Les temps d’avant
Je ne sais pas pour vous, mais moi j’ai besoin de mon passé pour m’y ressourcer. Le passé procure parfois des surprises, au détour d’un document oublié, d’une photo négligée, vous plongeant dans le besoin d’un retour en arrière, d’un détail devenu soudain important.
Aujourd’hui cette attitude est devenue suspecte, vite jugée passéiste, ce qui n’est pas un compliment, surtout quand l’intéressé est encore dans la vie active. Le retraité généralement bénéficie de quelque indulgence, il est perçu comme quelqu’un de plus dans le coup, réfugié dans le confort d’un passé dépassé. Pourtant le passéiste, puisqu’il faut l’appeler ainsi, peut avoir le regard neuf pour comprendre ou s’étonner des changements survenus de façon prévisible ou subreptice à nos habitudes, même nos mentalités.
L’autre jour en regardant les photos familiales de mes parents, j’ai été frappé par le port du couvre-chef, tout le monde en portait un. J’ai recherché dans les sites du type cartes postales anciennes et effectivement les gens avaient cet attribut qui les caractérisait. Le couvre-chef n’était pas anodin, la fierté de la casquette ouvrière, le béret provincial, ou le chapeau mondain. Que dire de la femme magnifiée par toutes sortes de chapeaux, parfois assortis de plumes discrètes ou ostentatoires suivant le niveau social. Donc je me suis remis à regarder ma famille et leurs amis avec un œil nouveau, voyant en mon père avec son chapeau feutre, un coté détective privé des années 50, et ma mère avec son chapeau discret, la bourgeoise effacée qu’elle était.
Enthousiasmé par les chapeaux, je me suis tourné vers les films d’avant, et j’ai redécouvert ces chapeaux marquants de cette période. Ceux des artistes engagés mais seulement pour la promotion de la mode. Le chapeau melon de Charlot, Maurice Chevalier ambassadeur de la France, en canotier, casquette, bon chic bon genre, même en chapeau melon, tout lui allait. Fernandel, Gabin, les ont tous portés avec audace, jamais ridicules. Les actrices françaises sont plus rares à oser vraiment s’afficher souvent en chapeau, à part Brigitte Bardot, notre effigie à nous.
Les femmes à chapeaux avec un grand F furent plutôt étrangères, Audrey Hepburn et Grace Kelly, les plus importantes ambassadrices de la mode française.
Je m’interroge sur le déclin de ces artifices, est-il dû à la disparition des chapeliers ou celle des têtes d’affiche pour les porter ? Avant les femmes se voulaient féminines, et les hommes avaient pour modèles Humphrey Bogart, Charles Bronson, Gabin, Belmondo, tout une époque révolue à recréer.
En somme entre le passéisme dépressif et le reniement compulsif ou pire le dénigrement systématique du passé, il y a un espace pour un avant constructif, et sans travailler du chapeau.
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