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Accueil du site > Tribune Libre > Les viseurs Catherine, un deuxième Karachigate !

Les viseurs Catherine, un deuxième Karachigate !

L'actualité des primaires socialistes nous a un peu fait oublier les affaires qui avaient occupé les téléviseurs auparavant. Celles des casseroles qui s'accumulent derrière le char présidentiel, dont celles liées à l'affaire dite de Karachi, qui se rapproche très fort de l'occupant de l'Elysée. Au point que Claude Guéant, ce petit préfet devenu maître de la France se soit cru obligé de rappeler que dans l'attentat, c'était bien la piste islamiste qu'il continuait à privilégier. Ce en quoi il est le seul désormais, une autopsie restée longtemps dans un placard ayant révélé que l'auteur de l'attentat n'était pas à bord de la voiture ayant explosé devant le car des techniciens français massacrés. En reprenant ce dossier, au retour de vacances, j'étais tombé par hasard sur une étrange coupure de presse datant de 2005 évoquant un autre scandale : la voici, c'est en quelque sorte un Karachigate numéro deux qui est décrit, une histoire qui va donner du travail supplémentaire aux juges chargés du suivi de l'affaire, pour sûr. On y découvre les mêmes méthodes, en pire, peut-être puisque là la France a réussi à fourguer aux militaires pakistanais des armes dont ils n'avaient pas besoin, ces derniers disposant déjà des modèles supérieurs. On y découvre aussi une sur-tarification douteuse, et également une accélération soudaine des dossiers pour que tout soit réglé avant juin 2005. Bref, les mêmes ingrédients de paiements en sous-main de sommes destinées à une échéance particulière : celle liée aux comptes de campagne d'une élection présidentielle ! Place au Karachigate N°2 !

Dans un article du Point, en date du 28 septembre dernier, on nous présentait les 10 personnes impliquées dans l'affaire de Karachi. Je vais me permettre d'en rajouter deux, un peu oubliés semble-t-il par la presse papier, alors qu'ils ont joué un rôle vital dans l'affaire. Dans ce même article, François Léotard hérite d'un rôle plutôt subalterne, alors qu'à mon humble avis, il est plutôt au centre de cet imbroglio. Ce même Léotard, qui avait sermonné Nicolas Sarkozy dans un livre pamphlet intitulé "ça va mal finir", qui devient, plus on avance, de plus en plus prémonitoire. Or l'homme a davantage à dire sur la question, c'est une évidence. Mais à l'heure actuelle, je pense qu'à trop avoir focalisé sur le côté français de l'affaire, on a eu tendance à oublier son côté pakistanais. Et ce côté n'est pas à prendre à la légère, car en face des vendeurs français et de leurs intermédiaires, on ne fait pas que trouver des militaires. On trouve aussi... un chef d'Etat, pas moins.

Ce chef d'Etat, c'est Asif Ali Zardari, arrivé au pouvoir en 2008, autrement dit c'est également l'époux de feu Benazir Buttho, venu parler soi-disant terrorisme avec Sarkozy le 2 août 2010. C'était sa deuxième visite, notait alors la presse : la première datant du 15 mai 2009 ; pas sûr déjà que leur première rencontre ait été pour parler des talibans, contrairement à ce qu'avait claironné l'Elysée à l'époque : car Asif Ali Zardari, est aussi l'un des hommes parmi les plus corrompus de la planète, surnommé "Monsieur 10 %", notait même à son encontre France 24."Il est accusé d’avoir détourné des centaines de millions de dollars, certains avançant même le chiffre de 1,5 milliard de dollars, qu’il aurait placé hors du pays. Des accusations que Zardari a toujours rejetées et qu’il met sur le compte de rivalités politiques. Il a cependant été reconnu coupable de corruption et emprisonné de 1997 à 2004. Il a même, un temps, été soupçonné d’avoir commandité l’assassinat de Murtaza Bhutto, le frère de son épouse, avant d’être blanchi. Puis, il rejoint sa femme qui vit en exil. Le couple reviendra au Pakistan en octobre 2007, à la faveur d’une amnistie décrétée par le président de l’époque, Pervez Musharraf." N'oublions pas en effet que le contrat des sous-marins Agosta a été signé en 1994, à l’époque où c'était Benazir Bhutto qui était ministre des Finances du pays. Elle aussi, rappelons-le également, n'était pas la sainte icône vénérée que l'on a pu montrer après sa mort : elle était aussi corrompue que son mari pouvait l'être.

Ce jour-là, à Paris, le 2 août 2010, Asif Ali Zardari, avait récolté dit-on 12 millions d'euros, promis par la France aux réfugiés des zones de combat talibanes. On n'ose imaginer ce que cet argent est advenu réellement, connaissant son collecteur. La chaîne d'état de la télévision pakistanaise annonçant dès son retour que la France avait "donné son accord pour fournir au Pakistan des technologies nucléaires civiles". Une promesse, comme celle faite à Kadhafi lors de sa venue en grande pompe à Paris, qui ne semblait pas faire grand poids des enjeux sur place, ou qui oubliait qu'au même moment les américains s'inquiétaient beaucoup du développement du nucléaire pakistanais, avec une centrale longtemps cachée et découverte par des photos satellites.  La diplomatie sarkozienne, on s'en rendait déjà compte, se bornant à fourguer tant que faire ce peut des techniques ou des matériels, sans trop se soucier de leurs conséquences, on l'a bien vu en Libye avec les ordinateurs pour surveiller la populace et enfermer les opposants. Avec le Pakistan, on joue avec le feu : après avoir vendu ses secrets à la Corée du Nord, le pays aurait favorisé la création d'un site nucléaire en Arabie Saoudite, situé à Al-Sulaiyil, au sud de Riyadh. Si on ajoute ses missiles CSS-2 achetés en 1988 à la Chine, on obtient une belle pétaudière.

Car dans toute l'affaire de Karachi, on avait jusqu'ici oublié son rôle, à ce président maniant la liasse de dollars depuis toujours. Un rôle clairement évoqué, pourtant, dans la presse anglo-saxonne. Le sien, et celui de l'agent intermédiaire principal du pakistan. Car les pakistanais avaient leur Ziad Takieddine à eux, et il s'appellait alors Amir Lodhi : "L'agent pakistanais le plus actif travaillant pour le compte de la DCN et de la Sofma en relation avec les négociations du contrat Agosta a été Amir Lodhi. Frère d'un ambassadeur pakistanais formé aux États-Unis, Amir Lodhi est un homme d'affaires de haut vol et Un financier avec un passé trouble. Menacé par l'énorme scandale de la banque BCCI, et son effondrement en 1991, avec le blanchiment d'argent lié au terrorisme et aux réseaux criminels, Lodhi en est sorti indemne après avoir accepté légalement deux coopérer avec les enquêteurs". En somme, il jouait depuis les agents doubles, et son curriculum sur lequel était marqué au fer rouge "BCCI" le caractérisait tout de suite comme jouant dans la cour des personnages douteux (la fameuse banque ayant servi à laver l'argent sale de la drogue !).

Pour ce qui est de le rôle exact du dénommé Lodhi dans l'affaire, tout avait été raconté au jugeTrévidic : "Et puis, quand un pays comme la France a cherché à vendre des sous-marins en 1994, il est devenu une figure essentielle. Amir Lodhi avait une carte importante dans sa manche, car il était proche d'Asif Ali Zardari, le mari [de Benazir Bhutto] qui avait un contrôle sur les contrats de l'État. Le 6 avril 2010, Henri Guittet, qui était directeur général de la Sofma au moment du contrat Agosta, selon le juge Trévidic, déclarait que de sur les 6,25 des commissions prévues "il y avait 4% pour les Zardari-Bhutto par l'intermédiaire de Lodhi, et l'OMS en gardait peut-être un peu pour lui-même. " Il a également dit au magistrat :.. « Je crois que dans le cas de M. Zardari il avait créé une entreprise pour recevoir cet argent, je ne me souviens pas le nom de la compagnie, elle était peut-être suisse ou au Panama [...] La somme restante devait être de 1,5% pour Lodhi lui-même, un peu pour Ansari [un autre intermédiaire], environ 0,25%, et environ 1% pour Zafar Iqbal [également un autre intermédiaire]. "Guittet, qui est probablement parmi les mieux placé pour connaître les détails face aux cadeaux du contrat Agosta, avait ajouté au magistrat : « Comme pour les 4% destiné à Zardari-Bhutto, je crois que 1% était due à la signature du contrat de la vente, ce qui signifie que c'était le moment où tout pouvait commencer et surtout quand le premier versement à étè payé cela semblait être du 1% par an. Les 2% restant devaient être payés au prorata des paiements des clients. " Le chef d'Etat actuel et sa femme, alors premier ministre étaient partie prenante du contrat... ou plutôt des versements des commissions. Un futur chef d'Etat qui créait une entreprise fantôme pour ramasser les commissions, voilà qui n'est pas sans rappeler un certain Nicolas, futur président lui aussi et la société luxembourgeoise Heine. Les deux ont utilisé semble-t-il les mêmes méthodes !

En face de Lohdi, en France, on l'a vu, c'est Takieddine, le protégé de Donnadieu de Vabres, à l'époque, qui sert de personnage intermédiaire. « Il est parfaitement exact que Ziad Takieddine a été imposé à la DCNI [filiale de la DCN dédiée aux questions financières, ndlr] par le pouvoir politique, ainsi qu’Abdulrahman el-Assir », a affirmé Gérard Menayas, le directeur financier de la DCNI de 1992 à 2002, au juge Marc Trévidic. Ce que confirme Emmanuel Aris, un cadre de DCNI : « M. Castellan [patron de la DCN, ndlr] m’a demandé d’aller le voir. M. Takieddine lui avait été présenté par M. Donnedieu de Vabres, qui était au cabinet de M. Léotard [ministre de la Défense du gouvernement Balladur]. D’après ce que m’a dit M. Castellan, le nom de Takieddine lui avait été donné par les autorités françaises. »

Lohdi est bien l'homme qui tirait les rênes du côté pakistanais, comme l'avaient remarqué les français eux-mêmes  : "dans l’une des notes du rapport de mission « Nautilus », l’ancien agent de la DST, Claude Thévenet, soulignait par ailleurs que l’homme d’affaires pakistanais Amir Lodhi avait été identifié comme le« coordinateur des opérations de rétrocommissions entre la France et le Pakistan ». Toujours selon « Nautilus », Amir Lodhi, dont le nom est apparu à plusieurs reprises dans les mouvements bancaires découverts en Suisse, travaillait notamment avec l’amiral pakistanais Mansurul Haq, condamné pour corruption au Pakistan dans le cadre de la vente des sous-marins Agosta par la France." On le voit encore : dès que l'on évoque la question, on tombe sur des militaires pakistanais, qui ne vivent que de la corruption.

Une corruption qui n'a pas concerné que les sous-marins : dans un texte lui aussi oublié datant de 2005, un journal, le South Asia Tribune évoquait un autre fait du même tonneau à propos cette fois d'un contrat de viseurs de visées thermiques vendues par Thales. Le journal révélant le deal commençant par l'amertume d'officiers pakistanais, qui visiblement écœurés par les méthodes de leurs supérieurs, avaient tout balancé à la presse : « Ces agents ne peuvent pas se réconcilier avec le fait que 21 millions de dollars supplémentaires ont été versés à une société française en supplément, versés à la hâte pour acheter du matériel de qualité inférieure déjà abandonné par la plupart des pays, y compris l'armée pakistanaise elle-même". Nous en étions restés à un seul Karachi-Gate, voilà que je vous en découvre par hasard un second !

L'histoire en effet mérite d'être contée en détail, comme l'avait très bien fait le SAT : selon les derniers détails, un appel d'offres restreint a été lancé le 17 Juin 2005 par le directeur général des Achats de la Défense cherchant à se munir de 900 viseurs thermiques (Thermal Image Sight ou TIS) et des unités de contrôle de tir pour les tanks de bataille pakistanais Al-Khalid et Al-Zarrar, (T-85 et T-80U). Le journal notant l'incongruité totale de la commande (et de sa date !) : "étonnamment pour un tel achat important grâce à aucun appel d'offres répertorié 1338/49/TISight/DGDP/PC-3B en date du 17 Juin 2005, seulement quatre jours ont été donnés pour la soumission des offres .Le 21 Juin a été défini comme la dernière date de soumission des propositions". Imagine-t-on pouvoir répondre à une telle demande en quatre jours seulement ? Comme le note encore le journal, c'est surtout parce que les jeux étaient déjà faits à l'avance : "ce fut apparemment fait ainis parce que la Direction des armes et de l'équipement (W & DE) , le GQG de l'armée à Rawalpindi, avait déjà pré-qualifié et présélectionné deux sociétés françaises, à travers un long processus de tests, d'essais et de dernière évaluation technique débuté dans la première semaine de juin 2005. Ainsi les deux sociétés étaient pratiquement prêtes à soumissionner. Ces sociétés étaient Sagem et Thales, le premier étant la troisième entreprise d'électronique de l'Europe de la Défense et de la Sécurité , tandis que Thales est en France la plus grande entreprise militaire. Adnan, le fils de feu le général Malik Jamsheed représentait Sagem au Pakistan alors que Thalès était représenté par un colonel et Wazir Shibli, de F.A. Enterprises." En voilà deux autres qui ont dû être bien arrosés, on peut raisonnablement s'en douter...

Passe encore sur le procédé, puisque nous dit-on c'est toujours ainsi : il y a davantage de graisse sur les pattes des intermédiaires que dans les roulements de chars que l'on vend, paraît-il. Mais le gros hic de l'histoire, c'est que le Pakistan n'avait absolument pas besoin de ses équipements ! Il en possédait déjà de plus récents ! Ce qui laisse augurer de belles magouilles en effet : "les offres techniques ont été ouvertes et évaluées d'abord par les services techniques, I & E et ITD directions de GHQ et après deux heures seulement de discussion,s les deux ont été déclarés techniquement qualifiés avec 4 observations techniques faites sur l'offre de Sagem et 35 observations techniques sur la candidature de Thales." Des offres qui ne sont pas pour autant similaires, note SAT : "la différence la plus significative dans les deux offres était que l'offre de Sagem était d'une génération-3 (G-3)d'unités TIS, tandis que Thales offrait 'ancienne génération-2 (G-2). L'appel d'offres avait était formulé pour les deux types bien que le G-2 était déjà presque obsolète." Mieux encore, puisque l'armée qui les commandait disposait déjà du modèle au-dessus : "pourquoi ces unités G-2 avaient été mises sur le marché est un grand mystère, car l'armée pakistanaise disposait déjà de G-3, montés sur les chars Al-Khalid fabriqués par le Pakistan pour lesquels Islamabad et le GHQ avaient fait beaucoup d'efforts pour assurer l'exportation pour des commandes en provenance du Golfe, de l'Arabie Saoudite et d'autres pays." Bref, deux contrats français en forme de scandale et d'arnaque complète, signés à la va-vite ; là encore pour une date butoir, cette fois de fin juin 2005. Bien entendu, totalement obsolètes, les lunettes de visée n'ont même pas été utilisées : "les officiers de l'armée en colère disent que les unités G-2 n'ont pas été montées sur des chars Al-Khalid à cause de problèmes d'identification, d'intégration, de stabilisation et de cible. Dans toutes les manifestations à d'éventuels acheteurs étrangers, le GQG a affiché les chars Al-Khalid munis d'unités G3".

Les journalistes, en épluchant ce second scandale, vont trouver d'autres anomalies dans ce fameux contrat : "Thales, d'autre part, n'était même pas un fournisseur qualifié jusqu'au début de 2004 et seul Sagem était dans la course. Puis vint le général Tariq Majeed, le chef d'état-major général avec son fond de renseignement militaire (MI). Il a ordonné que Thales devrait également être inclus dans les essais et les tests qui ont continué jusqu'à novembre de l'année dernière. Plus d'essais ont été effectués en Février / Mars de cette année jusqu'à ce que Thales ait été pré-qualifié, même si elle n'avait à offrir que des mdèles G-2." Bien entendu, derrière tout cela, il y avait des liasses de billets de dissimulées : "les grosses enveloppes de soumissions ont été ouvertes le 21 Juin 2005, après que les offres techniques des deux entreprises aient été approuvées. Sagem avait offert chaque unité de G-3 TIS pour 59 000 euros, pour un total de 53,1 millions d'euros ($ 64,5 millions de dollars) pour 900 unités. Le prix de Thales a été lui d'un incroyable 78 000 euros pour chaque unité de G-2, soit un total de 70,2 millions d'euros (85,3 millions de dollars)". Et au final, surprise, c'est l'offre la plus élevée qui a été retenue : "Le jeudi Juin 23, 2005, le Lt. Gen Tariq Majeed, chef d'état-major général a pris la décision, avec l'aide du vice-chef d'Etat major, le général Ahsan Saleem Hayat, d'écarter toutes les objections techniques et autres pour donner le contrat à Thales, au tarif supérieur, pour ses équipements inférieurs G-2. Sa décision a été donnée le dernier jour de son travail, et le Lt. Gen Majeed a effectué dès le lendemain d'un voyage officiel à l'étranger." Les poches pleines, serait-on tenté de dire ! En France, si l'on regarde bien, ce contrat de dernière minute, lui aussi, tombe pile-poil dans les dates de clotûre des comptes de campagne électorale : aurait-il servi à faire la jonction avec des virements en retard des Agosta ???

Entre temps, notre Lohdi s'évertuait toujours à faire monter ses propres enchères. Comme il ne disposait pas d'un Basire sous la main et d'une princesse de l'Est à ses côtés, il s'était fait aider par une jet-setteuse bien connue sur la place de Paris : elle lui servait en fait de banquière, en suisse, nous dit Mediapart. "Mais ce n’est pas tout. D’après les confidences d’un officiel genevois, certains des flux financiers mis au jour en Suisse font apparaître des mouvements de fonds initiés par M. Lodhi au profit de… la célèbre « jet-setteuse » française Hermine de Clermont-Tonnerre. Or, dans une note « Nautilus » du 11 septembre 2002, il est fait mention du séjour à Paris et à Cherbourg de « plusieurs chefs militaires pakistanais », en amont de la signature du contrat Agosta. « Ils étaient accompagnés par Hermine de Clermont-Tonnerre, qui prenait en charge leur confort sur le territoire français », précise le document. Sollicitée ces dernières 48 heures, Mlle de Clermont-Tonnerre n’a pu être jointe pour commenter ces informations". Une Hermine de Clermont-Tonnerre, reine des nuits parisiennes, que l'on verra souvent accompagnée de "la belle hélène", la femme de Basire, le grand ami de Nicolas. Inséparables, même, les deux : à partir de là, on peut en effet facilement imaginer qu'Hélène de Yougoslavie n'a rien inventé, quand elle a évoqué les voyages avec les valises vers la Suisse : si ce n'étaient celles de son mari, c'étaient tout simplement celles de sa copine de Clermont-Tonnerre, qui portait celles offertes par Amir Lodhi.

La Suisse, où le couple Bhutto avait accumulé quelques liasses, (12 millions de dollars au bas mot) qu'avait découvert le nouveau premier ministre au départ de Bénazir des affaires : "les transferts d’argent en question sont apparus à l’occasion d’une importante vague de perquisitions bancaires réalisées à la fin des années 1990 par un juge d’instruction genevois, Daniel Devaud, qui avait été saisi, en 1997, d’une demande d’entraide judiciaire émanant de l’Etat pakistanais. Comme elle le fait dans ces cas-là, la justice suisse avait ouvert sa propre procédure en parallèle. Le nouveau chef du gouvernement de l’époque, Nawaz Sharif, avait alerté les autorités helvétiques car il suspectait alors son prédécesseur, Benazir Bhutto, et son entourage d’avoir mis en place, entre 1993 et 1996, un vaste système de corruption et d’enrichissement personnel à la faveur de plusieurs marchés publics internationaux". On le voit bien, pourquoi cette affaire de Karachi est à la fois complexe et sulfureuse : en révéler tous les méandres, c'est s'attaquer à ceux qui ont ravagé le Pakistan de leur arrivisme forcené, à savoir le couple Bhutto.

Jusqu'ici, au sein de l'affaire, on avait donc eu droit à des négociations tendues de part et d'autre des intermédiaires mandatés pour faire monter les enchères des commissions, ou en préciser les échéances, sauf qu'à un moment ça va nettement s'accélérer : "Les deux hommes entament alors des négociations plus que serrées avec la DCN. Ils exigent que l’intégralité des 216 millions de francs soit payée au plus tard en janvier 1995. Une demande insolite, considérée comme inacceptable, puisque le versement des commissions s’effectue d’ordinaire sur plusieurs années, au prorata de la réalisation et du paiement du chantier (initialement prévus en 126 mensualités). Finalement, selon un accord du 24 janvier 1995 entre un représentant de DCN et Mercor Finance, la société offshore représentant Takieddine et El-Assir, il est convenu qu’un premier versement de 130 millions sera débloqué à la signature, peu après le 24 janvier, puis deux autres tranches étalées jusqu’au 31 décembre 1995, et une dernière en fonction de la réalisation du chantier." Pourquoi donc proposer une date butoir aux versements qui doivent s'étaler sur plusieurs années encore, c'est bien là ce qui retient aujourd'hui davantage l'attention.

Car c'est dans le timing qu'on s'aperçoit que les versements étaient liés à la campagne électorale. Ce qui pousse les intermédiaires, c'est bel et bien l'échéance électorale française. L'argent doit impérativement arriver avant la date de dépôt de clôture des comptes de campagne. Quitte à les accélérer ou à les transformer en paiement avancé, déguisé en lettres de créances. "Mais le calendrier ne semble toujours pas convenir aux deux hommes d’affaires d’origine libanaise mis en place par les balladuriens. Le courrier d’une banque à capitaux libyens basée à Madrid, la Banco Arabe Español, montre que les intermédiaires ont transformé l’accord en lettre de créance, qu’ils ont cédée pour percevoir l’argent le 2 juin 1995. Un mois avant l’échéance imposant aux candidats à la présidentielle de déposer leurs comptes de campagne. Dans ce courrier à un vice-président de la DCN, la banque précise avoir versé 54 millions de francs à Mercor Finance au titre de la lettre de créance détenue contre la DCN, et demande à celle-ci de rembourser. Ces 54 millions correspondent en réalité à la somme des deux échéances prévues pour être honorées les 31 juillet et 31 décembre 1995. Mais, manifestement, ces dates étaient trop éloignées pour les intérêts que Takieddine et El-Assir représentaient…" Bref, encore une fois, c'était bien le calendrier de remise des sommes qiui était privilégié !

Le Karachigate, contrairement à ce que peut bien clamer un ministre de l'intérieur qui ne fait plus désormais que dans le mensonge ou le déni pur et simple, n'a strictement rien à voir avec une quelconque piste islamiste. Un résultat d'autopsie, resté longtemps au placard, l'a démontré. S'il y a une piste à suivre, ce ne peut-être que celle qui remonte aux relations particulières entre Nicolas Sarkozy et celui que l'on surnomme Mr 10*%. A ce jour, le président français n'a toujours pas été affublé de la sorte. Plus on avance, et plus on se dit que ça ne saurait plus beaucoup tarder, avec ce qu'on découvre chaque jour qui passe... "ça va mal finir", avait prédit Léotard, qui connaît le dossier de Karachi (et bien d'autres) sur le bout des doigts.

la publicité Thales de 2002 pour ses viseurs "Catherine-QW" :

http://antisystemic.org/satribune/www.satribune.com/archives/200506/Thales_TISUnit.pdf

le dossier Médiapart sur Karachi :

http://www.mediapart.fr/documentaire/france/karachi-lautre-affaire-qui-affole-lelysee


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16 réactions à cet article    



    • artam 19 octobre 2011 11:26

      Bonjour morice, bon billet fort bien documenté, comme d’habitude.

      Pas toujours en phase ou d’accord avec vos idées, il faut vous laisser le mérite d’un travail de qualité. Bonne journée à vous...

      • morice morice 19 octobre 2011 11:42

        Pas toujours en phase ou d’accord avec vos idées, il faut vous laisser le mérite d’un travail de qualité. 


        merci, on n’est pas OBLIGE de suivre les idées en effet, ce qui importe c’est d’INFORMER, et là, on a la découverte par pur hasard d’une DEUXIEME affaire de Karachi. Oubliée depuis 6 ans !

        • morice morice 19 octobre 2011 11:50

          ai trouvé une photo supplémentaire très intéressante :



          • Ronny Ronny 19 octobre 2011 12:02


            @ morice

            Bien cet article... Effectivement on voit certains poins de connexions possibles avec le karachigate, que l’inénarrable Guéant attribuait voila encore 3 ou 4 jours à des islamistes !

            Du cou, je ne comprends pas les moinssages, à moins qu’ils ne soient systématiquement dirigés contre vous, ce qui commence à me gonfler sérieux. Surtout que parmi les moinsseurs, je me demande combien prennent la peine de lire, de contacter, de rechercher et d’écrire pour Avox... Autre opssibilité : les chiens de garde de la Sarkosie sont de nouveau de sortie, pour contrôler tout ce qui peut se dire sur les médias et surtout sur les médias « libres ».....

            Par ailleurs, je me demande si je ne vous ai pas croisé radiophoniquement voila une bonne vingtaine d’années alors que vous « sévissiez » sur des « radio libres ».


            • morice morice 19 octobre 2011 12:06
              visiblement, les Catherine on fait des petits


              ça s’appelle depuis des Buran-Catherine


              les chars indiens ont des problèmes avec :


              According to Jane’s Defence Weekly, the tank’s continuing technical flaws are « adversely impinging on the Indian Army’s operational preparedness. » 

              Confirming the Jane’s report, senior Army officers told this newspaper that the French Catherine thermal imaging (TI) camera, which gives the T-90’s Belarussian (Peling IG-46) night sight its 3 km range and higher accuracy, is not « adequately tropicalised » and hence prone to malfunctioning in the extreme heat of the Rajasthan desert region, where temperatures inside the MBT routinely average between 55ºC and 60ºC. 

              Produit français, pas fait pour les températures extrêmes... ah ah ah !

              « Du coup, je ne comprends pas les moinssages, à moins qu’ils ne soient systématiquement dirigés contre vous, ce qui commence à me gonfler sérieux. Surtout que parmi les moinsseurs, je me demande combien prennent la peine de lire, de contacter, de rechercher et d’écrire pour Avox...  »
              toujours la même équipe, ça ne fait que 4 ans que ça dure...

              Par ailleurs, je me demande si je ne vous ai pas croisé radiophoniquement voila une bonne vingtaine d’années alors que vous « sévissiez » sur des « radio libres ».

              deux seulement : RadioCampus et Ici L’Ombre, après je suis passé à Fréquence Nord puis RVN. C’est donc possible en effet.

              • morice morice 19 octobre 2011 12:29

                décidément, on croise toujours les mêmes en ce moment...



                soupçon de.... partialité ..

                « Le procureur Courroye s’est approprié l’instruction de ce dossier [Pouzilhac] alors qu’il est proche de la partie adverse à ce point que la défense du parquet de Nanterre dans l’affaire des fadettes est assurée par les mêmes avocats que ceux de M. Bolloré », a expliqué, lundi 17 octobre, à l’AFP, MeMetzner, en faisant allusion à Olivier Baratelli. 

                ah ah ah !!! c’est un GANG !!! 

                • alberto alberto 19 octobre 2011 14:08

                  morice : excellent travail !

                  Ce n’est pas un gang : c’est une mafia !

                  Pour info, DCNI est la filiale internationale de DCN, aujourd’hui DCNS : association de DCN et...Thales ! Tiens-tiens...

                  Bien à vous.


                  • morice morice 19 octobre 2011 16:40

                    Ce n’est pas un gang : c’est une mafia !


                    corse ? ah ah ah !!!

                    • Defrance Defrance 20 octobre 2011 16:49

                       c’est une mafia gang haineuse ? 


                    • morice morice 19 octobre 2011 16:58

                      ah ah ah :


                      Le ministère de l’Intérieur a acheté pour 35 millions d’euros un nouveau système d’informations et de commandement qui permettra à 60.000 gendarmes d’être interconnectés en temps réel.

                      « La gendarmerie nationale entre dans l’ère du numérique et du web 2.0. Elle achève de déployer un nouvel outil de commandement et d’informations développé par Thales en France et dans les territoires et départements d’outre-mer. Le ministère de l’Intérieur a dépensé 35 millions d’euros pour acheter un package complet (système, matériel et formation) au groupe français de haute technologie et de défense. L’outil -la BDSP pour Base de données de sécurité publique- devient le nouveau système de commandement et d’informations de la Gendarmerie. »


                      http://www.thalesgroup.com/Press_Releases/Markets/Security/2011/20111019_DS C_Thales_deploys_BDSP,_the_first_national_command_and_information_syst em_for_the_French_Gendarmerie/


                      4 modules, dont le dernier :

                      • Le Module 4 : Il gère le renseignement « élaboré ». « Il permet de capter des informations d’ordre public sur l’ensemble du territoire. Chaque gendarme fait remonter l’information en remplissant une fiche sur son écran. Ses informations seront partagés instantanément par l’ensemble des utilisateurs », explique le Général David Galtier. Ce qui n’était pas le cas auparavant car souvent l’information ne passait pas la frontière d’un département à un autre. Le module est également conçu pour que les analystes spécialisés de la gendarmerie traitent ces renseignements collectés dans la perspective d’anticiper les troubles à l’ordre public ».

                      l’arme anti-émeutes est née...

                      « 

                      Ce système qui très innovant utilise les technologies du web 2.0 ainsi que des outils collaboratifs, est au cœur du dispositif de gestion de l’ordre public », souligne Pascale Sourisse. »

                      validé par.... BAUER !!!

                      « Le Conseil d’état a validé les trois décrets nous autorisant à nous doter de cet outil et nous sommes passés devant la Commission parlementaire sur les fichiers, le Groupe Bauer ainsi que la CNIL », poursuit le directeur »

                      « LE GROUPE BAUER » !!! 

                      http://lesdessousdelapolicenationale.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/03/15 /qui-est-alain-bauer.html



                        • Pyrathome Pyrathome 19 octobre 2011 23:37


                          Arrivé à ce point de déliquescence, on va finir par être blasé..
                           Joe Dalton et ce monsieur 10%......c’est à peu près sa crédibilité aujourd’hui ( c’est même 9,99 % de trop..) et ça risque de ne pas aller en s’arrangeant d’ici avril 2012, s’il ose encore se présenter...mais, bon ils osent tout et c’est même à ça qu’on les reconnait...
                          Aura t-il le droit de visite de sa rejetonne fraichement née à Fresne ? Grave dilemme..... smiley


                          • Mister_Will Mister_Will 20 octobre 2011 00:32

                            Merci pour cet article Morice ...

                            C’est après sa lecture que je suis tombé sur cette info d’actualité qui me paraît intéressante à mettre en parallèle

                            Paris s’apprêterait à vendre des frégates à Athènes, Berlin proteste


                            There’s no bizness like war bizness...


                            • garisamui garisamui 20 octobre 2011 08:58

                              excellent, jouissif !

                              Je trépigne de voir la pétaudière leur et lui péter en pleine gueule ; espérons que les veaux soient réveillés....en 2012.


                              • Defrance Defrance 20 octobre 2011 16:47

                                 Merci pour cet article Morice, 

                                   ça fera 1cm de moins sur le reglage de la machine a amputer de la tête ! 

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