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Onana et al.

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« Bien qu’Alison et ses collègues de Human Rights Watch n’aient pas réussi, avant sa mort soudaine et prématurée[1], à convaincre le Tribunal pénal international pour le Rwanda de se montrer à la hauteur de son mandat des Nations Unies consistant à poursuivre les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité ainsi que les crimes de génocide, la lutte continue pour obtenir une justice équitable, dans un lieu ou un autre, pour toutes les victimes du génocide rwandais [2] ».

In : foreword by Roger V. Des Forges, for David Newbury’s edition of Alison Liebhafsky - Des Forges’s doctoral dissertation titled : “Defeat Is the Only Bad News”[3].(Traduction automatique - C’est moi qui souligne)

 

En préambule, l’extrait de l’avant-propos de la thèse de doctorat d’Alison Liebhafsky-Des Forges, datant de 1972, soutenue à l’Université de Yale, avec Jan Vansina[4] comme promoteur, et publiée en 2011, par les soins de David Newbury[5]

 

Ce texte me semblait vraiment coller de très près à « l’ensemble » ce qui se passe actuellement dans le cadre du procès tenté à Charles Onana et aux éditions « du Toucan », devant la 17e chambre du tribunal de Paris, ou chambre de la Presse, où :

« …. Il et elles sont poursuivies pour contestation de crime de génocide après qu’une plainte ait été déposée en 2020 par la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et Survie ………. Le tribunal se penchera sur les écrits de M. Onana ……... les organisations ayant estimé que l’auteur était à l’origine de propos négationnistes …….. notamment lorsqu’il prétend « s’il en était encore besoin, que la thèse conspirationniste d’un régime hutu ayant planifié un « génocide » au Rwanda constitue l’une des plus grandes escroqueries du XXe siècle » (page 198 « Rwanda, la vérité sur l’opération turquoise » - Paris, 2019, éditions du Toucan)[6] [7]

J’avais lu, à l’époque, ce livre de Charles Onana et je m’y suis remis, comme je me le proposais dans mon dernier texte[8]. Il s’agit donc d’un ouvrage de 678 pages dont j’avais, tout en lisant, marqué d’environ une centaine de signets les passages qui m’avaient interpelé. Le texte d’Onana, de 2019, est comme celui susmentionné d’Alison Des Forges, de 1972, en quelques sorte la « substantifique moelle » destinée au grand public, d’une thèse de doctorat qu’Onana a soutenue à l’« Université Jean Moulin de Lyon .- École doctorale de droit », le 21/12/2017.

Parmi les examinateurs de cette soutenance, le Colonel belge, à la retraite, Luc Marchal, ancien Commandant de la Minuar du Secteur de Kigali de septembre 93 à avril 94. C’est ce même Colonel Marchal qui a préfacé, en plus de 20 pages, le livre contesté « Rwanda, la vérité sur l’opération turquoise » dont le contenu vaut à Onana le procès en question, comme « repris » ci-dessus (extrait de l’acte d’accusation ?).

Il n’est donc pas étonnant que le Colonel Luc Marchal se soit porté témoin de la défense dans ce procès. Il est à souhaiter qu’il ait pu souligner devant la Magistrature ad hoc[9] que la méthodologie préméditée de l’offensive du FPR, le lendemain de l’attentat du 6 avril 1994, est tout aussi évidente que la planification de la présence à Bujumbura des troupes US de l’Africa Command (AFRICOM) de Stuttgart[10] et de celle de l’opération Distant Runner depuis Mogadiscio[11] , toutes deux débutées avant l’attentat du 06/04/1994. Le background, dans la presse aux ordres, sur ces trois planifications fait « écho » à la question de Dallaire : « …. la campagne et le génocide n’avaient-ils pas été orchestrés pour un retour du Rwanda au statut quo d’avant 1959 où les Tutsis dirigeaient tout…. »[12]. Mais « écho » =« négationnisme » ? - Point barre. !

Il est évident, pour moi, qu’il n’y a aucune trace de négationnisme du Génocide des Tutsis dans le constat et l’analyse de la suite logique de préparatifs évidents :

- en vue du déclenchement de la guerre en octobre 1990 ;

- de la planification de celle-ci durant 3 ans et demis ;

- de la prise finale du pouvoir par les FPR de Kagame au moyen l’attentat du 6/04/1994, élément déclencheur, nécessaire au Génocide.

Ces évidences et ces logiques sont soulignées par tous les observateurs objectifs de l’histoire du Génocide : de Boutros Boutros-Ghali[13] :« …. le génocide au Rwanda était à 100 % de responsabilité américaine …. les États-Unis, avec l’appui énergique de la Grande-Bretagne, ont tout fait pour empêcher les Nations Unies de mettre en place une force des Nations Unies, ils y sont parvenus » [14] à Carle Del Ponte[15] : « …s’il s’avère que c’est le FPR qui a abattu l’avion présidentiel rwandais, l’histoire du génocide rwandais devrait être revue … », à Willy Claes[16] (ex Premier Ministre belge et Secrétaire Générale de l’Otan) « ….. il ne fait aucun doute que Paul Kagame est « au moins en partie responsables » du génocide…. ». Les termes employés par Onana : « ….. la thèse conspirationniste d’un régime hutu ayant planifié un « génocide » au Rwanda…. » font écho à ceux d’« orchestration », d’« histoire à revoir », de « Kagame responsable du génocide » , rappelés ci-dessus. Mais là aussi « écho »=« négationnisme » ? - point barre. !

Il n’est pas étonnant non plus, in fine, qu’à ma grande surprise, l’ex-Ambassadeur de Belgique au Rwanda (pendant la période de la guerre 90-94), Johan Swinnen, s’est, lui aussi, porté témoin de la défense d’Onana. Johan Swinnen avait terminé son livre en néerlandais « Rwanda, Mijn Verhaal[17] » par l’angoissante question : « Dans quelle pièce avons-nous joué ? ». De plus il vient de préfacer, magistralement et d’une façon dithyrambique qui m’a étonné, le livre de Patrick Mbéko référencé ci-dessous en note 18 de bas de page. Patrick Mbéko est un politologue canadien d’origine congolaise qui analyse d’une manière très pointue, lucide et « modérée », la situation dans les Grands Lacs, depuis plus de 30 ans. Ce texte de préface de l’Ambassadeur, en 18 pages, m’a profondément marqué. Il est à souhaiter qu’il ait pu, lui aussi, rappeler devant le tribunal sa « position » :

« Pourquoi le génocide a-t-il duré si longtemps ? Pourquoi celui qui l’a stoppé ne l’a pas fait avant ? » …. « Kagame a toujours été opposé à la présence de la Minuar sur place. Alors, pour quoi faire le procès de la communauté internationale ? » …. « Cet épisode du Rwanda est mal conté ». …. « L’histoire est partielle, partiale, infectée de mensonges, de simplismes » …. « On tombe dans le piège de la pensée unique où toutes les victimes se trouvent d’un côté et les responsables de l’autre » … « Qu’en est-il du Rwanda d’aujourd’hui ? » … « Nous devons mener un combat pour la vérité. »[18]

Et encore :

« ….pourquoi toutes les tentatives d’éclaircissement des faits passés sont-elles à priori suspectées et jetées à la poubelle infamante, où l’on veut reléguer les nouveaux lépreux qualifiés de « négationnistes » et de « révisionnistes ». « …les hérauts du prêt-à-penser du Président Kagame ….un groupe de personnes pour qui il est, par principe, inacceptable d’interroger le récit officiel du génocide construit à l’ombre de la victoire du FPR et écrit avec le sang des Rwandais. Pour le FPR, il n’y a pas de salut ou de vérité en dehors de l’histoire officielle, à savoir l’histoire bénéficiant de l’imprimatur de Kagame »[19]

 

Il est à remarquer que si, depuis un certain temps, il est possible et facile, de dire que le Traité de Versailles était inique, ou qu’Hiroshima, Nagasaki, Varsovie et Dresde auraient pu (dû) être évités, on ne peut que difficilement, aujourd’hui, examiner les accords de paix d’Arusha de 1993, le bombardement de la Sainte Famille (ou celui du carrefour Kadhafi à Kigali) et l’« Opération Turquoise » dans une optique d’analyse objective, sans être soupçonner de vouloir nier le Génocide des Tutsis. De même, on ne peut prétendre que l’attentat du 6avril 1994 était ce qui a été l’élément déclencheur du génocide, sans être taxé de négationnisme et de divisionnisme. Or les procédures actuelles à l’encontre des écrits de Charles Onana ne se limitent évidemment pas au seul ouvrage incriminé actuellement et à l’« Opération Turquoise ». Il s’agit de mettre à l’épreuve du doute, l’honnêteté intellectuelle d’Onana à travers l’ensemble de ses livres, de ses publications et de ses autres recherches. Il en est de même de leurs conclusions inévitables et évidentes qui, depuis 34 ans, pointent Kagame en personne, en tant que « négationniste du premier de tous les crimes ; celui qui entraîne fatalement tous les autres jusqu’au génocide : le Crime contre la Paix », et cela en dehors de tout doute raisonnable.

IL est aussi à souligner qu’il est « normal » de parler de Staline, Hitler, Kim Il Sung, Pinochet, Bokassa, Ceausescu, Pol Pot, Idi Amin Dada (et al.) en termes de « malades mentaux » (et de Jo Biden en termes de « démence sénile »). Mais évoquer l’aveu implicite de Kagame d’être l’auteur de l’assassinat d’Habyarimana[20] et en conclure que la santé mentale d’un Kagame devrait être jaugée à l’aune de ce que Mitterrand disait : « Le pouvoir est une drogue qui rend fou quiconque y goûte. ». Mais paranoïa[21] de Kagame =négationnisme ? – point barre !

Dans l’environnement de ce procès, les prises de position de personnalités telles que le Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018 et d’Adolfo Perez Esquivel, Prix Nobel de la Paix 1980 ne reçoivent que peu d’écho conformément à la déclaration-décret de Kagame selon laquelle, à propos de Mukwege : « … Il reçoit un Prix Nobel et on lui dit quoi dire  »[22]. Et là aussi, l’« écho » =« négationnisme » ? - point barre. !

 

(à suivre ?)

 

[1] † 12 février 2009 dans le crash de Buffalo : https://fr.wikipedia.org/wiki/Vol_Colgan_Air_3407

[2] En 2011 la notion de génocide du Rwanda n’était pas encore interdite par la loi qui imposa l’appellation « Génocide des Tutsis »

[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Jan_Vansina

« Documentant la situation coloniale qui a donné lieu à un avenir précaire, ce livre est une lecture essentielle pour quiconque souhaite comprendre la tragédie de l’histoire récente du Rwanda »

Jan Vansina.

[8]Onana-Zola

[9] « Chargée de faire respecter la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 et les principes de la diffamation en droit français, permettant de trouver un compromis entre la défense de la liberté de la presse et le respect de la personne ».

[10] 5.992 km jusqu’à Buja, 10 heures de vol en C 130 transportant, entre autres, deux véhicules M-113 qui « par après seront laissés » aux forces belges de la Minuar (12iéme Compagnie), transportés de Buja à Kigali par Viktor Bout, l’utilisation d’avions US pour cette « livraison » ayant été interdite par le Pentagone !

[11] 1.300 km par mer, USS Péléliu, débarquement amphibie par hydroglisseurs à Mombassa + 1100 km par air, héliportage avec ravitaillement en vol par KC 130

[12] « J’ai serré la main du diable » R. Dallaire p 588 en français et p 476 en anglaise . « Who exactly had been pulling his string, throughout the campaign ? I found myself thinking such dire thoughts as whether the campaign and the genocide had been orchestrated to clear the way for Rwanda’s return to the pre—1959 status quo in which Tutsis had called all the shots ?” ( !!!!)(C’est moi qui souligne)

[13] Premier Africain, secrétaire générale de l’ONU, Egyptien, chrétien et francophile, seule SG à n’avoir pas de renouvellement de son mandat (à part Hammarskjöld assassiné … ? .par … ?.)

[15] En août 1999, nommée procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). En 2003 elle n'est pas renouvelée à ce poste.

[17] En français « Rwanda, mon récit » (édition néerlandaise Polis-Pelckmans, Anvers, 2016)

[19] In : Préface de « Malheur aux Vaincus » de Patrick Mbéko – Editions Duboiris -2024

[20] « ….Habyarimana étant du côté de ceux que je combattais, il était possible qu’il meure facilement. Supposez que j’y eusse laissé moi-même la vie ; ce juge serait-il en train de s’intéresser à ma mort et à celui qui m’aurait tué ?... Autrement avoué… « …quand je le tue on me cherche des poux…. » (Rien à voir avec les juges Nathalie Poux et Marc Trévidic .. …au contraire….)

[21] Trouble mental caractérisé par un orgueil démesuré, par la méfiance, et qui se manifeste par un délire et des réactions d'agressivité.


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1 réactions à cet article    


  • Bertrand Loubard 18 décembre 2024 20:17

    Ma cote : 1.08/5 au 18/12 - C’est-à-dire « mauvais » pour 13 votes …. mais, pas un seul commentaire pour dire ce qui est mauvais. Cela me paraît d’autant plus étrange qu’à la limite ceux qui votent « mauvais », devraient en toute logique se porter partie civile avec les autres au procès d’Onana. En effet, pour avoir écrit le mot « génocide » sans majuscule et sans ajouter « des tutsis du Rwanda », ne suis-je pas en train de me compromettre en contestant publiquement le « génocide des Tutsis du Rwanda qui a fait entre 800.000 et 1.200.000 morts, suivant les chiffres de l’ONU, en moins de 100 jours principalement des Tutsis et accessoirement des Hutus modérés (AOP UE) » …..En fait j’ai failli employer l’italique ….. Mais je ne sais pas dans « combien » cela va me chercher devant les chambres judiciaires ad hoc pour ce délit …..

    Bien à moi.

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