M. Barnier, ministre et candidat député : la démocratie française minée par les cumuls de fonctions
Les citoyens français ont tout lieu de se réjouir. Leurs hommes politiques sont des surhommes. M. Michel Barnier, tête de liste UMP aux élections européennes en Île-de-France, a annoncé, selon l’Express.fr du 4 mai 2009 qu’il ne quitterait son poste de ministre de l’agriculture et de la pêche qu’après les élections de juin. Il en est de même de Mme Dati, seconde de sa liste et toujours ministre de la justice.

Ministre et candidat député, des fonctions à mi-temps ?
L’argument avancé par M. Barnier ne manque pas d’intérêt : il s’est dit tout simplement capable de faire campagne et d’assumer « totalement (son) travail » de ministre. Il précise même comiquement la façon dont il compte s’y prendre : « Je ferai totalement mon travail (de ministre), a-t-il assuré, comme je l’ai toujours fait depuis deux ans, et puis je prendrai le temps le soir, le week-end, de faire une campagne sérieuse ».
On reste béat d’admiration. La journée de M. Barnier et de ses semblables aurait-elle plus de 24 heures ? Quand prend-il seulement le temps de se reposer ? Ou alors, il faut admettre que les fonctions de ministre ou de candidat député sont des sinécures qui n’exigent ni l’une ni l’autre un travail à plein temps. On découvre même qu’une campagne électorale peut très bien se mener sur ce qui reste de temps libre à un ministre. À qui fera-t-on croire pareilles invraisemblances ?
Les avantages d’être candidat député en restant ministre
On voit bien, en revanche, tout l’intérêt qu’il y a à se conduire ainsi : le candidat en déplacement peut avantageusement se prévaloir à tout instant de sa fonction ministérielle. C’est d’abord tout bénéfice sur le plan matériel puisque le candidat peut ainsi disposer de la logistique de son ministère : moyen de communication et de transport, personnel de l’État à son service pour le recevoir et l’accompagner sur place.
C’est également avantageux pour le candidat de jouir de la notoriété et de l’autorité du ministre en exercice auprès des électeurs. Les promesses que le candidat est amené à faire, reçoivent un label de plus grande crédibilité dès lors qu’elles sont dispensées aussi par le ministre en exercice qui garde toujours la main sur ses services. La pêche aux voix pour un ministre de la pêche peut en être facilitée. Bien malin, en tout cas, celui qui peut faire la distinction entre ce qui relève de la pure activité ministérielle ou ce qui a trait à celle du candidat.
Cette confusion des genres est ce que précisément la constitution française a tenu à éviter en instaurant l’incompatibilité entre la fonction de ministre et le mandat de député, en raison du principe de la séparation des pouvoirs exécutif et législatif. Sans doute, dans ce cas d’espèce, M. Barnier n’est-il pas encore député. Mais ce cumul commence à entretenir une confusion, sans compter que l’égalité entre les candidats qui se présentent à l’élection, n’est pas respectée. Paul Villach
13 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON