Marisol Touraine : une « peillonade » supplémentaire ?
Il faut croire que la seule préoccupation du gouvernement Ayrault est de remplir la check-list des annonces les plus médiatiques, afin de passer sous silence les mesures qu’attendraient réellement les Français. Depuis le début du mois d’octobre, les observateurs assistent, incrédules, à un festival d’annonces plus extravagantes les unes que les autres.
Vincent Peillon avait ouvert les hostilités avec une sortie sur le cannabis mi-octobre :
"Je suis très étonné parfois du côté un peu retardataire de la France sur un sujet qui, pour moi, est d'ampleur » (…)"C'est un sujet majeur. Je vois maintenant quasiment tous les soirs sur nos chaînes de télévision des reportages pour montrer les trafics illicites de nos banlieues et le danger dans lequel vivent nos concitoyens, y compris les enfants des écoles".
"On peut lutter par les moyens de la répression, je suis absolument pour, mais en même temps je vois que les résultats ne sont pas très efficaces"(...) "Cette question est posée et je souhaite que l'on puisse avancer sereinement".
Si chaque homme politique est libre de donner son avis sur quelque sujet que ce soit, démocratie oblige, les conditions de délivrance du dit avis sont cependant soumises à un devoir de réserve évident, d’autant plus lorsqu’on est ministre de l’Education en exercice. Il fait en effet tâche pour le serviteur de l’instruction de la jeunesse de prôner la dépénalisation d’une substance controversée, pour laquelle les principaux observateurs médicaux s’accordent à décrire les effets ravageurs sur le rythme scolaire des jeunes qui la consomment.
L’opposition est bien sûr rentrée dans la brêche. Liberation rapporte :
« Le secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé, a estimé lundi qu’après « la faute politique et morale extrêmement grave » de Vincent Peillon sur la dépénalisation du cannabis, « la question de son maintien au gouvernement est clairement posée ».
Le ministre de l’Education nationale « qui, il y a encore quelques semaines, nous a expliqué qu’il voulait établir la morale civique et laïque à l'école, et qui, dans le même temps, lance ce débat non pas à titre personnel parce que quand on est ministre on ne s’exprime pas à titre personnel (...), commet ici une faute politique et morale extrêmement grave », a-t-il déclaré devant quelques journalistes. « La question de son maintien au gouvernement est clairement posée », a-t-il ajouté. »
L’attaque est facile, et presque livrée sur un plateau par un Vincent Peillon maladroit, qui aurait d’ailleurs songé à démissionner suite à cet épisode embarrassant pour la majorité.
Mais il n’est pas le seul dans la tourmente. Marisol Touraine fait également face à une critique récurrente depuis le début du mandat Hollande, celle de pratiquer l’écran de fumée. Les salles de shoot, la taxation des boissons énergétiques, autant de propositions « choc », qui devraient inquiéter principalement les dealers et les « teufeurs », mais ne sont pas vraiment la priorité des Français. Concernant les boissons énergétiques, la ministre explique :
« Oui, je suis favorable au principe d'une taxe. Ces boissons contiennent de puissants excitants, dont l'impact sur la santé fait actuellement l'objet d'une évaluation par l'agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) à ma demande. Surtout, elles sont consommées par des jeunes, qui les mélangent à des alcools forts comme la vodka. Dans notre pays, un jeune sur deux s'adonne à l'âge de 17 ans au « binge drinking ». C'est préoccupant. »
Le propos de la ministre est très énigmatique pour les lecteurs avertis. En effet, celle-ci indique clairement que ces boissons sont dangereuses, mélangées à de la vodka. Certes mais prises seules, elles n’entrainent pas d’alcoolémie, ni d’autre état second nocif. Pourquoi ne pas taxer ou interdire la vodka, si le raisonnement est mené jusqu’au bout ? Marisol Tourraine voudrait peut être taxer également le coca, parce que mélangé au whisky, il entraîne des comportements dangereux tels que le « binge drinking » ?
On a beaucoup de mal à comprendre la logique de la ministre, qui semble vouloir surtout procéder à un effet médiatique en frappant fort sur l’alcool et la jeunesse, tout en réussissant le tour de force de proposer la taxation d’une boisson…sucrée, peut-être excitante mais guerre alcoolisée.
Aujourd’hui, la ministre entend réguler les prix des lunettes et des prothèses dentaires. Si l’idée est louable, le vœu semble lui être pieux.
« La ministre de la Santé Marisol Touraine a assuré que les dépassements médicaux abusifs « ne seront désormais plus possibles », après l'accord signé jeudi par l'assurance maladie, les complémentaires de santé et trois syndicats de médecins, mais aussi avec la mise en place d'un observatoire chargé d'y veiller. » indique la Voix du Nord.
On voit mal comment un observatoire, aux moyens forcement limités, pourrait obliger des milliers de praticiens à revoir la copie sur leurs tarifs. Peut-être eut-il fallu revoir les tarifs au travers d’une loi entrant dans le cadre d’un audit plus large de la Sécurité Sociale et des tarifs médicaux. Mais encore une fois, l’annonce est événementielle, rapide, et ne sera probablement suivie d’aucun effet.
5 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON