Le temps et l’histoire (seconde et dernière chronique sur le temps qu’il fait)
Ça y est la canicule arrive. Le petit chien avait dû s’endormir en juillet et se réveille en août pour nous apporter la tant attendue canicule. Cette augmentation des températures s’accompagne, naturellement, de nouveaux cris d’orfraies sur la fin du monde et la prochaine apocalypse. Cette annonce intervient après qu’on a appris que le mois de juillet de l’an de grâce 2023 eût été le plus chaud de l’histoire de l’humanité (comme chacun a pu le constater), et ce, en dépit du fait qu’une speakerine présentant quotidiennement la météo en suisse a poussé l’élégance jusqu’à présenter ses excuses, du fait que les températures qu’elle annonçait se révélassent fausse de l’ordre de 7 à 8 degré centigrades (ce qui n’est pas une paille). Nous voici donc reparti avec des cartes météo remplies de rouges de toutes les nuances (de l’incarnat à l’écarlate).
Nous allons donc tous mourir dans le feu, ainsi que l’a prophétisé Saint Jean dans l’Apocalypse et que nous le claironnent les « spécialistes » et autres « experts » du Climat (sans se rendre compte, manifestement, du parallèle profondément religieux de leur prédiction).
Eh bien mourons. Soit. Mais tel la Du Barry ne croyant pas sa fin possible, je demande encore une seconde au bourreau, auquel, ainsi qu’aux vils Cauchon qui peuplent notre époque, je demande de reconsidérer la question. Et si, finalement, ces prédictions se révélaient des affabulations ? Des propos, non pas de templiers par saison de forte soif (faisons preuve de mansuétude), mais au mieux une compilation d’erreurs, de mensonges par omission, de petits (et grands) arrangements avec la réalité ? Se pourrait-il que finalement, et à force d’arguments, Caton préférât à nouveau le vaincu et abandonnât la gloire factice du vainqueur ? Se pourrait-il que nous ne soyons qu’en face d’une basse opération de propagande ayant d’autres visées que la lutte contre le « réchauffement climatique anthropique » ? Et là, ami lecteur, en toi : que de propos complotistes ! Tu t’en amuses si on t’affuble du même sobriquet ; ou tu t’en indignes au nom de la Science (qui est la religion de notre époque) qui dit que la Vérité n’est pas celle-là et que seul un esprit malade ou manipulé ose s’y opposer. Oui, le consensus scientifique dit que nous allons tous mourir ! Le consensus scientifique : cet oxymore, cette ânerie que l’on nous sert à toutes les sauces (surtout les plus faisandées) ; cet ultima ratio regis du pauvre d’esprit. Choquons-le donc encore une fois cet imbécile : il ne peut pas y avoir de consensus en science, sinon nous en serions encore à croire que la Terre est plate et que le phlogiston produit la combustion. Galilée ou Lavoisier ont appris à leurs dépens ce qu’est l’argumentum baculinum (ou l’argument du bâton).
Je me permets donc d’opposer, aux hérauts de l’Apocalypse scientifique, les humanités de jadis, celle des philosophes, des savants et des grammairiens, car même caesar non supra grammaticos, c’est dire son prestige.
Ayant un goût pour l’histoire et la littérature, je me suis laissé aller à mon penchant qui est de lire. On connait l’excellent ouvrage d’Emmanuel Leroy Ladurie sur le climat des mille dernières années qui démontre, amplement, que l’histoire est faite de périodes chaudes et froides. De même que les amateurs de la Rome antique liront avec profit Comment l’Empire romain s’est effondré. Le climat, les maladies et la chute de Rome, de K. Harper qui explique la fin de Rome par le changement de climat et l’apparition de pandémies (tiens donc). Mais l’amateur de sensationnel aime bien les curiosités. Ainsi en est-il, de l’Annuaire des longitudes de l’année 1834 où l’on s’appesantira sur l’étude rédigée par le célèbre savant François Arago qui s’y trouve entre les pages 171 et 240 (et qui est gratuitement consultable sur le site de la Bibliothèque Nationale de France – « gallica » pour les intimes).
Cette étude nous amène à jeter un regard nostalgique sur le passé et ses savants, même si l’on y sent que les préjugés d’alors (le climat était plus froid en Europe avant que maintenant) semblent aussi ancrés dans la psyché collective que le réchauffement « anthropique » de nos jours. Entendons-nous bien : il n’est nullement question de réfuter que les températures sont plus élevées aujourd’hui qu’elles ne le furent durant tout le cours (ou quasiment) du vingtième-siècle, mais ce constat soulève deux questions : dans quelle mesure ? et l’Homme y est-il pour quelque chose ? A mon sens, et si nous trouvons dans le passé, des périodes aussi chaudes que la nôtre, et ce alors qu’il n’y avait pas d’action de l’homme sur la nature (autre que la déforestation), alors la deuxième question devient (ou presque) caduque, en tout cas mérite d’être nuancée. Ce faisant, nous pourrions poser les vraies questions qui fâchent : celles de la pollution et de la destruction de notre monde pour satisfaire le seul enrichissement personnel (et partant la damnation) des pléonexes qui nous dirigent ; et qui ont quitté depuis longtemps le frêle esquif de l’Humanité pour ne le contempler que du haut de leur hélicoptère, se repaissant du spectacle de ce cloaque sans toutefois porter secours ni à ce radeau de la méduse, ni à ses survivants.
Avant de vous faire profiter de quelques bonnes feuilles de cet article, un simple exemple permettra de comprendre l’esprit de confusion actuel. On vous parle d’un côté des rejets de CO2 de chaque pays en tonnes ; mais de l’autre on vous donne le niveau de CO2 dans l’atmosphère calculé en PPM (parties par millions). Ce n’est pas moi qui ai découvert cette curieuse relation mais Christian Gérondeau. Ainsi donc les rejets annuels de CO2 représentent 32 milliards de tonnes, quand l’atmosphère en recèle… 3200 milliards (soit les fameux 417 PPM rapportés à la masse totale de l’atmosphère). L’action de l’homme est donc responsable d’un pourcent du problème (et même moins : 0,5% car la moitié du CO2 est absorbé immédiatement par la nature). La France, quant à elle, ne représente que 0,9% (en 2019) des émissions mondiales de CO2 : soit 1% de 1% ou encore 1/10 000 de l’ensemble des émissions ou 1/20 000 du CO2 qui n’est pas recyclé naturellement. Dit autrement : si la France ne produisait plus du tout de CO2 : la teneur en CO2 dans l’atmosphère baisserait d’un 1/10 000. Comme dirait les Shadocks : « s’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème ».
Revenons à François Arago, qui fait une chose intéressante : il ne prend pas les anciens pour des imbéciles, des affabulateurs et ne réduit pas leur parole à une quelconque mystique religieuse. Or, qu’apprend-on à la lecture des textes anciens ? Que le temps a beaucoup varié depuis l’invention de l’écriture. Quant à Arago, prenant diverses mesures, recensant divers ouvrages et déroulant son raisonnement, il estime que le climat n’a pas changé notablement sur la surface de la Terre (je résume à grands traits le fonds de l’article) ; la température moyenne de la Terre au début du XIXème siècle (laquelle est plus faible que la nôtre) n’aurait pas notablement variée sur les trois milles dernières années. Je me dois d’indiquer ces éléments afin que chacun se fasse une opinion, et juge en son âme et conscience. Avoir une opinion, ne disqualifie pas, par essence, celui qui pense l’inverse de vous, quand bien même essaie-t-on d’invalider cette opinion, ou à tout le moins de la nuancer, quitte à utiliser les sarcasmes ou l’humour. Encore une fois, entendons-nous bien : j’apporte des éléments qui me paraissent intéressants, je ne dis pas que j’ai absolument raison.
Ainsi au rayon des périodes froides, note-t-il que : « le fameux pont de Trajan, sur le Danube, était destiné, suivant Dion Cassius, à rendre en hiver le passage de ce fleuve facile, quand le froid n’avait pas congelé ses eaux. » (p. 211), s’ensuit une longue litanie de recension d’auteurs anciens quant à la mer et aux fleuves qui gèlent (cf pp 212 à 216) : En 1323, les voyageurs à pied et à cheval allaient sur la glace du Danemark à Lubeck et à Dantzig. En 1334, tous les fleuves d’Italie et de Provence se gèlent. En 1434, « la gelée commença à Paris le dernier jour de décembre 1433, et continua pendant trois mois moins neuf jours. Elle recommença vers la fin de mars, et dura jusqu’au 17 avril. Cette même année il gela en Hollande pendant quarante jours de suite ». En 1468, en Flandres, on coupe avec la hache la ration de vie des soldats. La Seine n’en finit pas de geler au XVIIème siècle (au moins une bonne dizaine de fois). En 1726 encore, on pouvait passer de Copenhague à la Suède en traîneau ! Ça fait froid dans le dos si j’ose dire.
Et voilà que ressort la frimousse du redresseur de tort à la petite semaine, autrement appelé propagandiste ou « débunker » : « ahah ! C’est bien la preuve que le climat se réchauffe et que nous y sommes pour quelque chose ! Courbe-toi donc, fier Sicambre devant la vérité scientifique ». C’est oublier un peu rapidement la cinglante apostrophe de Clémenceau qui, s’adressant au fielleux Ribot, lui lança : « cambre-toi, fier si courbe ! » Car on retrouve (pp. 228-229) : « Des documents agronomiques que je vais mettre sous les yeux des lecteurs me paraissent établir que, dans certaines régions de la France, les étés sont aujourd’hui moins chauds qu’ils ne l’étaient anciennement. Plusieurs familles du Vivarais ont conservé, dans leurs titres de propriétés, des feuilles cadastrales qui remontent à l’année 1561. Ces feuilles indiquent l’existence de vignes productives, dans des terrains élevés de plus de 300 toises au-dessus du niveau de la mer. […] pour expliquer ce fait, il faut admettre qu’en Vivarais, les étés, étaient plus chauds qu’ils ne le sont aujourd’hui ». Plus loin, Arago, se fondant sur la date de paiement des rentes foncières en vin, lesquelles devaient se faire « en vin de premier trait de la cave » estime que les vendanges avaient lieu fin septembre (soit environ une quinzaine de jours plus tard qu’aujourd’hui, pour du vin récolté… à 300 toises d’altitude). On ne sait en revanche rien des rigueurs de l’hiver car « Ces documens sont muets quant à la durée et à la rigueur des hivers […] »
Quelques éléments de contexte : le Vivarais correspond au département de l’Ardèche. 300 toises d’altitudes équivalent à environ 600 mètres (584,7 mètres pour les précieux). La majorité du vin produit aujourd’hui en Ardèche, l’est dans des vignes plantées au maximum à environ 400 mètres d’altitude.
Autre exemple page 229 : « On lit dans l’histoire de Mâcon, qu’en 1553, les Huguenots se retirèrent à Lancié (village situé tout près de cette ville), et qu’ils y burent le vin muscat du pays. Le raisin muscat ne mûrit pas assez maintenant dans le Mâconnais pour qu’on puisse en faire du vin. L’empereur Julien, résidant à Paris, faisait servir sur sa table du vin de Suresnes. Dieu sait la réputation dont jouit aujourd’hui le vin de ce cru. »
Plus étonnant encore : « Philippe-Auguste ayant voulu choisir parmi tous les vins d’Europe, celui qui ferait sa boisson habituelle, les vignerons d’Etampes et de Beauvais se présentèrent au concours. La charte ajoute, il est vrai, qu’on les rejeta ; mais peut-on supposer qu’ils auraient eu la hardiesse de se présenter si leurs vins avaient été aussi peu potables que le sont, à notre époque, tous ceux du département de l’Oise ? »
Encore plus déroutant (p. 231) : « Lorsque l’empereur Probus permit aux Espagnols et aux Gaulois de planter des vignes, il accorda la même faveur aux habitans de l’Angleterre. La faveur aurait été une véritable dérision, si dans ce tems-là la vigne n’avait pas fructifié de l’autre côté de la Manche. De vieilles chroniques nous apprennent, d’ailleurs, qu’à une certaine époque, la vigne était cultivée en plein champ dans une grande partie de l’Angleterre et qu’on y récoltait du vin. »
En bon « complotiste », je ne peux m’empêcher de reprendre le passage sur le Groënland (p. 232) :
« Il est certain que la côte orientale du Groënland (Green-land, contrée verte) était libre de glaces lorsqu’elle fut découverte vers la fin du Xème siècle, par un navigateur islandais ; que des norvégiens s’y établirent ; qu’en 1120 la colonie était nombreuse, florissante ; qu’elle faisait un commerce considérable avec la Norvège et l’Islande. On sait aussi qu’en 1408, lorsque l’évêque Andrew (c’était le 17è depuis la colonisation) allait prendre possession de son siège, il trouva la côte entièrement bloquée par les glaces et ne put pas aborder ».
D’autres analyses sont extrêmement intéressantes comme celle sur le climat en Toscane, ou celle sur les relevés des premiers thermomètres suite à la découverte de Galilée. Vous y apprendrez qu’en Toscane au XVIème siècle (p. 227) : « […] les étés, en Toscane, y étaient plus chauds qu’aujourd’hui [XIXème siècle NDR]. Les observations de Raineri présentent, en effet, cinq maxima de 37° ½ centigrades ; deux de 38° 1/10 et un de 38° 7/10 […] ». Soit des températures comparables à celle que nous subissons en pleine « ère de l’ébullition ». Et encore s’agissait-il des thermomètres de l’époque, bien moins précis que les nôtres.
Nous ne pouvons que conclure avec Arago, parlant de la chaleur des étés que j’ai citée plus haut (p.231) « Voilà, ce me semble, de quoi convaincre les plus incrédules qu’avec la suite des tems, les étés ont perdu, en France et en Angleterre, une partie notable de leur chaleur. Il nous reste maintenant à chercher la cause de cet inquiétant phénomène ». Le bon Arago, s’il vivait de nos jours en conclurait : scio me nihil scire (je sais que je ne sais rien).
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