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Les derniers jours d’Arkalao

Les derniers jours d'Arkalao

Il n'existe pas d'autre légitimité pour me décrire comme 
« individu faisant (une) œuvre, cultivant ou maîtrisant un art, un savoir, une technique, et dont on remarque entre autres la créativité, la poésie, et l'originalité de sa production, de ses actes, de ses gestes. »

 

Quelques décennies de ma petite histoire

Ma brillante carrière a commencé à 15 ans quand j'ai appris la guitare et fait vibrer mes cordes vocales, ce qui m'a conduit a jouer dans les baloches de la région. Pas glorieux, mais payant à l'époque, puisque le cachet d'une soirée représentait le sixième d'un SMIC mensuel.

Puis j'ai écrit mes premières chansons que j'ai interprétées sur les terrasses de bistrot et dans les soirées cabaret des associations.

C'est à cette époque que j'ai créé L'art d'oser, une association dont le nom était tout un programme.
Ayant épousé plus tard le noble métier d'animateur, j'ai communiqué avec le monde culturel, et bien connu l'effervescence autour de nouvelles formes d'action, notamment en direction des jeunes et des quartiers défavorisés, Merci Jack.

Je suis intervenu particulièrement dans ce qu'on appelle la lutte contre l'illettrisme, en utilisant les ressources créatives de l'atelier d'écriture informatisé créé par mes soins. 
   
Puis, les technologies évoluant, j'ai pu développer mes talents d'auteur-compo-interprète grâce à la MAO (musique assistée par ordinateur) et le home studio.
Ma troisième entreprise a été créée pour proposer de la musique numérique pour l'internet, malheureusement un peu trop tôt (à cause de la lenteur de la transmission numérique).
Puis j'ai créé Chante-mémoire, ma quatrième entreprise, dont l'objet était d'animer la part immatérielle du patrimoine qu'on appelle la mémoire collective.
De cette expérience, il me reste deux albums de chansons, qui ont été exploitées pour les journées du patrimoine.
Par goût pour les poètes trop mal connus et la chanson française, j'ai mis en musique Gaston Couté et Bernard Dimey, 
J'ai également, en plus d'un album personnel, écrit des musiques pour d'autres auteurs, dont une douzaine pour une amie libertaire, qui chante sous le nom de fanFan - majuscule au milieu -, et qui est aussi éditrice (Wallâda).


Je me suis par la suite piqué d'art plastique et j'ai beaucoup créé dans le style que j'ai appelé « Subconscient abstract », des toiles, des sculptures, du récup'art... 
J'ai pu observer, de l'intérieur et de l'extérieur, la dégradation de la situation d'artiste non-commercial.
Que ce soit dans la chanson comme dans la musique, celui qui veut créer et diffuser doit, en plus de son talent d'artiste, développer des talents dans la communication, le commercial et surtout accepter de se « ...décortiquer, se déshabiller », de « donner en spectacle à n’importe quel prix ce qu'il a de plus précieux, de plus original... » (bien observé par Bernard Dimey).
Je me souviens aussi de la surprise générale lorsque j'ai signé un article sur le cas particulier des artistes allocataires du RMI, et de l'étrange réponse des autorités compétentes en matière d'insertion : selon les cas, obligation de chercher un « vrai travail » ou une formation à la comptabilité ! 

Il y a deux façons d'exercer son talent en tant qu'artiste, qu'on soit amateur ou professionnel.
La première consiste à chercher, à se questionner sur les émotions qu'on souhaite exprimer et sur des supports, des matériaux et des techniques originales, qui peuvent aller jusqu'à une apparente folie.
La seconde consiste à chercher à plaire, à être dans l'air du temps, à la limite penser « étude de marché » avant que de faire. Je pense être de la première catégorie qui est la plus créative, mais certainement la moins rentable, ne caressant 
pas le public dans le sens du poil.Je sais que je ne suis pas seul dans ce cas. Je sais aussi que le goût du « public » est de plus en plus formaté et standardisé.
J'ai effectivement chanté et exposé dans des lieux divers et variés, et constaté au fil du temps que l'exercice devenait au fil du temps de plus en plus difficile.
Une expo ou un cabaret nécessite un travail important sur le plan matériel et artistique et le résultat est souvent décevant dans le sens où le public est difficile à tirer, ceci dû au manque de notoriété du lieu d'accueil sauf à l'obliger à une consultation sur le smartphone où il est rivé en permanence. Quand à lui faire mettre un sou dans le chapeau ou dans une oeuvre….
 
C'est sur la base de ce constat que j'ai créé Arkalao.

Puisque l'exercice est si difficile chez les autres, j'ai décidé de la faire chez moi et plus, d'aller provoquer le public là où il se trouve.
J'ai donc aménagé cette vieille caravane de façon très visuelle, avec mission de pouvoir intervenir rapidement pour les deux choses que je sais faire : exposer mes œuvres et chanter mes chansons, et effectivement le concept à fonctionné dans des fêtes locales, à la fête de la musique, en accompagnement de concert …
En toute modestie, je l'ai intitulé mocdestement « le plus petit musée d'art contemporain du monde ».
« Quelle bonne idée ! » c'est le compliment que j'ai le plus souvent entendu.
C'est vrai que poser une roulotte dans un lieu très fréquenté permet de toucher quelques milliers de personnes, alors qu'une expo dans une « tour d'ivoire » locale, c'est 50-100 personnes au vernissage(dont la moitié sont des amis) et quelques dizaines par la suite.

Après deux années d'expériences, je me sens las. Non que j'ai perdu le « feu sacré » puisque j'ai quelques projets mais las de toujours devoir solliciter, tenter de convaincre, sans jamais de vrai retour positif. Le fait que je sois dans ma ville natale (Arras) qui n'a aucune politique de développement culturel et se montre incapable de retenir ses artistes est un facteur aggravant.

La dernière braderie ou l'autodafé ?

Et puis il y a le problème dont je souhaite témoigner.
Je commence à faire partie des vétérans, j'ai déjà vu la camarde de près (AVC) et je me questionne sur la fin. Pas la mienne, celle du stock d’œuvres qui dort dans mon grenier et qu'il faudra vider un jour.

Si cela se fait après moi, je crains le pire ! Tiens ! la déchetterie par exemple où l'on orientera peut être les récupérables vers la recyclerie à un prix proche de zéro ( les artistes connaissent bien le lieu).
On me conseille d'organiser une grande braderie qui me permettrait de devenir enfin mon propre épicier.
Ne vaudrait-il pas mieux allumer un grand feu ?

http://arkalao.chez.com/
http://wallada.free.fr/


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3 réactions à cet article    


  • Taverne Taverne 16 janvier 2018 16:31

    Quand vous ne serez plus qu’un cerf vidé, vous irez quand même au cimetière des zélés faons. Et, dans votre Arka-Là-Haut, vous y verrez Gaston, quoi qu’il doive vous en Couté, et Bernard même si cela tombe un Dimey.


    • Florent Arty 23 janvier 2018 23:32

      Le processus créatif ne se suffit pas à lui même dans la vie d’un artiste, l’artiste doit être accompagné pour être montré et vu. Ce n’est pas une fatalité mais une simple banalité qu’il faut prendre au sérieux pour atteindre l’accomplissement.


      • Florent Arty 23 janvier 2018 23:43

        Quant à ta vision dont tu nous fait part sur la vie culturelle arrageoise, je ne peux que malheureusement approuver. Néanmoins c’est ce combat qui m’anime, j’espère changer les choses pour servir « enfin » l’intérêt général. Je n’y arriverai probablement pas, mais comme dirait l’autre ce qui compte c’est pas l’issu mais c’est l’combat !


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