IDENTITE : (1) Caractère d’une chose qui reste toujours le même.
(2) Qualité qui fait qu’une chose est la même qu’une autre.
NATIONAL : Souvent associé au terme « Etat ». On nationalise en saisissant le bien privé pour l’ouvrir à celles et ceux ayant la nationalité, C.A.D. ayant une carte d’identité nationale.
Ainsi défini le débat est clos. Etre propriétaire d’une carte d’identité vous conférant une identité nationale suffit. Vous voila enclos sur un territoire. Et marqués d’un « F » sur la fesse gauche, ou droite comme il vous plaira d’être tatoués...
En hommage à A.CAMUS...
Lettre à un ami fascisant. Carnet de route pour l’étranger.
20 juin 1974. le voyage Glasgow Londres s’est bien passé. Beau temps. Le taxi entre Victoria station et Euston ne reconnaît pas les Livres Ecossaises (2 billets de banque ont cours à cette époque là) ni mon accent Scott. Sa centrale lui confirme la réalité de la Pound "Sterling" ville Ecossaise. Me voilà donc nationalisé Ecossais par un taxi Anglais. Il m’a fallu deux ans pour revevoir cet honneur... par le rejet. Trop brun pour les scotts trop Scott pour les Anglais.
21 juin-7heures. Dunkerque. Train Français, l’odeur de Gauloise et cette langue que je connais mais qui me paraît étrange sortie de la bouche de ce contrôleur. Mon premier sentiment " ce type se débrouille bien en Français !" et la celle qui sort de ma bouche m’étonne aussi, j’ai l’impression de m’entendre parler une autre langue...
21 juin-9 heures. Trois heures à attendre la correspondance pour Nîmes. Ils roulent à droite et vite. Ils s’engueulent. Papiers gras et cacas de chiens me procurent honte et plaisir nostalgique. Les gens sont plutôt bruns de poil alors que la normalité c’est roux...vous êtes bien d’accord avec moi ?
21 juin-12 heures. Départ gare de Lyon. Odeur de Gitane. Les gens sont encore plus bruns. Certains sont même déjà bronzés. Par les fenêtres du couloir, ouvertes à cause de la chaleur, les toits des faubourgs sont zingués et hauts. Ceux des villes qui suivront seront de lauze bleue puis les maisons céderont la place aux prairies où paissent des vaches blanches ou tachées de noir alors que, vous êtes bien d’accord, la couleur d’une vache c’est roux. A poils longs je vous prie.
18 heures. Entre Avignon et Nîmes le choc. La lumière a changé. Elle est, comment dire, plus lumineuse. C’est idiot mais les mots me manquent. Un frisson de bonheur me parcourt, l’odeur, cette odeur, ces senteurs me communiquent leur identité et me font renaître à la mienne. Ce quai en gare de Nîmes est le centre du monde. Je sais bien que la gare de Perpignan m’aurait rendu le même accueil. Me voila at home à 60 bornes de chez moi. Une salade Niçoise (Olives, Anchois, Tomates, Aïl, huile d’olive) et une côte de mouton saupoudrée de thym et, plus loin, l’air brulant de l’aprés midi caressera ma peau. Par mes sens tout me revient, m’envahit, me saisit :
Lou païs. Mon païs es aqui.
20 heures. Jane, je le sais,nous ne nous reverrons jamais. Londres, peut-être ? Paris ? Probable. Mais je vis mon identité prés de la grande bleue le cul sur une motte de thym ou un bouquet d’aspic.
Depuis ce jour je sais que les cigognes, le Rhin et la choucroute, les crêpes, la marée et le cidre, la bière, les moules et les corons vous font le même effet et je sens que vous comprenez mon désarroi à me sentir si différent de vous et semblable à la fois.
Je vous préviens malgré tout, que l’on ne m’oblige jamais à n’être que différent ou qu’identique car je prendrai les armes contre cette séparation de moi forcée.
14 septembre 2008. Quand le bateau quitta les quais de Porto Torres, en voyant les côtes de la Sardaigne de Gramsci s’éloigner pour la troisième fois, j’ai pleuré. Comme j’ai pleuré en laissant Jane sur un autre quai, à Lanark, au beau pays de Hume...
Serait-ce le syndrome de l’identité Humaine ? Je suis d’ici les bras ouverts.
Michel.