Manuel de survie par temps de crise
Un billet léger et sérieux à la fois. Pour méditer sur les temps présents, donner quelque zestes de sens à un monde qui ressemble à l’absurde mais qui s’il vous convainc de son absurdité, signe votre perte ; or, l’homme n’est pas destiné à être un perdant, ni face à Dieu, ni face à la Nature, ni face aux Puissants. L’homme doit devenir libre ! Ou abdiquer sa liberté et choisir d’être un esclave au sens moderne.

Pour commencer, ironiser. Desproges disait que le névrosé rêve de construire des châteaux en Espagne et que le psychotique croit qu’il peut les habiter. Transposons au monde de la finance. L’investisseur rêve de construire des bulles spéculatives et faire de la thune avec. Le trader croit qu’il peut vivre dans une bulle spéculative.
Puis, être pragmatique. Dans les principes. Savoir que quand on prend un crédit, on est tenu en laisse, on abdique un peu de sa liberté. A part le crédit immobilier, faut avoir une mentalité d’esclave pour prendre un crédit à la consommation, pour acheter une voiture par exemple. L’ancienne suffit ou alors, prendre une occase, ce n’est pas ça qui manque. Bien évidemment, je ne parle pas d’un taxi pour qui la caisse est un instrument de travail. Toute entreprise a besoin de financements pour se développer. C’est le crédit à la consommation que je vise. Une idiotie qui rend esclave avec les remboursements et qui rend cocu car l’écran plat ou le canapé est payé plus cher que le prix du marché. Il faut être con pour acheter un écran plat à crédit, l’économie de la connaissance est déjà en place, mais les gens obéissent à l’économie de l’ignorance. Qui repose sur la connerie des gens et les profits qu’on peut faire sur leurs faiblesses cognitives, comme tous ces jeux télévisés où on appelle en dépensant un euro pour en gagner 1000 alors que la probabilité est d’un dix millième, vu le nombre de participants. C’est sans importance.
L’accès à la propriété est un idéal tout à fait respectable. Le logement est indispensable, indissociablement lié à notre culture sédentaire, un lieu ou on se construit. Les uns sont locataires, les autres propriétaires. Accéder à la propriété c’est se dégager de cette pesanteur financière qui nous inféode à un bailleur. Mais pour la plupart, accéder à la propriété nécessite d’une autre forme de soumission, face à la banque et au crédit. C’est un calcul et un choix. Mais bienheureux les héritiers d’un bien transmis par les parents, qui peut être vendu et servir d’appoint pour devenir propriétaire. Nous ne sommes pas égaux, les uns naissent dans des familles aisées, les autres avec des parents prolétaires. Mais la loi universelle de la résilience et le choix de la persévérance font que le salut est pour tous, mais pas au même niveau sur le plan matériel. Le plan spirituel est l’essentiel. Votre 21ème siècle sera spirituel ou sera fade.
Et maintenant, la minute Courbet. En ce moment, panique pour quelques ménages endettés avec les crédits relais. Un conseil aux futurs acquéreurs. Examinons le cas suivant, simplifié, sans tenir compte des frais annexes (intérêts, notaires, agent, charges, taxe foncière). En 2005, un ménage veut acheter un logement 100 000 euros. Celui qu’il possède est estimé à 100 000. La banque prête cette somme et le nouveau logement est acheté alors que l’ancien est mis en vente au prix fort. 18 mois plus tard, le bien est vendu 110 000 euros. L’opération a dégagé 10 000 euros, servant à payer les frais annexes et le prêt relais est remboursé. L’opération est pratiquement neutre. En 2009, même situation. Un ménage achète 100 000 euros un logement mais 18 mois plus tard, l’ancien n’est vendu que 90 000, après négociation du prix. D’où une perte de 10 000 euros, plus les frais annexes. Leçon à retenir en cette période de baisse de l’immobilier, vendre avant d’acheter, le contraire de l’avant-2006.
Reprenons les rênes d’une « chevauchée à la Baudrillard ». Le monde vous paraît terrifiant, avec ses guerres et ses crises. Ne soyez pas pessimiste. Les élites ont tout intérêt à ce que le monde ne sombre pas. Mais ne soyez pas naïf. Le monde est dominé par des gens qui adorent l’argent et ne peuvent se passer d’une vie de luxe. C’est pour ça qu’on en voit à la télé, dans les émissions. Ils viennent faire leur promo, utiliser la plate-forme publique pour faire de la pub gratuitement et le monde trouve ça normal. Comme le prix des places pour un concert de Johnny ou un match de ligue. Hier soir, Les Houllier et les Deschamps ont exprimés leur stupéfaction en constatant que le stade de Bordeaux n’était pas plein. Etonnés, mais pas un seul pour évoquer le prix des places. Comme quoi, ces gens, du foot, de la télé, de la chanson, sont comme ceux de la finance et de la politique ; ils vivent dans une bulle et croient que tout leur est dû eu égard à leur position et qu’ils le méritent parce qu’ils donnent. Si vous observez ce qui se passe chez les raéliens, vous verrez que c’est pareil, mais en plus exagéré et sans les mécanismes démocratiques. Les adeptes de Raël sont prêts à dépenser le quart de leur salaire pour rémunérer la secte et son prince qui peut s’adonner au pilotage de voitures de course, un dada partagé par Fillon et Ferry. Mais ces deux là ont servi la République. Et Johnny aussi, qui donne tant, du moins pour les dévots de sa voix. En fait, la société où nous vivons ressemble à une secte qui se superpose à une démocratie. L’important est de comprendre les mécanismes sectaires et de ne pas abdiquer sa conscience. Par temps de crise, la lucidité ne procure pas un bien être mais du moins, elle offre le bonheur amer de se sentir libre. Car la devise qui arrive, c’est Liberté, Vérité, Fraternité.
Un conseil, fuir BHL et Houellebecq, deux sinistres personnages qui ne comprennent pas pourquoi ils sont détestés. Pourtant c’est simple, ces deux-là sont comme Johnny ou Zidane mais le problème, c’est que le public qui les suit est instruit et donc, possède l’intelligence de la détestation, contrairement aux fans des deux précédents, qui ont l’innocence, pour ne pas dire la bêtise, de la vénération. Ce monde du spectacle, c’est une pornographie financiarisée dont les profits sont assurés par les maladies mentales vénériennes des adorateurs. Noah parlait des cochons payeurs, vénérant leurs idoles, ceux qui enfoncent leur carte de crédit n’importe où, alors que les maladies vénériennes sont dues aux bites des porcs fourrées n’importe où, comme aurait dit Sevran, qui fut par ailleurs vénéré par ses fans.
Vivre en temps de crise ne dispense pas de quelques plaisirs simples. Bien au contraire, c’est le meilleur moyen de traverser le temps, fuir ce spectacle qui rend anesthésié les uns et coléreux les autres. Entre l’apathie et la furie, il y a d’autres stratégies. Pour vivre avec une sérieuse légèreté et ne pas maudire cette vie si précieuse. Aimer ses proches, regarder pousser ses plantes, les voir fleurir sur un balcon ou dans un jardin, écouter de la musique, converser avec ses amis, lire un livre de philosophie ou un roman, pourquoi pas du BHL ou du Houellebecq. On peut lire un auteur et cracher dessus. Frank Zappa crachait bien sur son public, non sans livrer quelque conseil pour vivre décemment en esprit. L’essentiel est d’être toujours un peu fou disait-il. Soyons fou alors, parce que dans le cas contraire, ce monde pourrait nous rendre dingue !
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