Où va le monde quand il sera trop tard ?
Voici : il y a en cette fin de matinée teintée de sa lamentable atmosphère féerique comme ils le prétendent si longuement depuis que l’air est devenu irrespirable et où le temps passe, comme un air de confiance : il n’y a plus aucun endroit où se réfugier de l’oppression qui rend cette civilisation si admirablement précipitée vers la vie sociale ; une confiance à tout ce qui se trouve régularisé, incendié, tendu au tragique, où les mites semblent être des monstres, où le soi est plus heureux que n’importe quel souvenir et puis encore… Les délices de la vie artificielle répudient l’envie d’y renoncer.
L’élévation pathologique des pensées d’ici à se manifester apte à s’y soustraire et à se développer si ouvertement en contrainte m’est étranger...
La prochaine journée quand à elle, on ne préfère pas l'imaginer, la toucher, la vivre, ni même la concevoir en dehors de notre attention actuelle : restons donc ici à prophétiser des probabilités nulles qui fermeront l’Histoire, qui cesseront de grandir sous l’étau de la mort éternelle d’un esprit commun qu’est le progrès économique qui désagrégera tout, qui nous fera rester assis là à entendre la désintégration de ce qui nous prétendons être.
Remisé à ce présent, nous avons à notre disposition un équipement technique de pointe avec lequel nous pouvons aisément suivre l’avancement réellement convaincant de l’agonie de milliards de vivants au travers une biosphère ravagée se densifiant sous la pollution et cela en tout confort ; ils disent que c’est pratique et sans risque, divertissant et surtout, facile à utiliser. La souffrance n’a pas de mots à dire, elle se livre de tout mener à bien. C’est un travail à vive allure mais il me semble qu’il est rudement efficace aux yeux de l’hégémonie marchande qui en fait la promotion en la rendant infranchissable et donc bénéfique.
"Où va le monde quand il sera trop tard" ? Ce monde serait attardé ! Attardé à porter l’infection générique d’une civilisation à s’immiscer au soleil couchant dans un écran large où on se dévête avec une vivacité péremptoire, à la hâte et à écouter des notes plaintives dans la pénombre des odeurs des visages asphaltés aspirés au suicide, etc. La métamorphose de personnes sans personnalité quelconque s’adonneront peut être à ce qui se présente de plus rapidement applicable et si vertigineusement mis en pratique : s’adonner au fait d’être la force naturellement prise en main par l’inquiétude !
J’ai pensé à la perte de conscience d'une jeunesse meurtrie par le doute d'être né ici, de se sentir comme soupçon, d’être en trop ; jeunesse qui se dissout par le biais de prétentions à pouvoir s’octroyer une certaine forme de résignation à toujours devoir sans jamais savoir et s’afficher agité face à tant de néant pour en sortir strictement nulle part ou encore à s’adonner à un travail parce qu’il y a rien d’autre et que c’est comme ça, « parce qu’il faut bien vivre » ; jeunesse qui a le devoir à décéder trop tard après avoir emmagasiné tant de leurs « défis à relever » ou de je ne sais quoi d’autre ; d’avoir à décider trop tôt pour tout ce qui est ramené à l’incertain, d’avoir une confiance absurde en un avenir dans les présentes circonstances, d'avoir à se subordonner à l'envie d'y voir plus clair ou d’avoir accès à autre chose en observant empli de nostalgie quelque peu morbide les photographies des grand-parents de plus en plus souvent en se rappelant de leurs histoires mastiquées d’horreur n'est autre qu'un bénéfice pour la pathologie économique totale liquidant la réalité au profit d'une camelote de résumé avec laquelle on fait le simple calcul d'une conformité sans faille accompagnée du matériel humain restant qui aspire par ailleurs aux mêmes revers parce que c’est comme ça...
Alors par la suite j’ai pensé qui seront-ils ? Aucune innocence ne pourra leur être dédiée, aucune responsabilité ni aucune décence. Toute tentative d’échapper à ce brasier qui fonde notre civilisation reconnaissant même sa fin ne sera possible. La soumission aux points de suspension. « Il se pourrait que… » ; il se pourrait que quoi j’ai pensé ? Les jours sont définitivement comptés au cœur d’une civilisation qui souhaite se donner la mort plutôt que d’atténuer les ambitions qui les détruit ou plutôt, que faire de ceux dont on a peur, chacun de nous. J’ai peur des hommes qui se baignent dans les illusions et les mensonges et qui continuent malgré tout à diffuser leur mal-être incarcéré dans leurs immondices à prendre des douches chaudes avec des shampoings biologiques et surtout j’ai peur des hommes qui, à mots couverts, violent pudiquement toute juxtaposition, toute idée mise à part une vie à crédit teintée de déguisements empiriques. « Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même pot », me disent-ils et je leur réponds ceci : le jour où la société industrielle aura dévoré en toute impunité leurs organes sous acide, seule leur âme les couvrira de silence.
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