Loup y es-tu ?
L’entend-on ?
Voilà, les bergers sont contents, les fantasmagoriques peurs ancestrales seront soulagées dans le cœur de tous les braves citoyens, surtout chez ceux qui produisent ou aiment le gigot à la Pâques.
Ils ont le droit, ils s’éclatent ; celui qui pose en photo pour un article, est particulièrement fier d’avoir tué le loup alpha, la meute ainsi est éclatée, les loups plus vulnérables. Tout baigne.
Mais pour les autres, ceux qui savent partager l’espace, ceux qui savent que chaque être vivant sur notre planète a autant de légitimité que nous n’y naître, d’y vivre, donc de s’y nourrir, c’est un meurtre.
Voici deux ans, on abattait les proies mouflons qu’on accusait d’être malades et de risquer de contaminer nos rôtis encore sur pattes.
Aujourd’hui, on abat leurs prédateurs ; nous seuls avons le droit d’être prédateurs, c’est vrai que seuls nous avons le fusil.
Bien sûr je n’ai rien d’autre à dire qui n’a déjà été dit vingt fois et je sais bien qu’il n’est même pas la peine d’expliquer aux convaincus que lorsque nous serons seuls avec nos bêtes domestiques, la vie sera impossible. L’équilibre si parfait nous dépasse et nous n’avons jusqu’ici fait qu’y mettre le désordre.
La sentimentalité, la poignante douleur qui étreint, devant la beauté sauvage, innocente, trahie, piégée, on ne sait pas bien si c’est la honte d’appartenir à une espèce aussi veule ou bien le deuil, qui se transforment en rage.
Mais cette rage va beaucoup plus loin quand on a conscience d’appartenir à un monde dont la beauté nous enchante au point de s’y fondre et d’y être discret pour en être témoin. Comme le prédateur qui enterre ses crottes pour ne pas laisser de traces olfactives qui éloigneraient sa proie, comme la proie, jamais solitaire, cague en tas pour ne pas guider le prédateur, la conscience de l’appartenance, un parmi les autres, nous fait agir de même, que nous soyons proies ou prédateurs puisque l’humain a l’insigne hommage d’être les deux. Il s’agit de cet instinct dans « l’impact écologique », et il ne peut être adopté que par des humains conscients de leur animalité. Un humain civilisé qui enseigne à l’école que nous sommes des êtres de culture et non pas de nature ne peut qu’utiliser sa raison pour fonctionner ; or la raison ne couvre qu’un champ étroit de notre perception du monde puisqu’elle s’évertue à tout faire rentrer dans des cadres dicibles car hiérarchisés, pour lesquels la programmation n’est qu’un jeu d’enfant.
Internet n’a l’air de rien mais s’inscrivant exclusivement dans ce cadre, il contribue à la mise en mots, comme seul mode de connivence, de toute expérience ; on en voit à chaque instant, au long des commentaires, les limites même si, quand on connaît un peu l’auteur, on en devine l’humour ou le second degré ! Mais cette « communication » privée des sens reste étriquée.
Notre monde, donc, de communication étriquée, ne favorise pas la prise de conscience de la place réelle que l’on y occupe.
Ainsi ne nous reste-t-il, pour satisfaire nos véritables aspirations, que l’artifice de l’addiction, que j’appellerais « drogue » si cela pouvait être compris comme je l’entends, et que j’ai essayé d’aborder à partir du symbole de Neptune, dans un article il y a longtemps.
Quand on parle de Loup, on parle de la Nature et ses lois, auxquelles malgré nos minauderies stériles, nous appartenons.
À l’inverse, quand nous parlons du nucléaire, nous parlons de l’Homme maître du monde, de son désir de pouvoir hégémonique, de sa rupture avec le Réel, de sa course folle vers l’abîme comme seule issue que propose son cerveau, qui se croit et se voudrait supérieur à tout.
Quand l’homme comprendra que son intelligence ne peut capter qu’une infime partie de l’ordre de l’Univers tandis que c’est l’intelligence de l’Humanité toute entière qui, on peut le concevoir, embrasse le Tout. Chacun d’entre nous ferraille dans sa sphère pour protéger son domaine du regard critique de ceux qui n’y sont point ; la spécialisation permet l’excellence mais elle empêche le regard large qui infailliblement nous rend humbles. Situer son domaine dans le monde n’est pas à la portée de tous ; on comprend bien le berger qui aimerait vivre peinard avec son troupeau en haut de la montagne et rêve que le loup n’existe pas ; on comprend bien l’ingénieur ou le technicien de l’atome, sûr de sa supériorité scientifique sur le commun des mortels, et qui ne supporte pas la critique ; c’est sans doute que dans l’apprentissage de sa spécialité on ne lui a pas appris que plusieurs regards étaient possibles et qu’il était positif de savoir se regarder de l’extérieur, par le regard supposé des autres en somme, pour ne pas s’y enkyster. Il leur manque de ne pas savoir se replacer dans le Tout. Notre société formate les jeunes, encourage tous les corps de métiers à y rester enfermés, ainsi, les populations sont-elles plus aisées à maîtriser.
L’homme ayant besoin de magie, de rêve, de gratuité, de spiritualité, nombre de scientifiques sont adeptes de sectes dans lesquelles ils trouvent, de manière primaire et quasi infantile, tout cela. Aucun humain ne peut développer tous les potentiels de l’Humanité et pourtant, chaque humain a besoin, dans le même temps ou dans des périodes différentes de sa vie de pouvoir les explorer.
J’ai aussi évoqué cela dans un article « Mon ignorance », il y a longtemps.
Parce que longtemps, aujourd’hui, c’est quelques mois.
Mais pas pour tout le monde ; la ténacité des ultras libéraux est légendaire : on propose, on laisse dormir, on repropose, on laisse pourrir, puis on agit. Cela peut s’étaler sur plusieurs décennies ! Eux ne sont pas pressés, ils ont tellement de fers au feu qu’il y en a toujours un de chaud.
Nous parlons beaucoup de moutons en ce moment, de manière métaphorique. Le loup aussi, mais peu, dans , par exemple : le loup dans la bergerie ; serait-il possible que cette métaphore influençât les bergers ? Pourtant, ils sont bien moutons aussi les dirigeants, à suivre leur berger fric, et aussi prédateurs que les algues vertes en Bretagne, qu’un lichen sur un tronc, ou même qu’un lierre sur un arbre ! Ce sont des parasites, pas des prédateurs. Les mots ont un sens.
Les dirigeants, les ploutocrates suivent les mêmes préceptes d’une même idéologie, certes, mais ils sont, d’une certaine manière, parfaitement interchangeables. À mon sens cela montre la limite des métaphores animales ; mais à mes yeux cela démontre l’uniformité produite par le même moule, celui de la « culture » occidentale ; celle-ci n’a de cesse de pointer les travers, défauts, perversions, atrocités de l’homme comme venant de son appartenance au règne animal, tandis que le juste, le propre, le salaud de salon, serait, lui, un pur et bel esprit.
Évidemment tout ceci est faux, aucun animal sur la planète Terre n’est doté de ces travers. L’Énigme reste ouverte : pourquoi les hommes les possèdent-ils ? Ah, c’est parce qu’en compensation ils ont aussi l’Esprit divin ! Pourtant j’ai beaucoup plus vu d’esprit divin chez les animaux que j’ai rencontrés que chez les humains ; mettons cela sur le compte d’un hasard malchanceux. Ce n’est pas le propos.
Le propos est, de manière irréfutable, que l’homme moderne ne développe de son cerveau que le mental et ce qu’il appelle « raison », alors que ce calcul limité à son intérêt individuel et immédiat ne lui ressemble guère pourtant.
Le problème ne se pose pas en : j’aime, j’aime pas, j’ai peur, j’ai pas peur ; la haine du loup est la haine, non pas du différent ou de l’altérité, mais du plus fort que soi ; il n’est égal à nous que face au fusil.
Récapitulons : la Nature est cruelle à l’Homme démuni ; pour survivre il développe son cerveau dans la seule optique, d’abord de s’en défendre, puis de la maîtriser, puis de la dominer.
Non, cela ne va pas ! Combien de cultures, de civilisations ont fait tout autrement ? Il n’y a que nous, et pas à l’unisson. Pourquoi avons-nous été moins habiles à nous adapter que d’autres peuples ; pourquoi avons-nous voulu créer notre vérité plutôt que s’adapter à la Vérité ? Pourquoi avons-nous développé une religion qui nous isole ?
Mais on sait qu’il n’y a jamais de réponse à « pourquoi » et qu’à « comment », cela prend un certain temps. Le constat, j’ose espérer, est fait par tout le monde : à vouloir maîtriser ce qui nous dépasse, nous ne semons que violence et mort ; le désordre est chaos, et le chaos ne se gère pas.
Comme nous avons fait nos preuves partout, en plus du mauvais usage de nos savoirs, la confiance en l’humain en ce qui concerne le nucléaire, par exemple, relève de la foi ; mais dans un monde où chacun passe son temps à utiliser des machines conçues par d’autres, sans en connaître rien, le nucléaire ne fait pas figure d’intrus. On appuie sur l’interrupteur, et du reste on s’en fout. J’ai même rencontré des citadins qui voulaient acheter une maison de campagne se trouver étonnés, stupéfaits, de savoir que l’eau venait d’une source, dont il fallait s’occuper, tandis que les eaux usées étaient collectées dans une fosse, dont il fallait s’occuper. Cela leur a paru si primitif, quasi dégoûtant, et hors de portée pour eux, qu’ils ont renoncé à la maison !!
Ils s’en remettent à dieu, aux hommes et à leur science mais grand bien jamais ne leur fît !
À force d’observer le monde, ses gens, leurs actes et leurs effets, j’ai envie de faire des dizaines d’études ; en ce qui concerne le sujet de cet article, j’aimerais savoir le pourcentage de pronuc, vraiment pro, qui trouvent normal que chaque être vivant a sa place sur notre planète et que c’est à tous de s’adapter.
Mêler Pluton à Uranus est une gageure, en astrologie. Pourquoi ne pas chercher à capter l’énergie foudroyante d’un éclair ? Pour pas celle des marées ? De la terre ? Trop compliqué ? Trop terre à terre, pour l’adepte de l’atome ?
Le loup nous survivra, il le prouve à Tchernobyl ; nous pouvons bien faire tout ce que nous voulons, la Nature aura le dernier mot. Sauf en ce qui concerne la panthère de Taïwan dont le dernier individu vient de disparaître.
En attendant, nous sommes quelques-uns à avoir envie de continuer à jouir de toutes les beautés du monde.
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