Les Anglais sont des gens énervants
Les Anglais sont des gens énervants, car ils font toujours tout avant les autres. Ainsi, furent-ils les premiers à couper la tête de leur roi (Charles Ier Stuart en 1649) et encore les premiers à adopter une déclaration des droits (the Bill of Rights en 1689).
Plus près de nous, ils furent les premiers à confier à un musulman assumé un mandat électif de premier plan (Sadiq Kahn élu maire de Londres) ; alors même que les médias français ricanaient encore du dernier livre de Michel Houellebec « Soumission ». Et jeudi, ils furent encore les premiers à oser gifler la toute-puissante technocratie bruxelloise.
Pour que le pays d’Adam Smith (sans doute le plus libéral du monde) quitte l’UE, la construction la plus libérale du monde : c’est qu’il doit tout de même y avoir quelque chose de pourri dans le royaume européen…
Le premier problème, c’est bien sûr l’immigration. Les médias-médiocres n’arrêtent pas d’en parler en se pinçant le nez. L’Europe lutte mollement pour endiguer le flot des réfugiés. Mais si les Européens ne veulent pas des réfugiés, ce n’est pas parce qu’ils sont racistes, mais parce qu’ils savent très bien que ces réfugiés ne repartiront jamais chez eux - même une fois la guerre terminée. Et que par ailleurs rien ne sera fait pour les pousser à s’intégrer à la culture européenne, puisque le multi-culturalisme est devenu la règle. Les Européens dans leur grande majorité ne sont pas opposés à une Europe multi-raciale, mais ils ne veulent pas de cette Europe multi-culturelle.
Le deuxième problème concerne la répartition des richesses. Londres et l’Ecosse (régions riches) ont massivement voté en faveur du « remain » (60%), alors que tout le reste du pays a voté assez largement pour le « leave ». Londres est l’exemple type de la ville-monde telle que la décrit Eric Zemmour, davantage connectée au monde qu’à son propre arrière-pays. Ce divorce entre les capitales et leur territoire, entre les élites et le peuple n’est pas limité à la Grande Bretagne et il est lourd de menaces pour l’avenir.
Ce divorce est en grande partie le résultat de la précarisation croissante des travailleurs, résultat de la libéralisation à outrance de l’économie et du marché du travail. Une précarisation qui rend de plus en plus difficile la construction d’une vie stable, pourtant nécessaire à l’épanouïssement individuel et familial.
Le dernier problème de l’Europe est sa « germanification ». A l’origine, l’Europe était fondée sur une répartition des pouvoirs entre la France et l’Allemagne. A toi la politique et la diplomatie, à moi la monnaie et l’économie. Mais la perte dramatique d’influence de la France depuis les années Sarkozy-Hollande a laissé tous les pouvoirs à l’Allemagne. Ce dont ni les Anglais, ni les Français ne sauraient se satisfaire. Et cela se voit dans les enquêtes d’opinion puisque ce sont les deux pays dans lesquels le sentiment anti-européen est le plus fort. Et oui, n’en déplaise aux technocrates bruxellois, les peuples ont une mémoire et ni l’Angleterre ni la France ne veulent d’une Europe qui ressemble de plus en plus au Saint-Empire romain germanique finissant, avec tous ses défauts.
L’Europe était une belle idée. Elle aurait pu être une grande réalisation si elle avait su se forger une identité autour de ses racines communes, ce qui rendait nécessaire de se doter de frontières pour bien distinguer le « dedans » et le « dehors ». Si elle avait su parler d’une voix forte à l’extérieur. Au lieu de quoi, l’Europe est devenue une simple zone de libre-échange, le prototype d’un futur Etat mondial utopique gouverné par une technostructure hors-sol. Les peuples ont sanctionné cette construction lors du vote sur la constitution européenne en 2005. Mais au lieu de se remettre en cause, l’Europe est entrée dans une dérive anti-démocratique en s’asseyant systématiquement sur tous les votes populaires ultérieurs : vote sur le traité de Lisbonne (2008), vote de la Grèce (2015).
L’Europe récolte aujourd’hui ce qu’elle a semé. Et elle ferait mieux de balayer devant sa porte avant que de donner des leçons de droits de l’homme et de démocratie au reste du monde…
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