Mediapart-SarkoGate et un trait de Chomsky s’il vous plait !
Depuis deux jours, nous assistons à une nouvelle et superbe validation de la théorie de Chomsky concernant la manipulation médiatique , et la fabrique du consentement en particulier. Nous avons donc d’un coté Mediapart , un média internet de type "contre-feux", encore inconnu du grand public voilà un mois et de l’autre, la communication gouvernementale adoubée sur le fond par nombres de médias serviles ou s’auto-censurant par crainte de représailles. Inutile de préciser que l’asymétrie est de rigueur dans ce consensus faisant loi.
Mediapart, comme nombre de ses confrères, lorsqu’il délivre une information alternative restant confinée à un nombre réduit de personnes est le meilleur alibi, pour un pouvoir en place, d’une démocratie fonctionnant sans accrocs (malgré son audience insignifiante confinée à un milieu, que je qualifierai sans doute à tort d’intellectuel). Ceci dit, lorsque celui-ci sort de ce "cadre" contributif au consentement en vigueur, les foudres de ce même pouvoir s’abattent sur lui, et le principal délit qui peut lui être ainsi attribué est son manque de légitimité. Celui-ci est donc coupable à priori, de ce manque de légitimité, bourgeoise au demeurant, et le rendant de fait suspect auprès de cet opinion publique habituée au ronronnement formaté de l’information. Seulement après cette mise en cause radicale sur le fondement même et existentiel de ce média, des torrents de boue peuvent ensuite être déversés sur lui afin de le fragiliser et de le marginaliser pour lui faire reprendre sa place originelle.
Trois semaines de WoerthGate
Eric Woerth, depuis trois semaines, et maintenant Nicolas Sarkozy depuis mardi, sont au cœur d’un tel faisceau de présomptions de culpabilité qu’il en devient presqu’indécent de constater que ce dossier est piloté par le procureur Courroye, celui-là même sous la coupe de la chancellerie et donc de Michèle Alliot-Marie. La boucle semble bouclée.
En ce qui concerne l’auto-censure, un journaliste du Monde a refusé les enregistrements du maitre d’hotel de Liliane Bettencourt . La plainte de Liliane Bettencourt à l’encontre de Mediapart, au sujet de ces enregistrements, a été déboutée par la justice pour les motifs suivants : les révélations faites par Mediapart depuis deux semaines relèvent « de la publication d’informations légitimes et intéressant l’intérêt général » et mieux encore, ordonner le retrait des documents tirés des enregistrements clandestins réalisés chez Mme Bettencourt « reviendrait à exercer une censure contraire à l’intérêt public, sauf à ce que soit contesté le sérieux de la reproduction des enregistrements – ce qui n’est pas le cas en l’espèce ». L’autocensure est donc avérée au Monde.
Les coups de boutoirs de la presse d’investigation du journal en ligne sont tellement prolixes, précis et régulier, qu’une défense cohérente de l’exécutif n’avait pas encore pu voir le jour depuis maintenant trois semaines. Voilà qui est donc chose faite depuis mardi dernier, et cette défense, dont la subtilité ne saute pas aux yeux à priori, ressemble davantage à des intérêts personnels et collectifs, bien compris d’une équipe soudée qu’à autre chose. Nous assistons donc depuis mardi, aux congratulations permanentes, d’après match dans les vestiaires, de joueurs jouant leur peau chaque jour un peu plus. La sueur et les passions sont bien là, et c’est sur ce terrain là que les français sont conviés, il est inutile de préciser qu’à ce stade là, la raison a abdiqué depuis déjà un bon moment.
Le tournant : la journée du 8 juillet
Les attaques se sont fait tantôt insultantes , tantôt insidieuses voire ridicules mais systématiquement sur le ton de l’amalgame le plus complet entre un Edwy plenel, patron de Mediapart, Mediapart, les journalistes en général, le PS etc….une fois la machine lancée, il ne lui manquait guère qu’un fait sur lequel se cristalliser.
C’est donc le Figaro, média servile de référence, qui a donné cette occasion à l’éxécutif ce matin . En effet Claire Thibout est revenue en partie sur ses déclarations. Il est d’ailleurs étonnant qu’elle ne soit revenue que sur un point, sur la culpabilité présumée du président..... et Le Figaro de titrer « L’ex-comptable de Bettencourt dénonce « la romance de Mediapart ». le Wording Elyséen a ensuite tourné plein pot sur cette information pourtant largement relativisée en fin d’après midi par deux autres organes de presse. D’après un journaliste du Monde ainsi qu’un journaliste de Rue89 , Claire Thibout aurait subi de fortes pressions politiques, pour retirer une partie de sa déclaration réalisée pour Mediapart mardi dernier.
Il n’était donc plus question de culpabilité de qui que ce soit, l’objectif étant de jeter l’opprobre sur Mediapart. Selon Le Figaro toujours, relayant l’Elysée : "L’affaire connait un tournant judiciaire" ce soir. Arrêt sur Image relativisait également l’article du Figaro en déclarant : Contrairement à ce que laisse entendre le titre du Figaro, c’est uniquement à propos de la période antérieure à 2007, que Thebout accuse le site de "romance".
L’affaire a donc été rondement menée, avec des policiers qui se sont déplacés de Paris dans la Drôme pour pour rencontrer Claire Thebout dans le sud avec une célérité dont ceux-ci sont peu coutumiers. Et même si Claire Thebout faisait d’autres révélations lors de cet interrogatoire comme nous allons le voir plus loin, Le Figaro n’a retenu que les charges contre le média de "contre-feux". Il est possible que cette descente chez l’habitant ait été pilotée depuis l’Elysée, avec le Figaro valant source légitimée d’information , pour déstabiliser Mediapart auprès de l’opinion.
Le WoerthGate se transforme en SarkozyGate
Ceci-dit Claire Thibout mouille aujourd’hui encore davantage de politiques : Pierre Messmer, Mme Pompidou, François Léotard, Gérard Longuet, le couple Chirac, Edouard Balladur, Bernard Kouchner, Danielle Mitterrand ou encore Renaud Donnedieu de Vabres, Éric Woerth et contrairement aux allégations du Figaro Nicolas Sarkozy est toujours sur sa liste.
Cette affaire, si les médias traditionnels avaient voulu s’en donner la peine, était connue de tous depuis déjà bien longtemps, je l’évoquais déjà en octobre 2009. D’ailleurs des informations complémentaires attendent vraisemblablement les enquêteurs, si jamais ils avaient la bonne idée d’aller faire un tour à Genève. Il faut croire qu’il n’auront pas ce trait de génie, tout comme la majorité de journalistes jusqu’à ce jour.
La clef se situe encore une fois dans les réactions à venir de l’opinion, il est probable que celle-ci continuera de jouer les faux-semblants dans les semaines à venir afin que la routine s’installe à nouveau. Et on criera au "tous pourri" en coeur, cela n’est cependant pas bien grave, puisque ces plaintes ne dépasseront pas les 4 murs de nos habitations.
Mesdames et messieurs, l’Elysée attend votre consentement, pressez-vous à le lui apporter (comme d’habitude).
Publié sur Peuples.net
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