Manipulation pro-anglais à Courrier international ?
« Demain, les fonctionnaires parleront tous anglais »
Ouaou ! En voilà une nouvelle choc. Dépêchons-nous d’imposer l’anglais dans l’UE avant que les Russes ne soient plus « fluent » que nous. Et adressons nos félicitations au ministre de l’ÉN qui veut mettre de force les bambins de trois ans à l’anglais.
On enfonce le clou dans le chapeau de l’article : « Le président Dmitri Medvedev entreprend de moderniser la fonction publique. Les serviteurs de l’Etat sont notamment priés de savoir parler anglais d’ici à 2020, et les plus chanceux pourront aller se former à l’étranger, rapporte Gazeta.ru. »
Pourtant, tout au long de l’article, si l’anglais est bien mentionné pour des sites Internet et des traductions de lois sur les entreprises, en ce qui concerne la ou les langues étrangères des fonctionnaires, on cherche en vain une citation correspondant à cette nouvelle choc.
En effet, l’obligation future concerne une langue étrangère, qui pourra donc être aussi bien l’ukrainien que le polonais ou le chinois ! Reconnaissons néanmoins que c’est fidèlement expliqué dans le corps du texte :
« Le ministère russe du Développement économique brosse le portrait du fonctionnaire moderne tel que le souhaitent les pouvoirs publics. Ce qui lui est demandé est essentiellement de revoir sa formation et d’apprendre au moins une langue étrangère. »
« L’un des objectifs du programme est d’arriver, en 2020, à 20 % de fonctionnaires maîtrisant une langue étrangère. »
Un polyglotte m’a confirmé que sur la VO elle-même, il s'agissait bien d'une langue, point.
Mais alors, comment et pourquoi l’info juste « une langue étrangère » devient-elle dans le titre et le sous-titre « les fonctionnaires parleront tous anglais » ?
Propagande, manipulation, facétie de la fille du journaliste sur le traitement de texte de papa ? On s’interroge.
D’autant que les « native english » ont eux, de leur côté, fait preuve de davantage d’honnêteté journalistique ou de précision :
« After 'Squirrel Institute' slip-up, the government says 20% of Russian officials must speak a foreign language by 2020 »
(The Guardian en ligne)
Sur un forum russe, les commentaires à cette info sont féroces ou moqueurs. C'est perçu comme un effet d'annonce et comme un moyen de plus pour profiter de l'argent public, pas comme un but réaliste et atteignable. En voici un échantillon :
— Avant d'apprendre l'anglais aux fonctionnaires, il faut d'abord leur "désapprendre" leur penchant pour les pots-de-vin ;
— Ils vont payer aux fonctionnaires des vacances à l'étranger - avec les impôts du contribuable ;
— Le pays a bien d'autres problèmes plus urgents.
— Ils vont pouvoir s'adresser en anglais aux retraités sans abri - c'est chic
— Ils feraient mieux de construire des canalisations dans les villages russes. Dès qu'on s'éloigne un peu de Moscou, c'est comme au temps des tsars : un trou dans le sol et l'eau dans le puits.
— Un fonctionnaire, jeune et instruit, arrivera dans un village et dira : "This hole is OK to drop the shit." !
2. Dans le même ordre d’idée, la même situation mais inversée, c’est un média ukrainien russophone qui a rajouté la mention de l’anglais !
Dans un article de Libé sur la vente des films français à l'étranger, on lit "Selon uniFrance, ces résultats s’expliquent par l’absence de film porteur l'an dernier."
Et dans un article ukrainien (traduit) : "L'organisation cinématographique "Unifrance" prétend que la raison de ces chiffres désastreux est l'absence des films porteurs français, tournés en anglais."
Conclusion : méfiance, méfiance... Lisons des deux yeux, et ouverts de préférence !
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