Obscurantisme, encore et toujours
L'Italie a un problème avec la religion. La religion catholique, j'entends.Il semble que 80% minimum des Italiens soient catholiques. Wikipédia parle de 94,1%. Selon les mêmes sources, il y aurait 66% de catholiques en France, 93,1% en Belgique. Admettons.
Toutefois, il s'est passé, ce samedi, sur la Rai 1, lors de l'émission "Ballando con le stelle", compétition de danse, une petite altercation qui ne serait qu'anecdotique de la mauvaise éducation d'un de ses protagonistes, si elle ne révélait, aussi, une situation typiquement péninsulaire, totalement éloignée d'une saine conception de la nécessité de laisser la religion dans la sphère privée.
De quoi est-il question ? Les couples de danseurs, l'un professionnel, l'autre amateur, mais vedette dans son métier, s'affrontent en une compétition, dont le jury est composé d'une seule et compétente danseuse professionnelle et de quatre autres personnages connus pour d'autres motifs. L'un de ces membres est un styliste d'origine vénézuélienne. Sans doute ce monsieur a-t-il toujours entretenu une foi catholique ; c'est son droit. Depuis l'année passée, il affiche un pseudo-mysticisme qui, cette saison, devient offensif. Je passerai son énorme pendentif pieux, accroché à une chaine aussi spectaculaire. Il me parait bien plus dérangeant par son prosélytisme pur et dur. Comble de l'agitation : les producteurs ont cru bon d'intégrer parmi les danseurs ... une religieuse en uniforme. Non seulement, elle semble hermétique à la possibilité de danser seule avec un homme puisqu'elle se fait accompagner de deux jeunes femmes, toute prestation se faisant doncà quatre, mais, par ailleurs, elle n'a pu participer à la transmission, en direct toujours, dont je parle, puisqu'à l'occasion du samedi pascal, elle était tenue à la prière au couvent. Néanmoins, elle y a effectué une prestation enregistrée.
Un des membres du jury a refusé de donner une cote dans la mesure, a-t-il expliqué, où les participants doivent tous etre traités sur un pied d'égalité, et je suis d'accord avec lui. Au cours de ces émissions, il est arrivé que des participants se fassent des fractures. Ils ont poursuivi leurs exhibitions et ils n'ont pas évoqué de cas de force majeure. L'opinion de notre homme a provoqué non seulement les bouderies des copains de danse de la religieuse, présents eux sur scène, des sifflements du public, mais aussi la forte indignation du styliste. Il a hurlé au respect de la foi (ce que l'autre admettait tout en appelant à celui des règles, je partage ces opinions) et, voyant l'impossibilité d'obtenir un revirement de son collègue, l'homme de mode s'est mis, les yeux enfiévrés, à réclamer que tous, présents, fassent le signe de la croix et récitent un Notre-Père ! Il a conclu en traitant l'autre de "gasato", gazé, ce qui semble du plus mauvais gout. Le plus étonnant est que personne ne se soit scandalisé d'une telle vindicte qui, entre nous, ne me semble pas parfaitement correspondre au message chrétien.
L'Italie n'a aucune religion d'Etat. Or, il semble que la moindre parole susceptible de déranger les choix personnels d'une personne catholique qui, par souci de sa foi, ne peut répondre à d'autres engagements pris, soit l'occasion de faire exploser des discours guerriers, des appels aux croisades. Après la fameuse rencontre de Vérone, où des intégristes de tous ordres se sont réunis pour clamer leur haine des femmes sans enfants, de celles qui ont avorté, des divorcés, des homosexuels, etc, ces attitudes brandies en public, sur une chaine de télévision que tout le monde paie, me semble un douteux présage pour la liberté de pensée de ceux qui ne sont pas soumis au Vatican.
PS. : Je rappelle qu'en Italie, il y a des non-croyants, des Juifs, des musulmans, des pentecotistes, des protestants.
Françoise Beck
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