Nos amis les gilets jaunes face à la transition technocratique : des solutions existent !
Le cycliste bordelais a eu l’occasion de rencontrer les gilets jaunes. Ces gens sont déterminés mais en dialoguant avec eux, j’ai compris qu’ils étaient autant résolus pour un conglomérat de mesures fiscales et économiques, qu’étrangers aux tentatives de penser le monde. Ce qui n’est pas un reproche, ces gens veulent juste que leur monde soit vivable. Ce qui démarque les gilets jaunes du mouvement « nuit debout » organisé par des urbains plutôt intellectuels qui voulaient changer le monde.
Les gilets jaunes sont semble-t-il plus résolus que « nuit debout » qui a vite montré un certain essoufflement. Les gilets jaunes incarnent une vitalité, une force, une détermination, une colère profonde, la vitalité ne faiblit pas. En revanche, « nuit debout » avait l’air d’une récréation même si certains des enjeux discutés étaient légitimes. Les gilets jaunes sont aussi résolus qu’en mai 68 sauf que ce n’est pas le même ressort, la même catégorie et la même dynamique car mai 68 a essaimé depuis Paris vers la province alors que les gilets jaunes sont issus de la province et plus spécialement des zones situées à la périphérie des métropoles. Des professeurs ont bien cerné les causes, les origines sociales, économiques et politiques de ce mouvement dont les racines sont peut-être encore plus profondes. « Nuit debout » d’inspiration gauchisante et écolo n’est pas compatible en l’état actuel avec les revendications des gilets jaunes, plus populaires et concrètes.
Le déclenchement de ce mouvement a été la taxation des carburants pour une « trajectoire carbone » liée aux accords de Paris consécutifs à la Cop21. Mais les causes sont plus profondes. Ces taxes n’ont été que la goutte d’eau. Les gilets jaunes n’ont pas vraiment saisi les liens entre leur situation, l’état du capitalisme entre 2008 et 2018, et le « mythe du réchauffement » avec les mesures du pacte de transition énergétique. Pourtant tout est imbriqué à un point qui n’a pas été élucidé par les analystes. A l’ère de la mondialisation, il faut penser global et agir global autant que local. Les accords de Paris sont le signe d’une gouvernance politique basée sur le mythe du réchauffement qui succède au mythe communiste. Avec la différence que le mythe climatique est compatible avec le capitalisme et qu’il impose le sacrifice imposé aux populations pour sauver un régime capitaliste à bout de souffle organisé par des puissants au service des prédateurs placés dans tous les rouages où il est possible, techniquement, financièrement, fiscalement, d’exercer ses intentions prédatrices. La transition énergétique est le moyen pour le capitalisme prédateur et dominant de sauver son régime. Ce qui suppose qu’il existe une alternative qui est aussi un capitalisme mais différent dans son essence. L’hypothèse est certaine mais il faut réfléchir et proposer des orientations déterminantes qui la plupart ne sont pas débattues.
Les gilets jaunes sont nos amis. Le mouvement ne peut pas s’arrêter car les problèmes soulevés par les gilets jaunes résultent d’une séquence initiée depuis une à deux décennies, dont les effets ont été masqués par l’endettement, ce fameux temps acheté dont nous a parlé Wolfgang Streeck. Le gouvernement n’a plus de levier pour acheter du temps et repousser les échéances de l’Histoire. La vie des ruraux, des campagnes, des classes moyennes, des vieux pauvres, est sacrifiée par un pouvoir technocratique au service des prédateurs qui ne sont pas forcément dans les banques ni à la bourse. La situation est complètement inédite. Cette jacquerie traduit une situation que les observateurs honnêtes ont jugée préoccupante. D’autant plus qu’avec la hausse certaine de l’électricité, des assurances, la hausse des taxes et peut-être du baril, la situation ne peut aller qu’en s’aggravant d’autant plus que la transition énergétique présentée comme une solution finale écologique sans discussion possible ne fera qu’accentuer les problèmes ayant mis les gilets jaunes dans la rue. Le gouvernement aura peut-être le mouvement à l’usure mais l’insurrection risque de revenir dès qu’une secousse intense sur les prix se fera sentir.
Les gilets jaunes, pas plus que les Français, ne connaissent en totalité les raisons pour lesquelles nous en sommes arrivés là. En Allemagne, pays plus petit avec une population bien supérieure, n’a pas vu l’immobilier et les loyers atteindre le niveau français. Si la France est arrivé à cette situation, c’est avec la politique de l’Etat menée depuis 25 ans. Notamment la gestion des terrains et la loi sur la défiscalisation immobilière. La politique au service de la prédation. Une autre politique est possible. Elle est visible depuis les sphères de la pensée. Un ruissellement de l’intelligence est possible. Un ruissellement de la monnaie depuis les plus pauvres est aussi possible. Honnêtement, je vois une impasse, autant pour le gouvernement que pour les gilets jaunes et pour la société française dans son ensemble. L’homme n’est pas à la hauteur des enjeux résultant de son travail. Etrange conclusion mais juste.
Il n’y aura pas de solution pour les gilets jaunes à l’intérieur du mouvement. Les solutions doivent être conçues en dépassant le mouvement et c’est pour cette raison que tout finira dans une impasse parce que tous les mouvements se radicalisent et se ferment au lieu de s’ouvrir. Dommage. Les solutions existent, les voies peuvent être ouvertes mais les gens ne les voient pas. Sortir des accords de Paris sur le climat fait partie de la solution mais c’est largement insuffisant pour régler les problèmes. Quelques autres choix sont salutaires. Supprimer les mutuelles et remettre cet argent gaspillé en bureaucratie et publicité dans un système de santé remboursant les soins de base et encadrant le tarif des professionnels. Supprimer toutes les niches fiscales et redonner son sens républicain à l’impôt sur le revenu. Changer la politique centrale et réaliser la demande de monnaie en vue d’un ruissellement par le bas. Supprimer la prime à la conversion et revoir le contrôle technique pour laisser circuler les véhicules ne présentant pas de danger majeur. Orienter l’immobilier à la baisse avec des mesures pour limiter la rente locative. Avec la sortie des accords de Paris, ces mesures en nombre limité peuvent améliorer grandement le système et faire à nouveau de la France un pays vivable pour tous.
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