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Narcisse parle aux Français

Monomaniaques, obsédés, accros, mythomanes, compulsifs, tout simplement fantasques, une partie de nos élites politiques semble être la somme quasi complète du dictionnaire des TOC, et d’aucuns exhibent même des signes de pathologies plus graves, comme l’autisme ou certaines formes de psychose. C’est plutôt une bonne nouvelle : on peut connaître ces signes et avoir une activité sociale ou professionnelle, on peut délirer et pourtant espérer être élu, on peut répéter encore et toujours les mêmes phrases venues d’un ailleurs opaque obsessionnel et pourtant être entendu. Il en va de même pour le déni de réalité, le rétrécissement de l’entendement et des solutions proposées, le formatage de phrases répétitives, les dérives prométhéennes, les obsessions sexuelles ou un surmoi inexistant. Des exemples de ces obsessions, qui prennent l’allure de slogans publicitaires et qui sont, par définition, des vieilles lunes, on en trouve treize à la douzaine. 

Une première catégorie est le résultat de phobies qui consistent à imaginer des ennemis de soi, du peuple, de la nation, de la civilisation, de la religion, de la sécurité, de la santé publique, du « bon sens », et tants d’autres, et qui produisent des accusations farfelues de chasse aux sorcières. Cette catégorie, comme toute autre obsession, est hermétique à la réalité des sciences, des études, des statistiques, dont elle use et abuse en sélectionnant dans un ensemble équilibré, la partie qui la justifie. Drogues, criminalité, santé, accidents de la route, euthanasie, homosexualité, étrangers, etc., sont traités de la sorte, au mépris de tout travail scientifique, pourtant diligenté par les mêmes et dont ils se servent non pas comme un outil de compréhension mais comme d’une harpe accompagnant et cultivant leurs phobies, au mépris aussi de l’aspect complexe des vrais problèmes qui leur sont liés.

La folie consistant à répéter à l’infini une action qui a déjà fait ses preuves de contre - productivité, ces phobies font partie du problème et éloignent toute solution. Les enseignements du temps, l’expérience, l’expertise, sont rayés d’un geste désinvolte, comme si connaître un sujet à fond était chose suspecte. Cette attitude paranoïaque qui consiste à occulter toute information issue d’un acteur indépendant ou d’un spécialiste, permet à la phobie paranoïaque à se perpétuer, tandis que des remèdes, certes complexes et nécessitant du temps, sont là et depuis longtemps mais jamais utilisés. Ainsi la situation se dégrade, donnant raison au paranoïaque qui ne voit là que le bien fondé de ses phobies et cultive ses tendances prométhéennes et egocentriques : hors Moi pas de solution, mais aussi : Je suis la solution.

Le discours politique, qui oppose phobies, dénis de réalité, et autres certitudes absolues, qui dénude la pensée en sa plus simple expression, travestit l’arène politique en une cour de récréation disputée par des bandes de pré – adolescents, menées par des caïds en culottes courtes. La potion magique des uns annihilant celle des autres. Ce qui n’exclut en rien que ces bandes utilisent les mêmes armes, les mêmes poncifs réducteurs, voir les mêmes projets. Mais même ces similitudes n’arrivent pas à faire trébucher la certitude, elle aussi partagée, que il s’agit d’une guerre de deux mondes (voir trois ou quatre). Syndrome, s’il en fallait encore un, d’une paranoïa aigue, d’une hystérie collective se croyant non partagée. Ces phobies, appelées parfois « programmes », parfois « valeurs », érigent des murs imaginaires infranchissables sensés protecteurs entre un bien commun en réalité parfaitement partagé. Certes il existe des murs, parfois très hauts, des clivages importants, mais de ceux là, il est préférable de ne pas en parler. Car dans cette paranoïa ambiante, l’explicite, le détail, les conséquences, la relation entre le but et les moyens sont des sujets à éviter. Le peuple étant pensé par les dirigeants à leur propre image : volage, adolescent pré pubère, incapable d’assumer la réalité et de payer le prix de l’effort. 

Le premier d’entre eux va plus loin encore : pour éviter tout dérapage de la réflexion toute intervention de la mémoire mais s’assurer cependant la victoire, il cultive les sentiments les plus bas en ne croyant pas un seul mot de ce qu’il dit. Cette schizophrénie utilitaire, débouche sur les symptômes classiques de cette maladie : le passé n’existe pas, le présent non plus, n’existe que la peur du passé comme élément destructeur du présent. En ce sens, le dit bafoue l’ayant été dit.  La parole elle même, comme outil de réflexion, de communication, de la dialectique, comme processus, perd son sens et devient du non-sens. 

L’affiche du président – candidat est, à elle seule, significative tant le message est brouillé et contradictoire : les signes, mer sereine, luminosité angélique, calme présidentiel prenant le large en observant l’infini (mais pas un pays qui n’existe plus) s’opposent au slogan viril de Force, qui n’est vérifiable que sous la tempête.

En d’autres termes, « j’ai calmé les orages, j’ai, de mon trident, apaisé les flots, je vous offre la plage, puisque j’ai Eole dans la poche ». Ce manque de surmoi, cette dérive prométhéenne, ne sont possibles que lorsque l’individu nage en pleine inconscience, inconscience de ce qu’il a dit, de ce qu’il a fait, de ce qu’on lui reproche. C’est un anti - Ulysse par excellence, ignorant les ruses de l’intelligence, la méthis, pourtant si nécessaire pour calmer la fureur des dieux. Il croit surtout que le citoyen, amnésique, acceptera à l’infini le supplice des Danaïdes. C’est du narcissisme pur. 


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14 réactions à cet article    


  • morice morice 20 février 2012 10:14

    Si je vous suis, cher Michel, c’est un peu Howard Hughes votre gugusse.. 


    À mon avis, il est en train de sombrer.... Enfin je dis ça, ses potes aussi...

    Dans l’attente de votre prochaine livraison... Toujours aussi agréable à lire, et pleine de bon sens.

    Dites-moi au fait, si ce ne sont pas des tocs, peut-on parler d’addiction ? Chez Hughes, c’était la codéine....

    Too much café chez l’agîté de l’Elysée ? 

    • frugeky 20 février 2012 11:52

      En terme de produits ce doit plutôt être un type de coktail détonnant genre benzo-cocaïne plus quelques amphétamines. smiley


    • Selfe 20 février 2012 13:26

      Vous faites partit des gens, mon cher Morice, qui font que quand examine leurs commentaires et leur comportement certaines fois, on se dit que l’on préfère les voir exercer l’exercice du pouvoir à beaucoup petite échelle.
      Ce qui a pour effet pervers, malgré leur critiques de la société, de nous réconcilier un petit peu avec nos dirigeants.
      Tout ceci sans vouloir vous vexer, c’est surtout amical.

      Sinon je suis d’accord avec Morice, cette fois, au sujet la lecture de cet article, j’aime beaucoup le style et j’ai pris beaucoup de plaisir à le le lire.


    • leypanou 20 février 2012 11:08

      "Ce manque de surmoi, cette dérive prométhéenne, ne sont possibles que lorsque l’individu nage en pleine inconscience, inconscience de ce qu’il a dit, de ce qu’il a fait, de ce qu’on lui reproche" : vous auriez pu aussi rajouter les conséquences sur ceux qui acceptent, qui dénient la réalité.

      Comment peut on en effet faire un acte contraire à ses intérêts, i.e voter pour quelqu’un qui a démantelé ou est en train de le faire tout ce que la France avait de solidarité, de casser tout ce que la France avait de protection sociale, etc, etc.

      Des chercheurs etats-uniens ont étudié pourquoi des membres des classes laborieuses ont voté républicain et sans passer par le Syndrome de Stockholm, on n’est pas à une contradiction près.


      • Selfe 20 février 2012 14:58

        Peut-être parce que ceux qui sont de « gauche » ne sont pas à gauche, pas assez près du peuple et de l’attente des citoyens alors que toute leur politique est censée être basée dessus...
        Cela donne peut-être la fausse impression qu’ils sont plus francs, moins tricheurs.

        Alors que ceux de « Droite », bien au moins ils annoncent un peu la couleur, enfin c’est plus clair dès le départ.

        Donc quitte à se faire avoir, autant se faire avoir un peu moins profondément, ça fais toujours un peu moins mal.

        Et il est possible que se soit le même principe aux USA.


      • devphil30 devphil30 20 février 2012 11:13

        Attention au tsunami petit nicolas 

        qui sème le vent récolte la tempête 
        la discorde ne mène à rien 

        tu nous a pourri la vie pendant 5 ans maintenant ne fait pas de caprice , tu as cassé ton jouet et les français ne supportent plus tes mensonges.

        Comment il a pu se déclarer à Marseille le candidat du peuple face aux élites , franchement c’est un fou 

        Philippe 

        • Old Dan 20 février 2012 11:27

          C’est pas un article, c’est une consultation !
          Très bien.

          Euuuh... Et ça se soigne ????


          • yazan 21 février 2012 00:57

            hum... autoritarisme autiste extrêmement courant au sein des mouvances d’extrême droite (peut on se qualifier de mouvance d’extrême droite lorsqu’on place un claude guéant à l’intérieur ???).

            A son age, le président a eu le temps de refouler très profondément les douleurs à l’origine de son comportement pathologique...
            Disons 20 ans de psychanalyse. Résultats non garantis...
            En gros, c’est pas gagné tout ça : Le pouvoir, la politique, l’autorité et l’extrême droite (mais en gros alors ^^)


          • Pelletier Jean Pelletier Jean 20 février 2012 15:38

            @l’auteur,

            Toujours aussi agréable de vous lire, mais je crains que votre analyse passe au dessus de la tête d’un bon nombre de nos concitoyens.
            Je reste encore stupéfait que dans les intentions de vote au deuxième tour, il puisse y avoir 46 % de français pour voter pour cet homme là.
            http://jmpelletier52.over-blog.com/ 


            • kssard kssard 20 février 2012 16:52

              @l’auteur, 


              Merci de votre intervention qui toutefois comme l’indique fort justement J. Pelletier est un peu absconde pour le commun des mortels. 

              Sur le fonds vous avez totalement raison. J’avais d’ailleurs moi-même l’intention de faire un papier sur le concept de déni. 

              Franchement, en dehors de tout esprit partisan c’est du jamais vu une campagne pour les présidentielles en France et j’entends de plus cette l’expression « plus c’est gros plus ça passe ». Ce n’est pas un hasard. 

              Le bilan, sur tous les plans est tellement mauvais, chômage, pauvreté, déficits, etc.... que Sarkozy est à 100 % dans le déni. C’est du jamais vu. Le discours est absurde, mensonger et inintelligible. On est en pleine schizophrénie en dehors totalement de la raison. 

              Pour ma part, je ne peux plus l’écouter plus de 3 secondes tant son discours est inhabité fallacieux et malhonnête. 

              Ils doivent aussi être fous les députés UMP dans leur circonscription avec un cheval de bataille pareil. 

              Vraisemblablement, on va tout droit vers le collapsus total de la droite. 

              Il faut que Hollande soit très solide pour résister à ces provocations provenant du registre du mensonge et du déni politique. Je n’ose même pas imaginer ce que pourrait être un face à face Sarko - Hollande. 

              Franchement, la politique ne peut pas descendre plus bas. La faillite morale du Sarkozisme est totale. 

              • Selfe 20 février 2012 17:30

                "Merci de votre intervention qui toutefois comme l’indique fort justement J. Pelletier est un peu absconde pour le commun des mortels. "
                Non mais franchement, si c’est ça l’opposition a Sarkozy, si c’est ça la gauche d’aujourd’hui, c’est vraiment inquiétant.

                Excusez moi mais quand je lis des choses pareilles, cela me sidère tant que je ne peux que réagir.
                Vous creusez vous même le fossé et ensuite vous pensez défendre la gauche ?
                Mais vous l’a faites sombrer au contraire.
                Sidérant...


              • Selfe 20 février 2012 21:27

                Désolé, j’ai peut-être été, surement même, un peu sec dans mes propos.


              • clostra 20 février 2012 20:09

                La mer Egée !

                Ma doué mais quelle idée !

                Elle porte le nom de celui qui s’est suicidé car il ne voyait pas revenir son fils qui devait lui apprendre qu’il avait survécu au combat en mer (celui-ci, bien vivant, avait oublié de lui en faire part) a fait ce geste parce qu’il le croyait mort.

                Egée


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