Macron Président, un vote pour rien ?
Après une campagne électorale inédite, la France est En Marche pour sacrer Macron son nouveau Roi, sur les ruines des partis qui ont gouverné la France depuis soixante ans.
Le Parti socialiste n’a pas survécu au quinquennat de François Hollande, élu en fustigeant la finance, et trahissant ses promesses avec une politique libérale.
Ceux que Valls qualifie de traitres sont en réalité les « socialistes authentiques », ceux pour qui la parole politique a une valeur et les frondeurs eurent raison de quitter le gouvernement au nom des engagements pris.
C’est d’ailleurs tout le sens de la victoire d’Hamon à la primaire socialiste.
Le faible score du PS est la résultante de la traitrise de la direction socialiste à l’égard de sa base en n’excluant pas des Valls, Bartolone, Delanoë demeurés membres du PS en soutenant Macron.
Qu’en est-il de la discipline partisane ?
Si le PS veut se reconstruire ou se recomposer, ce sera en investissant comme candidats aux législatives, des personnalités en phase avec la ligne Hamon-Mélenchon, s’associant au Parti de Gauche qui tire sa légitimité des dernières élections et représente le « peuple de gauche ».
Que ceux qui ont soutenu Macron rejoignent En Marche et cessent de saboter le parti qui les a fait vivre et prospérer durant des dizaines d’années.
La Parti Républicain n’est pas dans la même situation.
Lors des dernières primaires, Fillon avait parfaitement incarné les valeurs de la droite conservatrice.
C’est sur son programme économique rigoureux sur les dépenses et moins permissif sur le plan sociétal qu’il avait réuni une immense majorité de Français qui votent à droite et au centre.
Mais l’homme Fillon avait deux visages, il a été démasqué et est devenu inaudible. Il a sacrifié la belle dynamique des primaires en s’acharnant à se maintenir.
Les leaders républicains, par loyauté ou par bêtise, ont accepté qu’il demeure candidat en leurs noms, lui qui en février dernier continuait de se faire payer des costards à 14.000€ par un avocat libanais.
Aux législatives prochaines, avec un leadership cohérent, ils pourront démontrer que leur poids n’est pas négligeable. Et que ceux qui se sentent plus proches de Macron rejoignent les « Marcheurs » et les « Marchands ».
C’est ainsi que les étoiles se sont alignées pour la naissance du « sauveur ». De gros intérêts ont compris le profit qu’ils pouvaient en tirer et ont permis à ce brillant inconnu qu’est Macron de faire un hold-up sur la présidentielle.
Son discours souvent creux et sans profondeur fut celui rassurant que les gens raisonnables voulaient entendre, alors que leur parti optait pour des idées plus radicales.
Il aurait eu sa place dans tous les gouvernements depuis Giscard, mais la jeunesse du personnage et son côté libéral sur le plan économique et sociétal, ont eu raison d’une partie des Français qui ont cru au discours édulcoré de l’énarque.
Certain que les Français sont dans leur majorité pour le compromis, il a récupéré un grand nombre d’électeurs du Parti Socialiste effrayés par le projet économique du candidat Hamon, et a galvanisé un grand nombre d’électeurs de droite incapables d’accorder leur vote au combattant estropié par lui-même, mais qui accusait les autres.
Avec Macron, les milieux financiers disposent d’un Président acquis. Leurs affaires reprennent et les bourses saluent en fanfare l’avènement du banquier prodige.
L’euphorie risque d’être de courte durée.
Si on fait le compte des votants qui ont voulu « renverser la table », de Le Pen (21,53%), Mélenchon (19 ,64%), Dupont-Aignan (4,75%) aux Lassalle, Poutou, Asselineau, Arthaud et Cheminade, on arrive à 50%.
Macron (23,75%), Fillon (19,91%) et Hamon (6,35%) totalisent l’autre moitié. J’inclus Hamon alors qu’il est plus proche de Mélenchon que de Macron.
La campagne du second tour s’ouvre sur l’habituel refrain du fascisme de Marine Le Pen et des dangers encourus par notre démocratie.
Il est vrai que des néonazis antijuifs comme Soral soutiennent Marine Le Pen, mais ils ne constituent qu’une infime partie de son électorat.
Parmi les ouvriers Marine Le Pen réalise 37% quand Mélenchon fait 24%.
Parmi les employés Marine Le Pen est à 32% et Mélenchon à 22%.
Chez les jeunes de 18 à 34 ans, Le Pen et Mélenchon sont plébiscités puisqu’ils réalisent respectivement 25,7% et 24,6%.
Caricaturer puis écarter d’un revers de main les presque huit millions d’électeurs qui ne sont ni fascistes, ni racistes, mais qui souffrent d’une société mondialisée dont ils sont exclus, est la stratégie perdante qui fait monter les populistes depuis trente ans. Sur le plan moral, on sait que cette dialectique est nauséabonde puisqu’elle est fausse. C’est une profonde erreur qui, tôt ou tard, coutera cher à notre pays.
Marine Le Pen n’est ni une fasciste, ni une antisémite, ni une raciste.
Macron sera président :
Mais avec un score beaucoup moins élevé qu’on ne l’imagine.
Même contre Marine Le Pen, il lui sera difficile de rassembler les souverainistes alors qu’il est étiqueté mondialiste. Les conservateurs qui ne se reconnaissent pas dans sa vision sociétale libérale, et les partisans d‘une identité française chrétienne se souviendront des compliments adressés par Macron à Angela Merkel pour sa politique d’ouverture des frontières.
Malgré tout, cette fois Macron sera élu.
Pourra-t-il gouverner ?
Rien n’est moins sûr. La règle est que tout candidat qui réalise plus de 10% au premier tour peut se maintenir. Il est probable que les Frontistes, les Républicains, les Mélenchonistes et autres socialistes de la ligne Hamon se maintiendront au second tour contre les candidats d’En Marche.
La composition de l’assemblée ne permettra sans doute pas au Président de disposer d’une majorité, et après une première dissolution, le Président Macron devra composer si c’est possible, et peut-être démissionner s’il ne trouve aucune majorité.
Tel est l’avenir prévisible des prochains mois.
Pourrons-nous éviter le chaos ?
Plus très longtemps et tout dépendra de la volonté politique des dirigeants.
Si, sous l’impulsion des leaders français, les pouvoirs politiques en Europe s’attaquent violemment et de façon impitoyable au pouvoir financier qui détruit les vies de millions de « gens »,
Si les banques redeviennent cantonnées dans leur activité première, celle de financer l’économie par des prêts qualifiés aux particuliers et aux entreprises,
Si les multinationales qui s’enrichissent en France sont contraintes de payer des impôts en France,
Si on interdit les produits financiers extravagants qui génèrent des produits virtuels dans des bulles spéculatives qui éclatent et ruinent les peuples,
Dès lors que cette bataille sera engagée sérieusement, nos dirigeants gagneront en crédibilité et pourront entamer une politique de réforme favorable à l’entreprise et à l’emploi permettant de mettre En Marche la machine à créer de la prospérité ainsi qu’à intégrer ces centaines de milliers de jeunes qui sont Français et ennemis de la France.
Bernard Darmon
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