Libye : deux lynchages qui n’augurent rien de bon
Les événements récents en Libye sont plus qu'inquiétants. Je ne veux pas parler de la disparition proprement dite du dictateur Kadhafi, dont on a pu prendre la mesure de ses frasques à visiter ses palais délirants, déjà passés au bulldozer, non, ce qui est très inquiétant, ce sont les mensonges éhontés dans lesquels viennent de se draper les dirigeants actuels, au sujet du décès du dictateur et d'un de ses fils. Tous deux ont été purement et simplement lynchés et abattus, c'est une évidence, à voir les preuves vidéos de leur survie à leur arrestation proprement dite. Ce samedi 22 octobre, en déclarant qu'il n'y aurait pas d'autopsie menée sur le cadavre de Kadhafi (*), le CNT vient de signer son acte de décés de représentant d'une démocratie. Qu'on ne se méprenne pas et que ce soit bien clair, pour ceux qui voudraient chercher ici d'habituelles bisbilles : j'ai toujours soutenu ici l'arrestation de Kadhafi, mais certainement pas sa mise à mort de la sorte. Celle-ci a été voulue et décidée bien avant sa capture, et l'attitude actuelle du gouvernement provisoire rappelle par trop l'enterrement à la sauvette de Benazir Bhutto, elle aussi atteinte d'une balle dans la tête dont le pouvoir pakistanais d'alors ne voulait surtout pas entendre parler (bien aidé par les anglais de Scotland Yard, rappelons le !).
Comme pour Saddam Hussein, et son procès proprement escamoté, Kadhafi ne livrera rien des accords tortueux qu'il avait pu passer avec les puissances occidentales avant de disparaître. On ne saura rien des multiples voyages deTony Blair à Tripoli, ni des accusations très graves portées par la famille Kadhafi sur le financement occulte de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy. Kadhafi a certes été éliminé par des insurgés en manque visiblement d'ordes à respecter, mais ceux qui ont tenu le pistolet du coup final ne seront jamais plus inquiétés, et c'est pourquoi j'affirme ce jour que la démocratie libyenne en cours de gestation seulement est déjà un enfant mort-né, tant qu'elle conservera les mêmes responsables à la tête du pays.
Les faits sont là, patents, vidéos à l'appui : Mouammar Kadhafi, comme son fils Moutassim, on bel et bien été capturés vivants, et auraient pu donc être l'objet d'un procès, si on les avait gardés ainsi. Mais ils ne le sont pas restés longtemps, ils ont été tués, visiblement lynchés dans la furie qui a suivi leur arrestation. Pour le premier, le lynchage est patent et les circonstances particulièrement dégrandantes pour tous ceux qui y ont participé : comme le fait remarquer un internaute, dans une des vidéos montrant l'arrestation de Kadhafi, on ira même jusqu'à le sodomiser avec un bâton avant de le tuer. Kadhafi a été exécuté de deux balles, l'une dans le ventre, et l'autre en pleine tête, confirmera plus tard un médecin légiste. Les traces de deux impacts sont visibles sur les vidéos ou les photos diffusées à ce jour, je n'y reviendrai pas, le net en est rempli. Pour le second, il n'y même pas eu de mouvements d'excités et d'incontrôlés autour de sa personne : on possède en effet des vidéos du fils de Kadhafi plutôt serein et nullement malmené, mais très certainement conscient déjà d'être dans la situation du condamné à qui on donne la dernière cigarette, et puis après seulement... un cadavre, montré étendu, les yeux ouverts. Qui a décidé froidement de l'éliminer, lui aussi, voilà toute la question aujourd'hui : à la limite son cas est encore plus dérangeant, tant on peut donner comme excuse à ceux qui ont éxécuté le père d'avoir agî dans la frénésie générale, sans chef militaire véritable auprès d'eux, pour Moutassim, qui dirigeait il est vrai aussi les exactions dans le pays, ce n'est absolument pas le cas. L'histoire retiendra obligatoirement que le pays nouveau en train de naître vient d'entacher son existence de deux crimes qui anéantissent ses vélléités démocratiques. On sombre avec ces deux exécutions sommaires dans la manipulation du décès de Ceaucescu, après une parodie de procès expéditif, à part qu'en Libye, de procès on n'en a pas eu le temps d'en voir un seul.
Un journaliste de Slate à bien résumé la question, qui est bien celle du droit international : "J'étais en Roumanie le jour où Nicolae et Elena Ceausescu ont été hâtivement tués, et j'étais à Mossoul le jour précédent où Oudaï et Qoussaï Hussein ont été encerclés et soumis à tir mortel et d'obus dansune maison d'où il était impossible de s'échapper. Dans les deux cas,le soulagement ressenti par la population générale était palpable. Il ne fait aucun doute que l'élimination éprouvée des vieux symboles de torture et de la peur a un effet émancipateur, au moins dans le court terme. Mais je dirais que cet effet est soumis à un rendement décroissant, qui est devenu évident en Irak quand les acolytes de Moqtada al-Sadr ont obtenu la responsabilité de l'exécution de Saddam Hussein. Il ya des cicatrices sectaires restant de cet épisode bâclé et sordide, et je serai très surpris d'apprendre que des ressentiments similaires n'ont pas été créés parmi les nombreux Libyens jeudi. Il est trop tard pour réparer cela maintenant. Mais ce sera une honte si le meurtre des Qaddafis continue et ce serait une insulte si la citation à comparaître à la Haye continue d'être ignorée".
Le tout étant de savoir qui exactement à souhaiter en finir ainsi, au plus vite, dirons-nous, comme si la naissance de ce pays neuf devait se faire avec un gigantesque coup d'éponge prodigué sur le passé récent. Il y a bien eu une volonté cachée, derrière leur rapide élimination, il nous reste à en préciser la provenance exacte. Il ne faut pas chercher bien loin. Dans la confusion de la journée de la capture des deux anciens dirigeants du pays, on a en effet eu droit à de beaux mensonges de la part des dirigeants du CNT, dont on ne rappellera jamais assez l'appartenance de certains au régime précédent. Une photo, à elle seule, résume très bien qui sont les responsables de cette façon de jeter aux oubliettes un cas fort compromettant ; c'est celle d'un responsable local, venu faire le V de la victoire devant la dépouille de Kadhafi. On peut néanmoins expliquer son attitude par une décision prise le 24 août dernier, rappelons-le, selon laquelle le CNT annonçait une récompense de 2 millions de dinars (près de 1,7million de dollars) pour la capture du dictateur, "mort ou vif". Il est évident qu'à partir de là il n'y aurait pas de capture ni de procès : les jeux étaient déjà faits, et tout avait déjà été écrit d'avance. Une annonce faite par... Moustapha Abdeljalil en personne. "Mort ou vif", façon G.W.Bush visant Ben Laden, l'expéditif traitement du cadavre de Kadhafi, un temps gardé dans un frigo de supermarché, exposé au plus grand nombre, ressemblant comme deux gouttes d'eau à un saut de pont de porte-avions du corps de l'autre homme le plus recherché au monde.
A ce propos, il faut noter une news passée inaperçue ses derniers temps : celle de la mise à pied de 49 marins du porte-avions USS Carl Vinson, d'où le cadavre de Ben Laden est censé avoir été jeté, pour usage d'une drogue appelée "Spice" (du cannabis synthétique appelé parfois K2). Pour des observateurs plus subtils que d'autres, il semble bien qu'on aît affaire à une tentative d'intimidation du pouvoir US pour faire taire ceux qui continuerait à laisser entendre qu' il n'y a jamais eu à bord de mouvement particulier d'hélicoptère comme l'aurait laissé entendre l'administration pour édifier la fable de l'ensevelissement en pleine mer de la dépouille du prétendu Ben Laden. "L'équipage du porte-avions à propulsion nucléaire, qui est arrivé à Hong Kong, hier, prétend n'avoir été au courant d'aucune opération spéciale contre le chef d'Al-Qaïda jusqu'à ce que tout était fini," a signalé le Le Standard le 23 mai 2011. "Depuis, ils ont refusé de discuter des détails du problème ". Avec Ben Laden, on n'a eu pas de cadavre visible et les circonstances de sa mort ont rangées dans l'ordre des histoires inventées de toutes pièces, avec Kadhafi on a bien un cadavre visible mais pas davantage d'explication officielle qui se tienne sur les circonstances exact de son décès. Les deux affaires se ressemblent, à vrai dire, malgré leur apparente différence. Le cadavre invisible de Ben Laden a été soi-disant expédié en douce au fond de la mer, celui de Kadhafi, surexposé, n'aura pas droit à une autopsie (il semblerait que si aux toutes dernières nouvelles) et sera enterré à la sauvette dans le désert, ce qui revient au même : ils rejoignent tous deux l'immensité pour s'y perdre, deux minuscules aiguilles dans des meules de foin incommensurables. Personnellement, cela ne m'importune pas vraiment à vrai dire, car on a vu aussi ce que donnait la tombe de Rudolph Hess, devenue pélerinage des tous les fêlés de la Terre : ce qui me choque surtout, c'est bien le flou entourant leur décès.
Un membre du CNT de Moustapha Abdeljalil, l'ancien ministre de la Justice du fantasque colonel, venu faire le signe de la victoire devant son cadavre, cela peut donc se comprendre, après avoir lancé une demande de l'attraper "mort ou vif". Mais il convient de ne pas oublier que l'homme à l'origine de l'avis placardé est aussi celui qui avait fait condamner, sur ordre de Kadhafi en personne, les infirmières bulgares, chez qui il avait feint d'ignorer les tortures en rendant son jugement. Par deux fois, en prime, en tant que président de la cour d'appel de Tripoli qui avait confirmé la peine de mort des infirmières. On sait qu'elles n'y étaient pour rien dans cette sordide histoire d'enfants atteints d'un SIDA soi-disant inoculé. Aujourd'hui, le voilà sans doute ravi de l'aubaine de voir ainsi disparaître physiquement celui qu'il avait si bien servi avec zèle, et qui aurait été très gênant pour lui s'il était resté en vie. Imaginez, un Kadhafi défiant, comme on l'a connu, lui rappelant lors d'un procès à quel point il avait suivi ses ordres, avec toute la veulerie qui le caractérisait à l'époque !
Il n'a pas été le seul à se rallier : le tortionnaire en chef de Kadhafi, Abdelfattah Younes, l'avait fait lui aussi, à s'ériger très vite en commandant en chef des armées disparates du CNT. Abdelfattah Younes (ici en photo avec... BHL !) , retrouvé un jour raide mort, lui aussi, assassiné dans des circonstances floues que l'on élucidera désormais difficilement : lors de sa disparition, les premiers regards n'avaient pas porté nécessairement sur les supporters de Kadhafi, mais bel et bien sur... Abdeljalil lui-même, qui voyait en Younes un candidat bien trop sérieux, surtout en cas de victoire militaire finale qui se profilait déjà avec l'intervention de l'Otan et l'aviation de Kadhafi vite réduite à néant. Une victoire qui verrait lui échapper la revendication d'avoir libéré le pays ! Son grand rival politique, Abdelfattah Younes, la veille d'être assassiné, avait été convoqué devant un tribunal de Benghazi (?) pour examiner des actions qui lui avaient été reprochées. On lui reprochait en fait surtout ses 40 ans passés à avoir aidé servilement, lui aussi, Mouammar Kadhafi. S'y ajoutait une sombre histoire de rivalité tribale, Younes appartenant aux Obedei, Abdeljalil étant un Senoussi. Les deux avaient un différent depuis la nomination du second au titre de ministre de la justice. Dans ce rôle, Abdeljalil avait osé protester auprès de Kaddafi contre la non-exécution des jugements des tribunaux, en particulier les libérations d’islamistes... en ayant donc déjà marqué son territoire, en quelque sorte, en y ajoutant surtout une accusation très grave en 2010, visant Abdelfattah Younès, alors ministre de la Sécurité publique : selon lui, les islamistes qui n'avaient pas été encore libérés avaient été entre temps torturés par les services de police placés sous la responsabilité de Younes. Chacun savait, et on a pu le voir depuis en reportage télévisé, que police et torture, sous Kadhafi ne faisaient qu'un, pourtant. Celui qui avait condammné à mort les infirmières bulgares, qui avaient été torturées, et il le savait pertinemment, venant soudain dénoncer ces mêmes tortures, avouez qu'il y avait de quoi être surpris, à moins de déjà vouloir éliminer un rival, en prétextant quelque chose que personne ne pouvait ignorer dans le pays.
Le lendemain de l'assassinat de Younes, Abdeljalil s'était également empressé de dire que sa mort était due "à l'assaut d'un gang" : or il s'agissait de militaires en uniforme qui l'avaient tué. Ajoutant encore dans la foulée que son corps avait "disparu", alors qu'il apparaissait déjà le même jour dans un cercueil. Bref, les déclarations d' Abdeljalil, au lieu de lever le flou sur les circonstances de la mort de son rival, en rajoutaient plutôt, mettant encore davantage l'accent sur sa possible implication personnelle ! Les partisans de Younes, et de sa tribu insistant sur le fait que les seuls à savoir où il avait été convoqué étaient... les membres du CNT. A qeul jeu malsain joue Abdeljalil, voilà qui mérite notre attention. Car ce faisant, notre homme, plaçait aussi adroitement ses billes du côté des islamistes, dont il est finalement l'un des représentants-clé au pouvoir : il ne faut pas non plus oublier qu'il a étudié en école coranique, a fait des études de droit islamique, et a séjourné à Al-Azhar, au Caire, ce qui en fait le client rêvé des Frères musulmans, ce qu'il tient évidemment à ne pas trop montrer en public. Le futur fossoyeur de la démocratie libyenne est là : il a déjà éliminé ses deux adversaires principaux, à savoir son rival et son ancien responsable ! C'est lui, le nouvel homme fort du pays, et c'est de loin le plus à surveiller ! Et c'est lui qui va permettre au principal parti islamique de prendre le pouvoir, si élections il y a dans les semaines à venir, la Tunisie lui montrant (hélas), déjà, le chemin.
Maintenant, reste toujours à savoir ce qui s'est passé exactement : on a beau nous présenter un jeune homme ayant réussi à reprendre paraît-il le pistolet d'or ayant appartenu à Kadhafi, on a du mal à croire l'histoire. La mise en scène du pistolet d'or est en effet flagrante. Non pas sur l'existence même du pistolet, mais sur la façon d'en avoir fait dans l'instant un symbole fort du régime : en fort peu de temps également, le même pistolet aura changé de mains et sera revendiqué par un deuxième personnage. Oh, certes, Kadhafi devait en posséder un : on avait déjà trouvé chez ses fils des Kalachnikovs dorées : comme pour Huddaï, le fils bien atteint également de Saddam Hussein, le clinquant attire toujours les parvenus. Vu de Google Earth également, d'autres choses ont été manipulées dans cette fin tragique : dans l'icônographie représentant l'attaque de l'Otan, on a tenu visiblement dans la presse américaine à ajouter deux véhicules militaires blindés au convoi qui tentait de s'échapper de Syrte. Histoire de se dédouanner d'avoir attaqué des véhicules civils... Or plusieurs photos des dégâts occasionnés montrent que le convoi n'était composé que de 4x4, et qu'il a été frappé alors qu'il n'était pas en ordre de marche, mais s'apprêtait à partir ou s'était arrêté pour je ne sais quelle raison. Un rapide examen de l'endroit où s'étaient réunis les véhicules,vu sous Google Earth, ne cesse d'intriguer : à quelques mètres de l'endroit, une villa de luxe avec terrain autour intégralement en herbe, denrée fort rare dans le secteur, et dotée d'une enceinte d'épaisseur bien visible : aurait-elle servi de refuge à Kadhafi, censé être réfugié au cœur même de Syrte selon les médias ? On retombe là sur le syndrome de Ben Laden ! Une villa pareille, qui aurait échappé à la sagacité des espions de l'Otan débarqués au sol depuis un bon nombre de mois maintenant ?
Une villa dont les services secrets allemands semblaient avoir eu connaissance, révèle aujourd'hui Der Spiegel. Le BND (Bundesnachrichtendienst) semblait bien au courant des mouvements du leader déchu et semblait savoir où exactement il résidait à Sirte, mais selon le Spiegel n'avait pas eu vent de la tentative de sortie de la colonne de véhicule. On a du mal à le croire : les allemands ont certes refusé de participer aux opérations en Libye, mais on imagine mal une information de cette importance gardée égoistement sans en faire part au MI6 ou à la CIA. De plus, un autre informateur de poids vient discrètement de lever le voile sur les derniers moments de Kadhafi : c'est un de ses aides, blessé lors de l'attaque de l'Otan, car ayant reçu des schrapnels dans les jambes lors du bombardement. Or selon Mansour Dhao Ibrahim, c'est son nom, interviewé par le New-York Times, Kadhafi continuait en effet à être en liaison téléphonique satellitaire avec pas mal de correspondants, ce qui, chacun sait peut être surveillé, les satellites lancés, y compris dans le système Thuraya, pouvant être décryptés par le fabricant, en l'occurence ici Boeing. Je l'avais déjà écrit ici à deux reprises. "Mis à part un téléphone, que le colonel utilisait pour faire des déclarations fréquentes à une station de télévision syrienne qui est devenu son point de relais officiel, le colonel Kadhafi a été largement "coupé du monde", a déclaré M. Dhao. Il n'avait pas d'ordinateur, et en tout cas, il avait rarement l'électricité" : on a du mal à le croire, comme témoignage. La villa citée était à deux pas d'un nœud d'approvisonnement de courant à haut voltage, les véhicules calcinés ayant été retrouvé au bas du mur d'enceinte entourant le relais électrique situé à deux pas.
Question téléphonie, l'imprévisible Kadhafi avait pris en août dernier un bien surprenant arrêté : celui de menacer de mort celui qui utiliserait un téléphone du réseau Thuraya, qui, selon lui, servait à discuter avant tout avec l'ennemi. En somme, les défections et les redditions se faisaient avant tout par téléphone ! Il ne parlait pas du satellitaire, mais du réseau hertzien classique. Certains avaient constaté que le réseau autour de Zliten, à 120 kilomètres à peine de Tripoli avait été "jammé", à savoir brouillé. Qui en était à l'origine, voilà la bonne question à se poser. Or à ce moment-là, Kadhafi était alors en pleine discussion, notramment avec les anglais, sur comment se rendre en gardant le maximum de ses biens et de ses avoir, gelés chez eux. Des discussions tripartites, où le CNT participait pour mettre en place une reddition acceptable pour le dictateur : on le sait, son intransigeance (et son refus d'être un jour jugé pour ses crimes) les feront échouer. Mais il utilisait pour ce faire son téléphone satellitaire uniquement, et le brouillage des portables traditionnels lui importait personnellement peu, sauf comme il venait de le dire si ses propres troupes s'en servaient pour rejoindre l'ennemi. On retombe sur le même cas de figure que celui de... Ben Laden, et ses fameuses coupoles sur le toit de sa villa, avec lesquelles "il ne faisait pas d'internet"...
Ces fameux téléphones étaient devenus un enjeu crucial pour beaucoup de gens, à vrai dire, pour Kadahfi comme pour ceux qui désiraient toujours entrer en contact avec lui. En février dernier, pourtant, c'était l'inverse qui était apparu, de façon fort surprenante : celal provenait de l'Arabie Saoudite qui s'était plainte que les services de Kadhafi "brouillaient" son réseau Thuraya ! Et en même temps le réseau internet du pays, tant qu'à faire. Forfanterie de dictateur ou réussite technologique... française ? Car n'oublions pas que dans le "pack" Amesys, dont on a évoqué ici le rôle important dans la surveillance du pays, il y avait aussi le bras d'honneur promis par la société aux américains, et aux saoudiens, par effet boomerang. Or, dans la discussion autour de qui était capable de quoi ; il faudrait voir à ne pas oublier une chose : Mohamed Kadhafi, le fils aîné du dictateur, qui a fui en Algérie et ensuite au Niger est également membre du conseil d'aministration de Thuraya : le clan Kadhafi aura-il réussi à déjouer la surveillance sur sa personne via les envois téléphoniques, en infiltrant le réseau téléphonique le plus répandu dans la région ? Rappelons que le fameux réseau Thuraya est celui largement utilisé par les assaillants de Mumbaï, et que c'est aussi celui utilisé depuis toujours par les mercenaires de Blackwater, devenues les petites mains de la CIA (ici en photo le Thuraya d'un mercenaire de Blackwater surpris dans un reportage du National Geographic sur l'rak !) : difficile de croire en ce cas qu'un tel réseau, surveillé de près par la CIA depuis toujours, aît pu être mis en difficultés par l'équipe française, pour permettre à Kadhafi de ne pas se faire repérer !
Mais si Mansour Dhao Ibrahim ne dit pas non plus la vérité sur la localisation exacte de l'endroit où résidait Kadhafi, (ou plutôt ne précise pas les deux villas utilisées !) il est plus disert sur les derniers événements survenus : "Il ya deux semaines, comme les rebelles ont pris d'assaut le centre-ville, le colonel et ses fils ont été piégés dans leur navette entre deux maisons dans le quartier résidentiel appelé le district no 2. Ils étaient entourés par des centaines de rebelles, tirant à l'aide de mitrailleuses lourdes, de roquettes et de mortiers. "La seule décision était de savoir si on pouvait encore y vivre ou y mourir", affirme M. Dhao. Le colonel Kadhafi a décidé qu'il était temps de partir, et prévu de fuir vers une de ses maisons à proximité, où il était né. Jeudi, un convoi de plus de 40 voitures était censé quitter la région vers 3 heures du matin, mais la désorganisation des volontaires loyalistes a retardé le départ jusqu'à 8 heures. Dans une voiture Toyota Land, le colonel Kadhafi a voyagé avec son chef de sécurité, un parent, le conducteur et M. Dhao" (...) Au moins apprend-t-on que ce jour-là, Kadhafi ne disposait pas de son 4x4 Mercedes "spécial" équipé par les français (quoique, en regardant les squelettes des voitures incendiées on pourrait peut-être y découvrir ce genre d'engin)... A noter encore que Mouammar Kadhafi est né à Qasr Abou Hadi, une ville de Libye située à 18 km au sud-est de Syrte. Une ville où les insurgés trouveront une foultitude d'armes déposées dans des maisons individuelles (au cas où, très certainement : la paranoïa d'un dictateur surprend toujours le commun des mortels). Une ville située à 4 km à peine de l'aérodrome militaire de Sirte, et située sur la route que le dictateur était en train de prendre en contournant Sirte par l'ouest... Les photos des voitures détruites ne laissent en revanche aucun doute : sous un tel déluge de feu, les victimes ont été nombreuses (logique si c'est un mlssile thermobarique Hellfire modèle "Agm-114N Metal Augmented Charge", qui a été tiré par le drone US) , et c'était déjà une chance pour Kadhafi de s'en être sorti vivant, blessé seulement aux jambes semble-t-il lorsqu'il s'extirpe de son véhicule blindé. Le sang qu'on lui trouvera ensuite au visage proviendra d'un violent coup de crosse de revolver, asséné par un autre individu que celui qui lui donnera le coup de grâce. Le premier utilise un revolver à barillet, et porte chemisette courte, le second porte semble-t-il une chemise d'uniforme et utlise un revolver classique. Le mouvement du pistolet avant (et encore ici) et après un visage baigné de sang de Kadhafi est visible ici. On compte environ une cinquantaine de cadavres autour des véhicules incendiés : des kenyans, des nigériens, des tchadiens nous raconte un des visiteurs du lieu sur FR3. Kadhafi n'avait déjà plus le soutien de son armée (qu'il avait fait aussi bombarder !) : il ne lui restait que des mercenaires étrangers pour le défendre. Le matamore racontait que tout le pays était derrière lui : il aura fini son parcours avec une poignée d'hommes qui n'étaient ni militaires ni libyens, et qu'il payait tous pour le défendre !
Plus loin, l'ancien aide de camp raconte l'attaque elle-même : "les avions de l'OTAN et les combattants rebelles l'ont trouvé une demi-heure après leur départ. Quand un missile a frappé près de la voiture, les airbags se sont déployés, a déclaré M. Dhao, qui a été touché par des éclats d'obus lors de l'attaque. Il a dit qu'il a essayé de s'échapper avec le colonel Kadhafi et d'autres hommes, en marchant d'abord vers une ferme, puis sur la route principale, vers des tuyaux de drainage. "Le bombardement a été constant," M. Dhao dit, ajoutant qu'il a été frappé de nouveau par des éclats et a perdu connaissance. Quand il s"est réveillé, il était à l'hôpital." Un récit qui n'explique pas ce qu'étaient en train de faire les véhicules : visiblement, d'après les vestiges laissés sur place (dont des caisses de munition !) les voitures n'étaient pas en train de rouler mais étaient garées les unes à côté des autres : étaient-ils déjà arrivés à leur destination, cela semble impensable : entre le centre ville de Sirte et l'endroit où le bombardement a eu lieu, il y a peine 7 km ! Il semble plus que le convoi c'était donné cet endroit comme point de ralliement avant de se mettre véritablement en route. L'autre point restant en suspens étant pourqioi donc cet aide particulier aurait eu la vie sauve, alors qu'à l'entrée du tunnel d'eaux usées où s'était caché Kadhafi (ce n'est donc pas un racontar, et c'est bien ce qu'il avait fait, donc !) on a pu apercevoir de nombreux corps de combattants abattus, représentants le dernier carré des défenseurs du tyran ?
La fin extrêmement violente de Kadhafi et de son fils laisse donc un goût amer aux démocrates véritables : certes, la Libye nouvelle est à peine en gestation, mais ceux qui ont permis ce genre de lyhchage immonde ne peuvent raisonnablement plus se draper dans le voile de la démocratie respectable : on avait ordonné, par voie d'affiche, de se débarrasser sans aucune forme de procès d'un tyran qui avait tant à dire sur ses relations passées. A la façon des neocons, avec les mêmes mots qu'un G.W.Bush à propos de Ben Laden. C'est d'autant plus catastrophique pour l'image du pays que celui qui a coordonné cette façon expéditive de faire est aussi celui qui a sans nul doute froidement écarté du pouvoir son principal rival : en ce moment même, en Libye, sous l'apparence d'une démocratie, les germes d'une nouvelle dictature se mettent déjà en place. Moustapha Abdeljalil, qui a déjà pris l'habitude de fouler les tapis rouges européens est en effet de cette trempe d'individus, qui, après avoir servi avec zèle une dictature peuvent très bien du jour au lendemain prétendre à une virginité nouvelle et à nous faire oublier leur passé plus que trouble. Au regard de l'histoire, finalement, le jeune officier de l'armée libyenne qui en 1969 avait renversé le monarque Idris Ier n'avait pas fait autrement ! C'est bien cela, aujourd'hui, qui est le plus inquiétant. Ça et les monceaux ahurissants d'armes répartis dans tout le pays, et auxquels ont a tenu à en ajouter d'autres, comme si les immenses dépôts de Kadhafi n'avaient pas suffi.
Les coordonnées exactes de l'endroit où le bombardement du convoi a eu lieu :
31°11'38.01"N
16°31'20.92"E
Celles de la villa :
31°11'40.92"N
31°11'40.92"N
Le collecteur d'eaux usées où s'était réfugié Kadhafi :
31°11'43.52"N
16°31'17.21"E
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