On doit en être conscient
ON DOIT EN ÊTRE CONSCIENT
Il y a environ 70 ans, Malcolm X disait : « ils se sont moqués de vos noms, et vous avez changé de noms. Ils se sont moqués de vos habits, et vous avez changé d’habits. Ils se sont moqués de vos cheveux, et vous avez acheté des défrisants. Ils se sont moqués de votre peau, et vous avez acheté des éclaircissants. » Il est choquant de constater qu’en Martinique, que dans la Caraïbe, dans toute l’Amérique et même en Afrique ces mots soient encore chargés de sens.
Que dans un monde dit “post colonial”, notre Histoire, nos cultures, soient à grande échelle dépréciées, rabaissées quand elles ne sont pas tout simplement calomniées.
Comment se fait-il qu’en Martinique, dont la population est composée à 83% de personnes d’ascendance Africaine, l’éducation depuis plus de 100 ans ne soit axée que sur la France, l’Europe, ou l’Occident ?
Comment se fait-il que nous ne connaissions rien de l’Afrique pré-coloniale, de l’Afrique d’où nous venons ?
Que nous n’ayons pour la plupart jamais entendu parler des murs de Benin City, détruits par les anglais, qui étaient 4 fois plus grands que la grande Muraille de Chine ?
De la Charte du Manden, première constitution au monde, qui abolissait l’esclavage ?
Des bibliothèques de Tombouctou ?
Ou encore D’Aboubakri II, sultan de l’empire du Mali du 13ème siècle, qui serait arrivé à l’endroit que l’on appelle maintenant “Brésil” deux siècles avant les Européens ? De son successeur Mansa Moussa, l’homme le plus riche de l’histoire de l’humanité ?
Que nous ne sachions pas que le Mali détenait la moitié du marché de l’or à cette époque ?
Nous devons le dire haut et fort : l’éducation des populations des « anciennes colonies » est un outil idéologique qui contribue à garder nos populations dans une situation d’asservissement mental.
Et Cela fonctionne si bien, que certains d’entre nous ne regrettent pas la traite Atlantique, car on leur a mis dans la tête que l’esclavage, l’évangélisation et l’assimilation nous ont rendu humains. Nous avons brisé il y a 170 ans une partie des chaines qui entravaient notre liberté. Il est plus que temps que nous décolonisions nos esprits.
Nous, la jeunesse, nous, les survivants de ces génocides qui ne disent pas leurs noms, sommes les seuls à pouvoir s’emparer de notre Histoire et rétablir la vérité.
Nous vivons dans un monde dans lequel chaque personne sert ses intérêts en priorité ; et faire preuve d’honnêteté intellectuelle en ce qui concerne l’Afrique et sa diaspora, en ce qui concerne l’achat, la déportation et l’exploitation de personnes humaines n’a aucun intérêt pour la France, qui sans scrupules, continue de vider le continent mère de l’humanité de ses ressources. Une de ces nombreuses ressources étant ses jeunes, qui sont éduqués dans les écoles Européennes, et qui croient que les Européens leur ont tout apporté avec la colonisation.
Des Africains qui ne sauront jamais que le droit, l’écriture, ou encore l’astronomie existaient en Afrique bien longtemps avant cette sombre période.
Des jeunes éduqués à aduler leurs bourreaux : et oui, je parle bien de la grande majorité des philosophes, des auteurs et autres artistes des siècles passés :
Des Kant, des Rousseau, des Jules Ferry, des Voltaire, des De Gaulle, des Hugo, des Maupassant, des Zola, et j’en passe, qui sont pour certains mondialement reconnus comme étant des défenseurs des droits humains, alors qu’ils n’étaient bien souvent pas en accord avec les valeurs que l’école nous a fait croire qu’ils défendaient : des négrophobes, des sexistes, et qui du haut de leurs primautés s’octroyaient le droit d’apprécier qui possède un cerveau, qui possède une âme, qui détient l’humanité.
Je ne crois pas que l’école, aussi noble qu’elle soit devrait mettre à l’honneur des personnes ayant eu des propos tels que « les blancs sont supérieurs à ces nègres, comme les noirs le sont aux singes, et les singes le sont aux huîtres. »
Pour aspirer à l’avancement de l’humanité, nous devons observer l’Histoire dans sa globalité, sans négation. Doit-on obstinément mettre en avant ces personnes, il incombe de professer que NON
A la vérité qui semble s’être imposée aujourd’hui, nous ne devons pas acquiescer.
Il en va de notre honneur, de notre survie, mais aussi de l’honneur et de la survie du reste de l’humanité d’exiger que justice soit faite, car pour citer Christiane TAUBIRA : “Nul n’affirme son humanité au mépris des autres”
Esclaves et migrants : il était une fois les Blancs
Nell Irvin Painter, auteure de « Histoire des Blancs ». (Née le 2 août 1942 à Houston au Texas. Alors qu'elle n'est âgée que de 2 mois, sa famille déménage à Oakland, en Californie, attirée par la création d'emplois dans l'industrie de la Défense. Ils s'inscrivent ainsi dans la deuxième vague de la Grande migration afro-américaine depuis le Sud des États-Unis vers les centres urbains.
Diplômée du lycée d'Oakland en 19594,5, elle obtient ensuite une licence d'anthropologie à l’Université de Californie à Berkeley en 1964 puis un master à l'Université de Californie à Los Angeles en 1967. En 1974, elle obtient une maîtrise et un doctorat à l'Université de Harvard. Elle étudie également à l'étranger à l'Université de Bordeaux en 1962-1963 et à l'Université du Ghana en 1965-1966.
Spécialiste de l'Histoire du Sud des États-Unis au XIXe siècle, elle enseigne notamment à l'Université de Princeton. Elle publie des ouvrages historiques sur le sujet de la migration des Exodusters vers le Kansas à la suite de la Guerre de Sécession et de la Reconstruction (Exodusters : Black Migration to Kansas After Reconstruction, Norton, 1976) et sur l'histoire des Afro-Américains (Creating Black Americans : African-American History and Its Meanings, 1619 to the Present, Oxford University Press, 2005). Elle a également écrit des biographies de référence sur des personnalités afro-américaines du XIXe siècle : Hosea Hudson
(1898-1988), dirigeant syndical afro-américain et Séjourner Truth (1797-1883), abolitionniste noire américaine. En 2010, elle publie L'Histoire des Blancs traduit en français en 2019, où elle interroge la construction et l'évolution de la notion de "race blanche" depuis l'Antiquité jusqu'à l'Amérique du XXIe siècle6,7,8.
Nell Irvin Painter a reçu des diplômes honorifiques du Dartmouth College, de l'Université Wesleyenne et de l'Université Yale. Elle a reçu un prix Candace de la Coalition nationale des 100 femmes noires en 1986.
Après avoir pris sa retraite de l'Université de Princeton, Nell Irvin Painter étudie les Beaux-Arts. Elle obtient une licence à l'Université Rutgers en 2009 puis un master à l'École de design de Rhode Island. Cette expérience est décrite dans son livre autobiographique, Old in Art School : A Memoir of Starting Over, Counterpoint Press, 2018. )
Dès 1948 et son mythique Orphée noir, Jean-Paul Sartre a eu la probité du « privilège blanc », celui de « voir sans être vue » et de se penser comme point de référence. En témoignent une grande partie des travaux d’anthropologues au XIXe siècle et jusqu’au milieu du XXe siècle. Des hommes (habituellement) et des femmes (parcimonieusement) occidentaux écrivent sur les « autres ». Dans un environnement de prépotence coloniale et impériale né de la traite transatlantique, les Noirs sont des concepts d’étude scientifique pour les Blancs.
Il aura fallu attendre les années 1990 pour que les érudits enfin à ceux qui communément regardent autrui, les Blancs, et que se développent les Whiteness Studies aux Etats-Unis, après la publication de The Wages of Whiteness : Race and the Making of the American Working Class, de David R. Roediger, en 1991, et de How the Irish Became White, de Noel Ignatiev, en 1995. Vingt-cinq ans plus tard, en 2010, l’historienne africaine-américaine Nell Irvin Painter ébruite « Histoire des Blancs », dont la traduction française vient d’être publiée aux éditions Max Milo.
Cette étude colossale, ayant nécessités deux décennies d’investigation, pour montrer comment inexorablement la notion de race blanche s’est construite outre-Atlantique et comment elle puise dans l’histoire qui remonte à l’Antiquité, à une époque où les races jadis n’existaient pas et où il n’était pas question de Blancs et de Noirs. Ce qui importait alors, c’était là d’où venaient les hommes, la géographie, le climat. Pourquoi alors remonter aussi loin ? Pour comprendre d’où viennent les Saxons, dont se sont réclamés – et se réclament toujours – une partie des Américains blancs, ceux qui pendant longtemps se sont pensés comme étant les seuls véritables Américains et qui dominaient la société dans son ensemble. Mais aussi d’où viennent les Celtes. Ce qui permet, entre autres, de comprendre la discrimination dont ont été victimes les Irlandais.
La distinction entre Celtes et Gaulois, par exemple, dépend de la manière dont les Romains parlaient d’eux et des mots qu’ils employaient pour les désigner ; ce qui n’est pas sans rappeler la manière dont, beaucoup plus tard, les colonisateurs européens créeront par le langage et la volonté politique des ethnies en Afrique.
Un pan oublié de l’histoire mondiale
Nell Irvin Painter convoque tout un pan « oublié », dit-elle, de l’histoire mondiale : celui de l’esclavage des Blancs, qui a duré plus de deux mille ans et qui ne s’est achevé qu’avec la modernisation ottomane au début du XXe siècle. Cet esclavage-là est essentiel pour assimiler comment s’est élaboré la blanchité, notamment à travers son idéal de beauté.
« L’emploi de l’adjectif “caucasien” pour désigner les Blancs, écrit-elle, trouve son origine dans les idées de beauté qu’on associait à l’esclave blanc originaire de l’est de l’Europe, et la blanchité reste accolée à des représentations de la beauté existantes dans l’histoire de l’art et la culture populaire. » En témoigne le succès des odalisques. C’est là l’un des paradoxes dont aime à se jouer l’histoire : à cause de l’ampleur inédite – et sans commune mesure avec les autres esclavages – de la traite négrière, on a fini par associer les Noirs à l’esclavage, les Blancs à la liberté, et le modèle blanc s’est imposé comme canon esthétique. Or cette beauté-là nous vient de celle des femmes esclaves d’Eurasie.
Comble de l’ironie, le terme de « Caucasien » servant à caractériser les Blancs a été pensé à partir d’un crâne qu’a eu en sa possession le médecin, anthropologue et biologiste allemand Johann Friedrich Blumenbach (1752-1840) et qu’il trouvait parfaitement beau. Il semblerait que « la femme dont le crâne servit à désigner la race blanche ait été une esclave sexuelle à Moscou, comme des milliers de ses compatriotes en Russie et dans l’Empire ottoman ». Cette femme était une Géorgienne que les Russes avaient faite prisonnière et qui mourut d’une maladie vénérienne.
Au XIe siècle, Dublin est le plus grand marché d’esclaves d’Europe et un dixième de la population britannique est esclave – ce qui aura fortement marqué l’identité anglaise, dont l’hymne national scande que « les Britanniques jamais ne seront des esclaves », justement parce qu’ils l’ont été. Patrick, saint patron de l’Irlande, a été au Ve siècle l’un d’entre eux. Les Vikings ont été des marchands d’esclaves de premier ordre et ont déplacé massivement des peuples, à un point tel que ces trafics « ont changé la face de l’Europe ».
« Avant le développement du trafic d’esclaves provenant d’Afrique au XVIIIe siècle, c’est entre la moitié et les deux tiers des tout premiers immigrés blancs des colonies anglaises du Nouveau Monde qui vinrent comme travailleurs forcés, soit de 300 000 à 400 000 personnes », explique Nell Irvin Painter. Ces chiffres peuvent paraître infimes comparés aux plus de 12 millions d’Africains déportés outre-Atlantique, mais ils montrent comment les Etats-Unis, dès le début, se sont construits sur l’esclavage et la privation de liberté.
Plusieurs races blanches hiérarchisées
Très vite, les esclaves incorporés aux travaux pénibles (Africains et Tartares) sont perçus comme laids ; ceux appréciés pour le sexe (essentiellement des femmes blanches du Caucase) incarnent un idéal de beauté qui perdurera après l’amenuisement de cet esclavage. « Traite négrière et invention de la race sont concomitantes et s’imbriquent étroitement », précise Nell Irvin Painter.
Il faut attendre le milieu du XVIIIe siècle pour qu’on ne répartisse plus les hommes seulement en fonction de leur origine géographique. On met désormais l’accent sur la couleur de peau. Dès la fin du XVIIIe siècle, les Etats-Unis s’harmonisent en accordant la citoyenneté à presque tous les hommes blancs. En sont exclus les femmes, les Indiens, les Asiatiques, les esclaves et les hommes libres d’origine africaine.
Au milieu du XIXe siècle, l’évolution est telle qu’être Américain signifie être un homme blanc anglo-saxon protestant (WASP). Car à cette époque, rappelle Nell Irvin Painter, on ne croit pas en une race blanche mais en plusieurs races blanches, qu’on hiérarchise. Race, classe, religion se mélangent et entrent en considération. Il y a souvent antagonisme de race là où il faut camoufler un conflit de classe, observe l’historienne américaine. L’homme WASP domine. Les Irlandais, parce que considérés comme celtes et catholiques, sont persécutés et occupent les emplois précaires. Les Etats-Unis sont traversés par un anticatholicisme meurtrier. Considérés comme des « dégénérés » et comparés aux Noirs, les Irlandais pratiquent la discrimination raciale pour s’élever au-dessus de ces derniers.
Lorsque de nouvelles vagues d’immigrés débarquent à Ellis Island au XXe siècle, les Irlandais se fondent davantage dans la société américaine. Sont alors considérés comme races blanches inférieures les juifs de Russie, les Européens de l’Est, les Polonais, les Italiens. Et ce jusqu’à la fin des années 1930, où « la perspective d’une guerre avec l’Etat raciste de l’Allemagne nazie élargit le concept d’Américain, si bien que les non-Blancs, en particulier les Noirs, commencent à se faire une place ».
Toute identité est une fiction
La grande force de cette Histoire des Blancs, extrêmement documentée et savante, est de montrer que pendant près de deux siècles ont coexisté deux systèmes raciaux aux Etats-Unis : « un pour les races d’Europe et les races “étrangères”, un pour la dichotomie noir/blanc ». Cette dernière « apparaît comme un élément social et non biologique, une construction sociale puissante qui permet aux Blancs de se prétendre d’abord et avant tout comme des individus ». Un « privilège » qui constitue « l’identité de la race blanche » : « En même temps, de nombreuses autres caractéristiques – classe, région, sexe, âge, capacité physique et orientation sexuelle – ont un impact indéniable sur la façon dont se manifeste ce privilège. »
« La race est une façon de parler de relations de pouvoir », résume Nell Irvin Painter . Des relations qui créent des clivages que l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche a renforcés : « J’ai écrit Histoire des Blancs sous Obama. Avant Trump, beaucoup de personnes blanches ne voyaient pas leur blanchité. Trump a changé cela. Depuis, poser la question blanche se confond avec la question du nationalisme blanc », poursuit l’auteure. Un nationalisme blanc dirigé contre les migrants et qui veut dresser un mur de séparation avec le Mexique un paradoxe, alors même que les Etats-Unis se sont construits dans la migration, tout comme les déplacements et les brassages de populations ont créé de nouveaux peuples constitutifs de l’Europe.
L’ancienne enseignante à Princeton témoigne ainsi que toute identité est une fiction, une construction politique et idéologique, et qu’il ne saurait exister d’identité culturelle ou biologique pure. Elle rappelle par exemple qu’à son origine, le terme « Saxon » (dont se revendiquaient les pionniers blancs américains et dont se réclament encore les WASP) « ne désigne pas ceux qui peuplent l’Angleterre, mais des étrangers : des brigands qui sont originaires de l’Europe continentale – Scandinaves, Angles et Jutes, tous ceux qui pouvaient se livrer au pillage de la Bretagne romaine ».
Rien n’est plus apparent que l’inégalité de certaines races ; rien encore davantage marqué que ces inégalités entre individus se réclamant de la même race. Rien de plus sournois que les calculs arbitraires des aptitudes ethniques.
Oui les hommes peuvent se distinguer par leur physionomie ou leur couleur ; mais demeure des frères, à savoir par l’intelligence et la pensée. Il a fallu une longue altération de l’esprit, des emprises trop pesantes sur le cerveau de l’homme blanc, pour dédaigner cette vérité naturelle dont on n’a nullement besoin de la science pour l’affirmer. On voit par quelle voie factice, par quelles fausses croyances ce préjugé a été inoculé dans les intelligences. En ces temps c’était une science de parti pris qui a ostensiblement trompé les âmes à la convenance de la pensée ambiante. L’humanité n’est pas composée de races supérieures et de races inférieures. La théorie d’une classification hiérarchique des races humaines qui est sans aucun doute une genèse doctrinale du XIXème siècle, a été une preuve de la faiblesse de l’esprit humain, et surtout de la race orgueilleuse qui l’a instituée en doctrine scientifique.
L'égalité des races unanimement démontrée exhorte avec elle une onction définitive et supérieure de l'égalité de toutes les classes sociales dans les peuples de l'univers, car elle donne au principe moral, qui en fait la force en dehors de tout autre égard. C'est là assurément la félicité dans laquelle s'accomplit l'évolution sociologique de tous les peuples et la tendance de tous esprits éclairés et sains, c'est vers cet idéal que nous devons converger. Je nous y invite.
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