Liban : l’agonie d’un système
Liban : l’agonie d’un système
‘’Au pied de ces montagnes majestueuses qui ont fait la force de votre pays en demeurant le rempart inexpugnable de sa force de sa foi et de sa liberté…par devant tous les témoins de vos espoirs, de vos luttes et de votre victoire, c’est en partageant votre joie et votre fierté que je proclame solennellement le Grand Liban.’’ Ainsi parla le général Gouraud, du haut des marches de la villa des Pins à Beyrouth, ce 1er septembre 1920. Un siècle plus tard : un État, deux Républiques. Celle du Pacte national, ‘’Ni Est – Ni Ouest’’. Cette Première république (1943 – 1990) n’a pas réussi ni à arabiser les chrétiens, ni à libaniser les musulmans. ‘’Deux négations ne font pas une nation’’ écrivait Georges Naccache en 1949. Malheureusement la guerre civile qui a ravagé le Liban entre 1975 et 1990 a confirmé ses dires. La Deuxième République, celle de Taëf, depuis 1990, achève de partager le pays des cèdres entre les seigneurs de la guerre.
C’est l’apogée du communautarisme, du sectarisme et du clientélisme. La corruption bat son plein. Les pseudo-gouvernements qui succèdent au pouvoir procèdent à un pillage systématique des ressources du pays. Jusqu’à l’épuisement. Ils l’enfoncent dans les dettes et le prive de ses forces vives qui choisissent l’exil à l’humiliation. Une jeunesse au chômage, sans présent ni futur, abandonne, part à l’étranger gagner sa vie dans la dignité du travail. Des politiciens rivaux, inconscients, sans scrupules ni morale, trouvaient leur terrain d’entente dans le détournement des biens publics au détriment de l’intérêt national. Pour la classe politique, le Liban est une mine d’or à ciel ouvert, mais dont l’exploitation leur est strictement réservée. Ouvertement. En toute impunité. Sans contrôle ni compte à rendre. Surtout pas à une population miséreuse, que l’on prive du minimum vital : l’eau, l’électricité, les soins médicaux, le ramassage des ordures, la protection de l’environnement. Les emplois, en l’absence de planification économique et de formations professionnelles appropriées, deviennent rares. Chômage masqué et sous-emploi se propagent. Les emplois fictifs aussi, pèsent lourd dans le budget de l’État. Un État de droit inexistant, une justice défaillante font du Liban un espace ouvert à toutes sortes de trafic, à toutes formes d’abus et tous genres d’exactions.
Aujourd’hui, la donne a changé. Depuis quelques temps les réseaux sociaux se sont mis à dénoncer cette classe politique pourrie. Son enrichissement illégal, sa fortune colossale, éléphantesque, scandalisent. Ses milliards de dollars gagnés par un détournement habile des fonds publics, offusquent les Libanais mais aussi les nations étrangères. (800 milliards dollars US, selon le Washington Post ?!) Des politiciens qui ne savent compter qu’en milliards face à une population qui a beaucoup de difficultés à boucler ses fins de mois. C’est une honte. Quoi de plus légitime que le soulèvement de cette population et sa révolte contre un régime qui a érigé en système le pillage ordonné de la nation. Les Libanais, tous les Libanais sont unis et réclament d’une même voix la chute d’un système qui, pendant des décennies, est resté imperméable à leurs demandes, à leurs souffrances, à leurs cris, à leurs larmes. Les Libanais, tous les Libanais sont aujourd’hui dans la rue, ils manifestent leur colère et expriment leur indignation. Ils n’en sortiront qu’avec la tombée du rideau sur une tragédie qui a assez duré. L’avènement d’une Troisième République est imminent.
Ghassan Hélou, Montréal 27 octobre 2019
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