« Non mais ! »
Conflans-Sainte-Honorine, un tournant dans la lutte contre l'obscurantisme
Il faut sans la moindre hésitation condamner ce « oui, mais » délétère qui s’invite un peu plus à chaque nouveau drame, dans les débats sur les caricatures de Mahomet. Oui ! Les attentats contre les auteurs des caricatures ou contre tout ce qui s’y rapporte sont une horreur absolue. Oui ! Il faut les condamner avec la plus grande fermeté.
Et il n’y pas de « mais… » !
Ce « mais… », qui va du « …il faut éviter de provoquer » jusqu’au « …ils l’ont bien cherché », est insupportable. Il faut le condamner avec autant de fermeté que toute autre sorte de compromission. Cela étant dit et bien dit, gravé dans le marbre et entendu par tous, il ne faut pas pour autant s’interdire tout esprit critique !
Comment faire dès lors pour conserver un minimum de liberté d’esprit, sans tomber dans ce « oui, mais » détestable ? Afin de contourner cette difficulté, je propose de renverser la logique de ce « oui, mais » en le remplaçant par un « non mais ! ». Ceux qui me liront avec attention ne manqueront pas de noter la disparition de la virgule dans ce changement. Ce n’est pas un « oui », virgule je prends un temps pour réfléchir et ruiner d’un seul coup toute la fermeté de mon propos, mais un « noonmais » point d’exclamation qui exprime toute l’indignation mêlée d’une ferme détermination d’un « non mais dites donc ! » sans réplique. Sous-entendu : « ça ne va pas se passer comme ça ! ».
Si ce « non » convaincu peut sembler abrupt dans son expression, il faut donc aller jusqu’au bout de sa déclinaison sans en condamner d’emblée le principe, pour entendre le « mais… » qui le complète pour en adapter la pratique à la situation de crise dans laquelle nous nous enfonçons à chaque drame un peu plus.
Non…
Non, je ne suis pas Charlie !
Non, je ne pense pas que l’on puisse rire de tout !
Non, je ne crois pas, par exemple, qu’on puisse encourager des enfants à rire en bande d’un camarade isolé dans une différence physique ou psychique quelle qu’elle soit.
Non, je ne crois pas qu’on puisse rire des faiblesses de l’autre quand elles touchent à l’intime !
Non, je ne crois pas qu’on puisse rire de la foi religieuse intime de l’autre simplement parce qu’on ne la partage pas !
Non, je ne suis pas Samuel !
Non, je ne crois pas qu’un professeur de collège puisse proposer à certains élèves de sa classe de se dispenser de son enseignement en raison de leur confession religieuse !
Non, je ne suis pas cette Éducation nationale qui entend éduquer plutôt qu’instruire !
Non, je ne crois pas que la hiérarchie de ce professeur mise au courant par des parents d’élèves choqués puisse le laisser renouveler l’expérience !
Non, je ne crois pas qu’il faille inclure dans les programmes du collège en histoire ou en instruction civique des sujets philosophiques aussi complexes que la liberté d’expression !
Non, je ne crois pas qu’on puisse demander à un professeur d’histoire d’illustrer ce concept avec des faits d’actualité, autrement que par l’exemple quotidien qu’il peut en donner dans son enseignement !
Non, je ne crois pas que l’enseignement délivré par l’école de la république au collège puisse aller au-delà de la seule connaissance et se perdre dans le débat d’idées sur des sujets aussi complexes et sensibles que le droit au blasphème !
Non, je ne crois pas que la mission de l’Éducation nationale soit de transmettre des valeurs plutôt que des connaissances !
Non, je ne suis pas en marche avec l’émotion d’un rassemblement désordonné !
Non, je ne crois pas à la pertinence d’une marche collective de soutien aux victimes, qui plus est, en pleine crise sanitaire qui nous astreint paradoxalement à une distanciation sociale de plus en plus difficile à accepter !
Non, je ne crois pas que l’émotion puisse se substituer à la détermination dans la lutte contre l’obscurantisme religieux qu’il va bien nous falloir une bonne fois pour toutes engager avec plus de réalisme !
…Mais !
Mais je suis en marche avec toute la détermination d’une troupe organisée !
Mais lutter contre l’obscurantisme, c’est frapper, frapper juste, frapper fort et frapper vite, en jetant toutes nos troupes dans la bataille et en menant une chasse impitoyable à tous ceux qui tergiversent !
Mais lutter contre l’obscurantisme, c’est frapper juste !
Mais frapper juste, c’est faire de Charlie ou de ses défenseurs, non pas des victimes, mais bien des héros, lorsqu’ils le payent au prix de leur vie !
Mais frapper juste, c’est ériger un monument aux morts en hommage aux héros de la rédaction de Charlie tombés au front de la lutte contre l’intolérance !
Mais frapper juste, c’est faire de leurs caricatures des icônes de la lutte contre l’intolérance religieuse !
Mais frapper juste, c’est ériger une statue à la mémoire de Samuel Paty, mort au champ d’honneur de l’enseignement public !
Mais lutter contre l’obscurantisme, c’est aussi frapper fort !
Mais frapper fort, c’est désormais, pour affronter une telle sauvagerie dans l’intolérance, afficher les caricatures de Charlie dans tous les collèges et lycées de France afin d’apprendre à tous les jeunes français la tolérance !
Mais frapper fort, c’est en même temps mener une chasse impitoyable, sans tergiverser, à tous ceux qui refusent d’accepter l’affichage de ces caricatures.
Mais lutter contre l’obscurantisme, c’est encore frapper vite !
Mais frapper vite, c’est faire en sorte que la hiérarchie de l’Éducation nationale ainsi que les autorités policières et judiciaires ne puissent laisser un parent d’élève diffuser sur les réseaux sociaux des messages diffamatoires ou menaçants à l’encontre d’un professeur et de son enseignement, sans réagir immédiatement avec la plus grande fermeté pour faire disparaître sans délai ces messages !
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