que je me permettais de leur proposé, de plus comme souvent il y avait des « toxicos » le Lexomil est une plaisanterie
Un moyen de prévention contre le suicide, c’est généralement de 'doubler' l’individu fragile en ayant bien entendu choisi de placer avec un codétenu de confiance dont le tempérament sera une aide à la personne qui sera déprimée.
Avec tact, je fais comprendre au codétenu sa responsabilité et sur le risque qu'il encourt de « non assistance à personne en danger », s’il advient quelque chose à la personne que nous avons affectée dans sa cellule. C’est la raison principale des entretiens d'accueil afin de bien affecter les personnes fragiles.
Il y a d’autres moyens radicaux aussi pour éviter toutes tentatives de suicide. C’est de mettre à poil le dépressif, dans une cellule du quartier disciplinaire avec 2 matelas en mousse. Je l’ai pratiqué sur des personnes à risque... et ça marche !
Mais au lieu de se suicider dans le respect du code de procédure pénal, elle risque de porter plainte contre nous pour maltraitance. Pourtant, si je ne l’avais pas traité de cette manière, le type serait peut-être mort. La famille porte plainte contre l’administration, qui se retourne contre moi ou les agents. Notre responsabilité dans l’absolu est de rester 24 heures sur 24 derrière la porte de la cellule. Mais dans ce cas là c’est nous qui nous suicidons et notre famille porte plainte contre qui ? Plus sérieusement la justice trouvera toujours un responsable, même ci ce n’est pas évident, dans le code de procédure pénale, les avocats de la famille s’en chargerons. Trop de texte tuent l’essence même des lois et nous faisons dire tout et son contraire à des textes juridiques que nous soyons victimes ou accusés. Les brigadiers et les surveillants nous somme les fusibles qui empêchent les responsabilité de monter trop dans la hiérarchie.
A Fleury-Merogis, j’ai connu pire : la cellule de contention. C’est une cellule pour les nerveux, les agressifs, ceux qui risquent d'attenter à leur intégrité physique. Elle est équipée d’un lit spécial « style sado-maso ». On y couche la personne à poil puis on attache les bras et les jambes, enfin on lui immobilise le torse avec une camisole fixée au lit. Avant de sortir on le couvre d'un drap par décence.
C’est barbare, mais efficace à 100 %. Mais c'est démocratiquement et déontologiquement inacceptable dans un état de droit. En 1987 cela ce pratiquait, actuellement je ne sais pas.
Aujourd'hui c'est la camisole chimique. Une surdose de médicament qui ne tue pas mais inhibe toutes velléités et comme nous disons dans le midi les « les ensuques » avec des neuroleptiques qui endorment, comme dans les hôpitaux psychiatriques. Je dois dire que certains détenus apprécient cet état qui les rend calmes et en réclame lors qu’ils sentent qu’ils deviennent nerveux est irascibles, cela les aides à passer leur détention. Je peux dire, que c’est un moyen le plus utilisé pour éviter les tentatives de suicides.
Une chose est certaine : personne ne peut arrêter une personne qui a vraiment décidé de se suicider. Dix minutes avant de passer à l’acte, elle était tranquille, buvant un café et parlant de la pluie et du beau temps et puis... Personne ne peut rien y faire. A l'intérieur comme à l'extérieur.
Pourtant, peut-être à l’intérieur de la prison pouvons-nous plus faire pour les éviter les tentatives d’autolyse. Dans les hôpitaux psychiatriques par exemple, les personnes n'attentent pas à leurs jours. Pourtant elle le pourrait. Il y a bien des draps ou autres objets qui, détournés de leur usage, peuvent devenir des armes.
Tous nous nous devons d'être vigilants
Il est indispensable de traiter ce malaise en amont. Quant à savoir s’il y a plus de suicide en prison ou dehors cela ne me paraît pas important. Il faut être conscient que l’enfermement et la rupture avec les liens extérieurs provoquent des signaux d’alertes que sont ces tentatives et tous nous personnel pénitentiaire, psy, toubib et infirmier qui travaillons dans les prisons d’être vigilants.
La tentative de suicide est un cri d’alarme à la condition carcérale, est souvent un refus d’exécuter sa peine, même si on est coupable. Ou peut-être qu'un suicide réussi est-il une autre façon de s'évader ? un certain pas au-delà des murs...
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