Obama et Royal, une chance pour Bayrou ?
Le 26 octobre dernier à la Mutualité (!), le Mouvement démocrate a réuni sa première convention nationale qui clôt le cycle de naissance du MoDem initié le 27 mai 2007, officialisé le 1er décembre et accouché par les élections internes et locales du 27 septembre dernier. Ce ne sont que des informations connexes au sujet que je vais développer ici : comment l’élection d’Obama du 4 novembre et la motion de Royal arrivée en tête hier au PS pourraient conforter la place de François Bayrou et lui donner un petit plus pour 2012.

Avant de vous faire part de mon analyse (qui comme toute analyse a pour principe de se tromper une fois sur deux, et bien plus quand il s’agit de politologues patentés et télé-radiogéniques) de l’incidence potentielle de ces deux événements (en majeur et mineur, faut pas tout mélanger), je reviens un instant, juste trois lignes, sur cette convention nationale. En effet, en trois mots, il faut dire haut et fort qu’à cette convention nationale étaient présents tous les élus locaux. Tous veut dire, selon le mode de scrutin, tout le monde. En effet, cette élection se faisait pour la majeure partie et quand il y avait plusieurs listes (la majorité des cas) à la proportionnelle (modèle qui devrait inspirer le château et éclairer les lanternes). Ceci a pour signification, que les opposants, les mauvais coucheurs, avaient la possibilité d’avoir des élus, et ces élus celle de s’exprimer lors de cette convention. Or, il y avait un vote important. Certains se souviendront des échos catastrophistes concernant la dictature au sein de ce parti, notamment concernant le règlement intérieur. Ce règlement a une importance de catégorie un, étant donné qu’il régit la vie au quotidien du Mouvement, tant nationalement que localement. Ce sont les fameuses petites lignes des contrats que personne ne lit. Or donc, des aboyeurs de quartiers, s’épanchaient via le réseau des réseaux (WWW) pour dénoncer un manque patent de démocratie et qu’il y avait un hold-up de Bayrou sur ce fameux règlement intérieur. On se souvient également que le vote de juillet de la mention de Bayrou avait fait ricaner ces mêmes bons apôtres. Ils avaient donc tout loisir de manifester leur colère, leur désapprobation et surtout de prouver et leur courage et leur liberté de parole, plutôt de vote, en sanctionnant, ce jour-là ce RI mis aux voix. Résultats des courses comme dirait Omar Sharif, quelque chose comme 4 votes contre et 2 abstentions pour plus de mille votants. Le débat est donc clos. Beaucoup de bruit..., comme l’a écrit un du même nom que la poire du côté de Stratford-upon-Avon.
Venons-en à nos moutons comme le rêvait Jeanne d’Arc, pour parler de celle du Poitou, qui contre toute attente et tout pronostic, contre une force propaganda du Figaro et de nombreux journaux qui voyait Delanoë en preux chevalier socialiste, c’est notre Dame du Poitou, notre Chantal Goya zénithale de la politique qui a dominé les débats. Hier, elle a donné une mini-pâtée à ses trois concurrents directs par ordre d’arrivée : Delanoë (quelque 25 %), Aubry (quelque 25 %) et Hanon (quelque 19 %). Le gâteau socialiste se divise en quatre parts celle de l’ogresse à 29, celle du poucet à 19 et le reste à égalité, ce qui est sommes toutes pas mal pour un parti égalitariste. Quatre courants, mais quatre courants très forts. Du reste l’ex-mari de la Dame du Poitou a déclaré qu’elle n’avait pas la majorité. Cela commence bien. D’autres auraient appelé au rassemblement, Bambi se réveille pour mettre le bordel : La victoire de Ségolène Royal "ne lui permet pas d’être majoritaire dans le Parti socialiste", a déclaré ce matin le premier secrétaire sortant François Hollande [...]
"Le problème ce n’est pas cet ordre d’arrivée c’est comment on donne au parti (...) une majorité stable capable de le conduire". Du reste, ces élections n’ont pas plu à tout le monde. Mélanchon quitte le PS pour créer un parti à gauche. Voilà un copain pour le facteur. Nous nous trouvons donc au PS avec 4 courants, celui vibrionnant de la Charente libre qui veut un rapprochement avec Bayrou, le maire de Paris qui, après s’être déclaré libéralo-socialiste, se veut plus à gauche, mais n’est pas contre un accord modémique et la dame du Nord qui sur place a fait, elle, un accord avec le Mouvement démocrate, mais claironne qu’elle est une gauche solide et responsable, bien qu’elle travaille plus que 35 heures (pour gagner plus ?) et enfin la gauche officielle et orgueilleuse de ses origines, le jeune Hamon. Comme on le voit, les tactiques électorales, les philosophies sont assez diverses, si les objectifs sont les mêmes. Voici les trois raisons qui peuvent faire que Royal en tête ce sera Bayrou en tête (toutes choses égales par ailleurs).
- Elle est en tête, mais n’a pas un écart, quoique non négligeable, très important avec Delanoë et Aubry, deux personnages au caractère, disons, pas facile et Hamon qui peut se prévaloir d’un petit pactole. La crise a dû l’aider un peu. Ces quatre courants, ces quatre ambitions vont se heurter et cela va laisser des traces. Un gâteau coupé en quatre cela fait quatre morceaux comme dirait La Palice et donc quatre plus petits morceaux que le tout. Il y a des miettes qui vont se perdre. La légitimité du courant Royal est importante, mais pas suffisante. Le courant Hamon sera à un moment ou un autre une belle croupière de 19 % et même si le déchet ne sera pas de cette hauteur, cela fera du mal. La crise a radicalisé une partie des sympathisants et des électeurs du PS. La base de Royal va se rétrécir inéluctablement.
- Certes, elle a perdu les élections présidentielles, mais elle a un courage certain et ne baisse pas les bras. Un échec n’est pas la preuve d’un enterrement, Chirac de sa tombe politique en sait quelque chose, et Mitterrand ne dirait pas mieux de six pieds sous terre. Cependant, elle a des ennemis parmi les éléphants qui ne sont pas encore au cimetière et ils ne sont pas près de la lâcher avec, en toile de fond du fin fond du FMI, un candidat vacillant, le fameux french lover DSK.
- On a toujours préféré l’original au Canada Dry (enfin cela dépend des goûts), et le rapprochement avec le MoDem n’est pas du goût de tous, et ici encore une fois la crise modifie les cartes : elle gauchise une partie du PS et démontre après la chute du Mur de Berlin avec son système de société jeté aux oubliettes que le système qui se croyait plus fort s’écroule avec fracas. Royal est donc une concurrente sérieuse, mais qui, confrontée à Bayrou, me paraît-il, n’apporte pas de renouveau du côté du PS (au contraire de Valls, Moscovici, Hamon) alors que le leader est de son côté incontesté au Modem, et surtout est celui qui incarne, à ce jour, l’esprit démocrate.
Royal serait donc, à mon sens, une bonne nouvelle pour Bayrou. Elle n’est pas morte et enterrée, loin de là. Cependant, nous parlons de la marge, de quelques pour cents afin que l’une reste devant ou l’autre la dépasse. Et à propos de pour cents, de la marge, voilà mon autre volet : la victoire de Barack Obama. J’y vois deux impacts. Ils ne sont pas évidents ni tonitruants, mais restons dans cet esprit de la marge, cela peut jouer le rôle infime, mais primordial. Une goutte suffit à faire déborder le vase. C’est ce qu’un jour a répondu sœur Thérésa lorsqu’on lui disait que ce qu’elle faisait était une goutte d’eau dans la mer : si je ne le faisais pas, cette goutte manquerait à la mer (en gros).
- Le terme même de démocrate devient une référence internationale, la référence d’un nouvel ordre, la référence de la rupture à tel point que la Catsafiore claironne que Sarkozy et Obama c’est du pareil au même (on devrait parler d’Hortefeux à Obama...). Or, en France, il n’y a qu’un parti d’importance (il en existe d’autre comme le PSD) qui porte le mot de démocrate comme emblème, c’est le MoDem. L’intitulé même, simple, de deux seuls mots comme Parti démocrate : Mouvement (ce qui change, la rupture en somme, ce qui avance, ce qui s’oppose à la régression) et Démocrate (sans commentaires.
- Cette victoire prouve qu’un changement est possible. Qui aurait imaginé qu’un métis puisse devenir président des Etats-Unis d’Amérique ? Beaucoup l’espéraient, certains y croyaient. Mais, au tout début, c’est Hillary Clinton qui était donnée gagnante des primaires, et c’est Barack Obama qui est sorti du bois. Dans ce qui me préoccupe, ce n’est pas de savoir si Barack Obama va réussir (dans un autre cade de pensée, bien sûr que c’est primordial), mais c’est que sa victoire a prouvé qu’un autre monde était possible, or, en France, seul contre tous, Bayrou y croit et se bat pour celui-ci, un monde plus humaniste. Il y en a d’autres qui se battent comme Besancenot, mais ils sont englués dans la dialectique, l’opposition brutale et les clichés se servent de la misère et des injustices pour ouvrir des portes d’un enfer qui a existé et dont les recettes n’ont apporté que malheurs et privations de liberté. La dictature, qu’elle fût du prolétariat, reste une dictature et les schémas simplistes restent des schémas simplistes.
Pour conclure, voilà deux éléments venus pour l’un de l’intérieur de nos terres et pour l’autre d’outre-Manche, avec des conséquences diverses et inégales, mais qui pourraient apporter les quelques petits points pour faire que le troisième devint le second.
Et pour la bonne bouche, voici le discours de Bayrou du 26 octobre, que même les journalistes ont trouvé brillant. C’est dire.
Vignette : photos Wikipédia
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