Nath, t’es mal !

« Nous sommes mal. »

Qué ? Moi, ça va bien, Nath (tu permets que je t’appelle Nath et que je te tutoie ? Vu comme tu t’adresses à moi de façon directe et familière via le journal, autant être direct jusqu’au bout). C’est qui, « nous » ? Les autres Français ? L’UMP ? Ton équipe de campagne pour les municipales à Paris ? D’ailleurs, pourquoi t’es mal, Nath ? Tu as peur de ne pas boucler tes fins de mois si François Hollande t’empêche de cumuler ton mandat de députée et celui de maire ? Dur.

« Les élus ne parviennent ni à comprendre la politique de François Hollande, ni à l'accompagner ou à la contrarier. »

Gné ??? Les élus ne comprennent pas la politique de Hollande (c’est bête, un élu). Ils ne parviennent pas à l’accompagner (bon, OK, un point pour toi, Nath, on le voit bien avec la réforme des rythmes scolaires ou du cumul des mandats, un dossier sur lequel ta position rencontre de nombreux soutiens à gauche), ni à la contrarier (? ??). Mais s’ils n’accompagnent pas, ni ne contrarient les desseins élyséens, qu’est-ce qu’ils font ?

« A gauche, on grogne de plus en plus. »

T’es observatrice, Nath. Mais à la limite, je préfère lire les blogs de Gérard Filoche ou de Jean-Luc Mélenchon plutôt qu’une retranscription de quelqu'un qui n’est pas trop dépité par cette situation.

« A droite, on tente des sorties. »

Là, j’imagine le blockbuster ‘Il faut sauver le soldat Copé’, avec l’officier NKM qui tente une sortie sous les tirs de barrage socialo-communistes. Tu vends du rêve, Nath.

« On le savait. »

Entre la chanson phare de Carla Bruni et la référence subtile de NKM, on croirait que Raymond Domenech est le nouvel héros de l’UMP. Rassurez-moi, les filles, vous espérez quand même passer le premier tour en 2017 ?

« Cet homme règne par la division. De la France et des Français. »

Alors que quand tu as mené la croisade contre la viande halal ou les assistés aux côtés de Sarkozy, c’est fou comme tu as rassemblé les Français. La France et les Français, pardon (même si la division ne veut rien dire).

« Mais les Français, eux, sont dépités. Plus encore ceux qui ont voté pour lui. »

Oui alors t’es gentille, Nath, mais tu ne me connais pas. Je vais finir par être gêné par autant de promiscuité, je ne suis pas un garçon facile. François Hollande avait fait 28,63% des suffrages au premier tour. Il est actuellement autour des 30% d’opinions favorables. C’est évidemment faible, mais on ne peut pas vraiment dire que sa base électorale se soit volatilisée dans la nature. Et encore moins que ceux qui se sont rabattus sur lui au deuxième tour de 2012 soient prêts à voter UMP au deuxième tour de 2017 pour autant, malgré la déception.

« Les autres attendent. »

Je ne crois pas que les autres, à savoir les électeurs de Nicolas Sarkozy attendent grand chose de François Hollande. Mais je peux me tromper, c’est toi l’experte.

« Normalement après l'élection, c'est le temps de l'infaillibilité du vote. »

Gné ??? Tu pourrais m’expliquer ce qu’est un vote infaillible ? Nath, tu dois être du genre à signer des contrats d’assurance ou de crédit à la consommation sans lire les petites lignes, je me trompe ? Enfin, oui, je me doute que tu prends très peu de crédit à la consommation...

« Quelle pire impression que d'avoir été trompé ? »

Je sais pas, t’as pensé à demander à tes administrés ? Tu sais, les électeurs à qui tu as promis que non, jamais tu ne les abandonnerais avant de les laisser tomber et d’accepter de conduire une liste municipale à Paris parce que Longjumeau, quand même, c’est un peu une ville de bouseux en comparaison.

« Et nous sommes dans ce moment-là. Dans ce doute-là. Une gauche qui a tous les pouvoirs mais qui ne sait qu'en faire. Impuissante. Irrésolue. »

C’est marrant, parce que quand on va jeter un œil sur le site libéral Contrepoints (et ouais, c’est la classe avec les réseaux sociaux, on peut se retrouver sur des sites libéraux ou le blog à Filoche, et y trouver des billets d’humeur intéressants chez les deux, et ouais), on a l’impression que ce constat était tout aussi valable du temps de Nicolas Sarkozy et d’une droite qui avait tous les pouvoirs et ne savait qu’en faire. Impuissante. Irrésolue.

« François Hollande ne parvient pas à éviter la double peur : rassurer sa gauche et ne pas trop inquiéter la droite. »

Alors qu’il suffit d’analyser les reports de vote entre les deux tours de l’élection présidentielle pour voir que, rassurer l’extrême-droite et récupérer des votes au centre, Sarkozy y est parvenu avec une efficacité du tonnerre. Mais revenons à Hollande qui, dingue, n’arrivera pas à faire un bœuf avec Mélenchon et Bayrou à ses côtés. Dis, Nath, c’est bientôt fini l’enfonçage de portes ouvertes ?

« Ses résultats, presque un an après la présidentielle, sont marqués du sceau de l'inefficacité. »

C’est marrant parce que ce sont les mêmes qui réclamaient du temps pour voir les mesures de Sarkozy aboutir qui considèrent qu’un tout nouveau gouvernement devrait réussir au bout de 10 mois. Enfin, bon, une formule toute faite ne mange pas de pain (t’es sûre que tu n’as pas pompé ta tribune sur un discours de Hollande en 2008 ? On dirait, pourtant).

« De l'indigence. Du désordre des discours. Son équipe gouvernementale est faible, divisée, taraudée déjà par les excès de langage. Quel piètre bilan. »

C’est bien la même Nath qui avait parlé d’un concours de lâcheté entre le président de son parti et son ministre de tutelle d’alors qui se la ramène avec des leçons de solidarité gouvernementale ? C’est bien toi ? Tu nous prends pas un peu pour des amnésiques, Nath ?

« Pour réagir, François Hollande en appelle à la communication, invente des déplacements provinciaux dont l'artificialité n'échappe à personne. »

Tu veux dire que, comme ton ancien mentor, il organise des meetings avec uniquement des militants pour lui faire la claque ? C’est dommage que l’artificialité des déplacements élyséens t’ait à ce point échappé à l’époque. Mais au moins ça a aiguisé ton œil, tu en es experte, désormais : tu as tellement bidonné de meetings en tant que porte-parole de choc de Sarkozy qu’on ne te la fera plus.

« Déjà au plus bas dans les sondages, il croit trouver une sauvegarde dans la guerre. »

Ouaip, comme un mec impopulaire avait tenté de redresser sa cote en intervenant en Libye. Non, je ne parle pas de BHL.

« Confronté à la fronde d'une partie de sa majorité, il annonce le recours, vite contredit, aux ordonnances. Epuisement de sa légitimité. »

Je ne sais pas si le pouvoir abrutit, mais l’opposition rend lucide. Parce qu’il y a à peine un an, on ne peut pas vraiment dire que la procédure par ordonnances te dérangeait. J’espère que la suppression de la procédure par ordonnances (qui je te l’accorde et on ne peut plus anti-démocratique) figurera dans le programme de l’UMP en 2017. Chiche ?

« LE RÈGNE DE LA CONTREFAÇON »

Ah lala, ces mecs qui ne portent même pas de vraie Rolex… Pardon, c’était pas ça le thème ?

« Il voudrait nous habituer à être là. Qu'on le voie vraiment en président. »

J’ai l’impression qu’il n’y a qu’à l’UMP qu’on n’a pas compris ce qui s’est passé en mai 2012. Il EST président, Nath, c’est bon, tu as joué, tu as perdu. Tu veux une thérapie pour t’en remettre ?

« Mais, avec son verbe saccadé, la solitude que l'on sent dans cette étrange pratique du pouvoir, cet habit que définitivement il ne parvient pas à revêtir, il voudrait nous soumettre à un pouvoir vieux jeu, triste et tout compte fait dangereux. »

Alors qu’avec Sarkozy, la présidence était d’un moderne… Un peu facile d’attaquer Hollande sur le style, Nath, tu te rappelles qu’on avait aussi critiqué ton look de ‘Versaillaise’ à une époque ?

« C'est une vieille histoire. Le roi patelin. Marchant cahin-caha, cachant sa dureté et, par moments, jaillissant de sa boîte pour punir. »

Mais euh, Nath, Hollande, il est dur, ou il est transparent ? Il est sévère, ou il ne sait pas décider ? Toi aussi, tu as l’air d’avoir du mal à choisir entre deux angles d’attaque…

« Cet homme n'avait jamais gouverné. »

Excellente idée, Nath, ne donnons jamais de travail à un homme qui n’a pas d’expérience. ‘Je vous aurais bien embauché, mais il y a un problème : vous êtes au chômage’ [2]. Bon, on le sait, Nath, tes copains et toi avez rabâché cet argument que vous continuez à considérer comme pertinent. Et, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, ça n’a pas pris lors de la campagne présidentielle, je doute que cela marche encore maintenant.

« Les Français le découvrent. »

C’est FANTOMAS !!!!

« Ils comprennent chaque jour que le chef de l'Etat est un chef de bande, qui nomme les siens et ignore les autres. Pire, pour lui, un bon Français est un Français de gauche. »

Indignation sélective, toujours. Mais pourquoi Hollande ne nomme-t-il que des copains à lui, contrairement à Sarkozy qui, lui, ne nommait que des copains à lui ? Pourquoi, pour le fun, et par masochisme, ne confie-t-il pas des postes clés à des types qui le détestent ?

(Blague à part, Nath, les postes de complaisance sont une honte, tu as raison de le dire, alors tu fais inscrire une vraie réforme de ce système de ‘piston’ dans le programme de l’UMP pour 2017 plutôt que de jouer les oies blanches face à un système que tu as largement cautionné pendant 10 années d’exercice du pouvoir. Merci.)

« En vérité, pas de surprise. »

Tout ça pour ça. C’est bien de nous informer à ce point du récit que tu ne fais qu’enfoncer des portes ouvertes, des fois que ça ait pu échapper à quelqu’un.

« La ruse du détour, avec des textes législatifs qui jouent comme des accessoires, est éventée. »

Surtout qu’elle a déjà largement été utilisée par son prédécesseur.

« La posture et les rodomontades vis-à-vis de l'Allemagne signent sans cesse l'échec de la France dans l'Union européenne. »

Ouais enfin, Nath, c’est un peu ballot d’attaquer Hollande sur une position qui rencontre pas mal de soutiens. En Italie. En Grèce et au Royaume-Uni. Sans oublier quelques dérapages plus spectaculaires de tu-sais-qui. Vu comme ça, c’est plus Angela Merkel qui semble responsable de l’échec de l’Allemagne dans l’Union européenne.

« Et cette incapacité à affronter la crise économique, à lutter contre le chômage... »

Heureusement, Nath a la solution. Malheureusement, on est bientôt en fin de tribune, il va falloir conclure.

« C'est le règne de la contrefaçon. On peut se résoudre à obéir mais un peuple libre ne sert pas. Il refuse. Il se révolte. Il peut avoir des chefs mais ce ne sont pas des maîtres. »

Nath – Rosa Luxemburg, même combat. Tu comptes reprendre la place de Stéphane Hessel ? Non parce qu’en terme d’indignation, on t’a connue plus docile il y a peu.

« Que faire ? Il reste, et c'est énorme, la France et les Français, intelligents, curieux, insaisissables, originaux, inventeurs d'une démocratie vivante que quiconque jamais ne pourra museler, interdire, étouffer. »

Je ne veux pas te décevoir mais pour l’instant, les Français utilisent surtout leur intelligence ou leur créativité pour faire des Harlem Shakes ou partager des vidéos de Nabilla. C’est mal barré pour le grand soir. Et arrête de vouloir interdire d’interdire, on t’a pas dit qu’il fallait liquider l’esprit de mai 68 ?

« Car tous ces pouvoirs assemblés (Parlement, régions, villes et départements), réunis, détenus par cette gauche qui en quelques semaines a raté son rendez-vous avec l'histoire, ne peuvent nous soumettre. »

Euh, Nath, tu es quand même au courant que si la gauche a tant de pouvoirs, c’est parce qu’elle a remporté des élections ? Non parce que pour le tien de rendez-vous, c’est mal barré. Commence par essayer de gagner les municipales à Paris, Nath. En espérant que tu n’aies pas flingué les chances de ton successeur à Longjumeau en plantant tes administrés. Tu sais, la ville d’une porte-parole de Nicolas Sarkozy où François Hollande a réuni 55,5% des suffrages au deuxième tour des dernières présidentielles.

« Nous avons un nouveau récit à écrire tous ensemble. »

Oui, mais un conseil, Nath, revois ton style littéraire. On est dans un pays où Guillaume Musso, Marc Lévy, et même Frédéric Beigbeder arrivent à vendre des livres, mais quand même.

« Une révolution tranquille à engager. »

La rupture tranquillou, concept estampillé Michel Sardouille-NKM.

‘Tu fais la révolution, Nath ?

- Ouais, tranquille, Ernesto Che.’

« Une figure inédite de nous-mêmes, une France nouvelle à faire émerger. »

Mais avec de bons gros morceaux de vieille UMP dedans, rassure-moi ?

« C'est un long travail. »

Tu m’étonnes. On commence par quoi ?

« Depuis des années maintenant, nous traversons une crise économique terrible. »

Ah ben merci, on avait vu. Mais qui c’est-y qui dirigeait la France auparavant ?

« Nous devons nous rassembler pour renverser la table, retrouver l'envie de nous engager, de dire non aux vieilles habitudes, à ce radical-socialisme qui nous épuise, tuer les différences, redécouvrir l'honneur d'être nous-mêmes et penser que la France est notre chance. »

As-tu saisi mon pote, son envie de révolte ? Nath a envie de crier crotte. Zut. Flûte. Chié !

Bon, sans déconner, c’est pas que je veuille tirer sur une ambulance, mais on a déjà fini et je n’ai pas appris grand chose.

Donc, résumons :

- Hollande déçoit ceux qui n’ont pas voté pour lui (premier scoop).

- Il est nul, favorise ses copains (alors que nous, à l’UMP, on était top et on ne pistonnait pas les camarades, euh, ça troue un peu le fondement, mais admettons, deuxième scoop).

- Nath le dit : « Indignez-vous ! » Mais doucement quand même, on n’est pas à Lutte Ouvrière, hein. Et puis c’est pas trop notre style, ne vous blessez pas. (là, je l’avoue, c’est vraiment un scoop).

- Nath propose pleins de solutions pour dire comment qu’on aurait pu faire autrement pour redresser la France… ah ben, non, en fait.

 

 

[1] Il fut un temps où NKM rejetait sans aucune ambiguïté toute alliance avec le Front National, et où elle n’hésitait pas à hausser le ton contre son ministre de tutelle (Borloo) et son chef de parti (Copé) en soutenant un amendement de l’opposition d’alors à propos des OGM… C’était le bon vieux temps, elle a depuis pris du galon en devenant porte-parole de Nicolas Sarkozy, elle a gommé cette étiquette faussement rebelle pour devenir aussi manichéenne et disciplinée que ses dirigeants.

[2] Le pire, c’est que ce genre d’entretien existe réellement, j’ai éprouvé le fameux rejet pour cause de ‘manque d’expérience’ de la part du PDG qui espérait qu’un cadre sup quitte sa boîte et son excellente situation à 40 ans pour aller travailler dans sa start-up...