Les riches ont besoin des pauvres
S’il n’y avait pas de pauvres, comment pourrait-il y avoir des riches ? Pour devenir encore plus riche que l’année précédente, le riche a besoin du pauvre, mais surtout que le pauvre ne devienne jamais riche. Et si le riche veut s’enrichir, le pauvre doit devenir un peu plus pauvre. Si le nombre de pauvres diminue dans un pays, les riches s’en vont pour investir ailleurs.
- Repas offert par Pacific Garden Mission
- Chicago Tribune © Photo Nancy Stone
Nous participons tous à ce cercle infernal. Ainsi dans les années 1960-1970, la pauvreté avait diminué dans les grandes nations industrialisées et les riches, voyant en même temps leurs profits se réduire, sont allés investir dans des pays en développement en fermant leurs usines en Europe, aux Etats-Unis, partout où cela ne permettait plus une progression des bénéfices. En réponse à la désindustrialisation, les gouvernements concernés sous la pression des riches actionnaires ont mis en place des politiques économiques tendant à créer la précarité de l’emploi, à diminuer les avantages sociaux et salariaux acquis depuis la Seconde Guerre mondiale. C’est-à-dire qu’il était nécessaire de créer de nouveaux pauvres pour satisfaire les exigences des actionnaires qui voyaient leurs profits diminuer et qui partaient placer tous leur capitaux là où la population est suffisamment pauvre et mal protégée par les institutions. Les actionnaires continuent aujourd’hui de réinvestir en en Europe de l’Ouest, au Etats-Unis et au Japon car nos gouvernements ont su créer les conditions nécessaires à la reconstitution d’une classe de pauvres. Car s’il n’y a point de pauvres, il n’y a point d’enrichissement. Mais alors, si les gouvernements d’Occident n’avaient pas recréé les conditions de la pauvreté nécessaires au marché et que tous les investissements avaient fui vers les pays sous-développés, que se serait-il passé ? Certainement, une forte croissance de la pauvreté également dans cette hypothèse, mais dans ce cas, les entreprises ainsi délocalisées, à qui vendraient-elles ses produits ? Sans doute les actionnaires auraient-ils été aussi les perdants, si les gouvernements n’avaient pas joué leur jeu, car trop de pauvreté tue la croissance. Il n’y aurait plus eu assez de consommation. Il faut donc trouver un juste milieu, selon le marché, le nombre de pauvres ne doit pas aller au-delà d’une certaine limite impossible à définir.
Les Américains prétendent donner des leçons au reste du monde pour développer l’économie et diminuer ainsi la pauvreté. Il faudrait quand même qu’ils s’occupent de ce qui se passe chez eux et qu’ils prennent conscience des dégâts causés par leur politique économique qui est devenue aussi la notre, une politique universelle s’opposant à toute alternative. Les recettes économiques qu’ils imposent dans le monde entier et que nous suivons tête baissée sont responsables de cette grande pauvreté qui se répand dans tous les grands pays industrialisés tout en constatant que les riches sont encore et toujours de plus en plus riches. Le fossé entre riches et pauvres s’étend dans tous les pays d’Europe, aux Etats-Unis et même au Japon. La Chine, avec un taux de croissance de plus de 10% et ses millions de chômeurs, n’échappe pas à l’aggravation de la pauvreté en pratiquant un capitalisme d’Etat. Ce qui crée partout une forte diminution de la classe moyenne. Selon le rapport Mc Clatchy, le nombre d’Américains ayant basculé dans l’extrême pauvreté n’a jamais été aussi haut depuis 1975. 16 millions d’Américains vivent dans une grande pauvreté avec un revenu de moins de 9900 dollars par an pour une famille de quatre personnes dont deux enfants. Le seuil de "grande pauvreté" pour une seule personne correspond à un revenu inférieur à 5080 dollars par an. Le rapport note une augmentation de 26% de la pauvreté entre l’an 2000 et 2005. Pendant que la croissance économique, la productivité du travail et les bénéfices ne cessent de croitre, les salaires et les emplois ne progressent plus. Peu importe les chiffres exacts et les critères fixant le seuil de pauvreté qui diffèrent d’un pays à l’autre. Par nous-mêmes, quel que soit l’endroit de la planète où l’on se trouve, nous constatons tous l’aggravation de la pauvreté et l’augmentation de la richesse pour une minorité privilégiée. Cette minorité devrait pourtant craindre une montée du nombre de pauvres, lesquels pourraient tôt ou tard commencer à se révolter, notamment dans les grands pays industrialisés. Il y a aussi des limites à ne pas dépasser dans l’accroissement des inégalités sociales et la réduction du partage des richesses comme dirait le professeur Robert CHARVIN. Mais si le marché a besoin de beaucoup de pauvres, le pauvre a aussi besoin du riche pour travailler et tenter de satisfaire tous ses besoins. On n’a toujours pas trouvé une véritable alternative à l’économie de marché qui pourrait tous nous satisfaire et fonctionner réellement.
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