Mépris de classe
Le « cynisme » est défini par le dictionnaire encyclopédique « Le grand Larousse » comme suit : « mépris effronté des convenances de l’opinion qui pousse à exprimer sans ménagements des principes contraires à la morale, à la norme sociale. »
Ainsi, en pleine crise sanitaire et économique, à l’instar du pape de la santé publique, William Henry Gates III, pour cinq fois moins certes, le Ministre fédéral allemand de la santé, Jens Spahn, change de domicile. Avec son mari, Daniel Funke, journaliste et lobbyiste du groupe de presse « Burda », il vient de s’installer dans une demeure d’une valeur de plus de 4 millions euros, située au quartier chic de Berlin-Dahlem, surface habitable : 300 m2. On ne sait pas si l’arrondissement fut choisi pour sa proximité avec la résidence du couple Richard Grenell, ambassadeur de l’administration Trump en Allemagne, et Matt Lashey, amis intimes de Funke. On peut le supposer. (Bunte 08.06.2018)
Il faut dire qu’en cette période d’épreuves multiples pour le commun des mortels le sémillant ministre et ancien lobbyiste de l’industrie pharmaceutique est, ensemble avec le virologue « vedette » de la nation, Christian Drosten, constamment sur le devant de la scène. Côté préservation de la vie privée, c’est compliqué, une des raisons du déménagement, il paraît. En ce qui concerne la vie privée de ses compatriotes, c’est une autre paire de manche.
En effet, dans la précipitation de l’urgence, de la crise sanitaire ambiante, l’ancien apprenti bancaire s’était déjà démarqué par des propositions « avant-gardistes » en matière de santé publique, telles que l’introduction d’un « passeport immunologique », incitant tout citoyen au « vaccin volontaire », dans le cadre d’une modification de la « Loi sur la protection de la population contre des situations épidémiologiques exceptionnelles », passeport qui aurait donné accès à toutes sortes de privilèges, tels que, par exemple, l’exercice d’une profession dans le domaine de la santé ou le déplacement ou non dans certains pays. La liste (des privilèges) aurait été « extensible et sujet à discussion ». Le législateur l’en a empêché. Pour l’instant.
En outre, Herr Spahn promeut la « modernisation » des outils de gestion informatiques en matière de santé publique par une « adaptation » de la « Loi sur l’approvisionnement digital » modification qui permettrait une mise en place facilitée d’une « infrastructure télématique », telle que la télémédecine, un « dada » que compte par ailleurs élever au rang de fournisseur de prestations privilégié, le ministre suisse en charge de la santé publique, Alain Berset, à côté et en concurrence directe avec les médecins de famille. Tout ceci par souci d’efficacité dans le cadre de la « maîtrise des coûts ».
Ce n’est donc pas un hasard que le ministre allemand estime que la « loi sur la protection des données ne peut s’appliquer aux personnes malades », sans doute une des multiples conclusions de son livre « App vom Arzt » paru en 2016, dans lequel il prédit une révolution médicale sans précédent grâce à la digitalisation. De multiples gadgets, dont certains déjà en phase de test, permettront un allongement sensible de l’espérance vie, ou de survie.
Le ministre rêve de « lentilles de contact, capables de mesurer le taux de glycémie, des dispositifs technologiques, tels que des sous-vêtements intelligents, permettant une détection précoce des infarctus, des organes, fabriqués par des imprimantes 3D. Bienvenue dans le « Meilleur des mondes ».
La « loi sur l’enregistrement centralisé des implants » proposé par le ministre obligerait les acteurs de la santé la communication systématique des noms de patients bénéficiant de tels dispositifs à un registre central, ou la « Loi sur l’approvisionnement digital » qui permettrait une centralisation des diagnostics de tous les médecins conventionnés à des » fins scientifiques ».
On peut partir du principe qu’il n’est pas exclu que, pour les besoins de calculs actuariels des primes ou des rentes, notamment les assureurs aient un accès privilégié à des données, certes anonymisées, mais à la diffusion desquels le patient ne serait en mesure de s’opposer, si on suit les recommandations de monsieur Spahn. L’exclusion de certains traitements et la fixation arbitraire de primes de prévoyance ne seraient que quelques-unes des conséquences.
On peine à se rendre compte ce qu’une crise sanitaire peut rendre possible.
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