Les folies de la Guerre Froide révélées (4) : les premières prises de vues de fusée
La Seconde Guerre mondiale à peine terminée, l'espace est devenu en très peu de temps le nouveau terrain de jeux pour militaires. Tous les vaisseaux spatiaux civils ne seront en fait que des engins miitaires déguisés et leurs lanceurs des fusées intercontinentales destinées à détruire l'adversaire à grands coups de têtes atomiques. Et comme tout se fait alors dans la précipitation d'une course effrênée, les vieilles recettes réapparaissent très vite, les fabricants recyclant leurs vieux oripeaux en les présentant comme neufs à des militaires sans imagination et prêts à tout gober. Spoutnik se révèlera un simple émetteur radio bricolé à la hâte enfermé dans une boule d'acier, rien d'autre. C'est sans surprise que l'on retrouvera donc comme principe de satellite d'observation militaire un bon vieux télescope emporté jusqu'alors par ballon-sonde, filmant la terre sur un long rouleau de pellicule qu'il suffira alors de larguer sur terre pour observer le territoire ennemi. La technologie spatiale présente comme révolutionnaire utilise dans le domaine de l'observation des techniques rudimentaires, que l'arrivée des transmissions d'images rendra vite obsolète. On nage d'emblée dans des solutions archaïques, élaborées sur le fil par peur de voir l'adversaire les réaliser en premier. Mais avant cela, il y aura beaucoup de balbutiements et énormément d'échecs. Sans oublier les sommes considérables englouties dans ses gadgets décidés par des généraux frénétiques, dont les engins spatiaux représentent les jouets d'enfants gâtés d'une civilisation vivant dans la peur d'un conflit nucléaire. Et ceci, des côtés du rideau de fer de la Guerre Froide. Une gigantesque gabegie !
Les premiers essais de photographie aérienne par fusée remontent à loin : c'est le célèbre expérimentateur Robert H.Goddard, qui, aux Etats-Unis, songera le premier à utiliser un simple appareil photo à bord de sa première fusée, aux côtés d'un... baromètre. Il photographiera ainsi en altitude Auburn, dans le Massachusetts, qui avait alors des allures de petit village européen. Au sortir de la guerre, les américains, munis d'un stock conséquent de V2 empruntés lors de l'Operation Lusty reprennent l'idée en fixant à bors de leurs V2 tirés à White Sands des caméras... qui leurs reviennent en mietttes la plupart du temps, certaines ramenant pourtant un bout de film utilisable. C'est ainsi qu'on obtiendra la première image ramenée par fusée montrant la courbure terrestre. Jusqu'ici, seuls des ballons strastosphériques l'avaient fait, un principe initié par le célèbre Auguste Piccard (l'inspirateur chez Hergé de Tournesol) et son disciple français Audouin Dolfuss. Piccard avait photographié la courbure de la terre le 27 mai 1931 au dessus d'Augsbourg à 15 781 mètres d'altitude (51 775 pieds) le record du monde d'altitude atteint par l'homme. Jusqu'à cette date, ce record appartenait depuis le 4 juin 1930 à un avion, en revanche : 43 166 pieds (13 156 mètres), atteints au dessus de NAS Anacostia par Apollo Soucek, un obscur officier de l'US Navy, à bord de son Wright Apache... équipé d'une drôle de tenue stratosphérique. Soucek avait lui-même battu le record du 5 septembre 1923 de Sadi Lecointe qui avait donc tenu 7 ans, à l'époque où les records tombaient tous les mois.
La barre fatidique des 50 000 pieds (15 000 m) ne sera atteinte qu'en 1938 par MJ Adam sur son Bristol 138 (et son étrange scaphandre en forme d'apiculteur ), et celle des 60 000 pas avant... 1953, par un Canberra B2, l'avion des visites guidées au dessus de l'URSS avant l'U-2, piloté par Walter Frame Gibb. L'aviation jusqu'à une date récente, a eu beaucoup de mal à conquérir les hautes cimes.
Les premiers essais de V2 à White Sands le seront d'emblée avec des caméras à bord. Les engins sont de purs V2 allemands (ce que démontre l'usage de la remorque de transport et d'érection typiquement allemande visible ici à gauche), rebaptisées "RV4", avant de devenir en 1948 des "Bumper", à savoir avec le premier étage ajouté d'une petite fusée WAC-Corporal, (qui va inaugurer Cap Canaveral en Floride le 24 juilet 1950).
La caméra n'est même pas embarqués dans le cône de fusée, qui ne possède au début aucun moyen de récupération tel un simple parachute, mais sur le côté de l'engin, dans un emplacement resté libre entre les deux réservoirs centraux (voir ici à droite, c'est l'objet rouge, la bande noire indiquant à quel emplacement exact du corps de fusée elle est installée).
Parfois, des réglages de dernière minute se font... avec une simple échelle : on le voit, ces essais d'après guerre nous paraissent aujourd'hui fort rudimentaires ! On est très loin des salles blanches actuelles ! Et les premiers résultats sont à la hauteur du relatif amateurisme déployé sur place à White Sands : souvent, après quelques km seulement de trajectoire, la fusée s'écrase lamentablement en plein désert, ne laissant entrevoir que de la tôle fumante et un corps principal écrabouillé. On est dans le domaine de l'expérimental, qui va consommer un bon nombre de V2 à vrai dire, toutes d'origine semble-t-il : aucun exemplaire n'avait été depuis la fin de la guerre cloné. Les V2 avaient été d'emblée vus comme une solution intermédiaire en attendant de nouveaux modèles. Mais ils défrichaient le domaine de l'astronautique naissante, c'était déjà ça.
Dans les débris encore fumants, le photographe de l'époque aura en effet du mal à localiser sa malheureuse caméra. Le reportage de l'époque indique pourtant que cette fameuse caméra avait jusqu'alors survécu à deux crashs précédents, mais que le troisième lui aura été fatal (elle est en effet en miettes sur l'image de droite). On le voit la technique de prise de vues de l'espace est alors tout ce qu'il y a de plus rudimentaire ; personne n'ayant développé à l'époque une technique de récupération simple et efficace. Un test de séparation du cône de tête mené le 28 juin 1946 s'était soldé par un échec. Malgré tous ses déboires et cette gestion plutôt calamiteuse des prises de vues, les américains vont quand même réussir à la fois à pulvériser le record d'altitude d'un objet envoyé en l'air par l'homme et à la fois réussir à ramener un cliché, pris à l'altitude incroyable pour l'époque de 400 000 pieds (environ 122 km). Il faudra attendre le 24 octobre 1946 pour obtenir le tout premier cliché de la courbure terrestre, avec une caméra de cinéma 35 mm montée à 62,5 miles d'altitude (100,5 km !) et retombée... en miettes, son film exposé étant sauf protégé par une cassette spéciale. "Avant 1946, les meilleures images jamais prises de la surface de la Terre étaient du ballon Explorer II, qui avait monté à 13,7 miles en 1935 (21 000 m), suffisamment élevé pour discerner la courbure de la Terre. La caméra de la V-2 a atteint plus de cinq fois cette altitude, montrant la planète devant la noirceur de l'espace. Lorsque les images du film ont été mises ensemble, Clyde Holliday, l'ingénieur qui a développé la caméra, a écrit dans le National Geographic en 1950, que les photos de V-2 ont montré pour la première fois "la façon dont notre Terre devrait apparaître aux visiteurs d'une autre planète à venir sur un vaisseau spatial. " D'autres clichés suivront, bien mieux définis. Tel celui-ci, datant de 1950 :
La caméra 35 mm de cinéma avait filmé à bord le décollage de la fusée. Fabriquée par l'ingénieur Clyde Holliday elle avait saisi la première vision de la courbure de la terre vue de fusée. Moment bref, entrevu pendant les rotations incontrôlées sur elle-même de la fusée, mais moment très important de la conquête spatiale. Dans le commentaire officiel de l'événement, dans lequel on peut admirer la petite caméra qui avait résisté au crash du retour, on affirmait en effet "qu'un observateur dans la fusée aurait pu voir San Diego, Salt Lake City, Kansas City, et même San Antonio". Avec un peu d"imagination dirons-nous, tant l'image était de piètre qualité, à vrai dire. Mais ce n'était pas cela l'important : l'important, c'était d'avoir démontré que c'était possible : la qualité des images viendrait naturellement après, c'est sûr, avec d'autres tentatives et d'autres apppareils plus précis. Le magazine Air&Space songera cependant à nous rappeler l'événement en novembre 2006, pour son 60 eme anniversaire. Derrière le vol il y avait la très réactionaire Johns Hopkins University et son laboratoire de l'Applied Physics Laboratory (APL), et deux scientifiques, James Van Allen et S. Fred Singer qui deviendront célèbres tous les deux. En 1948, après une bon nombre d'essais et des caméras ayant pris des angles de vue différents du Nouveau-Mexique en altitude, on arrivera même à composer un étonnant patchwork de vues montrant effectivement la courbure terrestre :
Les lancements se continueront, mais l'arrivée en 1949 d'un nouveau modèle de fusée va changer la donne. Cette fusée, c'est la Viking de Glenn L. Martin Company, un projet élaboré par le talentueux Milton Rosen (ici a droite en train de commenter des photos aériennes prises par sa fusée), un fervent disciple de Goddard. La Viking est en effet innovante à plus d'un titre : elle pèse le tiers du poids d'une V2, car elle est entièrement réalisée en aluminium à la place de l'acier. Elle est pourtant plus longue (15,2m) mais plus étroite (photo ici à gauche) : elle présente une forme de long crayon. Sa version deux aura un diamètre plus imposant (photo à droite), passant de 84 à 114 cm, avec une longueur moins imposante (13 m). Le ratio de son poids à vide au poids carburant compris passera alors de 1 à 5, en faisant l'un des meilleurs du genre
. Car l'une des innovations fondamentales qu'apporte la Viking est celle du corps de fusée servant de réservoir lui-même, alors que sur la fusée de Von Braun il y a bien deux réservoirs distincts à l'intérieur du fuselage. La V2 étant en prime depuis toujours handicapé par sa conception de missile fortment chargé d'explosif : elle n'était stable qu'en emportant cette charge explosive d'une tonne, elle requierait donc toujours ce poids en ballast inutile : les techniciens de White Sands la bien nommée sont contraints de la remplir de sable pour qu'elle puisse voler correctement. La charge utile de la Viking est donc plus pratique à mettre en œuvre, et son domaine de vol plus élaboré : à la place du procédé rudimentaire des palettes de carbone de déviation du jet de la tuyère (qui perdurera jusque la Redstone, cette V2 cylindrique militaire conçue par Von Braun),
elle possède une tuyère entièrement orientable par verniers, dirigés par des gyroscopes, un brevet déposé jadis par... Goddard, qui deviendra très vite la norme en astronautique, comme le corps de fusée faisant office de réservoir.
Jugée trop onéreuse (la V2 présentant un caractère de gratuite de prise de guerre imbattable, sans aucun doute) la Viking ne verra pas sa carrière se poursuivre. Elle ne sera tirée en deux versions que 12 fois seulement : depuis le modèle RTV-N-12a amélioré, elle aurait pu devenir ; une nouvelle fois agrandie, un lanceur de satellites fort correct, mais la Marine à laquelle elle appartenait lui préférera la catastrophique Vanguard, qui soulèvera ce qui aurait dû être le premier satellite US de 1,2mètres avant de s'écraser devant les caméras du monde entier.
A noter que la Marine US avait prévu ou testé une autre corde à son arc. Ayant constaté que son arsenal de fusée ne lui permettait pas de grimper bien haut à moins de concevoir une fusées à étages (ce que sera Vanguard), elle avait résolu de faire effectuer les premiers kilomètres par... un ballon,
qui aurait servi de premier étage. Accroché sous un engin strastosphérique, une petite fusée aurait pu en effet atteindre une bien plus grande altitude. le projet sera décrit dans le numéro d'avril 1953 de Mécanique Populaire, qui le proposera même en couverture. Le projet le plus étonnant dans le genre fut celui de la Farside, une fusée bricolée à partir d'éléments à poudre de quatre étages. Le premier se composait de quatre roquettes Thiokol "Recruit", le deuxième une seule, le troisième quatre "Grand Central Arrow II" (un développement de la fusée "Loki"), et la quatrième étape était une simple "Arrow II". La fusée était accrochée sous un immense ballon (de 106 000 m3 !). Farside y était suspendue verticalement dans la structure en aluminium sous le ballon, et était lancée une altitude de 30 km (19 miles), à travers le ballon (!) Le cône de nez de l'engin atteignait une vitesse de près de 29 000 kilomètres par heure (18 000 mph) et grimpait ainsi à 122 km (76 miles) d'altitude. La charge utile pesait entre 1,4 et 3,3 kg, et devait transmettre des données sur des particules et des rayonnements électromagnétiques, le champ magnétique, et des gaz et de la poussière interplanétaires. Un total de six roquettes auront été tirées depuis l'île Eniwetok à la fin de 1957 (dans la vidéo, on la voit percer le ballon !) le premier lancement ayant été tenté le 25 Septembre 1957 : tous seront des échecs : le premier en raison du ballon, les trois suivants en raison du mauvais séquençage des étages, les deux derniers... en raison de la transmission de données qui ne donna... stricetement rien ! S'il faut chercher pourquoi les militaires, quand il s'agira de fabriquer un satellite espion, choisiront de ne pas utiliser de transmissions radios de leurs photos, jugées pas assez fiables, c'est dans l'échec du projet Farside qu'il faudra chercher. L'idée, plutôt économique et facile à mettre en œuvre, du lancement par ballon, sera repris plus tard par des amateurs.
On en était donc là, avec la première photo ramenée de l'espace, en 1950, lorsqu'un scientifique, Otto Berg, en étudiant plus attentivement découvert une série de photos d'une énorme tempête tropicale au-dessus de Brownsville, au Texas. En reconstituant l'ensemble des clichés en une mosaïque de la région abordée par la tempête, il s'aperçut que l'on pouvait à partir de là prévoir la trajectoire de l'ouragan : la météorologie spatiale était née. Ce n'était pas pourtant un météorologue qui en avait eu l'intuition : Otto Berg était un chimiste, découvreur, avec le couple Ida et Walter Noddack, du Rhenium. Un métal hyper-résistant que l'on retrouve aujourd'hui dans les pales de réacteurs des avions de chasse. Dans les anciens flashs à ampoule au zirconium, l'élément déclencheur était le rhénium, nous a également appris Le Temps. Une fusée Aereobee montée à 160 kilomètres d'altitude est revenue pour la première fois avec une image de la demi-sphère terrestre (un montage couleur de plusieurs prises en fait !). Leurs caméras reviennent sur terre avec le cône suspendu à un parachute : l'Aeobee, simple et efficace, se révélera une des meilleures dans le genre. En novembre 1950, on en lancera une du pont d'un navire, l'USS Norton Sound (AV-11) : c'était devenu la fusée à tout faire !
La météo par satellite intéressait donc déjà fortement les civlls. Mais d'autres lorgnaient déjà sur ce que leurs faisaient découvrir ces vues aériennes immenses... Air & Space magazine l'a également bien relevé dans son hommage aux pionniers : de tels clichés, dans l'avenir devraient logiquement intéresser les militaires confrontés alors en prime à leur hécatombe d'avions espions. "Dans son article du National Geographic, Clyde Holliday a offert quelques prédictions pour savoir où tout cela pourrait entraîner : « Les résultats de ces tests pointent vers une époque où les caméras pourront être montées sur des missiles guidés pour l'observation du territoire ennemi en temps de guerre, la cartographie des régions inaccessibles de la terre en temps de paix, et même photographier les formations nuageuses, les fronts de tempête et les zones nuageuses sur un continent entier en quelques heures. "Sortant des sentiers battus, il a spéculé que « la superficie entière du globe pourrait être mappée de cette façon."
Les militaires, qui poussèrent Eisenhower comme on le sait à mettre en place une véritable industrie de guerre aux Etats-Unis, ne pouvaient qu'avoir reniflé l'odeur de l'argent à dépenser dans cette quête à l'imagerie aérienne par fusées. Au milieu des années cinquante, tout était déjà en place pour que les fusées et bientôt les satellites deviennent les nouveaux auxiliaires des militaires. Le 16 Mars 1955, l'US Air Force a donc naturellement et officiellement ordonné l'élaboration d'un satellite de reconnaissance de pointe pour "offrir une surveillance continue des « zones présélectionnées de la terre » afin de « déterminer les capacités de faire la guerre à un ennemi potentiel ». L'idée était bien en l'air, et le concours était lancé. Le 20 mai, Eisenhower donnait son accord, précisant dans son ordre de mission que l'armée avait les "capacités" pour "réaliser un petit satellite de 5 à 10 livres", qui pourrait être lancé par "une adaptation des fusées existantes" et que les russes avaient donné le même ordre le 16 avril 1955, en "promettant la médaille d'or Tsiolkosky" à "ceux qui réussiraient à lancer un satellite". En fait, le même texte, au chapitre 5, le président faisait remarquer que même si un petit satellite ne pouvait pas emporter de charge militaire de surveillance du territoire adverse, il apporterait des connaissances pour faire avancer ce projet : on le voit, Eisenhower, qui avait choisi de mettre en priorité le civil et un projet moins coûteux se faisait tanner par les militaires qui désiraient un modèle plus conséquent. Le chapitre 6 devenant prophétique, mais pour les russes : "un prestige considérable et des retombées psychologiques immenses iront à la nation qui sera la première à lancer un satellite", écrit en effet Eisenhower, sans se douter que ce sera l'URSS qui suivra ses encouragements à la lettre.
Question caméras, on avance aussi à cette époque. Notre magazine de référence aura plusieurs "scoops" sur les progrès en la matière. Ainsi dans le numéro de décembre 1951 cet objectif de 1 mètre de long greffé sur une caméra 16 mm "capable de fimer un match de base-ball à 4 km" en dit la publicité : un théodolite monté sur ce qui semble être une ancienne tourelle de mitrailleur de B-25 ou B-24...
Restait à trouver une fusée capable de mettre un tel satellite sur orbite... et de trouver un moyen un peu plus efficace que de fracasser au retour sur terre les appareils photos pour obtenir des clichés de ce que faisaient pendant ce temps là ces damnés soviétiques. Et ce qu'ils faisaient de l'autre côté de leur rideau était plutôt inquiétant.
En réalité, ce sont eux qui grilleront la politesse aux américains, un peu trop sûrs d'eux et, de leur technologie. La fusée Vanguard sera une terrible humiliation que seul un bricolage à la sauvette, signé Von Braun, lavera. Ironie du sort, son premier étage défaillant n'était autre que la 13 eme fusée Viking surmontée de deux autres. Son moteur General Electric X-405, trop traficoté (et devenu XLR50-GE-2 chez la Navy) , perdra toute sa fiabilité. Entre temps, en effet les russes avaient pris les devants dans tous les secteurs de l'astronautique... et il fallait trouver un moyen de ramener ses damnées prises de vues. Se sera plutôt laborieux à vrai dire : les américains réussiront à le faire au bout de la treizième tentative seulement... La Viking avait elle montré ses capacités d'adaptation en décollant même en 195à d'un navire, le Norton Sound.
Pour l'instant, on en était toujours à équiper des V2 (ou des Aerobee plus fiables de modules de cônes de nez contenant des expériences scientifiques, ou des caméras. Voire aussi parfois des être vivants : le 11 juin 1948 c'est un petit singe rhésus surnommé Albert1 (appelé aussi "tutankamen" dit-on, qui fait office de chargement, ficelé comme un saucisson dans le nez d'une Aerobee sur un support de fer, le pauvre. Il y aura 5 essais et 5 "Albert" : (le second atteindra 133 km d'altitude le 14 juin 1949). Dans le lot, Albert III était un singe cynomolgus (le macaque cynomolgus (Macaca fascicularis) est le primate non humain le plus utilisé en recherche biomédicale) qui atteindra 35 000 pieds (10,7 km) le 16 septembre 1949, altitude à laquelle sa V2 explosera. Tous les autres seront tués lors du retour au sol en catastrophe des fusées : rien n'est alors prévu pour les éjecter, ce ne sera fait que pour les vols suivants. Albert I était mort pendant le vol, atteint par le stress d'une crise de ... flatulences (les macaques étant fort sensibles aux diarrhées) ! Lors du dernier vol, Albert V, est accompagné d'une... souris ; qui ressort, elle, vivante de l'impact de retour (le singe décèdera deux jours après son "atterrissage" mouvementé). Les expériences de ce genre continueront : le 20 septembre 1951, c'est au tour d'un singe appelé Yorick et de 11 souris d'être récupérés vivants après un vol à 72 kilomètres d'altitude à bord d'un missile Aeobee (fabriqué par la même firme que Viking) au dessus de la base aérienne d'Holloman au Nouveau-Mexique. Dans le lot, deux souris meurent, en plein soleil du désert en attendant leur équipe de recherche. Yorick devient ce jour-là le premier singe de l'espace à revenir vivant. Le 22 mai 1952, deux autres singes, Patricia et Mike sont envoyés dans l'espace avec Mildred et Albert, deux souris blanches pour y subir des tests d'accélération, d'apesanteur et de décélération sur des êtres vivants.. La capsule était équipée de caméras et elle montera à 58 kilomètres d'altitude avant... d'être récupérée par parachute. Mike survivra jusqu'en 1967 de son escapade, sa compagne décédant deux ans après le vol. D'autres expériences pré-envoi de l'homme dans l'espace auront encore lieu plus tard avec des singes de taille plus importante dont le célèbre Ham.
Et puis, coup de tonnerre du 4 octobre 1957 : les américains entendent sur leur radio un "bip-bip" étrange et répétitif : celui du premier satellite jamais lancé par l'homme, et il est... russe. C'est un véritable traumatisme : les russes viennent de gagner la course à l'espace. Les américains se réveillent avec la crainte de voir une bombe satellisée arriver dans leur jardin. Ils se mettent à construire des abris comme des lemmings, les militaires demandant aussitôt au président des crédits supplémentaires pour créer des missiles intercontinentaux, des super-bombardiers... et de gros satellites d'observation, écartés par Eisenhower dans sa décision de 1955. Pour les américains, en prime, ce n'est qu'un début : il ya aura 7 lancements de vaisseaux soviétiques du type Spoutnik jusqu'au 25 mars 1961. dès le 4 eme, 15 mai 1960, le vaisseau qui décolle peut emporter un cosmonaute... (son siège éjectable est testé avec Spoutnik 5 -Korabl-Sputnik 2- dès le 19 août 1960 !) ou toute une batterie d'appareils photos ! Les russes avaient mis dans le vaisseau deux petits chiens, Belka and Strelka, des souris, des rats et des plantes et récupéreront le tout. Ils pousseront le vice à a aller offrir un des deux cabots à Jackie Kenney, en gage d'amité russo-américaine.
Nota : les clichés (couleurs) sont extraits pour la plupart de l'exemplaire d'octobre 1950 du National Geographic, premier grand article exposant les lancements de fusées aux USA. Les autres proviennent de Mécanique Populaire.
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