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Accueil du site > Tribune Libre > Les élections et la corruption en Roumanie, un jour sans fin (...)

Les élections et la corruption en Roumanie, un jour sans fin ?

Un peu comme Phil Connors, j'observe les élections de ma patrie comme une réitération infernale dont tous les efforts pour changer de destin restent vains. Dans ce scenario préécrit, je m’attendais à une couverture médiatique internationale. Pourtant, il n'en fut rien. Pis encore, j'ai été étonnée de voir le manque flagrant d'intérêt des medias français concernant les élections présidentielles en Roumanie, ce pays qui, pourtant, reste quelque part dans ses entrailles, francophile, par sa culture latine et son histoire emmêlée. Les noms de Louis de Funès, Henri Berthelot ou encore de Jean-Louis Calderon font partie de la chair des deux pays. Les medias français ont peut-être décidé, eux, de quitter la scène, las de revivre le même jour.

Je sais l'image de la Roumanie devenue, depuis quelques années, très mauvaise. C'est probablement plus accrocheur pour l'information de ne voir que les délinquants et toutes les choses négatives par ailleurs. A l'inverse, voir le succès des médecins, des physiciens, économistes etc. qui sont venus remédier à la pénurie française des professions ou encore les simples ouvriers, femmes de ménage et autres travailleurs honnêtes, qui suent de toute leur peine pour gagner chichement une situation ; ceux qui participent à faire tourner l'économie française n'intéressent pas, il est plus vendeur de ne montrer que le vice. Or ce vice là ressemble fort à de la vanité de la part des medias.

Je sais aussi que la différence entre un cirque de pacotille et les élections roumaines souvent n'est pas très visible. En 2009, le candidat de gauche, Geoana, proclamait sa victoire à l'élection présidentielle le soir de celle-ci, arborant un large sourire de contentement intérieur face aux cameras des télévisions nationales. Or le lendemain dès l'aube, c’est son adversaire, président sortant de droite, Basescu, qui remporte les élections après une folle nuit de recompte des votes, à la bougie.

Cette fois-ci, le peuple a voulu être entendu sans compromis, une fois pour toute. Voici donc mon récit du déroulement des élections de cette année :

Les candidats, ont été, comme d'habitude, un représentant de la gauche, Victor Ponta, actuel premier ministre de 42 ans et favori annoncé, et un candidat de la droite, Klaus Iohannis, roumain d'origine allemande, maire de Sibiu (ancienne capitale européenne de la culture) et représentant de l'alliance de droite ACL soit l'alliance entre le parti national libéral PNL et le parti démocratique libéral PDL qui est le parti de l'ancien président de la Roumanie, Basescu.

Victor Ponta, le premier ministre en cohabitation avec Basescu, a été soutenu par des pontes, des éléphants diraient les commentateurs français, du Partid Socialist Democrat. Mais beaucoup de ces pontes sont impliqués dans des affaires de corruptions majeures. Ainsi, malgré sa jeunesse et en dépit d'un début de carrière placé sous le signe de la lutte contre la corruption, le soutien de politiciens empêtrés dans de sales affaires lui aura été fatal dans cette course au pouvoir présidentiel. 

Klaus Iohannis, quant à lui, est membre du parti de droite PNL. Un parti qui se veut de droite libérale mais qui pour autant n'hésite pas à changer son fusil d'épaule, en fonction des sondages ou autres arrangements mystérieux. Pour preuve, si ce parti s'est assez logiquement associé dans une alliance avec celui du président sortant, le PDL, la logique fut toute différente lors des précédentes élections car, par une alliance improbable avec le PSD, il s'opposa à l'élection de son actuel allié. Cette situation cocasse n'est pas sans rappeler le slogan touristique de l'ancienne et sulfureuse ministre Elena Udrea : "la Roumanie, le pays de toutes les possibilités". C'est sans doute la seule constance qu'il ne faut pas oublier. Enfin, Klaus Iohannis est appelé par des les roumains ' l'allemand ' du fait de son appartenance a la minorité allemande de Transylvanie. 

Lors du premier tour, Victor Ponta obtint 10% de plus que son candidat Iohannis et aborde donc le second tour comme favori. Mais une erreur lui sera fatale et changera complètement le cours des élections : l'organisation des élections dans les ambassades et consulats roumains partout dans le monde. J'ai dû, pour ma part, patienter plus de 4heures à la queue de l'ambassade roumaine à Paris pour pouvoir exercer mon droit constitutionnel. 4 heures ! Cette organisation déplorable a généré un violent sentiment de haine a l'égard du premier ministre Ponta. Un sentiment si fort, ressenti au delà de la diaspora qui a déclenché une campagne en ligne sans précédent sur Facebook surnommée en quelques heures " l’automne roumain".

Des milliers des vidéos du monde entier sont venu montrer comment ont été humiliés mes compatriotes à des queues interminables, sous la pluie et dans le froid, obligés d'attendre pour exercer leur droit fondamental. Cette campagne internet inhabituelle pour un peuple qui se mobilise peu s'est dès lors transformée en chasse à l'homme. Peu importe le programme politique, il fallait abattre Ponta, à tort ou à raison, en votant contre le' communiste'.

La campagne a été violente, elle n'est passée que par une insulte pitoyable "Puie monta" proférée à l'adresse du Premier Ministre et de son parti. J'en ai été très gênée car une forme de boule de neige véhémente s'est mise à grossir, récoltant par mimétisme, toutes sortes de votants convertis sur Facebook à un mouvement sans tête. C'était sans doute "cool" d'insulter. 

La diaspora est parvenue à mobiliser un pays entier qui est sorti voter pour leur futur, contre Ponta, et Iohannis en est sorti gagnant avec 57% lors du 2ème tour. La surprise n'est que moyenne car les roumains font plus confiance aux allemands et aux étrangers en général qu'à eux même.

Iohannis est un personnage sérieux, modeste qui, même s'il ne parle pas le roumain correctement, a gagné les cœurs des roumains. 

Mais, quelques questions se posent :

  1. Que fait-on avec les corrompus de droite qui sont au pouvoir depuis plus de 10 ans et qui n'ont jamais été punis ? Iohannis est-il capable de se battre en interne pour punir à égalité ceux de droite et de gauche qui ont détruit les finances du pays ?
  2. Que va-t-il se passer avec Basescu, l'ancien président de droite qui a fait tant de mal à un pays entier pour ses propres intérêts et celui de sa fille, la Paris Hilton de Roumanie ? Moi, comme beaucoup d'autres, je m'interroge sur le niveau d'indépendance du nouveau président ? Ne serait-il-pas, comme Medvedev en Russie, une sorte de marionnette agitée par les ficelles de Basescu ?
  3. Pourquoi cette campagne en ligne a été si violente verbalement ? Une vindicte populaire s'est installée et l'intelligence a disparu devant le plaisir sadique de faire mal. Faut-il rappeler à tous que la démocratie signifie, avant tout, le respect ?

Mes mots sont indépendants de la droite et de la gauche. J'ose espère de l'impartialité, de l'égalité et de l'intelligence dans la gestion des affaires publiques.

 

Affaire à suivre.


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3 réactions à cet article    


  • alinea alinea 20 novembre 2014 20:35

    Ne me dîtes pas que la gauche n’est pas passée parce que les élections ont été mal organisées dans les ambassades ?
    Le premier ministre est donc à ce point responsable de ce qui se passe dans les ambassades de son pays ?
    Bon ; de toutes façons, je ne comprends pas que ceux qui ne vivent pas dans un pays y votent alors que d’autres qui y vivent ne votent pas ! ou que les mêmes ne votent pas dans le pays où ils vivent !!


    • Sonya V... Sonya Vardikula 20 novembre 2014 20:58

      Merci Marinela !

       
      C’est à croire que les élections servent uniquement à humilier la population et à renouveler les acteurs de la corruption...
       smiley 


      • Sonya V... Sonya Vardikula 20 novembre 2014 21:09

        Bien vu pour Phil Connors ! 

         smiley 

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