Les misérables
RESF (Réseau Education Sans Frontière) et le DAL (Droit Au Logement) sont des armées de la Paix. Ce sont des bénévoles qui se battent sans compter contre la misère. Chapeau et respect. Toujours de beaux visages en face de vous. De l’espoir. De l’humanité.
Hier soir, j’étais alertée par Fati, cette jeune femme dont je vous ai parlé qui travaille à l’Armée du salut et a créé un village pour SDF à Marseille. Elle informait tout le monde que M. Ribeiro, père d’un enfant français scolarisé à Marseille, et qui donc ne peut être expulsé, venait d’être « enlevé » par la police, conduit au centre de Mesnil-Amelot et amené à Roissy pour être expulsé où menotté, mais se débattant de toutes ses forces, il avait été jeté à terre et roué de coups. Mediapart rapporte l’évènement.
Des drames de cette sorte, on nous en rapporte tous les jours et l’indignation des passagers qui ne supportent pas que des hommes soient traités comme des bêtes. Mais là, on en est arrivé à un stade supérieur puisque, le soir même, M. Ribeiro se retrouvait à l’hôpital.
Quelle vie à la Ken Loach !
M. Ribeiro perd ses papiers . Il est donc sans papier. Il se bagarre.Il prend neuf mois de prison. On le met en centre de rétention. Puis quand il sort tout va mieux, il s’occupe de son enfant qui le réclame, sa femme souhaite qu’il continue à le voir. Mais le 3 septembre dernier il se fait arrêter devant un bar en état d’ébriété. Un banal contrôle de police. Il n’a pas de papiers. On le met 25 jours en centre de rétention, puis 45 jours avant son expulsion qui lui est signifiée. Comme il la refuse, on le fait comparaître au pénal. Il prend deux mois de prison ferme aux Baumettes, cette fameuse prison 5 trous noirs. (Hé non, ce n’est pas un cousin de Cahuzac.) Le tribunal lui accorde alors 20 jours supplémentaires et décrète son expulsion. C’est alors que toute une mobilisation se lève pour lui. Trois députés : Gaby Charroux, maire de Martigues (PC), Buroni, (PS),lambert (EELV) mais aussi plus de 1350 signatures. Ces gens sont prêts à aller à Marignane pour s’opposer à ce départ. C’est alors que la police l’amène en région parisienne et s’apprête à recommencer ce matin ou demain cette tentative d’expulsion illégale.
Tous ceux qui luttent pour que ce père ne soit pas séparé de sa famille, surtout si vous habitez près de Roissy, suivez les évènements et ne manquez pas de manifester votre aide à un malheureux qui n’a pas besoin d’autres malheurs.
Le RESF, inlassablement, intervient dans ces cas. C’est grâce à eux que j’ai appris que le conseiller à l’immigration de M. Valls s’appelle M.Sodoni !!!
Vallseline et Sodoni veillent aux frontières !
Il est bien évident que ce qui arrive à M. Ribeiro est une manière de dire au RESF, vous pouvez vous battre tant que vous voulez, c’est nous qui aurons le dernier mot.
Mais ce n’est pas encore dit. La lutte continue. Restons actifs et attentifs. Pour l’instant un homme cassé et menotté est prêt à être embarqué le plus discrètement possible.
La veille, rue Valenciennes, visitant l’immeuble qui venait d’être réquisitionné par le DAL et jeudi noir, je découvrais une victoire de tous ces bénévoles qui se battent pour les sans-abris. http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/01/09/immeuble-requisitionne-a-paris-jeudi-noir-salue-le-changement-de-ton-du-gouvernement_1814582_3224.html
L’immeuble en question, très bel immeuble de 2000 m2, est vide depuis deux ans et pendant deux ans il a été chauffé à vide, il y fait une chaleur insupportable, et éclairé toutes les nuits. Bonjour le gâchis ! C’est un immeuble de bureaux qui abritait autrefois « Histoire d’or ».
Le Dal vient d’essuyer un échec car la réquisition de la maternité du « bien naître » 5 rue Erard n’a pu aboutir. http://www.metrofrance.com/paris/paris-une-maternite-requisitionnee-par-le-dal-et-jeudi-noir/mmab !BXBKj3vwv1V9w/
Mais ici c’est une grande victoire puisque Vallseline et Duflot ont dit OK et que les sdf pouvaient rester et passer l’hiver.
Je vais apprendre bien des choses au cours de cette visite et je vais peut-être vous les apprendre.
Nous savons en effet que les municipalités ont beaucoup de mal à Paris et dans la région parisienne pour construire leur quota de bâtiments HLM car il y a peu de terrains. Réquisitionner ? Certes. Mais on dit souvent que ces bâtiments sont insalubres.
Or il y a à Paris, gâchis total, un nombre incroyable de bureaux vides. C’est ainsi que du côté de la bibliothèque François Mitterrand, 80% des bureaux sont inoccupés. Chauffés pour qu’ils ne s’abîment pas. Et ces bureaux sont rendus très facilement habitables.
Quel est le but du DAL ? D’une part réquisitionner. Ensuite installer des sans-logis. Les aider financièrement à créer un lieu de vie habitable. Puis proposer le deal suivant aux pouvoirs publics : logez-les ailleurs, ils partiront. Mais achetez ces bâtiments inoccupés pour en faire des HLM.
Il est bien évident que si le DAL ne lançait pas l’affaire rien ne se passerait et des malheureux resteraient à la rue en plein hiver.
Rue Valenciennes, il y a trois ailes parfois sur cinq étages. L’une sera pour les familles, l’autre pour les associations culturelles, l’autre pour les jeunes travailleurs. Puisque ce n’est pas parce qu’on travaille, dans notre pays, qu’on peut obligatoirement se payer un logement.
C’est Souhil, un militant du Dal, qui me reçoit. Lui aussi à ce visage clair, cet air joyeux qui est celui d’une victoire. Il me fait visiter les 2000 m2 de cet immeuble.
Le problème du logement est terrible. Combien de familles baladées, logées dans des hôtels pendant des années et des années. Ce qui coûte un argent fou à la collectivité . Ces chambres, misérables, peuvent se faire payer de 1500 jusqu’à7500 euros par mois ! Vous avez bien lu ! Payé en liquide par les Services Sociaux car les services sociaux ne peuvent donner que du liquide !! Pour acheter de quoi manger, je le conçois. Mais pour payer un loyer, comment l’Etat accepte-il un procédé qui peut conduire à de la dissimulation ?
Ce qui se passe, bien sûr.
A ce sujet Souhil me raconte l’histoire de l’hôtel Hermel, dans le 18ème, de sinistre mémoire. Là, vivent 25 familles. Une nuit, tout est tellement insalubre, deux chambres prennent feu. Tous les habitants sont évacués puis l’incendie étant éteint, renvoyés dans leur chambre envahies de fumée et de gravats !! Le lendemain, que faire ? Le DAL intervient alors, leur conseille de ne pas partir et établit un campement de tentes. Ils vont y passer quatre mois. Or, qu’apprend-il sur cet immeuble ? Il est occupé depuis douze ans par une gérante qui ne donne pas un sou de loyer aux propriétaires. Mais qui touche tous les mois 2000 euros x 39 chambres ! En liquide !!! Et qui semble appartenir à une mafia. La célèbre mafia des marchands de sommeil, parfaitement tolérée, semble-t-il par les autorités qui l’engraissent. Ah ! S’occuper des misérables rapporte à certains !
Le Dal qui se bat depuis 4 mois organise manifestation sur manifestation, va de commissariat en préfecture et obtient enfin l’expulsion de cette gérante ! Comme me le fait remarquer Souhil, c’est la première fois qu’une gérante est expulsée avant des locataires !!
La preuve est donnée . Quand on veut, c’est facile !
Les habitants ont été relogés. La Mairie a racheté cette structure et l’a destinée à une association qui s’occupe de femmes battues.
Y a-t-il des progrès dans le domaine du logement populaire ?
Le loyer solidaire en est un. La mairie garantit au propriétaire le paiement des loyers en attendant de retrouver un vrai logement. Si l’appartement n’est pas aux normes, il est mis aux normes par l’Etat. Le contrat est de trois ans.
Notons qu’en Angleterre, un maire n’a pas le droit de mettre des mineurs plus de six mois dans des hôtels.
J’ai ensuite rencontré des habitants hébergés rue Valenciennes qui ne semblent pas sortis de je ne sais quelle cour des miracles mais qui sont des êtres humains, comme vous et moi. Avec un toit sur la tête. Un matelas par terre. Une pièce à aménager. Une vie enfin à l’abri. Ne croyez pas qu’ils soient différents. Vous et moi avec quelques malheurs inattendus. Rien de plus.
RESF, DAL, l’honneur de notre temps qui méritent tous les jours les gros titres.
Il faudra le dire jusqu’à ce que cela soit entendu.
On est fier d’être humains quand on vous voit.
Beaux regards généreux…
74 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON