Où va la droite ?
L’explosion de la droite avec un résultat pour LR inférieur à 10% est, avec la montée des écologistes, le résultat significatif des européennes aboutissant à des remises en cause douloureuses.
Laurent Wauquiez a voulu défendre une politique à la fois identitaire de droite concernant les questions d'immigration et de sécurité et libérale sur le plan économique, proposant de meilleurs contrôles de l’immigration au niveau national et européen et une politique économique ouverte et libérale assez proche de celle d'E. Macron. L’idée n’était pas mauvaise en soi mais l’époque ne s’y prêtait plus à cause de la perte de crédibilité des hommes politiques de droite au fil des ans.
En effet l’électeur de droite a été trop roulé dans la farine dans le passé, que ce soit par J. Chirac puis N. Sarkozy, concernant les promesses de contrôle de l’immigration, de fin du laxisme judiciaire, de nettoyage de la racaille « au karcher » en Seine-St-Denis pour reprendre une expression de N. Sarkozy, ceci sans que les réformes économiques et de la fonction publique aient tellement avancé.
Aussi sur les questions de sécurité et d'immigration, cet électeur ne fait plus confiance à la droite classique et préfère voter directement Rassemblement National. Etre trompé une fois avec J. Chirac qui avait un certain charisme, cela se comprend, deux fois avec la bonne campagne présidentielle de Sarkozy en 2007, cela peut encore passer mais trois fois, cela ne passe plus. De l’autre côté ce n’était pas plus brillant et la présidence de Hollande a porté un coup sévère à la gauche.
Concernant les questions économiques, l'électorat traditionnel de droite plutôt libéral et pro-européen, conscient que la France a besoin de réformes économiques de fond, est plus attiré par LREM que par le RN, l'affrontement Marine Le Pen - Macron à la dernière présidentielle ayant déjà montré qu’il n’était pas prêt à avaler la pilule d’un retrait brutal de l’Euro et d’autres propositions économiques assez farfelues avancées par Florian Philippot, le numéro 2 du FN à l’époque, se rapprochant de celles de Jean-Luc Mélenchon.
Une question se pose, comment en est-on arrivé là ? Tous ces brillants énarques qui ont truffé les directions des partis de droite (RPR, UMP, LR) n'ont-ils rien vu venir ? En fait, la raison profonde de cette situation remonte à un blocage, un interdit pseudo-moral initié par F. Mitterrand, un fin politicien, lui-même loin d'être un exemple moral repris par toute la classe journalistique, les « autorités morales » du landernau médiatique ainsi que des "intellectuels" comme BHL ou Julien Dray eux aussi loin d'être des parangons de vertu, l’interdit de passer tout accord avec le FN de Jean-Marie Le Pen au nom de la défense de la République contre un nouveau fascisme fantasmé.
Un homme politique pouvait avoir donné dans toutes sortes de combines, détournements d’argent, surfactures ou autres lors de campagnes électorales, tout passait sauf le crime de négocier avec le FN lors d'élections pour les présidences de régions ou autres. Aussitôt les leaders de la droite, Chirac ou ses successeurs, envoyaient un oukase à l'homme politique tenté par ce rapprochement, même s’il s’agissait de quelqu’un de relativement honnête par rapport au milieu politique comme ce fut le cas de Charles Millon en 1998 lors des régionales.
Mitterrand prenait la posture du commandeur dans Don Juan devant ces écarts par rapport à la ligne fixée tout en aidant en sous-main au développement du FN, un peu comme aujourd'hui Macron avec Marine Le Pen, entre autres en introduisant de la proportionnelle aux élections législatives pour permettre au FN d’avoir un groupe substantiel à l'Assemblée Nationale. Cela a permis au PS de se maintenir malgré sa baisse de popularité et d’éviter la formation d’une large coalition gouvernementale de droite. Les grands professeurs de morale de gauche toujours prêts à dénoncer toute alliance avec le FN, ne trouvaient pas grand-chose à redire contre l’installation d’un système racket des municipalités par le biais d’un organisme centralisant les fausses factures au niveau national pour financer le PS (Urba Gracco). Concernant une éventuelle coalition de partis de droite avec le FN, quelques rares voix faisaient remarquer que Mitterrand dans le passé n'avait pas hésité à passer un accord de gouvernement avec les communistes dont il était loin de partager toutes les opinions, s'étant montré assez combattif face aux communistes en tant que ministre de l’Intérieur de la 4ème République, aussi pourquoi interdisait-on à droite ce que la gauche n’hésitait pas à faire.
A l’époque, le FN et la droite gouvernementale étaient plus compatibles qu'aujourd’hui sur le plan économique. Contrairement à ce qu'écrivait récemment Yvan Rioufol dans le Figaro, prônant un rapprochement entre le RN et LR en arguant que Marine Le Pen contrairement à son père, n’était pas « infréquentable », en économie Le Pen était beaucoup plus proche des positions de la droite que sa fille aujourd'hui : il admirait le président américain Ronald Reagan qu'il avait rencontré en 1987 aux USA, se présentant comme un Reagan français et dénonçait les dépenses de l'Etat. Le RN d'aujourd'hui a soutenu la défense du statut de cheminot lors de grèves difficilement justifiables à la SNCF et défend un Etat interventionniste et dépensier en prenant comme bouc émissaire la Commission Européenne pour les difficultés économiques rencontrées par la France sans proposer grand-chose pour la réduction de la dépense publique.
En conclusion, que peut-on espérer pour la droite ? Une évolution des positions antilibérales et anti-européennes du RN ? Cela est possible, après tout, Marine Le Pen avant la présidentielle réclamait la sortie de l'Euro pour changer sa position juste avant le débat avec E. Macron suite à une alliance rapide avec Nicolas Dupont-Aignan et depuis elle a encore évolué. D’autre part, les élus LR ont compris que l’immigration était aux yeux d’une majorité de Français une question prioritaire passant même avant le réchauffement climatique. D’autre part, les municipales vont sans doute amener pas mal de rapprochements entre élus RN et LR au niveau local sans qu'il y ait cette fois-ci de caciques pour les interdire, les hommes politiques se montrant très créatifs quand il s'agit de sauver leur siège.
Finalement, il est peu probable que la droite politique disparaisse avalée par le RN et LREM, ceci d'autant plus que les idées de droite pour une application plus stricte de la loi, un meilleur contrôle de l'immigration et la nécessité de réformes économiques progressent dans l’opinion publique comme les idées écologiques mais si l’avenir est loin d’être bouché pour la droite, une chose de sûre, elle aura perdu pas mal de temps en se soumettant à une pseudo-morale prônée par des Tartuffes de gauche avec la complicité de responsables de droite.
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