La photo résume bien la chose, on y voit un homme en train de converser avec un Barack Obama comme à son habitude, détendu sinon franchement dilettante, la veste tenue à bout de doigt (de gaucher !) au dessus de l’épaule. L’homme est un américain d’origine sud africaine, il s’appelle Elon Musk, n’a pas encore 40 ans, et il est l’inventeur du système Paypal, qui a fait sa fortune lorsqu’il l’a revendu à EBay. Son système avait été créé pour une banque en ligne appellée X.com. Musk peut être considéré comme un petit génie : à 10 ans il faisait déjà son premier programme et à 12 il en vendait un autre, un jeu de tir spatial appellé Blastar. Très vite, il s’est en effet intéressé à l’espace, et avec le matelas de dollars que lui a procuré la vente de Paypal, il a fondé en 2002 une entreprise appellée Space X, chargée d’élaborer un programme spatial. L’homme abonné aux noms en X, le jour de la prise de vues, faisait visiter à Obama son nouveau joujou : son centre spatial, bâti autour de son projet : une fusée, capable de lancer une capsule en orbite et de la récupérer. Ce qu’il vient de faire avec brio, en à peine 8 ans de recherches, donc, enlevant ainsi une grosse épine du pied à la NASA, qui n’avait rien prévu pour aller dans les années à venir ravitailler l’ISS. Obama, qui venait alors de décider d’amputer sévèrement les ambitions spatiales nationales, venait de se trouver un allié de poids avec ce petit génie ayant recopié à la lettre les leçons d’un Glouchko ou d’un Korolev. La naissance de l’ère spatiale privée s’est faite avec les leçons tirées des expériences soviétiques, voilà qui représente le paradoxe fondamental que l’on vient de constater avec le lancement réussi de Falcon 9, la première capsule spatiale privée lancée et récupérée.
D’une certaine manière, en effet, Elon Musk, l’air de rien, vient de sauver la NASA : privée de navette, réformée pour grand âge, l’administration US n’avait en effet rien à son catalogue pour aller ravitailler la station orbitale internationale, et seul un vaisseau conçu il y a plus de 50 ans pouvait le faire : le Soyouz russe, appelé Progress dans sa version cargo. La capsule lancée par la fusée de Musk étant le clone d’Apollo, car pour réussir sa coûteuse entreprise, Elon Musk, le nouveau Von Braun américain, a appliqué les recettes les plus connues sur l’art de construire des fusées. Celles héritées du premier modèle, le V-2 et recopiées à l’envi par les russes. Car l’engin de Musk a défaut d’être une fusée innovante est un montage de recettes éprouvées : celles qui avaient conduit les russes à s’enfermer dans un projet qui ne pouvait pas marcher, à l’époque, faute d’ordinateur conséquent !
L’idée de reprendre un échec peut paraître farfelue, voire suicidaire, mais elle n’a été dictée que par l’argent. La formule choisie était la moins onéreuse et la moins risquée, aujourd’hui que les ordinateurs existent. Les russes, asphyxiés par les dépenses faramineuses du projet Saturn de Von Braun, avaient dû en effet se résoudre à bricoler à la hâte un projet de fusée de 100 mètres de haut alors qu’ils ne disposaient pas de moteurs assez puissants pour le faire (là ou les américains utilisaient ça, les russes marchaient avec ça). Résultat, les russes avaient dû se résoudre à multiplier les tuyères à la base de leur engin. Sur le pourtour du premier étage et au centre de leur gigantesque N-1, ils avaient dû accoler pas moins de 30 moteurs, des NK33. Qui, pour soulever le monstre de de 2 735 tonnes, devaient tous fonctionner en même temps et à la même puissance, ce que seul un ordinateur sophistiqué pouvait alors réguler. Hélas, les russes n’en disposaient pas : ils étaient très en retard dans le domaine : lorsqu’en 1976 un Mig-25 Foxbat se pose en urgence au Japon avec un pilote russe faisant défection, les gens de la CIA qui vont l’examiner vont découvrir à bord une électronique à base de tubes ! Remarquez, l’engin était insensible aux radiations, au moins, mais sa capture rassurait les USA sur les capacités des russes à réussir leurs entreprises aéronautiques ou spatiales : les savants soviétiques étaient définitivement des prosaïques, qui résolvaient leurs porblèmes davantage en garagistes talentueux qu’en recherche pure. L’industrie soviétique, celle qui faisait les camions Gaz et les voitures Lada, ne suivait pas. L’avantage du système était cependant la recherche de la simplicité maximale et des recettes durables. La preuve flagrante étant l’envoi vers la station spatiale de vaisseaux qui n’ont pas bougé depuis leur création, lancés par une fusée conçue au sortir de la seconde guerre mondiale, la RD-7, et ayant lancé le premier satellite, le fameux Spoutnik !
Car c’est vrai, ça : à regarder l’arrière de la fameuse Space X, on lui trouve un air de N1 prononcé. Les moteurs ne sont pas pour autant des NK33 provenant des surplus russes. La N1 un échec, il restait pourtant un bon nombre de moteurs performants inutilisés. Il y en avait 150 d’avance (pour 5 fusées donc !) dont 36 exemplaires ont été vendus à Aerojet General pour 1,1 million de dollars chacun, et la licence d’exploitation pour en fabriquer de nouveaux. Le NK-33 devenu NK-43 dans sa version "haute altitude" a été rebaptisé depuis AJ26-58 ou AJ26-59. En 2014, on prévoit d’en mettre dans la Taurus-2 d’Orbital Sciences Corporation américaine (deuxième projet privé avec son projet de module Cygnus) et le nouveau lance-Soyouz "allégé" (sans ses boosters). Mais non,pour construire sa Space X, Elon Musk, en brillant ingénieur, a retenu le moteur le plus fiable au monde. Enfin, il l’a recréé, plutôt et baptisé Merlin.
Le moteur de fusée le plus fiable au monde est tout simplement celui qui a ramené 12 cosmonautes vivants en réussissant à les arracher à l’attraction lunaire, à 6 reprises. Celui du LEM des missions Apollo, dont je vous ai conté l’histoire à l’été 2009. Celui d’Eagle, d’Intrepid, d’Antares, de Falcon, d’Orion et de Challenger, les surnoms donnés aux 6 LEMs qui se sont posés sur la Lune (Apollo XIII ayant été un échec). Celui de l’opération la plus dangereuse jamais faite avec des cosmonautes : décoller sans aucune erreur possible de l’astre lunaire. Merlin est en effet à base du moteur d’ascension du LEM, engin très complexe, sur lequel les cosmonautes, dans la cabine, pouvaient s’asseoir ! Sa tuyère en alliage au niobium et son cône d’éjection(ici celle de Falcon) est reconnaissable ici sous l’engin. Sur Falcon, ça chauffe sec. Le Merlin, sous le premier étage de la Space X a été regroupé en cluster de 9 tuyères. L’informatique actuelle, cinquante ans ou presque après la N-1, permet d’envisager davantage, et c’est bien d’ailleurs ce qu’envisage de fabriquer à long terme notre génie de l’espace. D’un seul exemplaire sur le tout premier prototype, on peut passer à bien davantage, en accolant au corps principal d’autres "boosters" similaires. Pour en faire un engin puissant, pour lancer des satellites plus gos. Chaque lancement étant facturé à la clientèle 95 millions de dollars pièce : n’oublions pas le côté privé (et rentable) de l’histoire.
On en sera alors au Falcon 9 "heavy". Mais pourquoi ne pas aller plus loin s’est-il dit, notre génie... et fabriquer dans la décennie à venir une Falcon X, à base de Merlin 2, puis d’y accoler les boosters équivalents munis de 6 tuyères chacun, pour passer à la "Heavy" et ... aboutir à la Falcon XX, de 10 mètres de diamètre, une centaine de mètres de haut et qui développerait 1,7 millions de livres de puissance contre 120 000 seulement actuellement ? C’est le retour de l’équivalent de la Saturne, façon N1 ! Toutes des fusées marchant à l’oxygène liquide (ou LOX) and et au kerosene spatial (ou RP-1) : la formule initiée au départ par la V-2 ! Le second étage de la Falcon future utilisant comme l’ancienne Saturn un mélange d’hydrogène (LH2) et d’oxygène liquide, fournissant l’énergie à un moteur appelé Raptor, en cours de dévéloppement. Bien entendu la capsule-cargo Dragon pourra subir la même évolution, et contenir des êtres humains. Le module pourrait contenir jusqu’à 7 cosmonautes ! Elle serait alors munie d’une tour d’éjection de sauvetage similaire à celle d’Apollo. C’est exactement le projet qu’avait prévu la NASA pour l’après Apollo... et un concurrent pour d’autres. Quant à notre génie, il a déjà une autre corde à son arc : il est aussi le patron désormais de Tesla, société qui construit la reine actuelle des voitures électriques.
En attendant, en effet au sommet de la Falcon, le module Dragon n’est pas en reste. C’est bien un clone de cabine Apollo, réalisé avec les techniques d’aujourd’hui en matière de traitement de l’aluminium (ici sans son revêtement, avec une cosmonaute de la NASA comme invitée). Son bouclier thermique est en tuiles de PICA-X. Une matière testée par la NASA sur la capsule Stardust : l’engin, de retour à fond la caisse d’un long séjour spatial à avoir croisé les comètes, était rentré dans l’atmosphère spatiale à l’incroyable vitesse de 12.9 kilomètres par seconde, alors que Dragon est rentré à 7 km/s. Le "Phenolic Impregnated Carbon Ablator" avait fait ses preuves : c’est à ce jour le meilleur matériau ablatif.
Pour les tests des parachutes, Musk a à nouveau fait marcher sa cervelle, et eu recours à un drôle d’engin pour monter en altitude la cabine et la lâcher, pour vérifier le déploiement de ses trois parachutes contenus dans son cône supérieur (lui aussi récupéré par deux petits parachutes !). Un des hélicoptères US les plus puissants de la gamme civile : ce bon vieux hélicoptère de feux de forêts, le Sikorsky C-64 Skycrane, recordman de charge en altitude, la "grue volante" toute d’orange vêtue d’Erikson. L’opération, menée à Morro Bay en Californie a été décrite ici par le détail. A noter également que le lancement a eu lieu sur un site historique : celui de Cap Canaveral, haut lieu des tous premiers lancements spatiaux US. Space X1 ayant été lancé du Reagan Test Center sur l’atoll de de Kwajalein dans l’Océan Pacifique. Un site ressemblant comme deux gouttes d’eau à celui de Kourou pour les lancements d’Ariane et de Soyouz, avec ces tours anti-foudre, similaires à celles de Kourou. Les communications étant bien meilleures qu’avant, le poste de commande n’avait plus à être aussi proche du lieu même du tir. Et l’équipement n’est plus le même non plus que celui de l’ère Apollo : les consoles à très peu de kilo octets de mémoire ont fait place à des ordinateurs performants.
Il y a quelque temps, quelqu’un avait écrit que "les vols de Falcon 9, en cas de succès, viendront trop tard, cependant, pour influencer les avis de l’administration des Etats-Unis d’Obama sur plans de vols spatiaux habités". Or il semble bien que si : en favorisant les projets privés, Obama semble s’être retiré une épine du pied avec le programme irréalisable financièrement de se rendre sur Mars ou même de retourner sur la Lune. La NASA, en panne de navette, est aussi en panne d’idées et d’argent. Reste donc le privé, avec un gros bémol à cet enthousiasme : en qualité de firme privée, Space X pourra signer avec qui elle veut, logiquement, ou prêter main forte à d’autres pays si bon lui semble. Or, un événement surprenant avait précédé l’annonce du vol orbital réussi de Dragon : c’est l’Afrique du Sud, patrie de naissance d’Elon Musk, qui avait annoncé avoir créé son agence spatiale. Rappelons que l’Afrique du Sud avait énormément avancé sur le sujet dans les années 80 avant ce cesser toute activité sur le sujet mais avoir donné un énorme coup de main à.. Israël, un sujet expliqué ici et là.
Un dernier point : vous allez me dire, c’est très bien tout ça, en effet, mais c’est un peu idiot d’envoyer une capsule dans l’espace sans rien lui faire emporter. Détrompez-vous ! Chez Space X, on y pensé, mais avec un sacré sens de l’humour : ils viennent de révéler à la presse quels étaient le chargement "secret" déposé à bord de l’engin retrouvé dans le Pacifique à 500 miles de la côte californienne. Tenez vous bien : c’est d’abord un poster, collé sur une boîte boulonnée sur le fond de l’engin. Un poster représentant un bel hommage aux frères Zucker et à Jim Abrahams (les auteurs de "Y’a-t-il un pilote dans l’avion"), avec la vache de ’Top Secret" dessus. Et dans la boîte.... une énorme roue de fromage ! Du Brouère lorrain, de la fromagerie de l’Hermitage à Bulgnéville (près de Vittel) ! En voilà qui ont du regarder la conquête de la Lune vue par Wallace et Gromit, pour sûr ! Selon Space X, et donc Musk, c’est surtout un hommage appuyé rendu à un des sketchs de Monthy Python parmi les plus absurdes et les plus drôles !
Cet article est peut-être l’occasion de relire ce que j’avais pu écrire ici sur la conquête de la Lune, en 7 épisodes.
En effet, très passionnant ! et Obama n’y est pour rien, d’ailleurs c’est une marionnette bonne à rien sinon obéir à ceux qui l’ont financé.... Mais avouez, on tourne vraiment en rond ( c’est le cas de le dire...) avec ces fusées d’artifice améliorées....à part jouer au manège enchanté au tour de la terre, rien de nouveau sous le soleil !! Je trouve même cela totalement déprimant, on est pas près d’envoyer des équipages sur Mars ou plus loin, avec cette technologie antédiluvienne carburant/comburant.....
À propos, je ne vous demande pas ce que vous pensez de ça.......d’ailleurs, je n’en pense guère mieux pour l’instant, mais ça ressemblerait bien à une farce, quoique !..... à étudier un peu quand-même, je viens juste d’en prendre connaissance..... autre lien...
Évidemment, moi aussi je me méfie de ce genre d’info.... L’enfoiré, les astéroïdes aussi gros sont répertoriés dans un catalogue et leurs orbites ou trajectoires sont suivis précisément , mais il peut arriver que certains éléments puissent échapper à la vigilance des astronomes..... Je soupçonne le retour de l’empire avec Dark Vador.....
Seriez-vous limité, Mr Morice, au point de ne comprendre que ce sont les
commentaires, dont certains sont carrément débiles, que je vise, et non votre article, que je trouve bon ? (Ou alors mon commentaire n’était pas assez explicite...) Votre précipitation à fustiger me peine...Je continuerai cependant de vous lire, rassurez-vous. Mais je me garderai de « tendre le dos », comme on dit.
« [...] la veste tenue à bout de doigt (de gaucher !) au dessus de l’épaule »
Peut on me dire ce que cela signifie et sous entend ? Non vraiment, quel est le but à mettre l’accent sur le fait qu’Obama soit gaucher puis de la suffixer d’un point d’exclamation ?
Ha, peut être que le fait qu’il y ait une écrasante majoritée de droitiers on en déduit que le gaucher n’est pas normal, donc on joue sur des superstitions à la con pour étayer un article qui parle de politique. Ridicule ! Mais en même temps ça marche sans doute, le gaucher n’est pas quelqu’un comme tout le monde pas vrai ? Il a quelque chose à se reprocher. On devrait même l’obliger à se servir de la main droite, faire comme tout le monde, rentrer dans le moule. Non mais...
P.S : bien évidemment je suis gaucher, sinon je gage que ça ne m’aurait pas frappé, c’est tellement logique quand on est dans le moule.
Oui ! Les termes et la tournure sont plus que condescendants ! Ce n’est guère étonnant de la part de l’entité ! Mais c’est le plus souvent la marque des « rédacteurs » d’Agoravox ! Pas rien ,merde quoi, d’y être rédacteur :.
Revenons Morice à votre qualité ( si on lit bien votre CV) de rédacteur en chef dans l’ex-revue Icônes. En effet si le propriétaire fondateur de la revue est décédé en 1996, n’en était-il pas le rédacteur en chef aussi ? Votre réponse n’en fait pas mention.
Oui ! Les termes et la tournure sont plus que condescendants !
euj je vous rappelle vos INSULTES, ici : là ce n’est pas de la condescendance : c’est du pur mépris.
En effet si le propriétaire fondateur de la revue est décédé en 1996, n’en était-il pas le rédacteur en chef aussi ? Votre réponse n’en fait pas mention.
et voilà qu’il continue l’imbécile : on était deux à faire le canard ! on a joué au pseudos pendant des années (chacun en avait 5 ou 5), et on faisait exactement la même chose : lui était le propriétaire du titre, et le FONDATEUR. Enfin si on peut dire : à sa mort, on s’est aperçu qu’il ne l’avait pas déposé ! Quant à vos « si » ils sont hautement méprisants, et ça les lecteurs s’en rendent bien compte !
SpaceX (Space Exploration Technologies Corporation) et une autre société américaine privée, Orbital Sciences, ont déjà touché quelque 500 millions de dollars alloués par le budget pour la création d’un vaisseau appelé à desservir le segment américain de l’ISS après la fin de l’exploitation des navettes spatiales en novembre 2010.
SpaceX et la NASA ont signé un contrat de 1,6 milliard de dollars qui prévoit 15 tirs du lanceur Falcon-9 dont 12 vers l’ISS et 3 d’essai
Bon !!! privatisation des lancements pourquoi pas après tout « obligation de moyens et de résultats »
pour le moment 1,6 milliard mais après le dis contrat ??? étant le seul ou presque à combien sera la note ??? là aussi il faut de la concurrence !!!
la corée du nord a ses propres lanceurs( moyenne portée demandez au Japonnais ce qu’ils en pense ) et je les vois mal demander à un Americain ! S’il vous plait monsieur vous pourriez me lancer mon missile nucléaire ?????
ne posez pas des questions auquelles vous avez les réponses morice....
mais la Corée du Sud si elle paye le prix elle pourra lancer ce quelle veut elle !!!! ( enfin je pense )