Les explorateurs du net
Il ne doit rien y avoir de plus exaltant que d'être un pionnier dans un domaine, d'ouvrir une voie, qu'elle se situe dans l'Himalaya, dans les domaines de la technologie, des sciences, des Arts, de l'architecture... Innover soi-même, être l'inventeur (peut-on dire "inventeuse" ?) ou faire partie des premières personnes à tester la chose nouvelle, avec souvent les plâtres qu'il faut accepter d'essuyer. On peut inventer soi-même un logiciel, ou se jeter sur les versions Beta dès qu'elles sont sorties. On peut aussi choisir d'attendre prudemment que le concept ait fait ses preuves ou ait été amélioré. Les deux attitudes se valent tout à fait, il n'y en a pas une qui, à mon sens, ait plus de mérite que l'autre.
Pour ceux qui connaissent l'histoire de l'URSS, le terme "pionnier" renvoie à ce mouvement politique dans lequel étaient enrôlés (probablement sans leur laisser le choix) les jeunes de 9 ou 10 ans jusqu'à l'âge de 14 ans. Pour d'autres, le terme "pionnier" évoque plus la conquête de l'ouest américain.
En France aussi, nous avons eu nos pionniers en ce qui concerne la conquête d'un territoire. Notre conquête de l'ouest parisien a vu les tous premiers résidents et les toutes premières entreprises s'installer à La Défense dans les années 60.
Erigée durant les trente glorieuses, La Défense symbolisait alors tout l'espoir que l'on plaçait dans le progrès industriel, scientifique, économique, technologique, progrès dans la vie quotidienne... à cette époque autrement plus optimiste (ou idéaliste, utopiste, à chacun de voir...) que la nôtre.
Les détracteurs de La Défense pourront continuer leur vie entière, si ça leur fait plaisir, à dire du mal de cette "ville" et la dénigrer, ça ne me fera jamais changer d'avis sur le fait que je l'adore et que je la trouve géniale. Je pars du principe que l'on ne dénigre que ce que l'on ne connait pas. Quand on connait bien quelque chose, on en fait une critique constructive.
C'est pourquoi j'entretiens régulièrement, à coup de lectures, mon immense intérêt pour ce territoire de l'ouest parisien, qui a fait partie de mon quotidien en 2011. J'aime son architecture, et j'aime particulièrement son histoire, d'abord parce qu'elle est passionnante, et peut-être aussi parce que je regrette de ne pas avoir fait partie de ces gens qui ont vécu ou travaillé à La Défense dès les premières tours ou logements sortis de terre, dans les années 60. (1)
Quelle impression extraordinaire cela doit être de s'installer dans une ville encore à l'état de projet, encore à peine sortie de terre, et de savoir que tout se construira là, devant vos yeux ! Certes, les premiers habitants ont subi les chantiers incessants, les premiers employés (je pense à ceux d'Esso) ont subi la gadoue, mais si l'on pointe sa longue vue en direction de l'avenir et que l'on y regarde d'un oeil positif et enthousiaste, être les premiers à vivre dans une ville que l'on veut futuriste et exemplaire a dû être une expérience unique.
C'est d'ailleurs ce que disent eux-mêmes les principaux intéressés, dans l'excellent livre des éditions Autrement, "La Défense, l'avant garde en miroirs", paru en 1992 (donc il y a un bout de temps déjà), où la parole est donnée à certains habitants ou employés de longue, voire très longue, date. Ils affirment notamment que des liens sociaux très forts unissent les voisins de ce quartier, qui se connaissent bien entre eux, et qu'ils entretiennent une véritable convivialité. La convivialité peut exister dans tous les quartiers, évidemment, et la plupart du temps elle existe, mais dans le cas de La Défense, que l'on croit toujours, à tord, froide et impersonnelle, cela devait être en partie dû à l'impression de faire partie d'une communauté un peu à part.
J'aurais, moi-aussi, aimé essuyer les plâtres de La Défense, voir sortir les tours de terre les unes après les autres (je me suis rattrapée par la suite avec certaines), participer, à mon petit niveau, à l'élaboration de ce grand projet. J'ai toujours aimé, jusqu'à une certaine fascination, les grands projets, bien qu'ils soient souvent, à tord ou à raison, au centre de nombreuses polémiques. Ils permettent en effet de regarder, et d'envisager, l'avenir avec enthousiasme et optimisme. Il est sûr que l'on se trompe, parfois, et l'avenir que l'on avait vu rose s'avère alors décevant dans le présent, mais je crois qu'il reste toujours quelque chose, une trace, un souvenir, de l'optimisme que l'on a ressenti, et il peut, si on ne lui tourne pas le dos, nous aider à avancer, nous porter littéralement vers l'avant.
Pour une autre raison, j'aurais aussi beaucoup aimé fréquenter la Cité des Sciences et de l'Industrie dès son ouverture, en 1986. Je passe mon temps à le dire. Ce fut le coup de foudre immédiat lorsque je l'ai visitée pour la première fois en 1991, et j'ai alors regretté toutes les expos, sans aucun doute formidables, que j'ai ratées. Toutes ces connaissances, cette ouverture sur le monde, que je n'avais pas pris la peine de venir explorer !
Plus généralement, c'est cette impression d'avoir raté les tous débuts de quelque chose qui me déplait.
Cette impression, je l'ai également eue avec Internet, je veux dire plus exactement le World Wide Web (expression d'où provient notre www que l'on tape pour les adresses de site), qui a été diffusé dans le grand public en France à partir de 1994. Oh, je n'ai pas perdu trop de temps, cette fois, car la première fois que j'ai vu un ordinateur connecté à Internet et que j'ai voulu me plonger dans cet univers, c'était en 1996, dans une bibliothèque universitaire où j'aimais me rendre. Je n'ai pas trop compris comment cela marchait. J'avais entendu parler d'Internet, mais c'était la première fois que j'étais en contact avec ce système. L'écran, que l'utilisateur précédent n'avait pas pris la peine de fermer, montrait un site américain au sujet de je ne sais plus quel sport, football américain ou baseball. Je voulais voir s'afficher autre chose, mais je ne savais pas comment m'y prendre pour changer de site. Je demandai à une étudiante qui passait par là si elle savait comment changer de site et regarder autre chose, mais elle ne le savait pas plus que moi.
Je fus intriguée au point qu'Internet devint presque une obsession. Il fallait absolument que j'utilise ce truc ! Je retournai deux fois dans cette bibliothèque dans le but d'obtenir une chaise devant cet ordi connecté mais, chaque fois, l'ordinateur était occupé par un étudiant au travail, que je n'osais pas déranger pour demander qu'on me fasse une démonstration.
Heureusement, quelques jours plus tard, un membre de ma famille ouvrit une connexion à domicile chez un fournisseur nommé Worldnet, et me montra comment utiliser la chose. Ce fut comme une révélation. J'eus l'impression que de nouvelles portes sur le monde venaient de s'ouvrir, et je repensais alors à la réaction d'Helen Keller lorsqu'elle comprit que le signe de la main que lui faisait répéter son éducatrice désignait en fait l'eau contenue dans la tasse qu'elle tenait. Un objet, une chose, égal un mot. Cette révélation la fit sortir des ténèbres dans lesquelles elle était enfermée. Elle pouvait désormais communiquer !
Je pris quelques semaines plus tard une connexion à mon propre domicile et devint presqu'instantanément une fan de l'Internet. (Au fait, vous vous souvenez du son qu'émettait le modem lorsqu'il se connectait ?)
Vingt ans plus tard, je ne peux que faire le constat qu'Internet a révolutionné le monde. Peut-être même plus encore que l'invention de l'imprimerie, à laquelle on compare souvent son arrivée dans nos sociétés. Un second "pas de géant pour l'humanité" ?
Internet a changé non seulement les rapports que les citoyens ordinaires que nous sommes entretiennent avec le savoir, la connaissance, et avec l'information, l'actualité mondiale, mais également les rapports que l'on entretient avec les autres, qu'ils nous soient proches ou non. Internet a chamboulé les rapports humains.
Soit on considère qu'Internet a changé les rapports humains pour de bon, c'est à dire dans leur ensemble, soit on prend le parti de séparer clairement deux mondes : d'un côté le monde "réel", celui où l'on vit lorsqu'on est déconnecté de l'Internet, celui où l'on côtoie les gens "en chair et en os", et de l'autre, le monde connecté, où les rapports sociaux sont intimement liés au lieu où ils se déroulent, et où les règles ne s'appliquent que dans ce monde.
Personnellement, je penche pour le premier choix, car il me semble que plus le temps passe, plus les deux mondes se mêlent et se confondent. La séparation claire et nette existait aux débuts de l'existence de ce monde connecté, mais de nos jours, il me semble que la frontière entre les deux se fait de plus en plus floue. Internet est comme greffé dans nos organismes. On ne peut plus s'en passer. Personne, moi y compris, ne voudrait revenir à un monde sans Internet.
Je parlerai donc comme si cette frontière n'existait déjà plus (ce qui est peut-être le cas d'ailleurs).
Ainsi, Internet a chamboulé les rapports humains.
"Proche" est un mot qui n'a désormais plus le même sens qu'autrefois. Autrefois, un "proche", dans le langage courant, c'était une personne de votre cercle familial, qu'il soit restreint à vos parents et éventuels frères/soeurs, ou étendu aux (éventuels) oncles/tantes, cousins/cousines, demi-frère du cousin germain de l'oncle de la cousine etc..., votre conjoint(e), mais également un ami que l'on avait fréquenté depuis tant d'années qu'on le connaissait aussi bien qu'un membre de sa famille. On disait toutefois, en parlant de cet ami, et pour le désigner, "un ami proche", plutôt que simplement "un proche". Pareil pour les voisins, susceptibles de devenir des amis.
Géographiquement parlant, il était également parfaitement clair dans la tête de tout le monde que l'on ne pouvait pas être "proches" si l'on était séparé par un océan, qu'il soit pacifique ou non, ou des milliers de kilomètres de terres. On ne pouvait donc pas être géographiquement "proche" de quelqu'un situé à des milliers de kilomètres de vous, mais votre voisin de palier n'était pas forcément "un proche" pour autant.
Les termes "proche" et "éloigné" étaient donc uniquement employés pour mesurer la distance, géographique ou morale, entre deux personnes. Le mot était bien défini, et tout le monde se conformait à cette définition. Il me semble qu'Internet a changé le sens de ce mot, en tout cas la compréhension que l'on en a.
Internet a rétréci la superficie du monde, qui est réellement devenu, selon l'expression déjà employée par Marshall Mc Luhan dans les années 60 en parlant des media, un "village planétaire" (avec malheureusement tous les "ragots de village", comme on dit, qui vont avec...). C'aurait pu être une excellente chose, ce village planétaire, mais il me semble que, dans certains de ses aspects, il a quelque peu mal tourné.
Le rapprochement, ou la sensation de rapprochement, des gens grâce aux media, et la technologie en général, n'était donc pas nouvelle à l'heure de l'apparition d'Internet (sans parler, en matière de technologie, de l'apparition du train pendant la révolution industrielle, qui donna aux observateurs de l'époque l'impression de l'abolition des distances).
Cependant, lorsque le téléphone est apparu, il était souvent difficile d'obtenir une communication, il fallait alors passer par une opératrice, donc un intermédiaire entre vous et la personne à qui l'on souhaitait parler, et les communications internationales étaient parfois impossibles, ou longues à obtenir, ou très problématiques en raison de la mauvaise qualité du son. Du reste, on n'avait que la voix pour communiquer même si, du fait de l'immédiateté (plus ou moins grande) de la transmission de la voix, la conversation pouvait se faire de façon presque aussi instantanée que si l'on se trouvait dans le même salon. Cela dit, les gens s'en contentaient très bien.
Tiens, au fait, vous vous rappelez l'époque où la communication téléphonique en France était au même tarif, quelque soit le temps que vous passiez au bout du fil ? Je crois me souvenir qu'un appel valait alors 20 centimes.
Le téléphone (et avant lui le télégraphe) a commencé à rapprocher les gens. Même éloignés géographiquement, ces gens pouvaient se sentir plus proches. En quelques secondes, la tante Machin avait de vos nouvelles. Rien à voir avec le courrier qui mettait des jours à arriver à destination -le télégramme étant réservé aux cas urgents ou événements spéciaux. D'ailleurs, notons au passage qu'en ce qui concerne le courrier postal, beaucoup de gens imprégnaient, et imprègnent peut-être toujours, certaines lettres qu'ils envoient du parfum qu'ils portent habituellement, afin que le ou la destinataire aient davantage l'impression de recevoir un peu plus qu'une simple lettre : un peu de la personne elle même. Une façon comme une autre de se "sentir" plus proches.
Cependant, le téléphone, comme le télégraphe, étaient limités dans leur fonction de téléphone et de télégraphe. La communication était incomplète. Il y avait bien eu des tentatives de visiophonie, mais personne, y compris moi-même qui d'habitude me jetais sur la moindre amélioration ou nouveauté technologique pour peu que cela soit "plus moderne", et suppliait ma famille de se procurer la chose, ne semblait alors avoir envie de partager son image en même temps que son son.
Tiens, j'allais oublier de parler du Médium interactif par numérisation d'information téléphonique ! Du quoi ?? Du Minitel, voyons ! Le Minitel est une invention française, cocoricooo. Quant à l'équivalent américain du Minitel, il ne connut pas le succès pour des raisons techniques qui m'échappent.
Le Minitel fut une aventure vraiment incroyable. Et passionnante, comme l'ensemble de l'histoire des télécommunications, et comme tout ce qui, en général, a pour objectif de rapprocher les êtres humains (même si, au final, ça rate...).
Le Minitel, dont l'usage premier a été l'annuaire téléphonique (3611) et dont les concepteurs annonçaient à l'époque de sa mise en service qu'il allait engendrer le déclin du papier, n'a été retiré de la circulation qu'en 2012, ce que j'ai eu la grande surprise d'apprendre en lisant l'article qui lui est consacré sur Wikipedia. Moi qui l'avais abandonné en 1997 pour me convertir définitivement à Internet, je croyais que tout le monde ou presque avait fait de même. Mais il y a des fans irréductibles d'anciennes technologies, et je ne les blâme pas puisque j'en fais également partie (avoir tendance à foncer tête baissée sur les dernières nouveautés technologiques, et adorer en même temps les trucs vintage, voilà deux comportements bien contradictoires, à première vue, mais en fait pas du tout incompatibles, si si, je vous assure...). Je regarde désormais les vieux postes Minitel comme des objets de musée, et rien ne me ferait plus plaisir que de les collectionner, voire les réutiliser. Trop tard... Tant pis. (2)
Le Minitel, malgré sa lenteur d'affichage, offrait déjà toutes sortes de possibilités, vente en ligne et réservations de voyages y compris, ce qui a familiarisé très tôt les Français, bien avant les autres, au vocabulaire lié ("naviguer"...) et au concept de la dématérialisation de l'information, de la communication et du commerce, ce qui fait que les Français, qui ont eu la possibilité de faire une transition plus douce entre le Minitel et Internet, ont peut-être moins eu l'impression de tester quelque chose de complètement nouveau.
Le Minitel devint si populaire en France que l'expression "3615" entra même dans le langage courant. On ajoutait 3615 avant un peu n'importe quoi (3), comme par exemple "3615 je bosse", ou "3615 je bouquine" (autrement dit : prière de ne pas déranger). Internet n'a pas engendré ce phénomène. Personne ne dit, par exemple, à son interlocuteur : "achtétépé deux points slash slash double vé double vé double vé je bouquine point com".
Comment expliquer, autrement que par le fait que c'était complètement nouveau et incroyablement prometteur, l'engouement incroyable que le monde a ressenti devant l'arrivée d'Internet, et ce dès ses débuts (à part la France, justement, qui s'est longtemps accrochée à son Minitel avant de comprendre -et accepter- enfin les possibilités bien plus grandes qu'offraient Internet) ? Est-ce seulement dû au fait qu'Internet a réduit la Terre à la grosseur d'une tête d'épingle ? Internet a-t-il, du moins en théorie, aboli les frontières ?
Internet a changé les rapports entre les gens car non seulement ils se sont sentis rapprochés dans leur communication, comme cela était déjà le cas auparavant pour le télégraphe, le téléphone ou le Minitel, du fait de l'instantanéité de l'email et des "chats" (on pouvait enfin recevoir une lettre de façon instantanée), mais surtout Internet a fait une sorte de synthèse de toutes les formes de communication.
En effet, Internet n'a jamais été destiné seulement aux échanges d'emails. Dès le début ou presque (je ne parle pas de l'époque pré www, où Internet était testé par des universités américaines, au Massachusetts et en Californie, qui avaient connecté leurs ordinateurs dès les années 60), Internet grand public a été multiple : email, chat, forums, World Wide Web... Je simplifie un peu à outrance l'histoire de l'Internet, évidemment, et c'est en fait bien plus compliqué que ça.
Avec le Web, la "toile" comme l'ont appelée dès le début les Québécois, on avait, avec un seul outil, son ordinateur, la possibilité (ou la possibilité future, car techniquement, tout semblait possible) de communiquer, s'exprimer, s'informer, se cultiver, lire, écrire, échanger ou partager des fichiers, des vidéos, des images, des sons... et créer !
Pour le clin d'oeil, le Web a réussi là où le visiophone avait échoué, parvenant à convaincre les interlocuteurs qui se "téléphonaient" à partager leur tête en plus de leur son.
Cela allait tellement vite de s'envoyer et recevoir des emails que les anglophones se mirent à nommer le courrier traditionnel "snail mail", autrement dit le courrier qui se déplace à la vitesse d'un escargot...
Internet, pour ce qu'il offrait, fonctionnait alors très bien avec Windows 3.1 sur lequel tournait mon premier ordinateur personnel, un 80386 (oh la la, ça nous rajeunit pas, tout ça...). Je ne me souviens pas en détail des temps de chargement, à part une pièce jointe qui a mis vingt-cinq minutes à se charger, mais je crois que plus personne ne pourrait, de nos jours, les supporter sans s'arracher la moitié des cheveux. Désormais tout doit aller vite, et non seulement tout doit aller vite, mais tout doit aller de plus en plus vite. C'est l'objectif à atteindre. L'augmentation de la vitesse de chargement et de navigation est devenue un argument de vente des fabricants d'ordinateurs et de logiciels, avec la capacité de stockage (bien qu'il soit désormais possible de tout stocker là haut, dans les nuages). Ce qui est malgré tout compréhensible lorsque l'on voit avec quelle vitesse Internet s'est développé et a évolué depuis les années 90.
Le développement rapide du web, et plus généralement de l'Internet, aux Etats Unis, reposa notamment sur le fait que les communications téléphoniques locales y étaient gratuites, donc l'usage d'Internet l'était également, les petits veinards... Rien à voir avec les factures ahurissantes de téléphone que je me suis mise à recevoir une fois connectée... Du coup, j'ai pris l'habitude de devenir insomniaque, histoire de me connecter la nuit afin de bénéficier des tarifs "bleu nuit" de French Telecom (qui débutaient à 22h30) avant qu'ils ne soient supprimés... mais ces tarifs spéciaux n'avaient malgré tout pas suffi à réduire de façon significative les coûts d'usage de ce nouveau media (ou plutôt medium, puisque media est le pluriel).
On trouvait déjà toutes sortes de choses sur Internet en cette fin des années 90. La BNF, par exemple, a commencé à numériser ses livres très tôt et une bonne sélection était déjà disponible en 1998 (peut-être même avant, je ne m'en souviens plus). On pouvait déjà payer en ligne, bien que les systèmes de paiements n'aient pas été considérés comme très fiables. Certains envisageaient même déjà de se convertir au télétravail ou de se faire soigner à distance, grâce à Internet. Jamais la frontière entre la science fiction et la réalité n'a semblé aussi mince qu'à cette époque.
On trouvait des annuaires de site, comme "Nomade", en plus des moteurs de recherche (rappelez vous Alta Vista...), ce qui serait difficile aujourd'hui vu les millions de sites sur la toile, il y avait même des sites pour parodier les annuaires, dont un qui se nommait "Yaourt" (je ne me rappelle plus ce qu'on y trouvait), et un autre "ecnarF oohaY" qui vous donnait sans problème votre renseignement, mais écrit à l'envers... Les gens découvraient, testaient, s'enthousiasmaient, et même rigolaient. Il y avait sur un site, dont tout le monde se refilait l'adresse en ricanant bêtement, une animation consistant à envoyer un coup de poing dans la figure de Mr Microsoft en cliquant sur un bouton (ce genre de trucs existe encore, si le coeur vous en dit, mais je ne suis pas sûre que ça fasse autant marrer qu'à l'époque). Bien sûr un compteur, que l'on trouverait maintenant archaïque, affichait le nombre de "pifs" et de "pafs" que le pauvre homme avait reçus... Un rien m'amusait...
Microsoft ou pas, on se précipitait tous pour télécharger Netscape, le navigateur alors en vogue, ce qui prenait évidemment des heures, on s'amusait à envoyer des mails sans aucun but, juste pour le plaisir d'utiliser sa boîte email et dire "hello, ça va ?", on se précipitait également pour ouvrir une boîte chez Caramail, le dernier truc à la mode...
On contactait par email, par forum ou par "chat" des gens que l'on ne connaissait ni d'Eve, ni d'Adam, situés au Canada, aux USA, en Australie, en Nouvelle Zélande... et dans bien d'autres coins et recoins de la planète, juste pour faire connaissance avec ces gens du bout du monde, papoter cordialement et leur demander comment la vie se passait chez eux, dans leur pays lointain qui semblait soudain devenu si proche... (ce qui bien sûr était déjà possible techniquement parlant avec un téléphone, la grande différence étant que lorsqu'on téléphone, on téléphone généralement à quelqu'un qu'on connait, sinon on appelle cela se tromper de numéro...) et tous les Francophones, quelle que soit leur statut social, leur profession ou leur âge, se tutoyaient. C'était un des principes mêmes d'Internet, à ses débuts. Il y avait un code de conduite commun sur Internet, que l'on nommait la "netiquette". Le tutoiement entre francophones en faisait partie, mais la netiquette portait surtout sur les règles de politesse, de courtoisie...
Je pense que cette tradition du tutoiement sur Internet a été initiée par les Québécois, qui représentaient alors la grande majorité des Francophones et des sites internet en français sur la toile.
On avait l'impression de se faire de nouveaux amis, même si on savait qu'il y avait peu, ou pas, de chances qu'on ait un jour l'occasion de les rencontrer "pour de vrai". Payer une facture de téléphone, même délirante, et acheter un billet aller-retour pour Sydney ou Wellington, ce n'est tout de même pas la même chose. Cependant, il est vrai que des personnes sont devenues, grâce à Internet, de véritables amis.
Dans le temps, comme disait jadis ma grand-mère, un ami était une personne que l'on avait rencontrée, avec qui le premier contact (qu'il soit professionnel ou non) s'était bien passé, si bien que l'on avait souhaité revoir cette personne, et avec qui une relation de confiance s'était nouée au fil du temps. Certes, cela pouvait être parfois une personne que l'on n'avait jamais rencontré physiquement, mais avec qui l'on correspondait, que l'on soit ou non proches géographiquement. Cela dit, c'est rarement la même chose. On ne sait à qui l'on a réellement affaire que si l'on rencontre la personne.
Autrefois, comme disait jadis mon grand-père, les gamins et ados étaient particulièrement friands de ce système de "correspondants", qui se déroulait parfois dans le cadre scolaire. Je ne sais pas si cela existe toujours. C'était un truc de mômes : les adultes n'avaient pas de "correspondants". Internet a étendu le concept aux adultes, dont beaucoup se sont également mis à avoir des "penpals". Bref, on est retombés en enfance !
Internet a également changé, peu à peu, le sens même du terme "ami(e)", parce qu'il est désormais établi qu'on peut être ami(e) avec une personne qu'on ne rencontrera jamais, voire même avec qui on ne discutera jamais !
L'impression que ces gens du bout du monde, avec qui l'on parlait, étaient des amis était d'autant plus forte qu'à l'époque Internet n'était pas aussi développé qu'aujourd'hui, et ses utilisateurs, encore très peu nombreux dans le monde et particulièrement en France (4), avaient réellement le sentiment qu'ils appartenaient à une communauté, donc un cercle, appelée les "Internautes". Sans aucun élitisme là dedans, je tiens à le préciser. On parlait alors d'internautes francophones. Le tutoiement entre Francophones y a sans doute été pour beaucoup, bien que les Anglophones aient certainement eu, entre eux, la même impression de rapprochement amical alors que chez eux le tutoiement/vouvoiement n'existe pas.
Bien qu'en France on déteste le concept de communauté (parce qu'il renvoie à un enfermement sur soi et est surtout employé dans un contexte religieux), et cela se comprend très bien, il faut reconnaître que beaucoup de relations humaines se développent prioritairement au sein de "communautés", au sens large du terme. En effet, beaucoup de gens se sentent naturellement plus à l'aise avec leurs pairs, avec ceux qui leurs ressemblent. Exemple : les jeunes joueurs de jeux vidéo se font sans doute une grande part de leurs amis parmi les autres joueurs de jeux vidéo, qui ont les mêmes goûts qu'eux, les mêmes préoccupations, les mêmes sujets de conversation. Les passionnés de course automobile ou de cosplay sympathiseront sans doute plus facilement avec d'autres passionnés de ces activités.
Pour en revenir à l'Internet de la seconde moitié des années 90, le seul fait d'être un Internaute vous faisait admettre direct au sein de la "communauté". On se voyait, mais sans élitisme aucun, je tiens à le rappeler, comme des sortes d'explorateurs de cette nouvelle technologie, des pionniers, parce qu'on s'était connectés aux tous débuts (ou presque) de sa mise à disposition pour le grand public, et donc on se sentait "proches" des autres personnes qui faisaient également partie de ce club, mais un club très ouvert. Pas étonnant que l'un des premiers fournisseur d'accès à Internet en France, et chez lequel j'avais souscrit mon abonnement début 97, se soit nommé "Club Internet" (5).
Il fallait également se plonger dans l'étude de l'html pour faire ses pages perso, qui aujourd'hui paraîtraient bien poussiéreuses.
Je n'irai pas jusqu'à parler de "famille" très étendue pour les internautes, mais c'était vaguement (normal, quand on navigue) l'esprit. On n'était limité que par la barrière de la langue. Il valait mieux alors parler anglais si l'on souhaitait communiquer ou s'informer sur Internet, puis venait (je ne connais pas l'ordre exact) le Français, surtout grâce aux Québécois, l'Allemand, l'Espagnol...
Internet a donc commencé en tant que communauté d'internautes, sorte de petite "famille", qui s'est agrandie au fil des années jusqu'à englober le monde entier. Quand on se connectait avec ses amis lointains sur Internet, on parlait d'ailleurs parfois d'Internet lui-même. On s'émerveillait ensemble de cette nouvelle ouverture sur le monde, sur les autres, sur cette possibilité de traverser les océans en quelques clics.
Cet enthousiasme était dû au fait qu'Internet était quelque chose de nouveau, certes, mais surtout nouveau pour tout le monde (dans le grand public, donc). Une personne qui, de nos jours, se connecterait pour la première fois de sa vie sur Internet n'a peut-être pas le même sentiment. Les personnes qui ont eu le téléphone dès son invention (ou presque) ont dû également ressentir cet émerveillement.
Depuis l'apparition d'Internet, le mot "ami" n'a donc plus le même sens qu'autrefois. Tout d'abord parce que deux personnes pouvaient alors, grâce à Internet et la communauté des Internautes, se sentir réellement proches, même si elles ne faisaient pas partie de la même famille, même si elles étaient éloignées géographiquement, même si elles n'avaient pas débuté leur amitié en se rencontrant dans la vraie vie, et même si elles savaient qu'elles ne se rencontreraient jamais.
Lorsqu'Internet s'est développé de façon exponentielle, tout le monde ou presque, mises à part les régions reculées du monde, est devenu un Internaute (ou, s'il n'avait pas encore Internet à son domicile, utilisait tout de même le réseau et considérait qu'il était devenu un acteur indispensable de la vie sociale et même professionnelle). On ne peut pas dire des gens, par exemple, qu'ils appartiennent à la communauté des dormeurs, parce que tout le monde (ou presque) dort. Je sais, l'exemple n'est pas génial, mais il reflète bien, malgré tout, ce que j'essaye d'expliquer. On n'a pas embrayé sur la vitesse supérieure, consistant à dire : "la communauté des Terriens". On a peut-être raté quelque chose, là... Seule l'arrivée sur Terre des Extraterrestres pourra (peut-être...) faire prendre conscience aux gens que nous vivons tous sur la même planète, qu'on n'en a pas d'autre de rechange, et qu'on devrait plutôt essayer de s'entendre. Oh pardon, je m'égare...
De nos jours, les régions du monde où l'on n'a pas accès à Internet sont considérées comme sous-développées, et même en danger de ne pas pouvoir se développer économiquement parlant. Il faut donc avoir Internet, c'est devenu vital.
Or, si tout le monde est un Internaute, donc si le monde entier appartient à la même communauté, il n'y a plus ce sentiment d'appartenance que l'on avait avant. Appartenance, qui supposait, qui obligeait, même, à suivre scrupuleusement les règles de vie du "club". Le développement d'Internet a eu pour conséquence première, il me semble, l'abandon progressif de la netiquette. Peu de gens continuent à la suivre, de nos jours.
De plus, on ne peut pas être ami avec le monde entier, donc au fur et à mesure qu'Internet se développait dans le monde, l'impression de s'y faire de nouveaux amis, avec qui l'on avait, dès le départ, quelque chose en commun, a diminué en flèche.
C'est peut-être pour cela, pour perpétuer cette impression d'avoir de nombreux amis (et potentiellement aux quatre coins du monde), que Facebook a nommé ceux qui vous suivent des "amis". Franchement, ça fait un peu secte ! Dans certains sectes, en effet, les adeptes s'appellent tous "cousin", "cousine" entre eux, ou d'autres appellations normalement réservées aux membres d'une même famille. Eh bien là, c'est pareil, sauf que sur Facebook, on fait encore plus fort, les gens sont carrément des "amis" !
C'est devenu une véritable culture, les amis-Facebook. Ouvrir un compte Facebook sans y ratisser une flopée d' "amis" revient à ne pas avoir de compte Facebook, voire même être carrément considéré comme un raté dans la vie. En conséquence, il est de bon ton d'afficher publiquement le nombre d' "amis" que l'on a. Ca rassure le propriétaire du compte, et c'est la meilleure carte de visite qu'il puisse montrer aux autres.
Plus ça va, et plus une certaine génération juge les autres sur le nombre d'amis, de followers, appelez cela comme vous voudrez, qu'ils ont sur les "réseaux sociaux" en général.
Je n'ai pas de compte Facebook et n'en aurai jamais. J'ai toujours considéré Facebook comme un instrument ne servant qu'à afficher son narcissisme. C'est de soi-même dont il doit s'agir (du moins sur les "comptes" Facebook, pas sur les "pages"). Moi, moi, moi, je, je, je, selfie, selfie, selfie, suivez-moi, aimez-moi, admirez-moi...
La première règle chez Facebook ne consiste-t-elle pas à obliger que le compte soit ouvert sous son nom propre, à interdire que l'on ouvre un compte avec un pseudo ? Je crois même qu'ils vérifient votre identité avec votre téléphone portable lorsqu'on ouvre un compte.
Les "amis" Facebook peuvent être de vrais amis, évidemment, mais c'est en fait le fourre tout général. On mélange ses vrais amis avec des gens qu'on ne connait pas, et même, comme je le disais plus haut, des gens avec qui on ne discute même pas.
Sur Facebook, on ne fait plus la différence entre les vrais amis, les connaissances, les inconnus. Je ne pense pas me tromper en disant que la plupart des gens qui ont des tonnes d'amis Facebook ne les rencontreront jamais en chair et en os. Comme à l'époque des débuts d'Internet, vous allez me dire, la différence tout de même c'est qu'à l'époque on correspondait de façon vraiment régulière et enthousiaste avec ces gens, et on se limitait à trois ou quatre personnes grand maximum. Donc on avait le temps de vraiment échanger avec eux et apprendre à mieux les connaitre. C'était le but, tout de même !
Comment voulez-vous entretenir sur Facebook de véritables relations d'amitié, ou même une simple communication régulière, avec 300 ou 350 personnes ? C'est impossible, et totalement ridicule ! Ce qui est encore plus ridicule, c'est qu'aujourd'hui, beaucoup de gens ne comprennent plus le sens du mot "ami" et sont sincèrement persuadés que les personnes qui les suivent sur Facebook sont leurs amis. Ainsi, de nos jours, un(e) ami(e) sur Internet, cela peut-être quelqu'un avec qui l'on n'est justement pas ami... Et comme Facebook a pris une importance inimaginable dans la vie de tous les jours sur Internet, les rapports que l'on entretient sur Facebook donnent un peu le "la" de l'ensemble des relations humaines sur Internet.
Puis on finit (est-ce déjà le cas, je n'en sais rien, car je n'ai lu aucune étude documentée sur le sujet, mais j'en ai bien l'impression...) par transposer le style de rapports humains vécus sur Facebook, donc Internet, à la vraie vie.
Pour les ados, c'est dramatique. Cela a conduit je ne sais plus quand un teenager américain au suicide car il avait perdu la plupart de ses "amis" sur Facebook. "Réf nécessaire", comme dirait alors Wikipedia. Désolée mais je ne retrouve plus la source de cette info (si toutefois elle est véridique, vu que l'info, elle aussi, est devenue très fantaisiste avec Internet). Un cas extrême, certes, mais le seul fait que cela soit possible (et ça doit arriver plus qu'on ne le pense, ce genre de dérives extrêmes) montre bien qu'il y a un vrai problème de société sous jacent. A quand les psychologues et psychiatres spécialisés dans les névroses liées aux réseaux sociaux ? Si cela n'existe pas déjà.
Facebook est théoriquement interdit aux enfants de moins de treize ans, ce qui prouve bien que son utilisation n'est pas considérée comme anodine. Cependant, cela ne signifie pas que d'un coup de baguette magique, quand on atteint l'âge règlementaire de treize ans, on n'est plus vulnérable aux dérives de l'Internet et de Facebook lui-même. De nos jours, tous les gamins veulent leur compte Facebook. Un gosse qui n'a pas de compte Facebook est rejeté par les autres gamins de son établissement scolaire. Et parfois, le rejet, quelle qu'en soit la raison première, se transforme en véritable harcèlement.
Comment est-ce possible qu'une génération entière soit devenue à ce point dépendante des média sociaux ? Et les parents leur emboîtent le pas, terrifiés qu'ils sont à l'idée d'être ringards, de ne pas être "dans le coup" et perdre ainsi le contact avec leurs propres enfants, ou pire, leur estime. Beaucoup de parents ont tendance à considérer leurs enfants comme un miroir d'eux-mêmes, ils veulent donc que l'image qui leur est renvoyée soit la plus valorisante possible pour eux.
Les réseaux sociaux en général ont également développé une véritable phobie de la "solitude". En réalité du seul fait de rester une journée sans "communiquer" avec trois millions de personnes. C'est la quantité, et non plus la qualité, qui importe désormais.
Cette peur de la solitude existait depuis longtemps aux Etats Unis (6) et a sans doute été importée outre Atlantique avec le reste. Merci pour tous ces cadeaux, on n'en demandait pas tant...
La solitude, désormais, ne consiste pas à n'avoir personne dans son entourage immédiat, ni famille, ni ami, mais consiste à ne pas être "populaire", à ne pas briller sur les réseaux sociaux.
Je suis sûre qu'il existe des gens sur Internet qui ont des milliers de "followers", ou d' "amis Facebook", qui n'ont aucun véritable ami en dehors de cela, personne en qui ils peuvent avoir une réelle confiance, et qui s'en fichent royalement, ne voyant même pas où est le problème, justement parce le seul fait d'avoir des milliers de "followers" et d' "amis" virtuels suffit à l'image qu'ils ont d'eux-mêmes et à celle qu'ils veulent donner aux autres. Be successful...
Internet a également son lot d'accros, de drogués, comme le raconte cet excellent article. Ce qu'il se passe sur Internet est, pour certaines personnes, devenu plus important que les échanges avec leurs proches, les vrais. N'oublions pas qu'on navigue sur le "web", la "toile d'araignée". Les araignées gardent bien leurs proies.
On peut comprendre qu'une entreprise qui cherche à se développer souhaite avoir un nombre élevé de "followers", car elle touche alors plus de clients potentiels, mais quel est l'intérêt de suivre ou d'être suivis par 2500 personnes sur Twitter, dont on ne lit jamais les tweets, et qui ne lisent jamais les vôtres ? Tout juste les retweetent-ils si le hasard fait qu'ils sont connectés au même moment que vous et les voient défiler sur leur "timeline" ("Faut apprendre votre vocabulaire !", nous rabâchaient toujours nos profs d'anglais). Mathématiquement parlant, plus on a de followers, plus nos tweets ont de chance d'être mis en favoris ou retweetés, mais là encore, c'est juste un truc narcissique. Franchement, ça change quoi, dans votre vie, que vos tweets soient retweetés ? Cela vous rend-il plus heureux pour autant ?
Lorsque j'ai ouvert un compte Twitter, mon objectif était, en plus de partager les articles intéressants que j'avais lus, de réellement suivre les personnes que j'avais choisi de suivre, c'est à dire d'aller jeter un oeil, à chaque connexion, sur ce qu'ils twittaient. (j'en profile pour dire que je n'ai jamais vraiment compris à quel moment il faut écrire "twee..." et à quel moment "twi..." ce vocabulaire "dans le coup" m'échappe totalement et je vis très bien comme ça) et c'est effectivement ce que j'ai fait pendant un certain temps. Puis des gens intéressants se sont mis à me suivre, et je les ai suivis en retour. Et comme je suis de nature curieuse, je me disais, "tiens, il suit qui, lui ?", et je consultais sa liste, où je trouvais forcément des gens intéressants à suivre... et petit à petit je me suis prise au jeu et j'ai suivi de plus en plus de monde. J'ai donc eu de moins en moins le temps pour suivre réellement les gens, et ce qu'ils avaient à dire ou à partager. Jusqu'au jour où j'ai décidé de décrocher un peu de tout cela.
Les réseaux sociaux sont utiles pour les entreprises, dont l'objectif n'est pas de suivre les tweets des autres puisque leur but est de se faire de la publicité, de faire connaître leur entreprise et augmenter leurs nombres de clients, mais pour les particuliers, c'est une activité vraiment trop chronophage, voire une véritable perte de temps si l'on n'utilise pas ces réseaux sociaux de façon vraiment pertinente. Ce sont des outils, pas des fins en soi.
Pourquoi vouloir absolument twitter tout ce qu'on voit, tout ce qu'on pense, tout ce qu'on fait, tout ce qu'on lit, retweeter tout ce que les autres ont eux-même twitté, pourquoi passer tant de temps à répondre aux tweets des autres, et à converser à coup de petits messages de 140 caractères ? C'est en effet sympa quand quelqu'un rebondit sur l'un de vos tweets et engage une conversation avec vous, mais le temps que l'on y passe, ou qu'on peut y passer si l'on se prend au jeu, c'est effrayant !
Par contre, un truc que j'ai beaucoup faire sur Twitter, et là je trouve que le réseau social trouve toute son utilité et sa raison d'être, c'est envoyer à d'autres "Twittos", qu'on les suive ou non, des articles que j'ai repérés (et que peut-être eux n'ont pas vus, sait-on jamais), et dont je sais, ou dont tout le monde sait, qu'ils sont en rapport avec leurs centres d'intérêts.
A l'inverse de Twitter qui n'offre que la possibilité de partager des micro-textes de 140 caractères maximum, et qui ont grandement contribué à l'oubli de l'orthographe (sava + vit décrir kom sa kan on a pa tro 2 place, é pui tou le mond vou konpran 2 tte façon alor pourkoi senbété à écrir korectemen ?) les blogs permettent à tout le monde de s'exprimer sur tous les sujets qui tiennent à coeur, sans limite.
Si Twitter, mais surtout les sms sur téléphone portables, a contribué à tuer l'orthographe, Internet a quand même eu un effet positif sur l'écrit. On n'a jamais vu autant de personnes écrire que depuis qu'Internet existe. En tout cas, c'est l'impression que j'ai, c'est mon opinion personnelle.
Le blog, s'il est personnel, est certes une autre forme de vitrine de soi-même, mais on peut écrire un blog sur un autre sujet que soi-même, tiens, sur les dernières sorties au cinéma par exemple. Cependant, la multiplication des blogs sur Internet, car il doit y en avoir des millions de nos jours, fait que chaque blog est désormais noyé dans la masse, à moins de l'alimenter tellement souvent (minimum un article chaque jour) qu'on parvient à se construire une communauté plus ou moins fidèle de lecteurs, plus ou moins nombreux. Je me demande comment les gens parviennent à écrire un article par jour sur leur blog. Soit ils ont le temps de faire ça, je sais pas, moi, ils sont retraités ou au chômage (ce n'est pas une critique, personne n'aime être au chômage et les chômeurs ne sont pas des paresseux, contrairement à ce que certains croient) soit ce sont de véritables génies. Personnellement ce n'est pas mon cas. Je n'ai ni le temps ni le génie, alors j'écris quand je le peux, à mon rythme. Cet article, par exemple, j'ai mis des semaines à le rédiger, à raison de quelques lignes chaque jour. Je sais, il est un peu long, mais accrochez-vous, il est presque terminé.
On est donc aujourd'hui inondés, envahis de blogs divers et variés sur Internet (le mien, sur lequel je raconte ma vie et pas mal de bla bla, étant une goutte d'eau de plus dans ce vaste océan) et l'on n'a jamais été à ce point gavés d'informations non plus.
L'information est omniprésente sur Internet. Elle n'est parfois même plus vérifiée avant d'être mise en ligne. Du genre : "Machin est mort !", "Ah non, désolé, nous démentons, c'était une erreur." Sur le principe, la multiplicité de l'information est une excellente chose, mais qu'en a-t-on fait ? Il ne faudrait pas qu'Internet devienne comme une arme à feu que l'on mettrait sans réfléchir entre les mains d'un gamin.
Sans aller jusqu'à ces extrêmes, certains sites (je ne parle pas de blogs) ne se rendent pas compte qu'ils publient des papiers d'opinion, sans plus. Mais quand une opinion est présentée avec force et conviction, elle devient un fait dans la tête de bien des gens. Et c'est là que réside le danger...
On trouve le meilleur et le pire sur Internet, sans qu'il n'y ait plus aucun tri, ou si peu, sans qu'il n'y ait aucun recul critique sur ce qu'on lit. A partir du moment où c'est écrit, et quelque soit la personne qui l'écrit, c'est considéré comme de l'info, et de l'info fiable.
Dès le début de l'Internet, certains se souciaient du fait que des gens y racontaient n'importe quoi et, de plus, on se posait déjà la question de la limite de la liberté d'expression. Cette liberté de s'exprimer allait-elle durer ? Elle a duré. D'un côté c'est une excellente chose, ça permet à tout le monde de s'exprimer et de donner son opinion, mais de l'autre, il faut reconnaître qu'Internet est devenu un déversoir universel. Certains sont totalement incapables de faire la différence entre liberté d'expression et liberté d'insulter. C'est ahurissant.
Internet sert aussi de catalyseur au grondement de la jeunesse. C'est là qu'elle se rassemble pour haranguer les foules, appeler à ceci ou cela. Il est désormais possible de provoquer une manif de milliers de citoyens dans la rue, rien qu'à partir d'un petit message, un seul, sur les réseaux sociaux, qui sera ensuite relayé par tous. On appelle cela l'effet viral.
Autrefois, c'était le Rock and Roll qui catalysait la rébellion et la subversion. Internet joue désormais ce rôle, annonce David Bowie dès 1999 dans une interview pour la BBC.
"Internet is just a tool !" Mais Internet, c'est juste un outil ! s'exclame alors un Jeremy Paxman plus que sceptique (c'est parce que lui ne porte pas de petites lunettes rondes fumées, alors sa vision n'est pas aussi bonne). Non, lui répond catégoriquement, mais calmement, l'artiste, qui avait déjà saisi à l'époque l'impact que le simple "outil" en question allait avoir sur l'avenir de nos sociétés : "it is an alien life form !" C'est une forme de vie extraterrestre.
N'a-t-on pas en effet l'impression que ce truc a atterri sur Terre sans s'annoncer au préalable, sans qu'on ait vraiment anticipé sa venue, ou faut-il interprêter cela comme une sorte de monstre qui nous parasite désormais et nous ronge de l'intérieur ?
"Je crois", dit-il, "que nous n'avons même pas encore vu le sommet de l'iceberg. Je crois que le potentiel de ce qu'Internet va faire pour notre société, en bien mais aussi en mal, est inimaginable. Nous sommes à l'aube de quelque chose d'exhaltant, et de terrifiant." Excusez la mauvaise qualité de la traduction, et bien sûr ce qu'il dit peut-être sujet à de nombreuses interprétations, mais tout de même...
En bien, mais aussi en mal...
Quelques instants plus tard, Bowie, qui cherche à rester dans le cadre du discours musical, ne fait rien d'autre qu'annoncer, de façon indirecte mais pourtant très claire, le developpement des réseaux sociaux, qui permetteront l'interaction entre les artistes et leur audience. "Cela va bouleverser l'idée même que nous avons de ce que sont les media", ajoute-t-il (mais on peut en effet également dire, comme il le fait, "mediums" si on en a envie ;-) )
Tout le monde connait Bowie en tant que génie musical, peintre et acteur de grand talent, mais sait-on qu'il était également fan de technologies ?
Il fut l'un des premiers explorateurs du net, un pionnier de son utilisation et, comme on le voit dans cette intervieuw (et ce n'était pas la première fois, mais est-ce surprenant pour quelqu'un d'aussi avant-gardiste) également un visionnaire...
Explorateur et pionnier du net, car il fut en effet le premier, en 1996, à mettre en ligne une chanson téléchargeable contre un peu de menue monnaie ("Telling Lies"), puis à diffuser en 1997 l'un de ses concerts en direct sur la toile, et proposer à ses fans, en 1998, un service dédié (et payant, BowieNet, fermé en 2006), véritable FAI / réseau social / site internet, où les abonnés bénéfiaient d'un accès Internet, avaient bien entendu la possibilité d'accéder à du contenu, musique, vidéo... concernant non seulement l'artiste mais plus généralement la musique, la possibilité d'interagir directement entre eux, et même avec l'artiste lui-même en participant à des chats mensuels avec webcam 360°, de partager du contenu entre utilisateurs, de créer sa page personnelle, créer des adresses email... Il n'était pas obligatoire de bénéficier du FAI, mais même si l'internaute voulait seulement les contenus, il devait souscrire un abonnement payant. A l'époque, cela m'agaça profondément de voir qu'il faisait payer ses fans pour accéder à du contenu (je me demande même s'il n'a pas été le premier à le faire), car cela ne correspondait pas à l'image de partage universel et non mercantile des connaissances et de l'information que j'avais d'Internet, ce qui avait été voulu par les concepteurs d'Internet eux-mêmes.
Bowie ouvrit même en 1999 ou début 2000, je ne sais plus, Bowiebanc, un service bancaire en ligne, ce qui eut le don de m'irriter encore plus. Sans pour autant souhaiter que les artistes se fassent financièrement arnaquer par des contrats douteux, évidemment, je n'envisageais pas qu'un artiste puisse également endosser le costume de businessman. En fait, Bowie n'avait fait qu'anticiper (comme d'habitude) ce qu'allait devenir Internet dans le futur : une gigantesque plateforme commerciale, et s'y adapter à l'avance, en montant dans le train avant qu'il ne se mette en marche. Avant même qu'il n'entre en gare. Je n'ai rien contre le fait qu'Internet ait un aspect commercial, ça existait dès ses débuts avec les sites marchands, et avant cela, sur le Minitel, mais je suis contre le fait qu'il faille payer pour obtenir non pas un bien de consommation, ou un livre, ou un disque, mais de l'information.
Cela dit, payer pour avoir de l'info est peut-être la solution pour s'assurer qu'il y a bien un travail de tri et d'analyse de l'info derrière. Après tout, ce que l'on paye, ce sont les gens qui font ce travail.
C'est ce caractère commercial qui m'a détournée d'Internet entre 2005 et 2011. Je voyais de plus en plus Internet devenir une machine à faire du fric, du business. "Connaissant" David Bowie, sa façon d'être toujours en avance de trois années lumière sur les autres, je me suis même demandé en 2000 si la "toile" tout entière n'allait pas devenir payante. De plus, on commençait à cette époque à assister à une véritable dégradation des contenus, la pornographie en accès totalement libre (c'est sympa, de penser aux gamins...), le racisme, la xénophobie, la pédophilie, le crime... ayant fait leur apparition sur la toile.
Qu'il était loin, le temps de la convivialité, où les internautes respectaient la netiquette, s'entraidaient et échangaient de façon vraiment amicale ! Internet promettait, ou risquait, de devenir une sorte de fourre tout chaotique. Les virus rongeaient désormais la toile, on était obligés de se barricader derrière des pare feu, des anti machins et autres protections (payantes, bien entendu) alors qu'aux débuts d'Internet, cela ne serait venu à l'idée de personne de penser qu'un abruti chercherait un jour à vous casser les pieds ou carrément à démolir votre ordinateur.
Alors, le jour où mon ordi s'est mis à jouer de la flute (ou de la clarinette, je n'ai pas bien entendu) tout seul pendant que je surfais, j'en ai eu vraiment marre, j'ai arraché la prise ethernet, et ma décision était prise. J'ai résilié mon abonnement et je suis restée toutes ces années sans connexion à domicile.
Pourquoi avoir repris un abonnement, alors ? Parce que je dépensais plus d'argent dans les webcafés, lorsque j'avais besoin de me connecter (notamment pour participer à Agoravox) que si nous avions consacré 50 euros par mois à une connexion ADSL à domicile.
Et que ce n'était pas agréable de devoir quémander l'accès à un ordinateur à une bibliothécaire revêche, qui vous accordait ce droit de très mauvaise grâce, comme si le temps de connexion que vous alliez utiliser allait être décompté de son salaire.
Et parce qu'Internet était devenu indispensable à notre vie quotidienne. C'était même handicapant pour quelqu'un de ne pas l'avoir.
Et quand je me suis reconnectée, c'est un tout autre Internet que j'ai découvert. Je ne savais pas ce que c'était que Twitter, par exemple, et il y avait plein d'autres trucs qu'il fallait que je réapprenne. J'ai redécouvert Internet, un peu comme quelqu'un qui revoit, des années après, une vieille copine de lycée et qui lui demande : "Alors, qu'est-ce que t'es devenue ?"
J'ai alors un peu regretté de m'être désabonnée.
J'ai donc décroché d'Internet entre 2005 et 2011, puis récemment j'ai plus ou moins (car j'y suis toujours) décroché de Twitter. Il semble y avoir une tendance actuelle chez un nombre grandissant de personnes de se désinscrire totalement des réseaux sociaux. J'ai trouvé plusieurs exemples de personnes qui annonçaient sur leur blog avoir définitivement décroché, et s'en porter pas plus mal (si ce n'est mieux).
Pourtant, cette attitude, qui consiste à avoir assidûment fréquenté les réseaux sociaux pour les rejetter ensuite complètement, peut sembler extrémiste, car Internet et les réseaux sociaux font désormais partie intégrante de notre quotidien, ils sont un élément essentiel de nos sociétés de l'information et de la communication. C'est vrai que c'est chronophage, mais en même temps, si c'est utilisé à bon escient et avec modération, ça peut se révéler très utile.
J'ai donc choisi, cette fois, de ne pas me déconnecter totalement, mais de trouver un compromis consistant à n'y aller que de temps en temps.
Internet fait désormais partie de notre quotidien. Il nous est devenu indispensable, mais il n'a pas évolué, aux yeux de beaucoup de gens qui l'utilisent depuis ses débuts, ou à peu près, de la façon dont il aurait pu évoluer.
Contrairement au territoire de La Défense où les premiers habitants et employés ont commencé par essuyer les plâtres, puis vu leur site s'améliorer au fil du temps, sur le territoire d'Internet, les premiers utilisateurs n'ont pas vraiment essuyé les plâtres, car (mais c'est une opinion qui n'engage que moi) le réseau n'offrait alors que du positif. Les mauvais côtés sont arrivés plus tard. En force.
Si l'on peut considérer qu'Internet a aboli les frontières, il n'a pas été autant qu'il aurait pu l'être le lieu par excellence de l'expression de la solidarité. La compétition y fait rage. Je ne parle pas ici de compétition économique (7) : Internet a encouragé et valorisé la compétition entre personnes, qui bien sûr existait déjà auparavant. (8)
Comme je le disais dans un précédent article de mon blog, Internet est un peu comme quelqu'un à qui l'on aurait décerné l'Oscar du meilleur jeune espoir, mais qui aurait par la suite déçu ses plus ardents supporters. C'est du moins ainsi que je le ressens personnellement. Cette opinion n'engage que moi, mais c'est pour cette raison que j'ai voulu, dans cet article, partager mon expérience personnelle en plus de parler d'Internet de façon plus générale.
Désolée d'avoir écrit un article si long, mais lorsqu'on navigue sur Internet, il ne faut pas s'étonner de trouver sur son chemin quelques romans-fleuves.
Notes.
(1) Je garde bien sûr en tête que La Défense s'est construite sur la base de très nombreuses expulsions, puis démolition des logements ainsi vidés. Cependant, de nombreux habitants expulsés (mais pas tous !) ont été relogés dans les nouveaux logements construits à La Défense, où ils ont pu bénéficier d'un confort qu'ils n'avaient pas auparavant.
(2) Il y a tout de même des gens qui cherchent à reconnecter les vieux Minitels pour le plaisir d'utiliser la machine.
(3) Du moins en France, je ne sais pas si le même phénomène s'est produit dans d'autres pays francophones.
(4) "En mai 1998, le nombre de foyers français connectés à Internet pouvait être estimé à 570 000 (soit 2,4% des foyers français), contre 270 000 en mai 1997 et 100 000 en mai 1996."
(Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Internet_en_France)
(5) Club-Internet était un FAI vraiment excellent, et les gens qui y travaillaient super sympas et disponibles. Pendant un moment, ils organisaient même des journées portes ouvertes dans leur locaux à La Villette, et ils montraient tout le côté technique, les serveurs, etc... aux visiteurs. On avait même ensuite droit à un petit café à la cantine.
(6) Dans un livre sur les Etats Unis des Editions Larousse, publié dans les années 60, que je possédais étant enfant (et que j'aimerais bien retrouver, mais en bon état...), je me souviens bien avoir lu que les personnes solitaires était considérées comme psychologiquement anormales aux USA. J'y ai également lu que les Américaines (des années 60) n'hésitaient pas à sortir dans la rue en bigoudis, mais ça ne vous intéressera sûrement pas de le savoir.
(7) Je n'y connais pas grand chose en économie, mais pourtant je ne suis pas trop gênée par l'idée de compétition économique tant qu'elle reste juste et honnête. Pas question, évidemment, qu'une énorme entreprise démolisse les petits entrepreneurs et, finalement, s'accorde une telle part de gâteau que cela en devient un monopole. Quant à supprimer toute compétition en économie comme le préconisent certains, franchement, je ne sais pas, mais personnellement ça me laisse assez sceptique.
Ce que je ne supporte pas, par contre, c'est la compétition entre les gens dans la vie quotidienne. J'ai la faiblesse de penser que nous sommes tous égaux sur cette Terre et que nous sommes là pour nous entraider, et non pour nous écrabouiller les uns les autre.
(8) La mode, par exemple, est aussi une forme de compétition, que s'infligent les femmes entre elles. Mais il est vrai aussi que, pour les adolescents, suivre la mode est aussi un facteur intégrateur dans un groupe.
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