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Accueil du site > Tribune Libre > Neuromarketing : IRM et manipulation de masse

Neuromarketing : IRM et manipulation de masse

Motivés par une recherche d’efficacité et de retour sur investissement. Les IRM fonctionnelles semblent appelées à devenir l’outil privilégié des publicitaires.

La publicité augmente et double en 10 ans. Nous n'ignorions pas que les sorciers du marketing cherchaient par tous les moyens, études cognitives à l'appui, d'impacter notre subconscient vers des objectifs de consommation.

Selon Jean-Baptiste Godinot, président de l’asbl RESPIRE, nous subissons entre 2500 et 15 000 impacts publicitaires par jour. On en perçoit 15% pour en retenir 1%. Les investissements publicitaires représentent 500 à 1000 milliards d’euros d’investissement annuel au niveau mondial, 30 milliards d’euros en France en 2010 , soit une multiplication par deux en 10 ans. Pourtant, les experts s’accordent pour dire qu’un message sur trois manquerait sa cible. Les professionels du secteur cherchent à réduire cet écart et sont à l’affût de ce qui déclenchera immanquablement le réflexe d’achat chez le consommateur.

Les vielles approches en trois phases : cognition, affect et comportement, sont dépassées depuis belle lurette. Aujourd'hui ces experts touchent nos sens, nos émotions, notre identité (l'apprtenance à un groupe), et notre strong>inconscient.


L'outil IRM passe de la santé à la consommation

N'imaginons pas que seuls les analystes en marketing détiennent le monopole de ces études. Freud et Yung ont été remerciés, et leurs élèves les ont vendus contre une science d'étude absolument imparable.

L’économie s'est mariée aux neurosciences pour donner naissance à la neuroéconomie, qui étudie, notamment grâce aux techniques d’imagerie cérébrale, l’influence des facteurs cognitifs et émotionnels dans nos décisions d'achats.

Sa petite soeur, la neuromarketing, tente de mesurer la façon dont un produit affecte notre inconscient et influe sur nos comportements d’achat. Il ne manquait plus que l'usage de l'imagerie de résonance magnétique fonctionnelle IRMF, si chère à notre médecine, pour influencer notre consommation. N'en restons pas là, car au nom de l'économie tout est bon ! électro-encéphalogramme ou encore l’électromyographie (EMG) sont utilisés par des marques afin de mesurer l’impact de publicités sur le consommateur.

Vous l'avez bien compris, nous sommes soumis à une manipulation forcée.

Des IRMF soumettent des cobayes à de nombreuses photos, vidéos, odeurs, objets, aliments, etc, pour observer quelles zones du cerveau sont activées. Des scientifiques spécialisés en neurosciences analysent les interactions entre ces zones, qui, croisées avec l’inconscient et la prédétermination sociale, conditionneront le comportement des consommateurs.

Les stratégies et campagnes marketing se rendent plus efficaces, et notre illusion d'autonomie et de liberté d'action prend tout son sens.

La preuve en est, que ces méthodes rendent inutile l'affichage obligatoire d'une marque ou d'un logo. Le guru du neuromarketing, Martin Lindstrom (Wikipedia ), estime que les pubs les plus percutantes sont celles sans logo, qui dissimulent les marques mais s’arrangent pour être identifiables. Les processus inconscients d’identification, d’appartenance à un groupe, sont des amplificateurs redoutables sans que cela ne coûte rien à la marque. Il suffit d'observer l'assurance des utilisateurs de casques (écouteurs) "blancs" de la marque Apple.

McDonald's a testé le neuromarketing ?

McDonald’s, révélé comme ayant testé sous IRM des odeurs afin de déterminer laquelle positionnait la marque comme saine, se défend d’avoir manipulé ses clients. Il s’agissait juste d’un test, disent-ils, sur ses nettoyants. Pourtant, Gemma Calvert a fondé en 1997 la société Neurosense et a comme client des sociétés comme Unilever, Intel, McDonald’s, Procter & Gamble, MTV ou encore Viacom.

Une centaine d’entreprises de neuromarketing, des USA jusqu'en Belgique, dépensent jusqu’à 120 000 € pour une étude de neuromarketing, sachant qu'un test IRM coûte environ 1000€.

Les marques les plus riches y ont accès, de même que des sociétés de transport, des banques et des assurances, bien qu’elles s’en défendent, craignant que cela nuise à leur image.

Encore plus futuristes, certaines recherches démontrant qu’il serait possible de “lire dans les pensées” d’un individu en lui envoyant “simplement” sur le front un faisceau lumineux. La lumière pénétrerait dans le cortex frontal de l’individu et serait ensuite naturellement renvoyée (principe du sonar) vers des capteurs extérieurs qui analyserait cette lumière et déterminerait ainsi les intentions de l’individu.

Nous sommes très clairement en face de manipulations de masses, jusqu'à se demander jusqu'où laisser ces individus agir, ce qui alerte les associations de consommateurs comme Commercial Alert.


Comment des marketeurs ont-ils accès aux IRM ?

Il faut forcément l'intervention de médecins et d'équipes médicales pour faire usage de telles installations, et cela va de soi, au sein d'hopitaux ou établissements de santé. Mais plus inquiétant, sont les questions qui en découlent.

  • Comment de simples loboratoires marketing ont-ils accès à des services IRM, à des fins mercantiles ?
  • Ces laboratoires de compétences scientifiques ne sont-ils pas tous financés sur fonds publics ?
  • Ces moyens techniques et intellectuels, détournés des recherches de santé, confisquent-ils les intérêts médicaux de patients dont la santé en dépend ?
 

La question sur cette pratique a été soulevée au Senat, en France, courant 2008. La France aurait réagi en interdisant sur son sol, les IRM à finalité commerciale. Mais si les entreprises peuvent confier leurs études en la matière à des laboratoires étrangers, notamment belges, nous sommes face à une hypocrisie européenne ; suivez mon regard.


Quels ont été les recommandation du Sénat ?

Dès l'audition publique du 26 mars 2008, Olivier Oullier avait mis en garde contre les risques de confusion avec la neuroéconomie. : « Si le marché du neuromarketing existe, il ne faut absolument pas, et je n'insisterai jamais assez là-dessus, faire l'amalgame avec la neuroéconomie qui est une discipline universitaire rigoureuse dont les finalités ne sont nullement commerciales. Mieux comprendre comment nos émotions peuvent intervenir dans les décisions économiques et morales peut avoir un impact positif y compris pour vaincre les mécanismes d'addiction, par exemple, afin de savoir pourquoi les gens prennent la décision de replonger »

Il reconnaissait sans ambages que certains charlatans essaient de profiter des découvertes en neurosciences.

A la lumière de la nouvelle loi, on peut se demander comment sera interprétée l'action d'une société de marketing qui veut réaliser, en France, une expérience d'IRM fonctionnelle sur une décision d'achat de consommateurs ? Une fois toutes les autorisations obtenues, cette société ne possédant pas d'IRMf devra faire appel à un laboratoire public qui en possède un et payer une prestation pour l'utilisation de l'IRMf, l'examen médical des sujets et le traitement des données. Les finalités de l'expérience sont bien commerciales, mais l'expérience a été réalisée au sein d'un laboratoire de recherche scientifique. Comment caractériser les résultats obtenus ? Dès lors il convient de lever toute ambiguïté et d'interdire clairement cette pratique.
 

Quels ont été les recommandation du Senat : Interdire la validation de campagnes publicitaires ou d'expériences de neuromarketing par le recours à des IRM dédiées au soin et à la recherche scientifique et médicale. Rapport du Senat


Comment qualifier ces pseudos recherches

Certains seraient tentés de croire que ces recherches sur les circuits neuronaux du consommateur perdra son sens, quand le pouvoir d'achat en berne, aura fini de parler pour imposer la sobriété. Selon Olivier Oullier, le contexte risque de pousser les professionnels à plus d'efficacité, de rationalité, de recherche donc.

Certains se croient permis du " fascisme de la consommation", termes forts mais peut-être pas si faux en soi. Oui car agir sur l’inconscient à l’insu du sujet constitue une atteinte à la liberté en le privant de son libre arbitre, de toute possibilité de résistance ou d’opposition.
 

 


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8 réactions à cet article    


  • Maha Drayo Mouyaya Maha Drayo Mouyaya 6 mars 2013 10:25

    La psychologie manipulatrice est une technique au service des Etats et du marché. Elle existe depuis toujours, mais suite à une croissance démographique elle a aujourd’hui besoin de faire appel aux sciences pour accroitre son efficacité prédictive. Tout le monde devrait connaitre ces techniques afin de lutter contre la manipulation dés l’école maternelle. Dans le cas contraire, on va vers une fracture croissante entre les manipulateurs et manipulés, ce qui va très vite devenir un nouveau esclavage.
    Pour contrer la manipulation, il est préférable d’éviter les sources d’informations toutes faites : la télévision, la radio, la presse... qui crée une hiérarchie des nouvelles suivant l’importance décidée à l’avance par un groupe restreint de personnes, un comité « d’experts » qui travaille toujours pour leurs propres intérêts. La facilité de s’informer par les médias « classiques » est un piège. A contrario, pour s’informer sur internet, il faut faire l’effort de savoir ce qui nous intéresse. Les médias classiques nous épargnent cette introspection laborieuse, qui est pourtant le prix de la liberté. A échanger une liberté contre une commodité on sombre inévitablement dans l’esclavage.


    • Syl20idm Sylvain Bdr 7 mars 2013 09:06

      Alors pou convaincre les jeunes de se couper de la TV et des radios, les 2 choses qu’ils suivent le plus avec un intérêt accru et entretenu par la télé réalité absorbante, nous ne sommes pas rendus.

      "A contrario, pour s’informer sur internet, il faut faire l’effort de savoir ce qui nous intéresse. Les médias classiques nous épargnent cette introspection laborieuse, qui est pourtant le prix de la liberté." Nous sommes d’accord  !


    • Syl20idm Sylvain Bdr 7 mars 2013 09:08

      Encore une faute et c’est mon tour : pour(R) convaincre


    • ricoxy ricoxy 6 mars 2013 21:09

      Les techniques de manipulation ont toujours utiliser les résultats des sciences physiques ou neurologiques. Un des plus fameux exemples est celui d’Edouard Bernays, neveu de Freud, qui utilisa les techniques psychanalytiques mis au point par son oncle pour élaborer des méthodes pour manipuler les masses et l’opinion publique (utilisation de la théorie du Ça pour la publicité et la propagande).


      • ricoxy ricoxy 6 mars 2013 21:49

        deux grosses fautes :

        1. ont toujours utilisé
        2. techniques psychanalytiques mises au point


      • médy... médy... 6 mars 2013 23:24

        Je comprends qu’il soit nécessaire d’alerter mais l’estimation de RESPIRE sur le nombre de pubs vues ou même entrevues chaque jour me semble fausse. Demain je mesure le nombre d’impacts publicitaires et je démontre que le chiffre de 2500 minimum avancé est faux. Même si c’était 500.

        Il y a une autre solution que celle de faire disparaitre la pub agressive. Cette solution c’est le « blindage » du cerveau par la simple maîtrise de son subconscient. Les gens qui sont tournés vers la Nature et qui rééduque leur Désir sont en passe de réussir cette évolution. Et c’est ce que craignent le plus les dealers de conso-drogue et leur sous-fifres annonceurs.


        • médy... médy... 6 mars 2013 23:29

          Moi aussi j’ai fait une faute (mis à part les habituelles erreurs de syntaxe qu’on ne corrige plus) : « qui rééduquent » voilà, ça doit être la pub.


        • Syl20idm Sylvain Bdr 7 mars 2013 09:01

          Pourriez-vous développer cette théorie du « blindage » ou expliquer comment cette maîtrise du subconscient s’opère ? Vous parlez d’une prise de conscience ou acte volontaire ? Les pires victimes de cette manipulation publicitaire restant nos jeunes, encore loin de se tourner massivement vers la Nature, même si leurs parents en avaient envie.

          Effectivement médy, celui ou celle qui est sous contrôle de ses désirs deviendra très probablement le meilleur mouton de la société de consommation.Nous savons aussi que les désirs même satisfaits appellent immanquablement à de nouveaux désirs, et si un seul n’était pas satisfait, la frustration serait au RDV, rendant le sujet toujours plus sensible aux annonces alléchantes.

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