Les américains et l’ISI ont toujours su où était Ben Laden (XIII)
Les premières tentatives d'explications du point de vue militaire ne suffisent donc pas, comme on l'a vu dans l'épisode précédent. Tout l'été qui a suivi le raid, l'année dernière, les critiques ont fait rage sur les incohérences flagrantes des récits dispatchés par les autorités. Un besoin d'unifier tous les propos officilels se fait sentir, pour couper court à ces critiques. Un homme a donc été recruté pour raconter la seule "bonne" version de l'intervention. C'est un journaliste "Freelance", Nicolas Schmidle, qui avait bénéficié en 2006 d'une bourse du Institute of Current World Affairs pour s'établir au Pakistan. Un choix, qui, on va le voir, ne devait rien au hasard.
Nommé au Pakistan pour y écrire comme correspondant de grands journaux des articles sur la vie locale, l'homme démontrera, en beauté que les autorités pakistanaises n'étaient pas prêtes encore à entendre certaines critiques : en janvier 2008, après 2 ans de présence, il avait en effet écrit sur place un article pour le magazine du dimanche inséré dans le New York Times, intitulé "Next Gen Taliban" un texte paru le 6 janvier. Un texte très bien rédigé, au demeurant, qui lors de sa parution, a plu à certains... et beaucoup déplu à d'autres. Il s'en était en effet pris au Maulvi Noor Muhammad, ancien responsable de la Shurah de Quetta et au groupe du Jamiat Ulema-e-Islam. Il avait accusé au passage les islamistes d'être responsables de l'assassinat de Bhutto "si la version du gouvernement est correcte" avait-il nanmoins précisé, écrivant qu'au contraire l'assassinat "avait rapproché les liens entre factions talibanes". Il décrivait surtout la présence talibane au Pakistan et la montée en puissance de Maulana Fazlullah, le leader du leader du Tehreek-e-Nafaz-e-Shariat-e-Mohammadi (TNSM), un cadre jeune du mouvement, celui qu'avait promu Abdul Rashid Ghazi, l'homme de la mosquée rouge. L'homme s'était allié au Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) de Baitullah Mehsud. Fazlullah (ici à droite) qui était un fanatique obtus, celui qui, dans les années 2006 s'en prenait à la diffusion de la musique comme blasphématoire, et avait lui-même créé une radio FM ne diffusant que de la voix et des préceptes religieux. Il s'était aussi opposé dans sa province à une vaccination anti-polio, comme étant "l'œuvre des juifs et des chrétiens". Les deux avaient été rendus responsables par Musharraf de l'assassinat de Bénazir Bhutto. Or on sait que ce dernier a été au minimum favorisé par Musharraf, qui n'avait pas assez protégé son convoi, sciemment, car au courant des préparatifs d'assassinat. En 2009, Mullah Fazlullah avait fait le chemin inverse des talibans habituels, en quittant le Pakistan pour rejoindre l'Afghanistan, dans a région limitrophe de Bajaur et celle de Mohmand. Avec lui, on avait assisté a une montée en puissance d'une jeune génération encore plus radicale de talibans, ce que dénonçait l'article de notre jeune auteur. Résultat immédiat, l'auteur de l'article, qui s'en était pris au gouvernement pakistanais et au rôle de l'ISI, s'était en effet retrouvé expulsé du pays au lendemain même où l'article était paru. Et c'est lui qu'on a choisi pour "emballer" la capture du siècle ! A vrai dire, comme propagande pro US vantant ses merveilleuses troupes de choc, il fera plus fort encore que dans son texte anti-tabiban (il se chargera aussi de ce cas la* ; il est vrai, dans lequel il minimisera le rôle des USA vis à vis du célèbre Viktor).
A le parcourir, en effet, dans les colonnes du New-Yorker, le 1er août 2011, on croit parcourir le scénario du futur film d'un Chuck Norris ! La "commande au New-Yorker passée par l'administration d'Obama demeure surprenante... à un détail près. Ce pourrait être en effet une forme de "droit de réponse" plutôt adroit, de la part de l'administration d'Obama, après une couverture ignominieuse mise en kiosque par le magazine trois ans auparavant, le président a peine élu : "la couverture du magazine du 21 juillet 2008 a provoqué une vive polémique aux États-Unis en pleine campagne présidentielle. Une caricature en pleine page représente le candidat démocrate Barack Hussein Obama et sa femme Michelle habillés, lui en terroriste musulman et elle en militante du Black Panther Party, se tenant dans le Bureau ovale avec un portrait d'Oussama Ben Laden au mur et le drapeau américain brûlant dans la cheminée. Le magazine s'est défendu en expliquant que c'était une critique satirique de la caricature que la droite conservatrice avait essayé de donner d'Obama" indique Wikipédia. Ouais... tout faire pour attirer le lecteur, dira-t-on plutôt.
L'article de Schmidle, sorte de patchwork de toutes les versions officielles précédentes, pour en devenit le document définitif sur la question, pillait en réalité largement le premier texte long sur le raid rédigé par Kimberly Dozier d'Associated Press paru le 17 mai 2011. C'est une correspondante qui avait été sérieusement touchée lors d'une explosion de roadside bombe le 29 mai 2006, et c'est aussi une spécialiste du contre-terrorisme, bien en cours à Washington et très respectée dans le monde journalistique. Elle présentait toutefois dans son texte une toute autre version que Schmidle, affirmant que la chute de l'hélicoptère avait bien eu lieue dès le début de l'opération et avait fait rater le plan initialement prévu, selon ce qu'elle avait appris des responsables militaires US en personne, qu'elle connaissait bien : "ajoutant de nouveaux détails exclusifs sur le compte de l'assaut de la planque de Ben Laden, les responsables ont décrit à quel point les raiders des SEALs ont crashé un hélicoptère devant la porte même de Ben Laden, ruinant le plan d'une attaque surprise. Ce qui les a contraints à abandonner leurs projets de diriger une attaque surprise sur Ben Laden - à savoir d'entrer dans la maison discrètement sur le toit ou le rez de chaussée en même temps. Au lieu de cela, ils ont surgi au rez de chaussée et ont commencé un assaut étage par étage de la maison, en arrivant au niveau supérieur où ils pensaient prendre Ben Laden - s'il était dans la maison-ou non". Retenons donc l'idée d'un assaut par le rez-de-chaussée et non par le haut de l'immeuble : or c'est cette version aussi que Schmidle va proposer. Pour elle donc, le crash de l'hélicoptère est d'emblée lors de l'attaque, l'autre devant se poser devant la villa à la place de larguer ces hommes sur le toit ! A un moment elle s'écrie "maintenant, le commando est dehors et l'effet de surprise est perdu !" Selon elle, chaque étape de l'opération était codifiée, et la lettre G était donc la 7ième, celle qui devait amener l'assassinat de Ben Laden. Une autre idée qui sera reprise par notre auteur. Elle indique que les hélicos, avec le corps de Ben Laden à bord, ont ensuite filé au retour vers la base de Bagram, d'après ce qu'elle avait pu apprendre. En réalité, c'est ailleurs...
A noter d'emblée que le texte de Schmidle débute par une illustration digne des jeux de guerre en 3D, signée John Ritter, souvent utilsé par le New-Yorker, et qui travaille en photo-illustration, mêlant clichés et peinture. On note que s'il ne se trompe pas de porte, au moins, dans son illustration, mais que son hélicoptère est un BlackHawk "normal", qui ne s'est jamais posé à cet endroit selon les voisins immédiats de la villa. Pourtant, dans son texte, l'auteur parle d'un appareil modifié, et même de deux. "Les Black Hawks, dont chacun avait deux pilotes et un membre d'équipage du 160th Special Operations Aviation Regiment, ou Night Stalkers, avaient été modifiés pour masquer, la chaleur, le bruit et le mouvement ; avec des parois extérieures à bord francs, et angles faibles, et ont été recouverts d'une "peau" qui amortit les ondes radar". La description est étrangement fidèleà celle des sites de "geek" qui ont rapidement proposé des images de l'appareil Stealth ; or comme je l'ai précisé, cette technologie de pans à facettes est ancienne. Voilà qui commence fort en tout cas : l'illustration trahit déjà le contenu du sujet ! A défaut d'avoir un texte qui se tienne, on avait choisi une illustration fort alléchante, faite par un artiste de renom, qui, cette fois-là, était resté bien dans les bottes des normes imposées par les militaires ; aucune fioriture, et aspect très nettement inspiré.... des jeux vidéos !
Pour ce qui est de l'appareil lui-même, si le cas du S-76 a pu être évoqué par votre serviteur, un élément des vestiges restés sur place démontre qu'on a bien à faire à une tête de rotor de Blackhawk. L'exemple est patent : que ce soit en provenance d'un MH-60S Knighthawk (S-70A) ou d'un HH60 des Coast Gard, la bielette de pas de chaque pale est bien la même. L'engin sous le rotor était donc bien de la famille. A part que sa cellule est entièrment partie en miettes. Si elle n'avait que brûlé, elle ne serait pas aussi fragmentée. Le tout étant de savoir qu'est ce qui a pu provoquer cette volatilisation catastrophique complète.
Il lui faut donc tout d'abord "expliquer" à sa manière le crash. Et sortir au plus vite de la réalité d'un crash d'emblée de mission. Pour ce fairer, il ressort tout d'abord la situation (connue) où un hélicoptère s'installe dans son propre vent rabattant et perd automatiquement de la portance (le "vortex ring", créé en bout de pale, lié donc à un dangereux "effet de sol"). "Lorsque l'hélicoptère a commencé à s'éloigner, le pilote a tiré sur le manche contrôlant le pas cyclique, qui contrôle le pas des pales du rotor, et s'est retrouvé avec un appareil qui ne répondait pas. Les hauts murs de l'enceinte et les températures chaudes ont provoqué la chute du BlackHawk, en le forçant à descendre à l'intérieur de son propre tourbillon créé une situation, une aérodynamique dangereuse pour un rotor, connue sous le nom de "settling with power." En Caroline du Nord, ce problème potentiel n'était pas devenu apparent, parce que le grillage à mailles-utilisé (à la place des murs d'enceinte) dans les répétitions avaient permis à l'air de circuler librement". C'est ici donc qu'on apprend qu'un décor correspondant à la villa à servi aux USA de décor d'entraînement pour l'assaut, ressemblant à la villa, à l'exception de l'usage de grillages pour simuler les murs (ce qui paraît assez ridicule à vrai dire). Les israéliens, on le rappellle, avaient fait de même, entièrement en dur,...sur les conseils des américains. "l’Urban Warfare Training Center, sorte de mini-ville arabe reconstituée, à faux minarets et fausses maisons cubiques, entièrement construit par non pas les israéliens mais par... des américains, en l’occurrence l’United States Army Corps of Engineers, venu bâtir cette ville de carton-pâte afin d’entraîner les soldats de Tsahal au corps à corps en situation urbaine ! Un clone de Ramallah aux portes du désert nous dit un site" avais-je alors précisé. On montrera plus tard au National Geospatial - Intelligence Agency (NGA) une maquette fort précise de la villa, "construite en 6 semaines", et "qui aurait servi aux Marines pour s'exercer" précisera-t-on. Aucun ceinture de grillage n'y figurera : si on a construit réellement un bâtiment similaire, on peut douter qu'on l'ai fait ainsi. Bien entendu, le jour où on divulgue le bazar, une année après le raid, on précise bien que ceux qui l'ont construite ne savaient pas qui habitait dedans : "parce que les détails opérationnels et la planification pour le raid de l'année dernière étaient quelques-uns des secrets les plus étroitement tenues au sein du gouvernement des États-Unis, le modèle était un secret bien gardé. Les informations sur la villa de Ben Laden on été si étroitement gardés que les analystes de différentes agences de renseignement ne savaient rien de l'information cloisonnée qu'ils étaient censés connaître. Il est probable que les modélistes de la NGA n'avaient aucune idée que le modèle qu'ils ont construit était celui du logement de l'homme le plus recherché de la planète".
Personne n'a vu à ce jour le remake du batiment d'Abbottabad en taille réelle, qui aurait servi pour s'entraîner. L'auteur, en l'évoquant, laisse d'emblée entendre clairement qu'il bénéficie de sources classées secret défense. Selon le Las Vegas Review Journal, le site existe bien et il est situé au Nevada, et non en Caroline du Nord : "Le site d'entraînement était un grand terrain appartenant au gouvernement dans une tronçon de désert avec une élévation équivalente à la zone environnant Abbottabad. Un bâtiment existant a servi comme maison de Ben Laden. Les équipages ont tracé un chemin parallèle à celui du vol de Jalalabad à Abbottabad. Chaque soir, après le coucher du soleil , des exercices commençaient", raconte le journaliste Keith Rogers. L'entraînement y aurait été fort court : une semaine seulement. Le Wall Street journal avait déjà enquêté sur des centres d'entraînement de ce type en mars 2010, avec comédiens gimés en talibans afghans et villages reconstitués. Un bidule créé par Strategic Operations créé par Stu Segall, ancien producteur de télévision et Kit Lavell, pilote décoré de la Navy ayant jadis effectué des missions au Vietnam. Un décor, donc, digne d'Hollywood.
Mais revenons en au crash de l'hélicoptère raconté par Nicolas Schmidle. "Un ancien pilote d'hélicoptère avec une vaste expérience dans les opérations spéciales a dit de la situation du pilote que "cest assez effrayant-j'ai en été victime moi-même. La seule façon de s'en sortir est de pousser le cyclique vers l'avant et voler hors de ce silo vertical ou de le traverser. Cette solution nécessite d'altitude. Si vous vous avez ce problème à deux mille pieds, vous avez beaucoup de temps pour vous en sortir. Si vous vous l'avez à cinquante pieds seulement, vous allez droit vers le sol". "Le pilote a abandonné le projet de faire descendre par la corde ses hommes et a choisi de se diriger vers le bas. Il a visé pour ça un enclos pour animaux dans la section ouest du complexe. Les SEALs à bord se sont préparés au choc au moment ou le rotor de queue a heurté en heurtant le mur de sécurité. Le pilote a dirgé le nez en avant de l'appareil vers le sol pour empecher de rouler sur le côté. Vaches, poules, lapins ont détalé. Avec la chute du BlackHawk dressé à un angle de 45 degrés à califourchon sur le mur, l'équipage a envoyé un appel de détresse aux Chinook qui tournaient au ralenti. James et les SEALs, dans l'hélicoptère deux ont regardé pendant tout ce temps la manœuvre en volant au-dessus du nord-est de la villa. Le second pilote, pas certain que ses collègues aient été la cible de tirs ou de problèmes mécaniques, en était resté à son plan de voler au dessus du toit. Au lieu de cela, il a atterri dans un champ herbeux en face de la maison." Personne, pourtant, dans les environs, n'a aperçu de deuxième hélicoptère se poser. Tous les gens du coins étaient venus voir pourtant ce qui se passait. A noter que pas un instant dans cette version, l'hélicoptère n'est l'objet de tirs, contrairement à ce que montreront beaucoup d'animations télévisées. L'hélicoptère, précisons-le, n'atterrit pas dans l'encols de la villa, mais dans le potager d'à côté.
On le voit, rien ne tient debout dans le récit. Le coup du vortex autogéré par un hélicoptère en milieu semi-fermé qui a déjà effectivement provoqué des catastrophes à beau être connu, il s'applique diffiicilement ici à ce grand terrain qui permet à l'air de largement refluer au sol. Comme la manœuvre du pilote consistant à faire plonger du nez son appareil : la première chose à faire, dans un hélico est de le maintenir à l'horizontale. Le coup de la queue qui reste coincée dans les barbelés au sommet du mur de ceinture ne passe pas la rampe, sa partie arrière restant accrochée à un mur de 4-5 mètres de haut.
A bord, en ce cas, les blessés auraient du être nombreux : l'angle fait non pas 45° mais au minimum 35, ce n'est pas rien, et le choc a dû être fort rude, même si la cellule de l'hélicoptère employée est plus résistante que celle des Blackhawks ordinaires. A noter que si c'était le cas, le rotor retrouvé calciné aurait dû garder une inclnaison forte, mais dans l'autre sens dans lequel on l'a trouvé... la photo des vestiges donne aussi une autre indication intéressante : le rotor est entièrement contenu dans le terrain, alors que selon la configuration expliquée par Nicolas Schmidle, les pales doivent ressortir du périmètre. L'une des pales, perpendiculaire au mur, le démontre : l'appareil est tombé à plat, la queue déjà séparée, laissant son cardan de liaison bien visible. Il ne s'est donc jamais retrouvé en porte-à -faux sur le mur. Le mur d'enceinte non abîmé à l'endroit ou repose l'élément de queue, à savoir à son sommet, indique que la "séparation" de l'arrière a été brusque, et nette. La résultante d'une explosion... en vol, séparant nettement la queue du reste de l'engin. Celle qu'ont confirmé les gens du voisinage. Fait notable également, les débris vus sur les vidéos prises par les habitants du quartier, encore en train de brûler ne sont pas très hauts : l'appareil s'est déjà "émietté" avant. Tout ce qu'il y a sous la tête de rotor a disparu sous lui. Passagers avec, dira-t-on. L'hélicoptère s'est répandu, volatilisé, partout dans le potager, dans le moindre recoin, avec des débris projetés à plusieurs dizaines, voire centaines de mètres au dessus du mur de ceinture de 5 mètres de haut. A la suite d'une énorme explosion. Pas celle de dynamiteurs désireux de ne pas laisser de traces. Une explosion obligatoirement catastrophique.
Comme ne passe pas le coup du deuxième appareil, seulement décrit pour permettre de tenir la théorie de la retransmission à distance de l'opération, le premier, crashé, ne pouvant plus rien émettre du tout. Tout le texte ne sert qu'à couvrir les différentes erreurs de com' du Pentagone ou de la Maison Blanche durant le raid.. et même après encore. C'est bien un texte de commande et non un texte journalistique auquel on a droit... ce qui va se vérifier plus loin avec brio.
Car nos fameux Marines, même dans un hélico planté par le nez, continuent leur mission comme si de rien n'était nous raconte Schmidle : "Après quelques minutes, les douze SEALs à l'intérieur on a retrouvé leurs réflexes et calmement relayé sur la radio qu'ils étaient toujours en course pour le raid. Ils avaient mené tant d'opérations au cours des neuf dernières années que peu de choses auraient pu les prendre au dépourvu. Dans les mois qui suivent le raid, les médias ont souvent suggéré que l'opération d'Abbottabad aussi difficile que l'opération Eagle Claw avec l'incident du "Black Hawk Down" mais le haut responsable du département de la Défense m'a dit que "ce n'était pas une mission sur trois seulement. C'était l'une des près de deux mille missions qui ont été menées au cours des deux dernières années, nuit après nuit. "Il a comparé la routine des raids du soir à " tondre la pelouse. " Dans la nuit du 1er mai seulement, les forces d'opérations spéciales basées en Afghanistan ont mené douze autres missions ; selon le fonctionnaire, ces opérations ont capturé ou tué entre quinze et vingt cibles. « La plupart des missions consiste à décoller, et après de tourner à gauche ," a-t-il dit. "Celui-ci a décollé et a tourné à droite." Je ne sais pas si vous avez déjà lu ce genre de prose, mais ça ressemble furieusement à du John Wayne, l'attaque du "compound" présenté comme une partie de plaisir ou aussi facile que de "tondre sa pelouse". La prochaine fois que l'herbe, chez moi, dépasse les 2,5 cm réglementaires, j'appelle les Navy Seals, c'est sûr ! Sans oublier le rappel lancinant de l'opération Eagle Claw dont l' Amérique d'Obama ne peut se permettre un second exemplaire à moins de connaître la même disgrâce que Jimmy Carter. Traumatisés, ils ont bien été traumatisés... mais pas encore vaccinés, ces américains. Car il ne fallait plus jamais montrer ça... même si ça se reproduisait un jour, en l'occurrence ce soir-là à Abbottabad ! L'empressement et l'insistance à citer Eagle Claw en référence est très suspect, dans les déclarations successives des responsables militaires US...
"Quelques minutes, après avoir heurté le sol, Mark et les autres membres de l'équipe ont commencé à sortir par les portes latérales de l'hélicoptère numéro un (on notera le délai d'extraction de l'engin de cette force de "réaction rapide", dont l'hélicoptère, coupé en deux, risque à tout moment l'explosion). "La boue collée à leurs bottes, ils ont couru aux côtés d'un mur de dix mètres de haut qui entourait l'enclos (l'enceinte fait au grand maxi 4,5 mètres, tout le monde a pu s'en apercevoir). "Une unité de démolition de trois hommes a atteint la porte fermée par un loquet de métal, et a pris dans des sacs des explosifs C-4, et l'ont posé sur les charnières. Après une forte détonation, la porte s'est ouverte. Les neuf autres Seals se précipitèrent, se retrouvant dans une allée, avec leurs dos à l'entrée principale de la maison. Ils se sont ensuite déplacés dans la ruelle, réduisant au silence leurs fusils pressés contre leurs épaules. Mark resté à l'arrière, quand il a établi des communications radio avec l'autre équipe". On notera l'usage d'explosifs, et la "forte détonation" première chose à faire pour se faire repérer : or, la porte sautée, nos Marines avancent toujours sans voir arriver personne... Il est des débarquements plus discrets il me semble. Les portes dont il parle sont celles, étroites, d'interconnexions entre portions de terrain (visibles sur le plan de la villa). Les portes extérieures resteront toutes intactes en fait. Lorsqu'on fouillera les décombres (ce sont les gamins du quartier, qui le feront) qu'ont laissé les bulldozers parmi les gravats de l'immeuble ayant soi-disant abrité Ben Laden, on fera comme découvertes des couches-culottes, des habits d'enfants, des débris d'ustensiles de cuisine, un flacon de médicament pour enfants ("Exifin for Kids" ?), un bout de cahier d'école (preuve que les enfants de l'habitation y allaient... et une gaine électrique (un toron de taille plutôt conséquente ! ). Démontrant que la maison était câblée en Ethernet.... et en laisons caméras, encore une fois tout le contraire de ce qui avait été dit sur l'équipement informatique supposé du maître des lieux !
"A la fin de l'allée, les Américains ont soufflé encore une autre porte verrouillée (ça fait DEUX explosions, mais ça correspond bien au plan montré !) et sont entrés alors dans une cour en face de la maison d'hôtes, où Abou Ahmed al-Koweïti, le courrier de Ben Laden, vivait avec sa femme et ses quatre enfants" (logiquement, dans la thèse officielle, chaque étage, rez de chaussée compris est occupé par une des épouses de Ben Laden)."Trois SEALs ont fait sauter la porte de la maison d'hôtes" (ça recommence, ils ont le C-4 bien facile, nos plongeurs !) "pendant que que les neuf autres passaient par une autre porte et entraient dans une cour intérieure, qui fait face à la maison principale (douze Seals seraient sortis de l'hélicoptère crashé ?). Lorsque la plus petite unité a tourné à l'angle pour faire face aux portes de la maison d'hôtes, ils ont repéré le koweïtien en train d'avancer à l'intérieur pour prévenir sa femme et ses enfants. Les Américains l'ont décelé à travers leurs lunettes de vision nocturne qui projetaient la scène dans les tons de vert émeraude pixélisées (la description fait catalogue pour fan de militaria, ou roman à la Delly vu sous Affelou période d'été). Al-Koweïti, vêtu d'un shalwar kameez blanc, avait saisi une arme et revenait à l'extérieur lorsque les SEALs ont ouvert le feu et l'ont tué".On est déjà à plusieurs explosions et tirs, et d'après notre auteur, Ben Laden est toujours en train de ronfler au dernier étage, si l'on suit bien ! Le Lexomil est aussi vendu au Pakistan, ou notre vigoureux grabataire sénile est en plein ébats amoureux avec ses 3 épouses ? Des silencieux au bout des canons, vous répondra-t-on : et quid du C-4 alors ?
Al Koweiti, c'est bien sûr ? Aucun des cadavres montrés ne correspondra en fait aux photos d'Al Koweiti. Cela n'empêche pas notre vaillant journaliste de continuer :"Les neuf autres Seals, y compris Marc, ont formé trois unités pour nettoyer la cour intérieure. Les Américains soupçonnaient que plusieurs hommes pouvaient être dans la maison (ah tiens, ils sont partis avec une liste des occupants potentiels, et un trombinoscope, en voilà des Marines bien préparés !) : Al-Koweïti, 33 ans son frère, Abrar, les fils de Ben Laden, Hamza et Khalid, et Ben Laden lui-même. Une unité SEAL n'eut pas plus tôt foulé sur la terrasse pavée à l'entrée devant la maison quand un homme trapu -Abrar-, moustachu, habillé d'un shalwar kameez crème-est apparu avec une AK-47. Il a été atteint dans la poitrine et tué, ainsi que sa femme, Bushra, qui se tenait debout, non armée, à côté de lui". Cela fait déjà trois cadavres, dont celui d'une femme. Ils ne semblent pas venu pour discuter, nos fameux Marines ! Même munis de silencieux, les tirs ou ceux des adversaires ont dû être entendus dans la maison, ou mêle à l'extérieur, pour les Kakachnikovs. A l'intérieur de la maison, difficile d'imaginer l'intrusion sans cris. Le hic, encore, c'est que de cadavre de femme, on n'en verra aucun...
Mais nos vaillants soldats sont prévoyants, ont même emmené un chien (appelé Cairo) et ont posté un homme dehors, au cas où, sorti on ne sait comment, car arrivé par la cour intérieure du potager, qui ne communique pas directement dans la rue, à moins d'ouvrir les grandes portes de la villa : "En dehors des murs de la villa, Ahmed, le traducteur, a patrouillé le chemin de terre devant la maison de Ben Laden, comme s'il était un policier en civil de la police pakistanaise. Il a regardé ce qui se passait vêtu d'un shalwar kameez dépassant au sommet d'une veste pare-balles. Lui, le chien Cairo en, et quatre Seals étaient responsables pour fermer le périmètre de la maison tandis que James et six autres Seals, l'autre contingent qui est censé être descendu sur le toit pour accéder à l'intérieur de la villa. Pour l'équipe de patrouille du périmètre, les quinze premières minutes se passèrent sans incident. Des voisins ont sans doute entendu les hélicoptères volant à basse altitude, le bruit d'un fracas, et les explosions sporadiques et des tirs qui ont suivi, mais personne n'est venu de l'extérieur". Quinze minutes de présence déjà... sans encore être monté à l'étage ??? C'est tout simplement aberrant : encore un peu et le maître chien effectuerait un pique-nique tranquille au milieu du chemin de terre devant la maison !
En fait, l"auteur, précautionneux, a beaucoup lu, visiblement sur ce qui a été dit jusqu'au moment où il a rédigé son propre "papier" ; il connaît donc l'épisode du "tweetiste" qui a raconté l'assaut en direct sur le réseau, qui nuit à la version officielle : "Un groupe local a pris note du tumulte dans un message Twitter : "Hélicoptère en vol au-dessus d'Abbottabad à 1 heure du matin (c'est un événement rare)."Finalement, quelques curieux se sont approchés pour en savoir davantage sur l'émotion de l'autre côté du mur. "Retournez à vos maisons," a déclaré Ahmed, en pachtoune avant, que le chien Cairo ne se montre. "Il ya une opération de sécurité en cours." Les habitants sont rentrés chez eux, aucun d'entre eux ne s'était douté qu'ils avaient parlé à un Américain. Quand les journalistes descendront sur la ville de Bilal dans les prochains jours, un habitant dira à un journaliste, « J'ai vu des soldats sortir des hélicoptères et s'avancer vers la maison. Certains d'entre eux nous ont dit en pachtoune d'éteindre les lumières et de rester à l'intérieur". Notre homme a donc aussi vu le reportage vidéo où le problème de la langue des "envahisseurs" a été noté. Or l'auteur a déjà eu des démêlés avec certains de ses confrères sur sa prétention à comprendre lui-même la langue locale (**). Il oublie en particulier qu'à cet endroit, c'est un autre dialecte qu'on utilise le plus souvent : c'est l'hindko pachtou, qui n'a rien à voir avec le pachtoune, paraît-il. Et selon le reportage vidéo du voisinage, les hommes sont entrès par la grande porte, laissé entrouverte, avant d'être chassés par ces militaires, et non après.
L'introduction du chien Cairo dans l'histoire est du storytelling bien mené : on pourra l'exploiter à l'infini, comme ici dans un article sur un site dédié aux animaux, où l'on affirme qu'Obama "voulait le rencontrer", ce fameux berger Malinois. Un chien lourdement équipé lui aussi... notamment d'une caméra... Or, si on regarde bien la provenance de la belle histoire.... c'est encore et toujours l'article du New-Yorker qui en est l'origine.... pour faire pleurer dans les chaumières en nous parlant de l'enterrement d'un Marines suivi par son chien, ils sont très forts, ces américains... un des fameux Seals, mort dans un accident survenu peu de temps après l'opération d'Abbottadbad... le 7 août 2011. Une coïncidence, bien entendu : nous en reparlerons bientôt, si vous le voulez bien. Il nous reste encore pas mal d'éléments à vérifier dans cette mascarade.
(**) "En effet, les Pakistanais qui ont passé toute leur vie dans le pays, de langue ourdou, ne peuvent pas comprendre le pachtoune et n'auraient jamais la prétention absurde de le faire. Comment M. Schmidle peut le comprendre, ou du moins interpréter, ce qui se passait à l'insu du pashtoune ou d'un traducteur ? Il me semblait que les choses n'étaient pas comme elles ont été signalées (par Schmidle)" note Christine Fair dans Registan .
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