EN réponse à votre courrier au professeur Bernard Bégaud sur le blog de Jean Yves Nau
Lettre ouverte Monsieur le Pr GOUDEAU
Objet : Votre réaction envers le Pr BEGAUD CHU de TOURS
Site internet de Jean-Yves NAU
Monsieur le Professeur,
En réponse au Pr Bernard Bégaud, vous avez récemment parlé de la campagne massive de vaccination hépatite B des années 94-98 comme « d’un chapitre inédit de l’histoire de la santé publique en France.
Vous ajoutez : il pourrait commencer vingt ans après les faits. Ce serait un chapitre qui réveillerait
quelques souvenirs ».
Ces souvenirs, pour ceux du moins qui n’ont pas disparu, nous les portons encore dans notre chair, vingt ans après, et nous souhaitons comme vous « que chacun assume, enfin, ses responsabilités ».
Il est facile d’accuser d’activité anti-vaccinale ceux et celles qui ont été victimes de cette vaccination ! C’est un moyen commode de les faire taire. S’ils ont accepté d’être vaccinés, contraints ou volontaires (beaucoup ont accepté par conscience civique devant un fléau qu’on leur annonçait considérable), c’est bien au contraire parce qu’ils croyaient à cette vaccination. Aucun de nous ne met en doute son utilité lorsqu’elle est pratiquée à bon escient, donc sur des populations à risque dont sont évidemment exclus les jeunes enfants et les nourrissons, sauf potentiellement les nouveau-nés de mères porteuses du virus HB.
Le Pr Bégaud a parfaitement raison de dire : « on a menti et on a continué à mentir, volontairement ou non, pour la bonne cause. Or, chaque fois que l’on ment, même et surtout avec une bonne intention, on provoque une catastrophe. Et la suspicion s’installe ».
Faut-il vous rappeler les slogans de l’époque ? Les publicités largement répandues dans tous les cabinets médicaux ? Les spots quasi quotidiens à la télévision ? Les mensonges du Doc à destination des collégiens ?
Quelques exemples : « l’hépatite B gagne du terrain. Etes-vous sur son chemin ? » ; « Pour garder l’esprit libre, une seule solution : la vaccination » ; « Pour voyager en toute sécurité, faites-vous vacciner ». Il y en avait pour tout le monde : les enfants des collèges, les parents qu’on affolait avec les risques de la salive, les retraités susceptibles de voyager et même les vieillards. Même le livre d’éducation civique édité par Hatier à destination des classes de cinquième reproduisait encore, à la rentrée scolaire 2000, des séquences du film TV de la campagne de 1995, celle du Doc, le docteur Christian Spitz, recruté par SKB. Publicité gratuite. Slogan démagogique : « vivre pleinement ses passions sans prendre de risques ». En cinquième ! Tout le monde s’est mis à craindre que l’hépatite B ne débouche au coin de la rue. Le sommet a été atteint avec : « l’hépatite B tue plus de personnes en un jour que le sida en un an » !
Monsieur le professeur, on ne vous a pas alors entendu protester. Pourtant vous deviez bien connaître les chiffres : le nombre de décès cumulés dus au sida s’est élevé en France à 35 140 entre le début de l’épidémie et le 31 décembre 2007, soit une moyenne de 1350 par an ; si on croyait le slogan, l’hépatite B tuerait donc plus de 1350 personnes par jour, et cela ferait près de 500 000 morts par an (chiffre révélé par Jacques Drucker, votre collaborateur), soit la quasi-totalité des décès enregistrés en France chaque année !
Tous ces slogans étaient présentés comme « offerts par votre médecin », médecin qui, comme la plupart des Français de l’époque, n’avait aucun doute sur la sûreté des vaccins, a cru bien faire de vacciner, encourageaitses patients : « c’est un vaccin nécessaire et anodin », mais a dû souvent reconnaître ensuite qu’il aurait mieux fait de se méfier. Vous ne pouvez nier que le Pr Bégaud a raison de parler d’un gâchis énorme. Il a raison de rappeler que « jusque dans les années 80, les Français étaient très attachés aux vaccins ». C’est d’ailleurs ce qui a permis tant de vaccinations en si peu de temps : rien qu’en 1996, déjà 17 millions de sujets vaccinés, soit 100 fois plus qu’en 1985 !
Or en 1985, il y avait déjà 182 000 sujets vaccinés en France. C’est un an plus tard qu’une task force a été créée pour élargir la vaccination. Son président ? Vous-même, monsieur le professeur ! On pouvait alors lire sur le serveur de l’OMS : « ce groupe d’experts fait du lobbying pour introduire la vaccination et aider à la création de mass markets ». Le financement venait de fondations américaines et des fabricants de vaccins. Si le fait est faux, il vous faut le démentir.
Il faudrait aussi que votre confrère et collaborateur Pierre Coursaget démente les propos qu’il a tenus lors du Colloque international qu’il a présidé en mai 1989 à Paris : « Je suis reconnaissant aux nombreuses organisations et aux laboratoires pharmaceutiques pour leur généreuse participation financière ». Ces laboratoires étaient SKB et Pasteur Vaccins. Générosité sans espoir de contrepartie ?
Le résultat ? Une peur si largement diffusée en France (mais pas dans les autres pays) qu’elle a précipité chez les généralistes et les pédiatres des millions de personnes inquiètes, pour leurs enfants d’abord, mais aussi pour elles-mêmes. Nombreux ont même été ceux qui profitaient de la consultation pour se faire vacciner aussi ! Les généralistes ont été submergés par la demande. Les pharmacies se sont retrouvées en rupture de stock. Les associations de parents d’élèves se sont mises à réclamer de plus en plus de vaccins.
L’avez-vous oublié ?
Avez-vous oublié aussi ce propos tenu dans Avenir le 27 janvier 1994 par Alain Aufrère, responsable du laboratoire SKB : « En 1994, nous avons décroché le marché de la vaccination en milieu scolaire ».
Décroché le marché ! Quels mots…
Pourrez-vous nier aussi que, comme le dit le Pr Bégaud, « de fausses statistiques ont été données, par exemple sur le nombre de cancers du foie provoqués par le VHB » ; qu’on a exagéré aussi le nombre de cirrhoses du foie dues au virus alors qu’elles sont bien plus souvent dues à la consommation d’alcool ; qu’on a aussi exagéré la gravité de l’hépatite B, comme l’a dénoncé M.A Balinska (Société de pathologie exotique de l’Institut Pasteur) et qui a regretté, dans le numéro d’Esprit mai 2001, « qu’on n’ait pas attiré l’attention du personnel soignant » sur « les risques courus par un grand nombre de personnes ». Ignoriez-vous la courbe de l’étude épidémiologique du Pr Sépetjan qui révélait une baisse considérable de l’incidence de l’hépatite aiguë dans la région lyonnaise entre 1985 et 1995 ? Pas valable à vos yeux pour être extrapolée à toute la France ? Il faut reconnaître que l’épidémiologie française était singulièrement en retard et le resterait
longtemps puisqu’encore en 2002 le Plan Hépatites pour les 5 ans à venir avouait n’avoir guère avancé dans l’épidémiologie de l’hépatite B…Nous comprenons votre souci de protéger les populations contre les maladies infectieuses. Nous le partageons. C’est pourquoi nous sommes consternés de subir les conséquences d’une pareille désinformation : des milliers de victimes, de très nombreux décès, des maladies extrêmement diverses quisont loin de se limiter à la seule sclérose en plaques. Il vous suffit, si vous l’ignorez, de consulter notre site,celui du REVAHB. La conséquence inévitable : une méfiance généralisée qu’il sera d’autant plus difficile de réduire que le déni de tous ces accidents continue depuis 20 ans.
Pourquoi cette méfiance si grande en France et pas dans les autres pays ? Avez-vous oublié que la Grande Bretagne n’a alors vacciné que 5% de sa population ? Le Pr Bégaud a raison de faire remarquer qu’il a toujours existé en France « un courant méfiant, autour de concepts bio et nature, mais pas plus qu’en Allemagne ». Aujourd’hui il se trouve considérablement renforcé précisément en France. Pur hasard ? Ou n’est-ce pas plutôt parce que l’Allemagne a beaucoup moins vacciné les adultes que nous et que la Grande- Bretagne n’a jamais considéré comme utile la généralisation de ce vaccin à toute la population malgré des chiffres épidémiologiques similaires aux nôtres. Polémique seulement franco-française ? Alors expliquez nous !
Le Professeur Bégaud a raison aussi de souligner une réalité bien particulière à la France, l’existence de « deux lobbys. Les laboratoires, bien sûr, qui commercialisent… Mais aussi celui, plus intellectuel, de tous ceux qui refusent de remettre en cause le vaccin, tellement persuadés que c’est un outil merveilleux qui ne présente pas le moindre défaut ». C’est une évidence pour toutes les victimes d’accident vaccinal. On peut, en France mettre en cause un médicament (hormone de croissance humaine, Vioxx, Isoméride, Médiator).
Jamais un vaccin. On préfère abandonner les victimes ou nier leur existence. Comment voulez-vous que les populations souhaitent se faire vacciner quand elles savent qu’en cas de problème post-vaccinal elles seront laissées sur le bord du chemin ? Peuvent-elles compter sur l’ONIAM CRCI ? Aucune de celles qui ont été vaccinées avant le 5 septembre 2001 n’y a droit, soit la presque totalité des victimes ! Les tribunaux ? Vous êtes-vous informé du nombre d’indemnisations reçues ? Du sort des personnes non liées par l’obligation vaccinale, soit le plus grand nombre ?
Vous écrivez : « Il n’y pas eu de campagne chez les nourrissons en 1994 mais une campagne visant les préadolescents.
Tout le monde s’accordait pour une extension aux nourrissons dès que les vaccins multivalents seraient prêts. Pour les pré-adolescents, c’est vrai : la vaccination a bien été décidée en 1994 pour tous les enfants de sixième. 80 % des préadolescents, soit 500 000 enfants de 11 à 13 ans ont été vaccinés en 1994, autant en 1995, d’après votre propre confrère et collaborateur, Jacques Drucker, qui le précise, page 200, dans son livre, les Détectives de la santé - Virus, bactéries, toxiques : enquêtes sur les nouveaux risques, 2002. Mais ce que vous écrivez n’est pas vrai pour les nourrissons.
Vous semblez oublier que dès 1990 vous envisagiez la vaccination universelle et obligatoire ; que celui qui vous a tant soutenu, Jean-Yves Nau, était transporté d’enthousiasme : « L’éradication mondiale est aujourd’hui permise ! » ; que l’OMS était enfin gagnée : elle recommandait en effet la vaccination de tous les enfants dans tous les pays du globe. L’Italie s’est alors empressée de décréter la vaccination obligatoire des bébés (il y a d’ailleurs eu, à cette occasion, en Italie, des condamnations pour corruption) ; et en 1994 les pouvoirs publics décidèrent l'entrée de cette vaccination dans le calendrier vaccinal des nourrissons, le BEH l'officialisa le 10 janvier 1995 et 30 % des nourrissons furent alors vaccinés, et cela avec, dans certains cas, un vaccin qui n’avait même pas de dosage pédiatrique (GenHévac B Pasteur) ! A-t-on attendu, comme vous le dites, la fabrication de vaccins hexavalents ? Ils n’ont été mis à disposition qu’en 2000 ! N’est-ce pas vous qui réécrivez l’histoire ?Vous savez même très bien « qui a lancé une campagne massive à destination des nourrissons et des enfants de 10-11 ans, sans mettre en place de système de surveillance et d’information, sans se donner les moyens de savoir quels étaient les gens que l’on vaccinait, sans informer les médecins ni le public du pourquoi de la campagne, sans aucun message clair ». L’Ordre des pharmaciens avait même alerté contre le risque de rupture de la chaîne du froid !
Vous affirmez : « Chez les enfants aucun effet secondaire démyélinisant n’a jamais pu être observé » Ils sont certes très minoritaires, mais ils existent puisque le rapport de pharmacovigilance de l’année 2011 en rapporte 117 chez l’enfant de moins de 15 ans. D’autres que vous ne mentionnez jamais sont aussi mentionnés : diabètes, polyarthrites, lupus, thyroïdites, thrombopénies. Au moins deux adolescents sont morts d’aplasie médullaire et nous connaissons au moins un cas irréversible de Guillain-Barré, reconnu par les experts qui ont examiné cet enfant de 2 ans et qui ont ainsi contribué à faire indemniser la famille. Ces accidents sont certes moins nombreux chez les enfants que chez les adultes, mais ils ont détruit des êtres très jeunes pour qui l’avenir est définitivement compromis. Fort heureusement, l’intervention de Bernard Kouchner, en 1998, a mis fin à la vaccination à la chaîne dans les collèges. S’il l’a fait, c’est qu’il avait de bonnes raisons de le faire.
Avait-on mis en place un système de surveillance et d’information ? Qu’en est-il encore aujourd’hui ?
Qu’en est-il en France où la sous-notification des accidents est un mal endémique, et dans les pays pauvres où l’on vaccine beaucoup sans pouvoir assurer un suivi ?
Oui, il y a des laboratoires compromis. Oui, il y a aussi des médecins compromis. Et aussi des médias « faiseurs d’opinion » car soumis aux industriels qui les financent grâce aux budgets publicitaires. Et des responsables sanitaires. Et des ministres. Où en est-on aujourd’hui, en France ? Qu’en est-il de l’épidémiologie française des infections hépatiques par le virus B ? Quel secours a été apporté aux victimes ? Quel a été l’impact réel sur les populations à risque de cette vaccination massive et irraisonnée ?
Pour rappel : si l’on se contente des décisions de l’ONIAM et de ses CRCI, elles délaissent les personnes ayant subi un « aléa thérapeutique » survenu avant le 5 septembre 2001, donc bien à distance de la « vague vaccinale » des années 1994-1998. Quant aux décisions d’indemnisation amiables accordées pour un accident post-vaccinal survenu ultérieurement, on peut depuis les compter sur les doigts d’une main,obligeant les victimes à recourir à des voies juridiques.
Vous avez raison : « Vingt ans plus tard l’enquête doit pouvoir être menée. Elle était depuis longtemps nécessaire. Avec les accusations du Pr Bégaud elle devient indispensable ». Nous la souhaitons. C’est un peu tard, mais mieux vaut tard que jamais.
Veuillez agréer, Monsieur le Professeur, l’expression de mes salutations.
Catherine Gaches Présidente du Revahb Réseau des victimes de la vaccination hépatite B.