Les chiffres du Covid-19 ne justifient pas le couvre-feu. Bientôt une affaire d’Etat ?
0) Les décisions récentes de nouvelles restrictions, dont le couvre-feu, ne sont pas des décisions sanitaires mais politiques. Elles sont documentées par les chiffres mais aucun ensemble de données ne signifie par lui-même ce qu’il faut décider. Le couvre-feu a été décidé par le gouvernement sur la base des données remontées depuis les centres hospitaliers, complétées par le décompte des tests positifs. L’analyse d’une telle décision doit prendre en compte la complexité des choses. Globalement, cette grave décision est la conséquence d’une crise majeure, sans précédent depuis la guerre d’Algérie. Cette crise, je dis qu’elle est politique, dans le sens où c’est une crise de régime. Je ne vais pas analyser ici ce volet mais donner quelques éléments chiffrés récents permettant d’apprécier le cours de l’épidémie. N’oublions pas que krisis pour les Grecs anciens signifie jugement et décision. Je vous donne un élément pour juger. Le reste sera à venir.
1) Mon bulletin de la semaine dernière faisait état d’une décélération légère mais visible dans les chiffres des réanimations. Cette fois, la tendance s’inverse et nous sommes en phase de modeste accélération, pas encore visible sur le dernier bulletin hebdomadaire de SPF. Le nombre des nouvelles hospitalisations est en augmentation de 15% en semaine 41. Si nous étions dans la vague de mars, cette augmentation aurait été de 200 % au bas mot. En S41, le nombre de nouvelles admissions en réanimation est de 900, et donc sans changement par rapport à la semaine précédente dont le chiffre était de 890. En revanche, les nouveaux décès sont en croissance presque linéaire depuis quatre semaines, avec 450 contre 400, soit 22 %. Ces données sont à prendre avec circonspection puisqu’elles sont en décalage d’une semaine et ne prennent pas en compte la modeste accélération de la semaine en cours, à partir du 9 octobre. Modeste mais tout de même significative si l’on suit les derniers chiffres des réanimations.
Cette nouvelle accélération surprend mais elle se produit diversement selon les départements, avec des seuils et des dynamiques différents. L’explication est multifactorielle. Avec deux causes principales, pathologiques et sociologiques. Autrement dit la gravité des cas de Covid et le schéma des contaminations, spécifique du reste à chaque zone géographique, ce qui explique les grandes différences entre les métropoles touchées comme Paris, Marseille et les autres moins « secouées » comme Strasbourg et dans une certaine mesure, Bordeaux. On ne peut nier qu’une augmentation des réanimations se produit mais en revanche, on peut contester l’appréciation de gravité et même évoquer un principe opposé à la précaution, celui du risque sanitaire que l’on pourrait prendre pour faire en sorte que la vie de la société, culture, bars, spectacles, restos, sports, reprenne.
2) Le tableau qui suit vise à comparer en terme d’intensité clinique les deux phases du Covid-19, autrement dit la vague du printemps et la marée d’automne qui contrairement aux marées d’équinoxe, n’est pas d’un grand coefficient. Sur les premières colonnes, j’indique la progression des réanimations en cours (en gras) et les hospitalisations en cours (parenthèse) en prenant le début de la vague le 18 mars puis l’état de la situation le 25 mars. Ensuite, le pic clinique, atteint à peu près partout dans la première semaine d’avril. Cela montre l’accélération de la vague, sa rapidité et son intensité. La dernière colonne montre sur une semaine comment la marée monte, ce qui permet de comparer et d’apprécier s’il y a matière à s’affoler. J’ai juste eu un petit souci, ne pouvant pas disposer des chiffres du 15 octobre car apparemment, ils ne sont pas remontés depuis Santé publique France et ne sont donc pas enregistrés sur le site cascoronavirus.fr. Je ferai avec et décale d’un jour sans altérer la vision des choses.
18 mars – 25 mars Pic avril 7 octobre 14 octobre
Ile-de-Fr 294 - 1114 (960 - 3880) 2670 (13210) 453 – 524 (2490 – 2730)
Grenoble 2 – 16 (18 – 248) 66 (255) 27 – 39 (149 – 224)
Lille 26 – 76 (106 – 239) 280 (970) 75 – 93 (397 – 554)
Lyon 8 – 87 (36 – 570) 304 (1250) 80 – 97 (386 – 518)
Marseille 11 – 82 (100 – 370) 270 (1180) 136 – 143 (539 – 579)
Montpellier 15 – 36 (37 – 135) 80 (264) 40 – 47 (138 – 180)
Rouen 3 – 18 (30 – 125) 116 (364) 25 – 34 (156 – 217)
Saint-Etienne 10 – 40 (31 – 210) 107 (490) 35 – 46 (190 – 275)
Toulouse 5 – 36 (23 – 108) 108 (250) 33 – 50 (140 – 153)
Passons à l’interprétation de ce tableau à l’attention d’un lecteur possédant un QI dans la moyenne et une capacité à lire les chiffres.
a) Comparons la vitesse de la vague de mars et de la marée d’octobre. Les chiffres bruts ne doivent pas être regardés mais l’augmentation. En mars, elle était quasiment exponentielle alors qu’en automne, l’augmentation elle était quasiment linéaire, sauf pour les hospitalisations récentes dans quelques départements mais pas les autres (Marseille et Toulouse sont en linéaire). Globalement, pendant la vague de mars, en une semaine, on observe une multiplication hebdomadaire par un facteur 4, voire plus. Pendant la marée d’octobre, l’augmentation des réanimations est de 20 à 30 %, un peu au-dessus à Toulouse et en dessous à Marseille. Ces derniers jours, une accélération modérée est à signaler puis à confirmer, à moins que cela ne décélère d'ici une quinzaine.
b) La comparaison avec le pic d’avril montre quelle est la marge de manœuvre. Il faut prendre en compte l’ampleur de la vague. Lyon, et Marseille ont été moyennement affectées, contrairement aux départements du Grand Est et de Paris. A Marseille, la marée pourrait bientôt atteindre un seuil. Au vu de la montée, il y a du temps avant que les 270 réanimations d’avril ne soient atteintes, pour autant qu’elles le soient. Dans toutes les métropoles, il y a une marge de manœuvre très importante. Il n’y a aucun risque que le pic d’avril ne soit atteint, ni la moitié. En revanche, Grenoble et Montpellier pourraient voir le pic atteint mais ce constat est un trompe-l’œil. Les chiffre d’avril ont été relativement bas dans ces départements de quelque 1.2 M.h. ; respectivement 66 et 80 réanimations.
c) Le nombre des hospitalisations est un chiffre à surveiller mais son évolution erratique défie l’entendement. Seules les données consolidées sont significatives car les chiffres donnés au jour le jour sont baisés. Une proportion non négligeable de patients sont enregistrés comme cas suspects de Covid. Il faut aussi prendre en compte le principe de précaution et la gestion locale. Un clinicien décidera de renvoyer un patient chez lui alors qu’un autre pourra le garder un ou deux jours de plus. Surtout si l’hôpital dispose de lits disponibles. Dans certains départements comme la Seine maritime, l’Isère ou l’Hérault, l’augmentation des hospitalisations se traduit par une cassure vers le 4 octobre. Les réanimations suivent avec un décalage. Il devrait y avoir une augmentation sensible mais sans aucune certitude. Dans quelques départements, les courbes sont équivoques. Cette épidémie continue à nous dérouter
d) Le diable étant logé dans les détails, j’espère que le défaut des chiffres du 15 octobre est dû à un dysfonctionnement de Santé publique France et que la situation va se rétablir prochainement afin que nous puissions apprécier la réalité de l’épidémie.
e) Le diable étant pluriel, je note une question sur le décompte. Les patients en soins intensifs sont comptabilisés en réanimations, ce qui, selon une source dans le monde médical, conduit à gonfler modérément les chiffres.
3) Que conclure ? Je n’ai pas parlé des tests positifs et des cas de « je ne sais quoi » régulièrement annoncés dans les médias. C’est une erreur à mon sens que de se focaliser sur la circulation d’un virus qui ne peut pas être stoppé, même avec un couvre-feu. En revanche, il faut insister sur le suivi des symptômes et des malades, en testant notamment la température, ce qu’a fait depuis des mois l’Italie sans que l’on ne sache si ce détail explique en partie les bons résultats dans ce pays. La décision de nouvelles contraintes ne se justifie pas. Je parle en citoyen politisé et non pas en scientifique. La science regarde les chiffres, le politique décide en fonction des éléments dans la balance, du risque et des buts poursuivis.
Ce qui est passe dans ce pays est grave et relèvera peut-être d’une affaire d’Etat. Le propos que je tiens n’a pas de valeur définitive, ce n’est qu’une opinion provisoire. Je pense que le régime poursuit une sorte d’expérience de Milgram à l’échelle nationale, visant à stopper un virus, contenir une épidémie, sans se préoccuper de la vie des gens, fracassée, massacrée. Une expérience inédite, menée avec une autorité scientifique contestée et une peur généralisée qui elle, est un ressort essentiel dans cette expérience, pour autant que la peur puisse être un ressort. La doctrine du régime a changé depuis mai. Au printemps, il fallait affronter la vague. En automne, il faut réduire la circulation du virus. Véran a décrété qu’il ne fallait pas mourir avec le Covid, ou du moins, le moins possible ; avatar s’il en est du biopouvoir théorisé par Foucault. Le régime veut se prouver qu’il peut réussir à tout prix, qu’il a bien géré la crise, puis justifier la nouvelle application après le fiasco précédent de Stopcovid et pour se faire, n’hésite pas à employer les mesures les plus contraignantes pour parvenir à un but qui sert en priorité le régime, son appareil, la secte scientifique qui s’y est greffé, et non pas le bien public devenu secondaire. C’est grave ! Si tel est le cas, il faut entrer en opposition (autour de moi, certains parlent de résistance).
Les chiffres ici
https://www.cascoronavirus.fr/
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