Manuel Valls entrerait au gouvernement en juin après les élections européennes
Cette information ne doit pas surprendre les fins observateurs qui en avaient remarqué les signes avant-coureurs (comme du reste un rédacteur du post.fr Bruno Roger Petit ici). Il est vrai aussi que la spécialité de l’Elysée depuis mai 2007 est la chasse aux socialistes. D’abord cela a été celle aux éléphants : Kouchner, puis une tentative en deux temps avec Rocard missionné puis démissionnaire - d’une mille et une commissions, genre Shéhérazade on raconte une histoire qui chasse la précédente pour endormir Schâhriar - pour enfin terminer sa riche vie politique au rayon surgelé comme ambassadeur aux pingouins et aux igloos (mais ce demi-trophée-là n’a que peu d’importance puisque l’ancien premier ministre de Mitterrand est rangé des voitures comme il l’a annoncé, l’Autosatisfait ne peut l’accrocher au-dessus de sa cheminée cela ferait vraiment vantard, ce qui en fin de compte n’est pas pour gêner son Excellence), le danseur de tango africain qui est allé vérifier la qualité des cigares pour notre Science Munificente. On ne peut plus parler de Besson car il est désormais membre et co-manitou de l’United Money Profit.
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Le château se trouvait depuis quelque temps en manque de têtes à accrocher à son tableau de chasse. L’ouverture avait fait long feu, le coureur de jupes du FMI qui a bien profité de l’aide du locataire de la Lanterne pour diriger le porte-monnaie du monde a fait dire que ce qui l’intéresse ce n’est pas d’être grand chambellan mais plutôt calife.
Notre Invité permanent des villas de luxe a donc décidé de repartir à la pêche au gros. Il y avait bien eu à un moment donné Védrine, mais c’est un cheval de retour qui ne compte pas vraiment. Ce n’aurait été qu’un petit poisson d’eau douce. Ce qu’il fallait dans les filets du Capitaine du Titanic c’est un poisson aux qualités indéniables : un bon coup de com. Faire coup double : dézinguer un peu plus le PS et montrer son trophée au bout d’une pique bien haut au-dessus des grilles de Versailles afin que la prise soit vue jusqu’à l’Oural. Car cela va marquer pour sûr. Pour cela il y avait deux candidats : Vincent Peillon et Manuel Valls. C’est à la fois un choix tactique et un concours de circonstances. En effet outre le fait que Valls paraisse plus brillant et plus prometteur que Peillon, ce denier est collé à l’araldite bi-composants au PS (quand même tête de liste aux européennes) et sa stratégie est de viser potentiellement 2012 comme candidat de son parti, quittant alors le destin poitevin pour le sien. De plus, atout de catégorie 1 en Sarkoland, Valls est très télégénique (bon la Martine du Nord, elle, a un petit faible pour Hamon). Et plus ça brille, plus ça communique, plus c’est télégénique et plus ça plaît boulevard Saint Honoré.
A la vérité, je tiens mes informations de trois « taupes », dont l’une est une femme. Vous comprendrez évidemment que je ne peux révéler ici leur nom et ce d’autant que j’ai une autre révélation à faire pour bientôt (le temps de vérifier et de croiser mes sources) et celle-là aussi pas piquée des hannetons. Mais deux viennent d’un camp et la troisième personne d’un autre. En fait j’a dû faire d’autres recoupements car je me suis demandé pourquoi j’avais obtenu cette précieuse et atomique révélation. Comme toujours : à qui profite le crime ? En fait ce n’est pas la justesse de l’information qui est en cause, mais pourquoi la révéler maintenant. Je me suis donc débrouillé pour me faire confirmer la véracité de celle-ci. Pour la réponse à la question je vois deux hypothèses : la première, habituelle au camp de tout est communication, nouvellement appelé le camp de la Banane : tester le coup. La seconde est inverse : empêcher le coup en le diffusant suffisamment à l’avance pour que des pare-feux se mettent en place. Malheureusement je n’ai pas de moyens de savoir quelle est la vraie raison. Vous pourriez me dire que tout dépend qui m’a informé en premier, du côté de l’UMP, du côté du PS ou même du côté de chez Swann si nous étions à Guermantes à défaut d’être chez la princesse de Clèves (et pourtant Lafayette cela devrait dire quelque chose à Sarko l’américain surtout en voulant fêter le débarquement, non ?). Oui. Mais ce n’est pas si simple. Mes informateurs ne sont pas forcément dans la ligne de leur parti. Donc je vous laisse en plan avec cette énigme. Les plus futés seront sans doute proches de la vérité.
En revanche je peux vous dire comment cela s’est passé. L’opération a été montée en trois temps
- d’abord un appel téléphonique de Besson à Valls entre l’abandon de candidature de ce dernier à la tête du PS et cette élection
- ensuite soit fin décembre soit début janvier une rencontre entre Valls, une autre personne dont je reparlerai et Besson dans un coin discret au bar du Ritz place Vendôme, celui à gauche de l’entrée. Cela s’est passé aux alentours de 22 heures 30 / 23 heures, une heure où cet endroit est clairsemé et où la clientèle est plutôt étrangère. Besson n’est pas si connu que cela qu’il se remarque. La réunion a été discrète. De toute façon ce n’est pas le Ritz qui allait crier quoi que ce soit sur tous les toits, si tant est qu’il eut reconnu qui que ce fût.
- enfin un dîner chez Lipp, exactement dans la partie appelée Omnibus qui a deux avantages notables : elle est isolée et on peut y accéder sans être vu, où étaient présents : Frank Louvrier le communicant de l’Elysée, Claude Guéant, Eric Besson, Manuel Valls et deux autres personnes dont je ne peux parler, l’une étant déjà présente au Ritz. C’est l’une de ces deux personnes qui a réglé l’addition, addition disons le honnête (ce qui ici a une toute autre signification qu’honnête bien entendu), mais pas dans mes moyens.
Pour cette réunion Louvrier a été préféré à Sauzay car il est moins connu du grand public et le château, depuis les bêtises du second, a plus confiance dans le premier (meilleur Louvrier de France, bon passons). Sa présence avait pour objet de définir une stratégie de communication globale. Guéant était là pour donner une caution élyséenne et de la crédibilité à cette rencontre et Besson à la fois comme intermédiaire et comme témoin de l’expérience de franchir le Rubicon. Et de plus il y a une bonne entente, malgré tout, entre Besson et Valls. Un peu comme à l’UIMM on met un peu de liquide pour fluidifier les relations, Besson comme témoin avait ce double avantage de parler d’expérience - car malgré tout César l’a franchi, lui, le Rubicon, en jetant les dés (il était plus utile de jeter un pont d’une rive à l’autre, mais Caesar est un joueur invétéré, en particulier il était champion de 421, bon là je m’égare alors que les choses sont sérieuses) mais ce n’est pas donné à tout le monde, on peut légitimement penser que l’impétrant doit avoir un léger pincement au cœur - et d’aider au contact. Sa mission sous-jacente, notamment par l’exemple, : conforter Valls dans sa future décision.
Je peux même vous dire que Guéant a pris ce soir-là un Gaspacho Andalou, un Saucisson pistaché et des vermicelles de marron, quant à Valls cela a été une soupe de poissons de roche suivi d’un couscous de la mer et enfin un crumble fraises/ rhubarbe. Curieux de manger du poisson dans une brasserie me direz-vous, la Sauerkraut mit Würtzen, Kartoffeln und viel Bier, n’auraient pas été mal, sauf si on était un vendredi tout en sachant que la politique est une belle bouillabaisse. En boisson il y a eu je crois un rosé pour les uns (Domaine Ott « Château de Selle », 2005) et aussi un rouge pour les autres (Pommard « Chaponnières » 1997).
Les quelques signes visibles que l’on a pu avoir de cette « transaction » deviennent des évidences quand on sait ce qui s’est passé. D’abord c’est clair que Sarkozy veut anéantir ses adversaires (vocabulaire qui vient des propres paroles) et qu’une des manières pour y arriver est d’attirer dans ses filets des poissons qui en vaillent la peine et Valls en vaut la peine. Besson avait été il y a un an fort marri d’avoir échouer à sa mission de ramener Rocard entre les mailles de son filet à lui, voulait se rattraper et prouver qu’il méritait la confiance du Très Haut ( Un retour de bâton pour n’avoir pas pu ramener Michel Rocard dans sa besace ? Car selon une source gouvernementale, Eric Besson a bien tenté, en liaison directe avec l’Elysée et Matignon, de confier une mission d’ouverture sur l’économie internationale à l’ancien Premier ministre socialiste. Le deal a capoté fin janvier quand Rocard a démissionné de la commission Pochard sur l’éducation. Une prise que le secrétaire d’Etat aurait pu déposer aux pieds du chef.-Libération). Depuis quelques temps le discours du Kondukator est simple : ouverture d’une part et d’autre part il faut une union nationale pour combattre la crise millénaire qui secoue le monde et les étoiles. Noter bien ce second point car je vais y revenir. De l’autre côté on a bien entendu les paroles de Valls qui, sous couvert d’ouverture d’esprit et de modernité socialiste, a violemment critiqué ce qu’il a appelé l’antisarkozysme obsessionnel et le gauchisme infantile, se mettant a contrario dans le camp des raisonnables et des modernes : Déboussolés par nos défaites consécutives aux élections nationales, certains responsables de notre parti cherchent encore leur cap entre le gauchisme infantile et l’anti-sarkozysme obsessionnel. Un signe évident de sarko-compatibilité. Du reste il est plutôt apprécié du côté de l’UMP. Remarquez avec des paroles comme celles-ci on n’en est pas étonné : Tout cela constitue-t-il, pour autant, « un mouvement historique de régression des droits » et un projet concerté « d’étouffement systématique de tous les contre-pouvoirs » ? Ma réponse est non. Faut-il voir dans ces évolutions la manœuvre réfléchie et diabolique d’un Bonaparte en Ray-ban ? Ma réponse est encore non. En revanche voici que qu’en a dit Hamon : Manuel Valls s’est fait une spécialité, parmi d’autres petits commentateurs à Paris de faire des compliments à Nicolas Sarkozy. Je les lui laisse. et ailleurs (bureau national du mardi 24 mars) : J’en ai plus et plus qu’assez de passer mon temps dans les médias à répondre à quelques socialistes plutôt qu’aux sarkozystes. Qui d’ailleurs, utilisent tes phrases, Manuel, pour nous taper.
On remarquera que la communication est en route comme cette « tribune » d’opinion du Monde (parlons du peu, le quotidien de référence) qui fustige elle aussi cet anti sarkozysme obsessionnel. Vous imaginez : un article, en bonne place dans le Monde, d’un auteur qui ne signe même pas de son nom. Imaginez ce que cela veut dire : par exemple que Le Monde lui donne la parole. Que Le Monde le distingue d’autres articles. Que ce sujet qui légitime Valls est mis en avant de façon magistrale. Qu’un nouvel angle d’attaque des spins doctors se fait jour : toute future critique contre notre Eminence sera dorénavant cataloguée comme inepte car relevant de la psychiatrie. On disqualifie à l’avance le contradicteur. Foin d’opposition réfléchie et même sage, foin des constats : toute critique ne procédera plus que de la maladie mentale. Et Valls est à la fois initiateur et bénéficiaire de cette théorie. Enfin co-initiateur, mais bénéficiaire car cette nouvelle vue du monde politique français lui ouvre les portes du pouvoir actuel sauvegardant sa morale, faisant de lui un Sage, réfléchi, pondéré, un Juste en somme, lui donnant tout prétexte au ralliement puisque l’économie par sa dégradation augmentée impose une union de toutes les forces (vives de la nation comme dirait l’autre). La machine à média est en route. De plus cette démonstration de maladie mentale d’être antisarkozyste permet dans un double salto arrière de faire en négatif (ou en positif comme vous voudrez) une propagande quant aux qualités réelles de sarkozy car en s’opposant frontalement à lui on n’est qu’aveuglé et on passerait à côté de ses réelles qualités. Et voici ce qui me fait tomber à la renverse,moi qui fait partie des obsessionnels, ce qu’écrit notre bon Jean-Patrick D. : M. Valls a fustigé les tenants d’un "antisarkozysme obsessionnel" au sein de son parti. Cela ne touche pas seulement son parti mais toute la gauche et notamment les professions intellectuelles. Alors, que signifie-t-il ?
J’ai écouté le discours du président à St Quentin et une évidence m’est apparue : cet homme fait de la politique, propose de l’idéologie, c’est à dire des pensées, des convictions au sujet de la société, de la vie en général. On peut-être d’accord, en désaccord, mais le fait est là : il ne parle pas pour ne rien dire. Or depuis la Libération et peut-être même avant, la pensée de gauche, l’idéologie de gauche (avec tous ses avatars : communiste, gauchiste, catho...) domine la sphère intellectuelle et le paysage mental de la France. Il y a un monopole de la pensée politique, de la moralequ’elle détient et c’est ce que vient rompre le discours sarkozyste ; il vient entamer ce monopole.
Je vous laisse méditer ce discours (le texte entier est à lire, il est éclairant). Moi, vous le savez bien je ne suis qu’un aveuglé échappé d’un hôpital psychiatrique. Mais ce qui me rassure, je ne suis pas le seul, mais cela devrait inquiéter le pouvoir, car tant de fous en liberté est un vrai danger pour la nation. Il ne restera plus au pouvoir qu’à faire de la France ce qu’il fait des villes de Nîmes, de Saint-Lô, de Saint-Quentin pendant des heures. Mais je rêve sans doute, dans ces villes règnent alors la liberté et la sagesse.
Il faudrait aussi que Valls et Jean-Patricks D., si par hasard ils tombaient à Grandrange sur un employé d’Arcelor Mittal, un peu en colère, ils lui tiennent courageusement le même discours et le traite de psychopathe si d’aventure cet employé regrettait avec quelque violence les promesses du Guide, celles des investissements, puis celles de l’usine de capture de CO2 dont a finalement bénéficié l’Allemagne, celles de revenir (par deux fois il l’avait dit il y a plus d’un an et a répété lors de son discours télévisé qu’il irait en ajoutant que l’usine, hein, n’était pas encore fermée...) Hier, 31 mars 2009 l’usine d’Arcelor Mittal de Gandrange a fermé définitivement ses portes.
La question est de savoir comment tout cela a pu arriver. C’est en fait le concours d’un parcours personnel et de l’histoire économique. Valls a été prétendant au trône, puis royaliste et enfin hors circuit. On comprend que la conjonction d’une ambition, justifiée ou non, déçue et d’une impatience mal maîtrisée puisse amener à réfléchir à son avenir de façon différente. Parmi les conditions psychologiques il y a donc cette impatience de pouvoir, ce rejet qu’il a ressenti du PS et un autre événement qui a joué dans une décision qui doit être confirmée : l’échec du Zénith (ou le demi échec). Cela le conforte que le PS irait dans le mur. Alors peu de solutions se présentent à lui. Parmi celles-ci il y a l’intégration du gouvernement Sarkozy puisque les circonstances peuvent lui être favorables.
Revenons en à l’association des deux faits suivants : a- la crise continue de s’aggraver d’ici juin (phénomène favorisant) et b - le PS se ramasse aux européennes (phénomène déclenchant). En fait le second élément sera ou non la confirmation de sa décision. En effet le PS en déconfiture et bouclée par les amis de la dame du Nord, il n’y a plus d’espace pour lui. Si en même temps l’économie est au plus mal voilà qu’une fenêtre s’ouvre : l’union nationale. Si en plus on parle de Fillon pour l’Europe, c’est le jeu des chaises musicales et des places s’offrent. Il sera alors plus aisé d’avoir un discours qu’initie l’affaire de l’antisarkozysme obsessionnel. Il sera celui-ci : la situation de la France est suffisamment grave pour que toute bonne volonté aide à son redressement. Ma responsabilité est d’aider à stopper l’effondrement économique de la France, œuvrer au rassembement des Français et donc de participer à un gouvernement d’union nationale. L’affaire est dans le sac. Valls visant non 2012 mais 2017. Si ce scénario se réalise et que l’économie se redresse il gagne sur tous les tableaux : il aura été ouvert, aura participé sans se renier (discours que l’on connaît). En un mot il aura été ouvert et responsable. Un chef d’Etat. Il ne lui reste qu’à confirmer ce statut en laissant passer 2012 pour panser les blessures et s’affirmer comme un recours ou une nouvelle voie.
En fait la décision définitive de Valls dépend du score du PS aux européennes. Tout le terrain est préparé. Mauvais score et c’est oui.
Les proverbes ont parfois du bon. L’on dit qu’en avril ne te découvre pas d’un fil. Et avril commence du 1er et va jusqu’au 30. En fait avec ce départ c’est tout le pull socialiste qui commence à se détricoter. On a Delanoë d’un côté qui boude, un couple sauvage Hamon/Dame du Nord qui ancre le PS à gauche et pas vraiment dans la modernité, Royal qui brille dans un ailleurs éthéré. Enfin tout n’est pas pour le mieux.
Il m’a toujours paru que ces manœuvres étaient indignes, je ne vais pas changer d’avis. L’union nationale pourquoi pas, mais la pêche au gros non. Du reste un poisson hors de l’eau meurt et pourrit par la tête. Une morale à méditer.
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