Les grands hommes
Un homme qui pense mourir jeune se met dans l’optique de profiter un maximum de la vie ; à l’article de la mort, il dira, sur le ton fier du prophète incompris : « je vous l’avais bien dit pourtant, je le savais ! » En réalité, il sera mort d’avoir brûlé sa vie.
On a toujours tendance à croire que les hommes qui nous dirigent ont quelque chose de supérieur qui justifie leur position. Cela est faux : c’est leur position qui nous pousse à cette croyance stupide. Eux-mêmes sont souvent victimes de cette inversion, et ne voient pas qu’en réalité leur importance n’est due qu’à leur position.
De cette première erreur découlent malheureusement toutes les autres, car l’importance indûment conférée à nos hommes politiques nous pousse d’une part à nous dévaloriser face à la politique (il faut des professionnels), et d’une autre à leur accorder une confiance qui dépasse leur capacité (ils savent ce qu’ils font). Cette importance démesurée comme toute chose est à double tranchant, car en même temps qu’elle leur donne la supériorité elle ne leur autorise pas l’échec (puisque ce sont des surhommes).
En définitive, notre président a presque raison lorsqu’il évoque sa situation banale d’être humain, car il est effectivement (comme les autres hommes politiques) un homme comme les autres : avec ses erreurs, ses souffrances et son passé. Malheureusement pour eux (les hommes politiques), et victimes qu’ils sont de leur supériorité indue, ils sont acculés à assumer leur charge et assurer le gouvernement.
De fait, ils sont obligés de prendre des mesures qui améliorent le sort de leur peuple, toute en se trouvant dans l’ignorance absolue quant aux conséquences de ces mesures. Ils sont perdus face à un avenir qu’ils imaginent, et qu’on leur demande de savoir pour le réaliser. Pour ne pas décevoir le peuple (et donc rester en place), ils font semblant de le connaître, pour tenter ensuite de justifier leurs échecs par des faits extérieurs à leur volonté ; comme n’importe qui le premier jour de travail, on essaie d’avoir l’air au courant, histoire de passer la période d’essai...
C’est pour cela que la rapidité des réformes est une erreur grave. Afin d’être en mesure de réaliser son programme, le président fonce tête baissée à travers tous les obstacles. Il veut des résultats et en aura. Mais on connaît le vieil adage « ne pas confondre vitesse et précipitation » et à coup sûr nous sommes dans la précipitation. Que ce soit le rapport Attali ou n’importe quel autre projet, ce sont presque tous les corps de métiers qui descendent dans la rue les uns après les autres. Parfois le gouvernement s’aperçoit vite des conséquences désastreuses de telle ou telle réforme et revient vite en arrière. Mais, la plupart du temps, tout est fait tellement vite qu’on n’arrive pas à suivre. Je défie quiconque (et le président lui-même) de réussir à lire tous les textes de loi qui sortent. Alors comment voulez-vous que les principaux intéressés (les citoyens) aient, d’une part, le temps et, de l’autre, la capacité de lire ces textes (qui ne sont que des « petits caractères »).
Il ne faut pas croire que tout cela soit sans conséquences. Car si l’avenir est incalculable, la volonté des dirigeants est une donnée non négligeable : la politique de libéralisation outrancière (et sécuritaire) voulue par le président aura des conséquences, et sans doute pas celles qu’il attend. Ou alors... Bref, le président fonce droit dans le mur. Comment espérer faire vivre mieux le peuple en l’obligeant tous les jours un peu plus ? Pour le consommateur, l’argent sort toujours plus vite qu’il ne rentre. Avec quoi va-t-il payer ses impôts ?
Le gouvernement voudrait diviser le peuple et pousser tous les uns contre les autres qu’il ne s’y prendrait pas autrement. De la même manière que les Etats-Unis combattant le terrorisme ont créés plus de terroristes, le gouvernement voulant combattre la pauvreté créera plus de pauvres.
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