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Accueil du site > Tribune Libre > Libération, le journal qui fait semblant

Libération, le journal qui fait semblant

En ces jours de Bruni-mania, un petit retour sur... Joffrin et Libé et Minc et Sarkozy himself s’impose.

On peut donc lire dans Libération une consternante interview de Mme Carla Bruni-Sarkozy. La raison ? la sortie de son album. La vraie raison ? La communication globale de l’image présidentielle.

La sortie d’un nouvel album de Carla Bruni n’a aucune raison de prendre autant de place dans Libé. Sauf à être génial mais alors on peut s’étonner alors qu’il n’en soit pas fait mention (ou presque) dans l’entretien en question.

C’est parce que cet album, tout le monde (ou presque) s’en fout. La presse, servile, l’a déjà encensé, il est officiellement merveilleux.

La messe est dite.

Cet entretien chez Libé provoque chez les lecteurs quelques réactions épidermiques. ils sont surpris. Il provoque même l’ire de certains journalistes.

Pourtant... quelle surprise ? Je vous invite à relire le passage, p. 333 que Laurent Maudiut consacre au rôle de Minc dans la crise de Libé en 2006 dans son livre (par ailleurs excellent) "Petits conseils" (ed. Stock).

D’abord le contexte : Libé est en crise. E. de Rotschild (un autre des potes de Sarkozy) vient de sortir Jully, on cherche un remplaçant, la rédaction a choisi Plenel. Ce dernier veut être résolument "anti-sarkozy" !

On comprendra que ça ne passe pas. Pourtant économiquement on peut supposer qu’aujourd’hui Libé aurait davantage de lecteurs s’il avait fait ce choix là, le choix d’une certaine radicalité militante, fidèle à ses origines. Mais même chez les milliardaires l’économie n’est pas toujours le critère (sinon ils nous foutraient la paix avec la presse).

C’est là qu’intervient Minc (très proche de Sarkozy). Nicolas Sarkozy rejette Plenel. Il n’en veut pas. Il l’a dit à Rotschild qui le lui a demandé.

La suite est une affaire de tour de table, d’argent. Minc explique que Plenel n’en réunira pas sur son nom. Joffrin et lui se connaissent, Joffrin est rassurant, il montre beaucoup les dents mais il ne mord jamais. Toujours cet insupportable petit milieu parisien, on fait semblant beaucoup mais on se connait et on se fréquente surtout.
Quoiqu’il en soit, au final, le tour de table du sauvetage de Libé est une petite réunion des amis de Minc.

Maudiut conclut l’épisode d’un prudent : "s’il n’est pas encore défénitivement établi qu’Alain Minc a effectivement supervisé, en coulisse, toutes les opérations dans leurs détails, il est clair qu’il y a pris une part active."

Minc à 100 % ou pas, ce que cet épisode nous rappelle, c’est que Joffrin à Libé c’est le candidat qui n’a pas déplu à Sarkozy, le candidat qui a été en mesure de rassurer les indispensables millions. Le candidat qui peut illusionner la gauche mais dont on sait qu’au fond il n’est pas bien méchant. On lui donne de temps en temps un os à ronger (on le traite mal en conférence de presse) parce qu’on sait qu’il ne s’acharnera pas trop, qu’il est trop intégré. Parce qu’on sait qu’il est "dans le systeme", il ne représente aucun danger. Terriblement egocentrique et narcissique, il a besoin du systeme pour y organiser ses débats à la télé, ses "assises" asceptisées, il a besoin du système. Et ce qu’il prend il le rend bien :

- Il participe en pleine campagne a détruire Royal.

- Il se bat contre internet

- Il rejette une "diabolisation" de Sarkozy qui équivaut à dire "On ne doit plus jamais critiquer Sarkozy sans dire que c’est pas si mal".

- La critique des médias est une hérésie.

- Il tue toute l’audace et tout le mordant de Libération.
Ce n’est pas mal pour un seul homme. Le système peut être reconnaissant.

Alors aujourd’hui que Joffrin se couche devant Mme Bruni-Sarkozy pour lui servir la soupe n’est une surprise qu’autant qu’on a voulu croire que Libération est encore un journal de gauche.

Il suffit de relire la sidérante et ridicule chronique de Alain Duhamel avant le referendum irlandais, voir, sur le site, le nombre de unes consacrées au foot, la manière dont le social est de plus en plus exclu des pages du journal, la déconnection croissante de ce titre avec ce qui fut son lectorat pour comprendre.
En fait, au moment où l’on croyait sauver Libération ce journal avait été achevé, acheté.

Libération est mort. Libération a été vampirisé par le fric et les amis du président. Juste avant la campagne présidentielle Libération a été muselé.

Alors si aujourd’hui Libération sert de porte-voix à Mme Bruni-Sarkozy (qui n’aime pas la "voix" de Mme Royal... c’est sur que le phrasé si élégant de son époux est bien plus doux à l’oreille) cela n’est en rien une surprise.


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9 réactions à cet article    


  • moebius 21 juin 2008 23:41

    et la cause du peuple ça se vend encore ?

     


    • jaja jaja 21 juin 2008 23:59

      "Libération est mort. Libération a été vampirisé par le fric et les amis du président. Juste avant la campagne présidentielle Libération a été muselé."

      Il y a bien longtemps que ce journal que je lisais à l’époque a été muselé. Bien avant d’autres élections que les plus jeunes sur Avox n’ont pas connues... Bien sûr il ne s’est pas arrangé avec le temps et l’arrivée de requins de premier plan de la finance...

       

       


      • alceste 22 juin 2008 06:58

        Excellent résumé, il y a bien longtemps que Libération libère surtout "le lèche-bottes-qui-est-en-vous", mais la réaction de certains journalistes qui y travaillent montre tout de même que la ligneJoffrin est fortement contestée.


        • Blé 22 juin 2008 07:05

          On sait que les quotidiens nationaux et des provinces françaises sont à la solde de ceux qui gouvernent vraiment notre beau pays : les banquiers.

          Tout le reste c’est du blablabla. Si je veux m’informer je vais voir ailleurs que dans ces journaux qui ne peuvent même plus servir à emballer le poisson.

          Dans le fond, "libé" nous rend service, sachant qu’il n’est plus fiable, il nous dispense de lire au quotidien la propagande de nos élites politiques, économiques et "intellectuelles".

           


          • Deneb Deneb 22 juin 2008 09:06

            Il y a 20 ans, j’achetais Libé tous les jours. Aujourd’hui je n’achete plus aucun journal - les informations disponibles sur le Web me suffisent largement. Aujourd’hui je me rends compte comment c’est facile de manipuler une opinion, surtout lorsqu’on a qu’une seule source d’informations. En effet, pour ma dose d’informations quotidienne je regarde les titres en français, anglais, italien etc.. En ayant une vision plus globale, je suis effaré par la cécité dont je souffrais il y a 20 ans, par la démagogie d’un JT, par le pouvoir d’un créateur d’opinion qu’est un titre de presse. La, presse papier, n’en deplaise à "Canard enchaîné", n’a aucun avenir, vu la rarefaction des ressources naturelles. Pourquoi mobiliser une industrie pour diffuser une information, quand un simple ordinateur suffit ? Les gens vont-ils lire sur les ecrans ? Bien sûr ! On pourra toujours lire sur papier, mais le petit luxe de pouvoir tripoter le papier et se salir les mains avec l’encre d’imprimerie va devenir bien trop onereux pour la plupart des gens. De plus, vu ce que ça coute pour organiser un journal papier, on peut être sûr qu’il reflete surtout les intérets de celui qui le finance, donc un riche, qui n’est certainement pas riche parce que plus intelligent et travailleur, mais parce que moins honnete et plus manipulateur.


            • chmoll chmoll 22 juin 2008 09:19

              si j’comprend bien libé, sert plus d’emballage cadeaux que média


              • Jordan Jordan 22 juin 2008 17:19
                Joffrin est lui même fils de banquier. Qui bouffe a tous les râteliers. Je ne lis plus libération depuis un an.

                • Elysium Elysium 22 juin 2008 21:19

                  Ce qui m’avait le plus interloqué chez Libé, c’est l’incroyable série d’articles qui me semblaient enfoncer un coin conflictuel entre l’ex-candidate du PS et son parti en mai et juin 2007. On aurrait dit qu’on jetait de l’huile sur le feu, autant qu’on le pouvait, à chaque occasion. Alors pour les 17 millions de Français qui avaient soutenu Ségolène Royal, ça avait été une souffrance, puis un profond ressentiment.

                  C’est là que je me suis dit qu’il y avait quelque chose qui était biaisé, qui était pourri.

                  Depuis lors, je n’ai plus confiance. Je percois Libé comme un cheval de Troie sarkozien. Sous le couvert d’un média de gauche, il me paraît surtout servir à semer la pagaille à gauche. Je n’ai pas souvenir d’y avoir lu un article qui cherche à trouver des solutions ou à apaiser des tensions au sein du PS.

                  Je suppose que d’autres, avaient fait les mêmes observations.

                  Alors, si maintenant, en plus, Libé va jusqu’à écrire le bouquin de Delanoë, poussé à fond par les médias de droite, ça paraît vraiment cousu de fil blanc.

                  Libé aura eut-être bien servi Sarkozy, mais maintenant il me paraît de plus en plus grillé auprès de la gauche. Il pourra toujours essayer de se reconvertir en porte-parole de l’UMP pour tenter de sauver les meubles... Mais il y en a déjà plusieurs.... Et ceux qui sont abonnés au Figaro, préféreront l’original à la copie.


                  • valere valere 23 juin 2008 12:25

                    Elle est où la limite entre "promotion d’un disque" et "propagande politique" ??

                    Y’en a ras le bol de cette politico/people ??

                    A quand l’autobiographie de Carla, promotionnée par Sarko en personne ??

                    On marche sur la tête dans ce pays ! Faut pas s’étonner que ça aille si mal en France.

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