Les USA et l’OTAN poussent-ils vers un 2ème Hiroshima en Ukraine ? Si tel est le destin, l’Occident sera sommé de régler la guerre à Gaza
Depuis l’annexion de la Crimée par la Russie, en 2014, suite à la révolution de Maïdan en Ukraine qui a conduit à la destitution du président Viktor Ianoukovitch et son exil en Russie, une guerre sporadique a opposé les séparatistes pro-russes à l’armée régulière d’Ukraine. Ce conflit a duré dans la région du Donbass jusqu’à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022.
Pour appeler « opération militaire spéciale », le choix du nom par la Russie a tout son sens. Il repose sur le décalage entre la puissance de l’armée russe et celle de l’armée ukrainienne ; de plus, la Russie est classée au rang de grande puissance nucléaire dans le monde, alors que l’Ukraine n’a pas l’envergure d’une grande puissance militaire comme la Russie, et n’est pas une puissance nucléaire.
Et on constate aujourd’hui, le paradoxe de cette guerre ; chaque camp croit qu’il est dans son droit dans cette guerre ; les Russes dans leur droit d’envahir, les Ukrainiens dans leur droit de repousser l’invasion russe. Si la Russie a opté pour envahir l’Ukraine, et lancé son « opération militaire spéciale », c’est aussi parce qu’il y a des causes « humaines » mais aussi des causes « géostratégiques », celles-ci sont essentielles et en rapport à son statut d’une des plus grandes puissances nucléaires du monde.
L’Alliance atlantique a voulu étendre sa sphère d’influence jusqu’aux frontières de la Russie, et elle s’est étendue à la plupart des pays de l’ex-aire d’influence de l’Union soviétique devenue, après son éclatement, la Fédération de Russie.
Fortement convaincu dans son droit, et surtout que la plupart des pays de l’ex-aire soviétique ont rejoint l’Union européenne et l’OTAN, la Russie n’a trouvé rien trouvé à redire compte tenu de vagues promesses qu’on lui a faites durant la période difficile qui a suivi la fin de l’URSS, en décembre 1991. Quant aux États-Unis et l’Europe, s'affermissant et se renforçant au fur et à mesure des intégrations des pays de l’Europe de l’est à l’Union européenne et à l’OTAN, ils n’ont pas pris en compte les avertissements russes ; ils ont continué leur extension à l’est de l’Europe. Leurs succès successifs en Europe centrale et orientale les ont poussé dans cette voie jusqu’à ce que vient le tour de l’Ukraine d’intégrer l’aire occidentale.
Globalement, le peuple ukrainien a opté pour l’Occident, mais les peuples russophones des régions de l’est de l’Ukraine, d’origine ruse, ont refusé leur intégration à l’Union européenne et à l’OTAN ; ils ont préféré se séparer de l’Ukraine et fonder des États indépendants. Après plusieurs années de crises et de lutte, ils ont, par référendums, en 2022, rejoint la Russie. Leur rattachement à la Russie leur permettant de se protéger de la mainmise du pouvoir central de Kiev. Une situation qui s’est transformée en guerre.
En plus des causes « humaines » qui ont provoqué le conflit, il y a les autres causes que l’on a définies comme essentielles. En effet, elles ont trait au statut de la Russie dans son rang de puissance nucléaire mondiale ; elles revêtent un caractère géostratégique et toucher à ce caractère constitue pour la Russie, au cas où l’Ukraine rejoindrait l’OTAN, un « péril existentiel ». Et c’est ce que l’Occident vise, et c’est ce qui explique que la guerre était inévitable.
D’autant plus que tout ce qui peut toucher la Russie influera sur la Chine ; ce qui explique la solidarité entre ces deux grands pays d’Asie qui s’érigent en puissances adverses menaçant le leadership et l’hégémonie de l’Occident sur le monde.
En fait, dans cette nouvelle phase de l’histoire, un processus historique naturel est en marche dans le monde. Qu’aujourd’hui, la Russie envahisse l’Ukraine est une donnée qui entre dans la marche de l’histoire de l’humanité. L’invasion de l’Ukraine a été un concours de circonstances historiques. Ne prenant que l’arme nucléaire découverte qui a été découverte en 1945, si on suit les événements historiques qui ont suivi depuis la fin de Deuxième Guerre mondiale, on constaterait que l’invasion de l’Ukraine en 2022 n’a pas surgi ex nihilo, mais que des causes précises l’ont fait surgir.
Dire que c’est le président Vladimir Poutine qui a déclenché l’invasion de l’Ukraine, c’est méconnaître les forces de l’histoire. Le président russe Poutine n’est qu’un homme, il ne peut déclencher l’invasion de l’Ukraine que si tous les éléments du processus historique sont propices et commandent cette invasion. En clair, le président russe n’a fait que déclencher ce qui était en puissance dans l’histoire. Si, par exemple, l’arme nucléaire n’avait pas existé, il n’y aurait pas eu d’invasion, ni d’opération militaire spéciale (SVO), ni révolution Maïdan, ni crise au Donbass.
Ne perdons pas de vue que l’arme nucléaire a permis 79 ans de paix entre les puissances ; sans l’arme nucléaire, les guerres entre les grandes puissances n’auraient pas cessé. C’est dire l’importance de la nouvelle ère qui s’est mis en place depuis 1945, l’« ère nucléaire », et qui ne permet, entre les deux camps opposés du monde, que des guerres par procuration.
Ce que l’arme nucléaire « garantit », malgré les menaces proférées par la Russie de recourir à l’arme nucléaire, il ne peut y avoir de guerre nucléaire entre les puissances. Et ce, pour la simple raison ce que toutes les puissances auraient à perdre. En un rien de temps, si une guerre nucléaire s’est généralisée, ce n’est pas 70 ou 80 millions d’êtres humains qui ont été tués au cours de la Deuxième Guerre mondiale, mais 1 ou 2 milliards d’êtres humains qui disparaîtront de la surface de la Terre ; en quelques heures, au plus tard en quelques jours, et non en six ans comme cela s’est passé entre 1939-1945. Plus de capitales, plus de mégapoles occidentales, russes, chinoises, indiennes, pakistanaises, coréennes, israéliennes…
Aussi l’Occident « aide l’Ukraine » mais tout en mesurant ses actes ; ne pas aller au suicide planétaire pour l’Ukraine. Et dans toutes les décisions prises en Europe, en cas de menace de guerre nucléaire, et donc dans l’Alliance atlantique, le dernier mot reviendra aux États-Unis et non aux pays d’Europe parce qu’ils sont la seule puissance nucléaire mondiale pratiquement à parité avec la puissance nucléaire de la Russie.
Si l’Occident, sur le plan historique, a toujours mené des guerres au Vietnam, en Corée, en Irak, en Syrie, en Afghanistan, la liste est longue, pour ses visées de domination, la situation aujourd’hui est différente. Précisément, par cette situation différente, on se pose la question : « Qu’est-ce qui pourrait advenir de la guerre en Ukraine ? En 2024 ou en 2025 ? Deux ans et bientôt 6 mois, depuis le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, la guerre en Ukraine est dans l’impasse. On ne voit toujours pas d’issue à la guerre, appelée à durer. Quant aux menaces de recours à l’arme nucléaire par la Russie, elles ne portent plus.
Dans cette guerre, les États-Unis et l’Europe ne peuvent se permettre de laisser la Russie gagner ; il en va de même pour la Russie ; les enjeux qui les opposent sont d’ordre planétaire. Posons la question : « Que craint la Russie au point qu’elle ait envahi l’Ukraine ? » Certes, l’objectif était de venir en aide aux populations russophones d’origine russe dans la région du Donbass. Mais alors pourquoi le gouvernement russe par la voix du président Vladimir Poutine parle de « péril existentiel » qui ne peut être motivé que par l’annexion des quatre régions ukrainiennes annexées. Il existe forcément un autre péril encore plus grand au point que gouvernement russe a évoqué un « péril existentiel » pour la Russie et qui, s’il le faut, légitime le recours aux armes nucléaires pour la survie de la Russie.
Pour comprendre, rappelons la situation de la Russie, en 1991. Après la dissolution de l’Union soviétique, l’Ukraine hérita de vastes stocks d'armes nucléaires, la plaçant au troisième rang des puissances nucléaires mondiales en nombre d'ogives. L'Ukraine avait conservé environ un tiers de l'arsenal nucléaire soviétique, ainsi que l'organisation de sa conception et de sa production. En 1994, l'Ukraine, par des arrangements financiers, a accepté de se séparer de ces armes et d'adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Le 5 décembre 1994, elle signe les mémorandums de Budapest par lequel elle accepte de se défaire de l'énorme stock d'armes nucléaires, le désarmement étant financé par le gouvernement des États-Unis dans le cadre de l’accord Cooperative Threat Reduction Program.
Les mémorandums de Budapest sont signés par l'Ukraine ainsi que la Biélorussie et le Kazakhstan qui détiennent aussi un stock d’armes nucléaires de l’ex-URSS. Ces accords sont paraphés par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie qui accordent des garanties d’intégrité territoriale et de sécurité pour chacune de ces trois anciennes républiques socialistes soviétiques, en échange de leur ratification du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). En 2009, les États-Unis et la Russie confirment de nouveau la validité de ces trois mémorandums.
Le mémorandum stipule que la Russie, les États-Unis et le Royaume-Uni s'engagent, en contrepartie de l'adhésion de l'Ukraine (ou de la Biélorussie, ou du Kazakhstan) au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et de l'achèvement du transfert de son arsenal nucléaire à la Russie, à :
- Respecter l'indépendance et la souveraineté ukrainienne dans ses frontières actuelles.
- S'abstenir de toute menace ou usage de la force contre l'Ukraine, si ce n'est en défense légitime ou d'une autre manière conforme aux dispositions de la Charte des Nations Unies.
- S'abstenir d'utiliser la pression économique sur l'Ukraine en vue d'influencer sa politique.
- Demander l'aval du Conseil de sécurité des Nations unies si des armes nucléaires sont utilisées contre l'Ukraine.
- S'abstenir d'utiliser des armes nucléaires contre l'Ukraine.
- Consulter les autres parties prenantes si des questions se posent au sujet de ces engagements.
Lors de la crise de Crimée de 2014, l'Ukraine, se référant à ce mémorandum, a rappelé la Russie qu'elle s'est engagée à respecter les frontières ukrainiennes, ainsi qu’aux autres signataires qu'ils en sont garants. L'interprétation qui a touché l’alinéa 2 et 6 du mémorandum par la Russie donne une justification à une intervention du fait que des populations majoritaires dans les régions de l’est de l’Ukraine ont rejeté le projet d’intégration du gouvernement central à l’Occident et que cela relevait de leur aspiration légitime à leurs droits politiques.
Ce qui a amené la Russie à être solidaire avec les populations russophones de l’est de l’Ukraine, d’ethnie russe, et explique son intervention en février 2022. En vérité, à cette population russophone s’est greffée la place de la Russie sur le plan de l’équilibre géostratégique mondial. Une Ukraine qui projette d’être intégrée à l’Union européenne et à l’OTAN, et cherche à reprendre les territoires annexées avec le soutien de l’Occident, si elle réussissait, constituerait non seulement une défaite pour la Russie mais aussi la remise en question de sa place dans l’équilibre de puissance mondiale. Et c’est ce que le président russe a voulu signifier en évoquant un « péril existentiel » et le recours à l’arme nucléaire.
Pour avoir une vision précise de ce qui va se passer dans les temps à venir, compte tenu de l’impasse dans la guerre en cours en Ukraine qui évolue très peu, donnons un exemple de fin de guerre.
La guerre se poursuit mais sans grand changement, hormis quelques villages conquis par l’armée russe. La résistance de l’armée ukrainienne tient, et toujours pas d’évolution ; des négociations sont menées par le pouvoir central de Kiev, mais la position de la Russie reste inchangée. Tout dialogue de paix doit passer par la situation de fait de la guerre, et sur la base des quatre régions annexées (Lougansk, Donetsk, Kherson et Zaporijjia).
Comme il l’a défini lors d’un discours prononcé le 14 juin 2024, le président russe Vladimir Poutine a présenté ses conditions pour la mise en place d’un cessez-le-feu en Ukraine : le retrait de l’armée ukrainienne des quatre régions le plus touchées par le conflit, dans l’est du pays, ainsi que l’abandon de sa candidature en vue d’accéder à l’OTAN.
- La demande russe concerne les oblasts ukrainiens de Donetsk, Louhansk, Zaporijjia et Kherson.
- « Garantir pleinement les droits, libertés et intérêts des citoyens russophones en Ukraine et reconnaître de nouvelles réalités territoriales : le statut des républiques populaires de Crimée, Sébastopol, Donetsk et Louhansk et les régions de Kherson et de Zaporijjia en tant que sujets de la Fédération de Russie ».
Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a immédiatement publié un communiqué portant sur la déclaration de Poutine. En voici les principaux points :
- Les ultimatums de Poutine ne sont pas nouveaux, et ont déjà été entendus à de nombreuses reprises.
- Les déclarations de Poutine sont manipulatrices et visent à tromper la communauté internationale et à diviser l’unité mondiale autour de la Charte de l’ONU.
- Poutine essaie de se présenter comme un artisan de la paix, alors qu’il est le provocateur de la plus grande agression armée en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale et qu’il souhaite qu’elle se poursuive. L’Ukraine, quant à elle, veut y mettre un terme.
- Une coalition internationale est nécessaire pour contraindre la Russie à de véritables négociations, c’est pourquoi il est important qu’un maximum de pays participe au Sommet mondial pour la paix.
Aux réponses du gouvernement ukrainien, il est clair que ni le pouvoir de Kiev ni les États-Unis ni les pays européens n’accepteraient les conditions de la Russie, car ce serait reconnaître implicitement leur défaite et pour quel but ces efforts de guerre et cette aide massive occidentale, depuis plus de deux ans et elle doit continuer, et qui doit à la fin se terminer par la victoire de la Russie ? Elles seraient sans sens ; ce serait la Russie qui l’aura emporté dans ce bras de fer sur l’Ukraine entre l’Occident et la Russie.
Si nous suivons bien l’évolution des événements qui marquent la guerre en Ukraine, il ne ressort rien de positif tant les positions des deux camps sont très éloignés ; chaque camp ne donne aucune impression qu’il va dialoguer et essayer de négocier la fin de la guerre. C’est compréhensible tant pour la Russie qui reste ferme sur ses positions que le pouvoir de Kiev qui s’est trop engagé comme l’Occident pour reculer. En clair, aucun camp ne reculera.
Donc la diplomatie est au point mort ; elle ne pourra pas concilier les positions pour essayer de trouver un compromis. Les deux camps visent la victoire du fait que les enjeux sont d’ordre planétaire ; si l’Ukraine et l’Occident viennent à perdre, ce sera un véritable désastre pour tout l’Occident, et même le doute pèsera sur l’OTAN qui n’a pas apporté ce qu’il a promis à l’Ukraine ni une sécurité réelle pour les membres des pays de l’ex-aire d’influence de l’Union soviétique, i.e. les pays d’Europe centrale et orientale (PECO).
A notre sens, l’Ukraine aura des difficultés pour ainsi dire insurmontables pour repousser les forces russes et libérer les régions annexées au moins pour deux raisons. D’abord, la puissance de l’armée ukrainienne ne peut se comparer à l’armée russe, une des plus puissantes au monde, et ce malgré l’aide occidentale. La deuxième raison, ce sont les populations des régions annexées qui, par référendums, ont décidé de se séparer de l’Ukraine et rejoindre la Russie.
Combien même la guerre se poursuit, elle sera une guerre d’usure. Il viendra un moment où l’Ukraine atteindra une limite naturelle dans ses efforts de guerre où elle sera obligée de « dialoguer » avec la Russie pour mettre fin à la guerre. Comme dans toutes les guerres passées. L’Allemagne a été obligée, en 1918, de demander un armistice du fait de l’apparition de troubles dans l’armée allemande dus au sentiment de défaite des troupes.
Et c’est cette situation qui va devenir extrêmement dangereuse ; et l’Ukraine n’acceptera pas la défaite ni d’ailleurs l’Occident qui a tout à perdre. Quelle sera alors la réponse du pouvoir ukrainien ?
Postulons qu’au cours de cette guerre, avec le risque de la défaite, l’Ukraine poursuit un programme nucléaire secret pour se doter de l’arme nucléaire, comme a fait Israël dans son programme nucléaire secret pour s’immuniser des guerres avec les pays arabes. Postulons que l’Occident pour éviter une défaite aide l’Ukraine dans son programme nucléaire. On peut même dire que cette situation de l’après-guerre est déjà anticipée par l’Occident et que la crise russo-ukrainienne même si un cessez-le-feu est décrété avec la Russie ; la fin de la guerre ne sera qu’une pause.
Postulons que l’Ukraine réussisse son programme nucléaire secret, et qu’elle fasse un essai nucléaire souterrain réussi, que peut faire la Russie ? Elle n’a aucun moyen pour s’opposer ; l’Ukraine, avant même de procéder à son essai nucléaire, s’est déjà doté d’un arsenal de bombes nucléaires, dès lors elle est déjà « immunisé » face à la Russie.
En effet, cette nouvelle situation de l’Ukraine nous fait rappeler la Corée du Nord avec les États-Unis. Après avoir procédé à un essai thermonucléaire et, avec des essais concluants de missiles balistiques de portée de plus de 10 000 km, pour la première fois en 2017, pouvant atteindre les États-Unis, la Corée du Nord a mis en danger la première puissance du monde.
La crise nord-coréenne avec les États-Unis a pris des proportions telles qu’elle a fait courir un risque de guerre nucléaire entre les deux pays. Ce n’est qu’à la suite des rencontres des deux présidents américain et nord-coréen, en 2018, que la crise a été réglée. Ce qui s’est passé pour la Corée du Nord pourrait se passer pour l’Ukraine. La Russie aura alors à sa frontière sa « Corée du Nord » qui pourra menacer de guerre nucléaire Moscou.
L’Ukraine se trouvera alors dans la même posture que la Corée du Nord ; la Russie sera obligée de dialoguer comme l’a fait le président Donald Trump avec son homologue nord-coréen Kim Jong-un. Une rencontre à terme entre les deux présidents russe et ukrainien.
Et, aujourd’hui, la guerre en Ukraine n’est pas terminée. Il est clair que la Russie comme l’Occident ont anticipé sur la fin de la guerre et ce qui pourrait survenir. On comprend dès lors l’enjeu que constitue l’Ukraine pour la Russie à ses frontières ; une Ukraine autopilotée par l’Occident, qui serait dotée d’armes nucléaires, ne peut que constituer un « péril existentiel », provoquant un danger permanent compte tenu de l’hostilité de l’Occident qui cherche à dominer et Ukraine qui lui emboîte le pas.
Tant que la guerre avantage la Russie, l’Ukraine et l’Occident n’arrivant pas à faire reculer la Russie, la situation de guerre va forcément perdurer ; elle ne se règlera pas ; mais, avec l’usure et l’aide occidentale qui ne tarit pas, la guerre qui se poursuit, mais dans l’impasse, il peut arriver qu’une situation de cobelligérance avec l’Occident devient de plus en plus visible, la Russie, comprenant que, même si elle sortait victorieuse de la guerre, la situation ne sera pas apaisée pour autant ; le conflit pourrait avoir une autre dimension, beaucoup plus périlleux pour la Russie.
Comme l’a déclaré Pavlo Rizanenko, en 2014, alors membre du parlement ukrainien : « À l'avenir, peu importe manière dont la situation se résout en Crimée, nous avons besoin d'une Ukraine bien plus forte. Si vous avez des armes nucléaires, les gens ne vous envahissent pas. »
Et c’est dans cette fenêtre d’opportunité que lui offre la guerre, anticipant la fin de la guerre, que la Russie, dans ses options retenues, pourrait être amenée à utiliser pour la première fois l’arme nucléaire contre l’Ukraine ; certes, cela relèvera de circonstances exceptionnelles, mais l’objectif est de mettre définitivement fin au « péril existentiel » qui viendrait à peser sur la Russie si cette guerre n’y mettrait pas fin, si même la victoire contre l’Ukraine et l’Occident n’y mettrait pas fin.
Si la Russie utiliserait une arme tactique de faible puissance nucléaire contre l’Ukraine, que pourrait faire l’Occident ? Il est évident que ni les États-Unis ni l’Europe ne vont se lancer dans des représailles contre la Russie ; le risque de Troisième guerre mondiale est omniprésent. Donc la seule réponse des États-Unis est de pousser à la fin de la guerre. Il n’y a pas d’alternative. Certes, la Russie sera condamnée par le monde entier ; mais anticipant, par l’emploi de l’arme nucléaire, la Russie aura obligé le gouvernement ukrainien et l’Occident à mettre fin à la guerre, mais aussi à montrer qu’un éventuel programme nucléaire ukrainien pour contrer la Russie ne servirait ni l’Ukraine ni l’Occident.
L’Ukraine non seulement ne pourra pas intégrer l’OTAN mais les pays d’Europe, en particulier les PECO commenceront à douter de la puissance de l’Alliance atlantique. Assure-t-elle réellement la sécurité à ses membres et à ceux qui veulent s’engager ?
Il n’y a pas de réponse. Une seule vérité, c’est que la « ligne rouge existentielle à ne pas franchir », brandie par Moscou, était réelle. L’Occident n’en a pas tenu compte ; il en aura subi les conséquences. Quant à la Russie, en provoquant un 2ème Hiroshima en Ukraine, l’objectif aura été de supprimer le talon d’Achille qu’était l’Ukraine dans son rang de première puissance mondiale (par le nombre d’ogives nucléaires).
Comme l’a été le Talon d’Achille du Japon pour les États-Unis, en 1945, et qui l’ont supprimé par deux fois ; Hiroshima est bombardée le 6 août 1945, Nagasaki le 9 août.
Les conséquences qui surviendraient seraient considérables. L’Alliance atlantique perdra de sa puissance surtout en termes de rhétorique de guerre ; Occident s’affaiblirait ; la realpolitik reprendra ses droits. Désormais, l’Occident et l’OTAN chercheront à stabiliser la situation avec la Russie.
La situation de guerre et l’après-guerre à Gaza, en Cisjordanie et au Nord d’Israël va évoluer considérablement. Elle le sera par les conséquences de la guerre en Ukraine et l’affaiblissement de l’Occident en Europe qui aura suivi. Les États-Unis et les pays d’Europe seront obligés de revoir leur aide militaire à Israël.
La guerre est au dixième mois à Gaza et Nord d’Israël, et toujours pas d’issue. Il est évident que les conséquences de la guerre en Ukraine et l’emploi d’armes nucléaires auront des retentissements dans toute la région du Proche et Moyen-Orient ; c’est très possible que les pays de cette région chercheront à développer des armes nucléaires pour s’immuniser contre Israël qui est déjà doté.
La fin de la guerre en Ukraine et la pression des États-Unis vont mettre fin définitivement à la guerre à Gaza, en Cisjordanie et au Nord d’Israël, en frontière avec le Liban. Si telle est la destinée du monde, elle aura au moins mis les points sur les i à l’Occident qui, malgré tous les échecs dans ces guerres passées, n’en continue pas moins de menacer le monde. Et toujours le même objectif, « chercher à dominer le monde ». Reste que toute domination ne s’opère qu’un temps. L’histoire témoigne des dominations passées ; elles n’ont duré qu’un temps dans l’histoire. L’humanité avance et ne peut être « domestiquée » par quelque puissance, c’est le sens même du progrès du monde humain.
Medjdoub Hamed
Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale
Relations internationales et Prospective
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