Œdipe à l’Elysée : en attendant le Gladiateur et le sable du Colisée
"Le véritable cœur de Rome n'est pas dans le marbre du Sénat, il est dans le sable du Colisée. Il va leur apporter la mort, et ils vont l'aimer pour ça."
Sénateur Gracchus, « Gladiator », Ridley Scott (2000)
Et si, malgré la consigne de vote anti-Le Pen donnée par Jean-Luc Mélenchon, les 21,95% des voix obtenues par celui-ci au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle convergeaient vers la candidate du Rassemblement national qui le devance de justesse avec 23,4% des suffrages – selon les chiffres du ministère de l’intérieur à 6 heures du matin ? interroge l’éditorialiste Richard Werly dans le quotidien Suisse Le Temps.
La possibilité de voir le vote protestataire devenir effectivement majoritaire en France ne peut pas être écartée à deux semaines du second tour, le 24 avril 2022. La réalité s’impose d’elle-même : s’il veut être réélu pour un second mandat, M. Macron devra en effet trouver les moyens d’enrayer ce scénario.
Finalement contraint de défendre son bilan, le président sortant devra surtout convaincre de sa capacité à écouter les Français, avec pour objectif principal de démontrer que Marine Le Pen n’est pas la candidate populaire qu’elle prétend être.
Jeu difficile s’il en est car l’arène est actuellement occupée par trois forces électorales dont le but va être de se transformer en forces politiques réelles pour les cinq ans à venir.
I- Ces forces électorales souffrent toutes d’un handicap sérieux :
-La première, animée par « le dur désir de durer » quoi qu’il en coûte, tente de jouer la carte forcée du bail politique avec reconduction tacite en faisant l’impasse du compte-rendu pourtant obligatoire d’un mandat et d’un quinquennat calamiteux.
-La seconde, capitalisant sur la durée politique, un enracinement et une légitimité déjà anciens, pourrait profiter de l’usure de son adversaire après cinq ans de pouvoir pour concrétiser enfin la visibilité et la légitimité d’un électorat jusqu’alors barré par les grands partis politiques désormais durablement effondrés (républicains et socialistes).
-La troisième, installée dans le rôle d’arbitre, n’apporte rien de consistant, limitée qu'elle est à jouer le rôle du clébard insaisissable dont les aboiements incessants empoisonnent la quiétude de tout le voisinage un dimanche après-midi.
La force électorale qui remportera la victoire devra donc effectuer une transformation immédiate en devenant réellement une véritable force politique dont la mission comme la pérennité seront conditionnées par sa réussite aux élections législatives qui s’ensuivront.
Mais se pose préalablement la question primordiale de savoir qui disposera de quels moyens pour agir et quels seront les hommes et les femmes qui sauront prendre leur place pour mener à bien effectivement et efficacement, dans ce qui représentera durant les Cent Jours à venir, la prise en main de l’Appareil d’Etat ?
II- Considérons posément la situation :
-A l’exception de quelques parlementaires qui se sont distingués durant la législature actuelle, la France Insoumise n’est et ne restera que le parti de M.J-L. Melenchon, et rien d'autre.
-La République en Marche, quant à elle, ne peut sérieusement espérer accueillir les chevaux de retour, les ralliés de la 25ème heure et recycler les têtes d’affiches calamiteuses qui ont animé la vie politique du pays en tirant encore sur les cordes désormais usées de ces aubaines qu’auront représenté pour un pouvoir détesté, à bout de souffle et à court d’imagination, les campagnes vaccinales comme les peurs induites par la guerre en Ukraine, sans écarter les scandales financiers soigneusement éludés et les autres mines à retardement qui ne manqueront pas d'exploser.
-Quant au Rassemblement national qui semble avoir perdu bon nombre de ses éléments de qualité, il ne semble pas disposer pour le moment des personnalités susceptibles de lui permettre de gouverner en cas de victoire, sauf à considérer l’ouverture que pourrait représenter avec le nouveau parti Reconquête ! un E. Zemmour désormais devenu acteur politique à part entière et qui serait appelé avec des cadres utiles et neufs pour former un gouvernement.
-Et qu’adviendra-t-il si M. Macron est réélu ?
Fera-t-il l’impasse sur l’obligation qui sera la sienne de choisir Mme Le Pen comme Premier ministre ?
Aura-t-il recours comme cela est fort probable à une girouette politique aussi opportuniste qu'arriviste, prête à toutes les volte-faces pour jouer les utilités ?
Continuera-t-il à faire comme si de rien n'était, espérant asseoir sa nouvelle légitimité sur une nouvelle recomposition législative ?
La Vieille Garde n’a plus qu’une seule envie : virer le stagiaire. Mais voilà : entre-temps, celui-ci est de venu…Parrain.
Quant à nous, pour l’heure, nous ne sommes que les spectateurs d’Œdipe à l’Elysée.
Si la névrose a pour but la destruction du complexe d’Œdipe, il serait urgent que la France entière sorte de cette névrose carabinée qui commence à sérieusement lui nuire et qui ne durera pas cinq ans de plus.
Tout dépendra de l’issue du Débat entre les deux candidats dans les jours à venir.
Mais il va falloir passer à autre chose, et vite !
Car il est hors de question de ressortir une fois de plus de la Naphtaline l’argument tiré du fameux « front républicain », le « barrage aux chemises brunes et aux bottes » venant légitimer le maintien au pouvoir du fossoyeur de l’Etat et du Service public au bénéfice d’intérêts privés, le destructeur de pans entiers de notre économie, de nos finances, de notre souveraineté, de notre système de retraites, de notre système de santé, le pourfendeur du système économique, politique et social qui n’aura alors plus aucune limite car limité à deux mandats.
La catastrophe en marche, en quelque sorte.
En attendant l’arrivée d’un véritable Gladiateur, pour enrayer ce que vous pouvez écouter ci-après avec le talentueux Pierre-Emmanuel Barré :
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